L’acupuncture
est – elle utile chez le patient avec dépression majeure traitée par
antidépresseur ?
QUESTIONS :
Evaluer l’efficacité de
l’acupuncture corps entier en addition au traitement médicamenteux de la
dépression pendant une durée de 8 semaines (2 mois)
2 hypothèses sont testées : 1- l’acupuncture associée améliore l’évolution de la maladie plus que le traitement pharmacologique seul. 2- la puncture de points définis d’acupuncture est spécifique.
PLAN EXPERIMENTAL :
Essai contrôlé randomisé acupuncture + médicament de référence vs médicament de référence vs fausse acupuncture + médicament de référence.
CADRE :
Département de psychiatrie, Université de MAINZ - GERMANY
PATIENTS :
Recrutement :70 patient(e)s étudié(e)s sur une période allant
d’octobre 1993 à octobre 1995, souffrant d’un épisode dépressif
majeur. Critères d’inclusion : 1°diagnostic selon le DSM III
(296.2 : un épisode dépressif majeur – 296.3 épisode périodique de
dépression majeure), 2° score > 18 sur les 21 items de l’échelle de
dépression d’HAMILTON, 3° âges des patients de 20 à 70 ans. Critères
d’exclusion : délire, affection psychiatrique de type schizophrénie
trouble bipolaire, idée suicidaire aiguë, hernie discale, emphysème,
épilepsie,
maladie du foie et du rein,
troubles de la coagulation, retard de cicatrisation de plaie.
Tous les patients ont donné leur consentement éclairé écrit.
INTERVENTION :
Les 3 groupes ont un
traitement pharmacologique : miansérine DCI (athymil en France 90 –120mg
/j° et diazépam DCI (valium en France jusqu’à 20 mg mg /j si nécessaire)
Randomisation entre trois
groupes :
1.Groupe acupuncture
vraie.
Nomenclature OMS : VE15, VE17, VE18,
CO7, MC6, RA5, RA6 et PO1 les points sont piqués bilatéralement, soit 18
points. 3 fois par semaine pendant 4 semaines soit 12 séances. Séances réalisées
par 2 médecins expérimentés en acupuncture chinoise traditionnelle. Les séances sont de 30 minutes; le
traitement est standardisé avec des aiguilles de 0.3mm x 25 mm à une profondeur
de quelques millimètres. Détection des points au détecteur. Retrait après
quelques minutes.
2.Groupe fausse
acupuncture. Localisations non
spécifiques à proximité des vrais points, piqués superficiellement.
3.Groupe de contrôle :
médicamenteux : l‘ Athymil a été utilisé en raison du peu d’effet secondaire par rapport aux tranches
d’ages du groupe.
Les scores de sévérité de
même que les taux d’hospitalisations antérieures, âges et le sex ratio sont
distribués de manière homogène entre les 3 groupes.
IL n’existe pas de différences statistiques entre les groupes ni sur le plan de l’âge, ni du sexe
JUGEMENT :
L’état psychologique a été évalué à l’entrée dans l’étude puis deux fois par semaine pendant 8 semaines par des évaluateurs indépendants et aveugles. Pour suivre l’évolution psychopathologique de la dépression les 3 échelles suivantes ont été utilisées : échelle d’évaluation globale (GAS, 1976) échelle de mélancolie (BRMS), et l’échelle d’impression clinique globale .Pour l’état dépressif dans le suivi longitudinal, utilisation d’une échelle d’auto évaluation (Bf-S).
RESULTATS :
L’acupuncture associée (verum ou placebo) améliore plus l’évolution de la dépression que le traitement par miansérine seule aucune différence n’a été mise en évidence entre acu verum et placebo il n’y a pas d’effet spécifique à la puncture d’un point défini d’acupuncture dans le traitement d’une dépression majeure.
GRILLE DE QUALITE : Grilles de qualité selon JADAD.
Randomisation 1 (citée sans
description), aveugle patient 1.Aveugle évaluateur : 1.
Prise en compte des perdus de
vue : 1.
Soit score de 4/5, c’est à dire étude de haute qualité. L’étude est donc présumée de bonne qualité méthodologique.
COMMENTAIRES :
Plan expérimental : il est éthique (le groupe contrôle a le
traitement de référence d’une dépression) et cherche à mettre en évidence, enter les bras acupuncture verum
et placebo,
un effet spécifique de
l’acupuncture en association à un antidépresseur.
Comparabilité des groupes avant
traitement : le groupe
acupuncture a 60 % d’épisodes récidivants de dépression majeure selon le DSM
III-R en plus par rapport aux 2 autres groupes (86% vs 54%) l’échelle de
Hamilton peut différencier les sujets
dépressifs des sujets contrôles mais elle ne permet pas de différencier des
groupes diagnostiques de dépressions. Cette échelle est suffisamment sensible pour apprécier les changements
sous traitement antidépresseurs. Cette différence potentielle entre groupes a
certainement été repérée par les auteurs qui ont ajouté le taux
d’hospitalisations antérieures à la
comparaison initiale des groupes. Les antécédents de dépression sévère
paraissent être un indice de gravité, comme il semble que le groupe acupuncture
est un taux de récidive plus importants les conclusions sont forcement en
faveur d’une moindre efficacité de ce groupe. Le DSM III différencie d’ailleurs
296.2 : un épisode dépressif majeur – 296.3 épisode périodique de
dépression majeure.
Résultats – taux de
répondeurs : il y a bien que non
significativement, 80 % de meilleurs répondeurs en plus dans le groupe placebo
que dans le groupe verum acupuncture, ce qui tendrait à démontrer une activité
non négligeable du bras dit acupuncture placebo …
Groupe acupuncture
verum : les 2 groupes verum et placebo acupuncture ont
une différence significative en leur faveur par rapport à la miansérine 90 –
120 mg /j mais sans mise en évidence d’une différence entre eux. Verum acu
semble être insuffisamment actif : on ne peut juger de l’adéquation
deslocalisations des points ni des profondeurs de puncture car non précisées.
Par contre, il n’y a pas de recherche préalable du “ deqi ”, ni
manipulations et la durée de pose des aiguilles (“ quelques
minutes ”) semble insuffisante.
Dans l’autre bras, le groupe
placebo acupuncture semble
être suffisamment actif pour empêcher la mise en évidence d’une différence
statistiquement significative avec le groupe verum : d’une part les points
piqués sont ils des points d’acupuncture (méridiens ou hors méridiens) hors
indication psychique ou des non - points (ni méridien ni hors méridien),
d’autre part la puncture superficielle n’est pas l’absence de puncture cutanée.
EN CONCLUSION :
L’absence de calcul préalable
de l’effectif nécessaire à l’étude plaide en faveur d’un manque de puissance
statistique pour la mise en évidence d’une différence d’effet entre acupuncture
verum et placebo.
Dr Michel Faure
GERA
Groupe de
travail « évaluation et lecture critique en acupuncture »
FAFORMEC
Date
de création 03/02/2001