Les effets immédiats de la
puncture du tiaokou ES38 dans l'épaule douloureuse et l'importance du deqi
Traduction : Dr
Jean-Marc Stéphan
Mots clés : tiaokou, épaule douloureuse, tendinite du sus-épineux, deqi,
essai contrôlé randomisé
Summary: The painful shoulder is one of the most common disorders of the
locomotor system, involving frequent consultations as much in primary care that
specialized. Few evidence exist to support or refute the effectivesess of the
most common interventions in the treatment of the painful shoulder. There is no
bibliographical review which objectifies the effectivesess of the acupuncture
in the treatment of this pathology but these last years appeared randomized
controlled trials which incite to the use of the acupuncture in the treatment of the adhesive bursitis. The present study aims at in the tendinitis
of supraspinatus, to estimate the immediate answer to the puncture of the tiaokou
( ST38), in the reduction of the pain and in the increase of the degree of
abduction, when one associates it a puncture transfixiante towards the chengshan
(BL57) with obtaining deqi and dynamic manipulation. 107 patients were
randomized in two groups, with a group control benefiting from a neutral
puncture on the same point. The experimental group obtained an improvement
significantly higher to the group control so much in the improvement of pain
(absolute and relative) that in the benefit of the degrees of abduction
(absolute and relative).
Key words: tiaokou,
painful shoulder, tendinitis of supraspinatus, deqi, randomized
controlled trial
La douleur d'épaule est un motif fréquent de consultation et souvent de diagnostic difficile. On estime que 40 % des personnes en souffrent à un moment ou un autre de leur vie. Les études de prévalence offrent des chiffres très disparates, de 3 à 20 % [1,2] ou même plus élevés si l'omalgie n’inclut pas dans sa définition l’incapacité fonctionnelle du mouvement [3], chiffres augmentant avec l'âge et avec certaines professions ou activités sportives (tennis, natation, etc..) [4,5,6].
L'épaule, comme unité fonctionnelle, est composée de
4 articulations : gléno-humérale, sterno-claviculaire, acromio-claviculaire et
scapulo-thoracique. À la différence de la hanche, qui est une articulation stable
avec appui acétabulaire profond, l'épaule est une articulation mobile avec une
fosse glénoïde superficielle. L'humérus est suspendu à l'omoplate par des
tissus mous, des muscles et des ligaments, et une capsule articulaire, et a
seulement un appui osseux minimal. L'épaule est une articulation complexe
jouissant d’une grande mobilité, mais est aussi la plus instable de l'organisme
et donc l’une des plus impliquées dans les problèmes douloureux. Néanmoins 90 à
95 % des causes de douleurs de l'épaule sont des problèmes péri-articulaires,
c'est-à-dire en rapport avec les structures qui entourent
l’articulation et non pas avec l’articulation en elle même comme :
* les bursites sous-acromiales, les tendinites du
sus-épineux (60%)
* les capsulites rétractiles (« épaule
gelée ») (12%)
* les ruptures de la coiffe des rotateurs, conflit
antérieur sous-acromial (syndrome de pincement) (10%)
* arthrose de l’articulation acromio-claviculaire et
sterno-claviculaire (7%)
* tendinite bicipitale (4%)
* causes diverses (7%)
Comme nous l’avons vu, environ deux tiers des cas
d'épaule douloureuse concernent la tendinite de la coiffe des rotateurs
[7,8,9,10,11,12], insertion conjointe des muscles sus-épineux, sous-épineux et
petit rond sur le trochiter, le tout étant en rapport avec un surmenage de
l'épaule (personnes de 40-50 ans, ouvriers), une instabilité articulaire (<
35 ans) ou une dégénérescence de la coiffe avec l'âge (> 55 ans). C’est le
tableau d’une douleur mécanique aiguë ou chronique, au niveau de la face antéro-latérale
de l'épaule. La palpation de cette zone est plus douloureuse, plus avivée, particulièrement dans les mouvements d'abduction et de rotation interne.
L'inflammation peut affecter aussi d'autres structures anatomiques voisines
(bursite sous-acromiale) ou les surmener et les léser secondairement
(ténosynovite bicipitale).
La
mobilité active est profondément limitée par
la douleur. Cela est mis en évidence par « l’épreuve du grattage
d'Apley », qui permet d’estimer grossièrement la limitation de l’amplitude
de mobilisation de l’articulation. Il s’agit de demander au sujet de se
crocheter les doigts dans le dos, une main en position basse, l'autre en
position haute. Ce mouvement combiné réalise une adduction avec rotation
médiale et une abduction avec rotation latérale. Il sera comparé avec le côté
controlatéral.
