L'acupression améliore la qualité du sommeil chez les personnes âgées en institution, cette action est spécifique du point d'acupuncture.
RÉSUMÉ
Question
L'acupression améliore-t-elle la qualité du sommeil chez les personnes âgées en institution ?
Plan expérimental
Essai comparatif randomisé acupression versus acupression sur non-points et versus absence d'acupression.
Cadre expérimental
Institution de 750 lits à Taipei (Taiwan).
Patients
Sont recrutés les résidents volontaires de l'institution remplissant les critères suivants : age de 60 ans ou plus ; score ³ 5 au Pittsburgh Sleep Quality Index qui détecte les troubles du sommeil ; état mental normal ; capacité à communiquer en mandarin ou en taiwanais ; capacité à rester assis 15 minutes ; maintien dans l'institution le week-end ; absence de pathologie locale proche des points d'acupuncture choisis. 102 patients sont inclus dans l'étude (62% d'hommes, age moyen 79 ans, données basées sur les patients ayant terminé l'étude).
Interventions
les patients sont randomisés en 3 groupes :
1) acupression (n=34) : 20VG (Bai Hui), 20VB (Fengchi), An mian, 7C (Shen Men) et Shen Men auriculaire. La pression du point doit déclencher une réaction d'engourdissement, de distension ou de chaleur. La séance est limitée à 15 minutes : 5 minutes de massages des doigts, puis 10 minutes de massages des points à raison de 2 minutes par point. La séance a lieu entre 13h00 et 22h00, une séance par jour, 5 jours par semaine sur 3 semaine (de la 2ème à la 4ème semaine). Les séances sont réalisées par un praticien qui a spécialement suivi une formation de base de 10 semaines en acupuncture dans le cadre d'une formation continu certifiée par l'Association of the Modern Acupuncture Research.
2) acupression sur non-points (n=34) : utilisation de non-points situés de 1 à 3 cun des vrais points et hors du trajet du méridien.
3) contrôle sans acupression (n=34)
Critères de jugement
Critère principal : le score au Pittsburgh sleep quality index (PSQI). Cette échelle possède 7 items (qualité subjective du sommeil, latence de l'endormissement, durée du sommeil, utilisation d'hypnotiques …) avec un score global PSQI variant de 0 à 21 (un score ³ 5 détectant un trouble du sommeil). Le PSQI est évalué en pré-intervention (1ère semaine) et en post-intervention (5ème semaine). Critères secondaires : la fréquence et la durée des réveils nocturnes. Ces données sont recueillies quotidiennement de la 2ème à la 4ème semaine.
Résultats
18 patients, 6 par groupe sont sortis de l'étude pour diverses raisons (hospitalisation, voyage….). L'amélioration du score global PSQI est plus importante dans le groupe acupression comparée aux deux autres groupes (p< .001). A l'analyse item par item, l'acupression a un effet supérieur dans la qualité subjective du sommeil, la latence d'endormissement, la durée du sommeil, mais non sur la consommation d'hypnotique. La diminution de la fréquence et la durée des réveils nocturne est plus importante dans le groupe sous acupression (p<.001.
Conclusions
L'étude confirme l'efficacité de l'acupression dans les troubles du sommeil du sujet âgé.
correspondance
Dr Li-Chan Lin. Institute of Clinical Nursing, National Yang-Ming University. 155 Li-Nong Street. Sec 2 Taipei, Taiwan, Taiwan. ROC. E-mail : Lichan@ym.edu.tw
COMMENTAIRES
Les insomnies chez le sujet âgé constituent un champ d'application d'un haut intérêt pour l'acupuncteur. 10% de la population se plaint de troubles du sommeil et 40% des consommateurs d'hypnotiques sont des sujets de plus de 60 ans. Il s'agit d'un sujet important de santé publique. Ceci doit logiquement amener l'acupuncture en thérapeutique de première intention. Nous n'avons identifié que deux essais contrôlés randomisés dans le domaine des insomnies [1-2].
- L'acupression (semen vaccariae) au niveau auriculaire (Shen Men, Sympathique, Cœur, Foie, Endocrine, Vertèbres Cervicales et Subcortex) sur 30 jours est supérieure à 10mg de Diazépam (Lian nan et al [1]).
- Sur des études polysomnographiques effectuées avant et après traitement, l'acupuncture "selon les règles traditionnelles" est supérieure à une acupuncture sur des non-points (Montakab H [2]).
Sur le plan méthodologique, plusieurs points mériteraient d'être précisés (principalement la randomisation et les sorties d'essais. L'étude n'est pas réalisée en insu évaluateur : le PSQI n'est pas basé sur un auto questionnaire, mais probablement sur un interview des patients (à vérifier) par l'évaluateur qui est aussi le praticien. Il s'agit là bien sur d'un défaut important (mais comme le soulignent les auteurs il s'agit aussi d'un problème de budget, de temps et de personnel).
Après acupression, il n'est pas mis en évidence de différence quant à la consommation d'hypnotiques. Mais l'étude n'avait pas pour objectif un sevrage, et il ne semble pas que des conseils particuliers aient été donnés.
Sur le plan de la technique manuelle, il faut noter la recherche du deqi par simple pression (obtention d'une sensation d'engourdissement, de distension ou de chaleur). La pression appliquée est de l'ordre de 3,7 Kg à 4,0 Kg. Dans leur traité de base sur l'acupression, Jia Lihui et Jia Zhaoxiang [3], décrivent des pressions de 7Kg (pression faible) à 12,6 Kg (pression forte), il est vrai en technique de tapotement. Les pressions très fortes atteignent 60 Kg. Pour avoir subi ce traitement à Shanghai, je peux témoigner que de telles pressions sont extrêmement pénibles à supporter !
L'élément tout à fait remarquable de l'étude est la qualité du processus qui a amené à l'élaboration et la réalisation du protocole d'acupuncture. C'est la première étude de ce type que je lis, elle doit servir de référence dans les essais en acupuncture. Le protocole a été déterminé après une revue de la littérature et après avis recueillis auprès de praticiens de médecine traditionnelle ayant plus de 10 ans d'expérience. Ce protocole (choix des points, techniques de stimulation, durée et rythme des séances) a été évaluée (sur une échelle de 0 à 100%) par 5 experts. Le niveau de validation par les experts va de 80 à 100%. Les conditions d'application du protocole ont été étudiées, notamment sur 3 paramètres :
- la précision de la localisation des points. Points et non-points ont été localisés sur 20 sujets par le praticien, localisations vérifiées par deux experts. ,
- la reproductibilité de la l'intensité de la pression appliquée au niveau des points. des mesures répétées ont été réalisés pour évaluer la stabilité de la force de pression, notamment en tenant compte d'une éventuelle fatigue du praticien.
- la durée d'application de la pression au niveau de chaque point. Des enregistrements vidéos ont été réalisés.
Johan
Nguyen
GERA
Groupe de
travail « évaluation et lecture critique en acupuncture »
FAFORMEC
références
1- Lian Nan et al.
Insomnia
treated by auricular pressing therapy. Journal of TCM 1990;10(3):174-75.
2- Montakab H.
[Acupuncture and insomnia].Forsch
Komplementarmed
1999;6(1):29-31.
3- Jia Lihui et Jia Zhaoxiang. Traitement par pression sur des points. Editions Scientifiques et techniques du Shandong, Jinan
Date de création 06/01/2001