Du fait des complications liées à l'emploi du diazépam
l'acupuncture peut-elle être une alternative pour faciliter la réalisation et
réduire l'inconfort d'une fibroscopie oesogastroduodénale ?
L'acupuncture peut-elle constituer une alternative pour
faciliter l'intubation, diminuer les troubles émotionnels et l'inconfort
physique lors d'une fibroscopie, du fait des complications liées aux diazépam.
Plan expérimental :
Essai comparatif à randomisation partielle, appelé aussi
îlot de randomisation ou “ Randomized Block ”
Traitement de référence versus acupuncture, versus
groupe contrôle sans traitement. La randomisation n'est faite qu'entre les deux
groupes acupuncture et absence d'intervention. Le groupe traitement de
référence étant constitué de volontaires. Il n'y a pas d'aveugle.
Cadre :
En Angleterre (sans précision supplémentaire).
Patients :
Ont été inclus 206 patient âgés en moyenne de 57 ans
(extrêmes 20 - 95 ans). 51% pour de femmes. Les patients sont adressés pour une
endoscopie en ambulatoire dans le service. Le recrutement a été réalisé de
manière prospective entre janvier et septembre 1998.Il n'est pas mentionné de
critères d'exclusion.
Le taux de suivi a été de 84 % (173 patients restent
pour l'analyse car il y a eu 33 sorties d'études dont 3 ont refusé de remplir
le questionnaire d'auto- évaluation, 13 ne l'ont pas rendu, 13 patients ont
rendu un questionnaire inexploitable et 4 n’apparaissent pas dans le tableau de
répartition des groupes).
Il y a une différence importante dans le sex- ratio pour le groupe Diazépam ( 2 femmes pour 1 homme) par rapport aux deux autres groupes (environ 1 femme pour 1,5 homme).
Intervention :
Dès le recrutement, la question est posée aux patients de leur préférence pour une sédation intraveineuse. Les refus de sédation sont alors randomisés entre le groupe acupuncture et le groupe contrôle. La méthode n’est pas décrite .
Utilisation de XYLOCAINE pharyngée pour tous les
patients dans les trois groupes.
Groupe traitement de référence (95 patients)administration
d’une injection intraveineuse de diazépam (VALIUM en France) en moyenne 8 mg
(extrêmes de 2,5 à 20 mg).
Deuxième groupe (54 patients) : acupuncture sur les points GI4, MC6,
ES9, VC23, VC24 soit 8 aiguilles d’une longueur de ½ pouce à 1 pouce ( soit
1,2 à 2,5 cm) insérées 5 minutes avant
l’examen et laissées en place pendant la durée de celui-ci, après une
stimulation manuelle de 1 à 2 secondes.
Troisième groupe : aucune intervention en dehors de l'anesthésie locale.
Principaux critères de jugement.
Mesure du malaise physique et de l'anxiété ressentie par une
double méthode :
D'une part observation extérieure par les infirmières :
notion de la facilité, du nombre de tentatives d'introduction, présence et
intensité d'un réflexe nauséeux et cotation de l'état émotionnel et de
l'angoisse perçue sur une échelle de 1 à 5 au départ et pendant le déroulement
de l'examen.
D'autre part un auto- questionnaire de 35 items rempli
par le patient ( échelle de Lickert
côté de 1 à 5 pour prévenir le biais de conformité) analysant la facilité de
l'intubation, l'état émotionnel et l'angoisse ressentie par le patient entre le
moment où il entre dans la salle d'examen et son retour à domicile.
Mesure de la saturation en oxygène par gaz du sang artériel
pendant l'examen.
Principaux résultats :
malaise physique et anxiété :
Critères d'observation extérieure : le nombre de
tentatives (p<0.001), les scores de l'état émotionnel et de l'angoisse perçue
(p<0.01) sont tous significativement plus bas dans le groupe traitement de
référence par rapport au groupe absence d'intervention et acupuncture.
Critères d'auto- évaluation : les scores de facilité
d'intubation (p<0.2) et de malaise physique (p<0.05) sont
significativement plus bas dans le groupe traitement de référence par rapport
au groupe absence d'intervention et acupuncture. L'auto-score de l'angoisse
ressentie est plus bas dans les groupes acupuncture et traitement de référence
par rapport à l'absence de traitement mais sans atteindre le seuil de
significativité statistique.
Mesure de la saturation en oxygène : 8 patients dans le groupe
traitement de référence, 2 dans le groupe abstention mais aucun dans le groupe
acupuncture ont eu besoin d'oxygènothérapie et de surveillance respiratoire pendant l'acte. Un des patients du
groupe traitement de référence a nécessité une antagoniste des benzodiazépines
(flumazénil ANEXATE en France).