Typiquement la mobilité passive de l’articulation
gléno-humérale sera normale et légèrement douloureuse, symétrique avec le côté
sain : 160 ° en flexion ou antépulsion, 60 ° en extension ou rétropulsion, 55 °
en rotation interne, 45 ° en rotation externe, 45 ° en adduction et 180 ° en
abduction. Ces manœuvres
excluent le diagnostic d’une lésion capsulaire
ou articulaire. Néanmoins, la mobilité doit être correctement recherchée car le
patient peut, de façon réflexe en raison de la douleur ou involontairement,
être incapable de relâcher de manière adéquate sa musculature. Souvent, il est
préférable de réaliser les manœuvres en décubitus dorsal.
Le tendon du muscle sus-épineux est le plus céphalique
des trois et le plus enclin à avoir un conflit dans l'espace entre l'acromion
et le ligament coraco-acromial. Sa principale fonction concerne l’abduction,
entraînant une douleur maximale dans les mouvements compris entre 60 ° et 120 °
quand il est enflammé. Le tendon du muscle sous-épineux est celui qui
intervient principalement
dans la rotation externe. Le petit rond, voisin, rotateur externe et extenseur,
ne sera pas affecté.
Le traitement consiste généralement en
physiothérapie ou infiltrations locales avec corticostéroïdes, interventions
qui présentent une efficacité controversée [14,15,16].
L'acupuncture a été utilisée pour le traitement de
ces maladies en Chine pendant plus de 5000 ans [17]. À présent, on la considère
en médecine occidentale comme une technique efficace dans un grand nombre de
pathologies, spécialement dans les cas où l’on voit la médecine moderne limitée
ou contre-indiquée [18,19,20,21], et en particulier dans le traitement de la
douleur chronique [22,23,24]. La revue systématique effectuée par Lewith et
Machin sur l'efficacité de l'acupuncture dans la douleur chronique a conclu que
le traitement avec la « vraie » acupuncture était significativement
plus efficace que la « fausse » acupuncture et le placebo [25]. Par ailleurs, il
a été démontré que l'acupuncture entraîne moins d’effets secondaires que
l'utilisation d'anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et des opioïdes
[26].
Depuis l'introduction des techniques d'acupuncture
dans les soins primaires du fonctionnement de l'Unité de Traitement de la
Douleur (UTD) du Centre de Santé de Dos Hermanas "A", nous avons
acquis suffisamment d’expérience pour évaluer initialement la tendance
évolutive de ces patients quand on les traite avec l'acupuncture. Une de ces
expériences est l'étude contrôlée randomisée que nous allons maintenant
présenter et qui a servi de base pour la conception et l'élaboration d'une
étude multicentrique d’une réalisation en projet.
Nous posons l'hypothèse suivante : la puncture au point
tiaokou ES38 selon la technique tiao-shan et une manipulation
dynamique jusqu’à obtention du deqi réussit à améliorer immédiatement la
douleur de l'épaule d’origine tendineuse (sus-épineux) de
manière plus significative que la puncture neutre de ce même point.
Évaluer l'efficacité de la puncture du
point tiaokou ES38 selon la technique tiao-shan avec obtention du
deqi dans la tendinite du sus-épineux comparé à la puncture neutre du
même point
Objectifs spécifiques
-
Objectif principal : évaluer l'effet sur la diminution
immédiate de la douleur après la puncture
-
Objectif secondaire : évaluer l'effet sur l'abduction de
l'épaule
Étude contrôlée randomisée
L'étude a été approuvée par le Comité d'Éthique de
l'Hôpital de référence. 125 patients ont été sélectionnés et inclus, avec une
symptomatologie d'épaule douloureuse d’origine tendineuse (sus-épineux),
diagnostic porté par les médecins de famille et les spécialistes du secteur des
trois zones de base de la Santé qui desservent l'Unité de Traitement de la
Douleur (UTD) du Centre de Soins Primaires de Dos Hermanas "A"
(district sanitaire Sud de Séville). On les a informés du type de l'étude et
des techniques qui allaient être employées ainsi que des effets secondaires
possibles (infection, lipothymie, hématome). On les a informés, de même, qu'ils
pouvaient se dédire ou sortir de l'étude sans aucune sorte de pénalité ou perte
de bénéfice auxquels, d'autre part, ils avaient droit.