Conclusion de l'auteur :
Bien que cette
étude rapporte ,dans le groupe traitement de référence (diazépam), un effet
statistiquement supérieur au groupe absence de traitement ou acupuncture sur le
soulagement de l'angoisse durantl’examen, l'acupuncture montre quelques preuves
de réduction du score d'auto évaluation de l'état émotionnel .
La randomisation étant partielle ( 2 groupes sur 3 )
on peut appliquer 2 scores de Jaddad.
Traitement de référence versus
acupuncture :seulement description des sorties d’étude donc 1/5
acupuncture versus absence de traitement :il y a
randomisation et l'on dispose de la description des sorties d'études donc
score 2/5.
Dans les deux cas
l'étude de mauvaise qualité méthodologique.
On peut discuter du choix du diazépam comme traitement
de référence : en effet il est aujourd'hui dépassé et l'on utilise plutôt le
midazolam (HYPNOVEL en France).
Du point de
vue méthodologique : la méthodologique dite “Randomized Block ” est ici mal
utilisée (Ref : Thomas KF, Fitter MJ. Evaluating complementary therapies for use in the National Health
Service : “ Horses for course ”, part 2 : Alternative
research strategies. Compl Ther Med
1997 5 : 94-8).
Sil s'agit de comparer l'acupuncture et la sédation, la
stratégie normale aurait dû être la suivante :
Dès le
recrutement la préférence demandée aux patients. Ils sont alors répartis en
trois groupes : A =
préférence pour l'acupuncture (par exemple) ; B =
randomisation des patients sans préférence ; C = préférence
pour le diazépam (par exemple).
À terme nous
avons quatre groupes : A = acupuncture choisie ; B1 = acupuncture non
choisie ; B2 = diazépam non choisie ; C =
diazépam en choisie.
L'effet de la préférence peut être exploré en comparant
A versus B1 et B2 versus C.
L'efficacité des deux traitements peut être comparée : A
versus C et B1 versus B2.
L'intérêt de cette méthodologie et d'être proche de la
pratique réelle, dans laquelle le choix des patients est demandé. Il ne s'agit
pas de vérifier l'efficacité spécifique de l'acupuncture, mais de comparer
l'efficacité globale de deux traitements.
Si l'objectif était de vérifier la supériorité de l'acupuncture par rapport à l'absence traitement, un essai classique versus absence de traitement est suffisant. En voulant tout faire cet essai ne prouve rien .
Les résultats ne sont pas présentés dans un tableau
précis intégrant les intervalles de confiance
L'auteur se base sur
un essai antérieur positif, (Cahn AM,Carayon R,Hill C,Flamant R.Acupuncture in gastroscopy .Lancet 1978 1 :182-183 ) mais celui-ci est
peu comparable : Les points d'acupuncture sont
différents(VC12,VC17,VC23,VC24 avec l'électrostimulation et ES36, MC6 sans
stimulation électrique ).acupuncture versus acupuncture placebo (points à 1cm
de ceux précédemment cités )
Raisons de l'échec :
Pas d'induction analgésique (mise en place des aiguilles
cinq minutes avant l'intervention alors qu'une induction analgésique demande au
minimum 20 minutes). L'auteur explique son choix en arguant de ne pas modifier
le programme opératoire en allongeant la durée de l'examen. Toutefois l'essai
précité ne respecte pas non plus ce délai de 20 minutes.
Pas de stimulation, pas de recherche du deqi
L'utilisation de spray anesthésique a pu, comme le
souligne l'auteur, modifier l'effet de l'acupuncture.
Au
total , essai de qualité méthodologique médiocre et qui ne présente que
peu d’intérêt en pratique de toutes façons car il aurait fallu poser la
question différemment : soit acupuncture versus absence de traitement ou
anesthésie locale, soit acupuncture versus sédation , soit “ randomized
block ” bien mené.
FAFORMEC
Références :
1.Bell
GD, McCloy RF, CharltonIE, et al. Recommendationsfor standards of sédation and patient
monitoring during gastrointestinal endoscopy .Gut
1991 32 :823-827
2.QuineMA,Bell GD, McCloyRF, et al.Prospective auditofupper gastrointestinal endoscopy in two
regions of England : safety, staffing and
sedation methods.Gut 1995 36 :462-467
3. Cahn AM, Carayon R, HillC, Flamant R, Acupuncture in
gastroscopy .Lancet 1978 1 : 182-183 .
4. Langhorne PA, in :NivenCA, Caroll D editors
.The health psychology of women .Harward Academic
Publishers 1993 . p 69-75 .
5.Thomas M, Acupuncture studies on pain .Acupuncture in medicine 1997 15(1) 23-31