* Approbation par le Comité d'Éthique de l'Hôpital
de référence
* Critères d'inclusion :
- patients
avec diagnostic des pathologies mentionnées ci-dessus d'évolution supérieure à
3 mois
-
consentement éclairé
-
unilatéral
* Exclusion : chirurgie, luxations ou fractures au
niveau de l'épaule, hypo-coagulation, atteinte généralisée du système
musculo-squelettique ou atteintes neurologiques, atteintes trophiques
vasculaires des membres inférieurs, lymphoedème
La
validité éthique de cette étude a été analysée par les comités d’enquête
éthique de l'Hôpital de référence. Dans la conception ont été pris en compte
les quatre principes éthiques de Bauchamp et Childress
[27] (l’autonomie, le bénéfice (le principe d’être bénéfique), l’innocuité (le
principe de ne pas nuire), et la justice) et ont été garantis expressément les droits du
patient à l'intimité et à la décision éclairée dans les caractéristiques
particulières de l'étude. Également, l'étude a été réalisée en accord avec les
normes de Bonne Pratique Clinique et la Déclaration de Helsinki de 1964,
modifiées par la 48ème Assemblée Générale de 1996 en Afrique du Sud. Tous les
patients ont signé le consentement éclairé des procédures cliniques d'enquête.
Les patients ont été randomisés en deux groupes, 1)
le groupe expérimental traité par l'acupuncture au point tiaokou ES38
avec la technique tiao-shan (jiao-zhuan), obtention du deqi
et manipulation active et 2) le groupe contrôle, traité par acupuncture au point
tiaokou ES38 avec la technique tiao-shan, mais sans obtenir le deqi
et sans aucune manipulation. La randomisation a été réalisée en présentant une
carte avec la lettre "A" (n=70) ou "B" (n=70) dans 140
enveloppes identiques opaques qui ont été fermées et disposées dans le bureau
de l'UTD. Après l'évaluation standard les
sujets ont extrait une des enveloppes d'un conteneur déposé sous la tutelle de
l'investigateur responsable du service. Les sujets ayant extrait la carte
imprimée avec la lettre "A" ont été inclus dans le groupe
expérimental et ceux qui ont extrait la carte "B" dans le groupe
contrôle. Des mesures opportunes ont été prises afin de préserver la
confidentialité des informations des patients participants, y compris
l’anonymat dans les bases de données construites pour l'analyse.
Acupuncture au point tiaokou ES38 selon la
technique tiaoshan avec recherche du deqi et manipulation active
La séance d'acupuncture consiste à localiser,
puncturer et manipuler le point tiaokou ES38 ipsilatéral. Après
stérilisation de la peau, le patient en décubitus dorsal, la puncture est
réalisée avec une aiguille fine d'acupuncture 30 de jauge et 5 cun, en
deux phases : 1) insertion jusqu'à obtention de la sensation propagée le long
du méridien d'Estomac zuyangming indiqué par le patient et 2)
approfondissement en direction du chengshan VE57 jusqu'à obtention de la
sensation propagée le long du méridien Vessie zutaiyang. Après avoir
réalisé la puncture transfixiante, on manipule activement l’aiguille selon la
technique nianzhuan tandis que l'on invite le patient à réaliser des
mouvements de l’épaule pendant deux minutes à la recherche de l'arc douloureux
de l'épaule atteinte. Cette manipulation est effectuée trois fois le long de la
séance. Après une séance de 20 minutes, on procède au retrait de l’aiguille.
Acupuncture
au point tiaokou ES38 selon la technique tiaoshan sans recherche
de deqi et sans manipulation
L’intervention dans le groupe de contrôle sera
identique au groupe expérimental, sauf que la puncture est pratiquée en une
seule phase jusqu'au point chengshan VE57, sans recherche du deqi
ni manipulation de l’aiguille. Après une séance de 20 minutes, on procède au
retrait de l’aiguille.
Mesures basales
Les mesures de base sont réalisées avant la
randomisation et consistent à mesurer :
* l'intensité de la douleur selon échelle analogique
visuelle (EVA) de 0 à 10 cm
* le degré d'abduction de l'épaule atteinte au moyen
d’un goniomètre de 0 à 180 degrés
Les mesures sont effectuées 10 minutes après le
retrait de l'aiguille, en gardant le patient en décubitus dorsal.
Variable principale :
* changement de l'intensité de douleur par rapport à
la mesure initiale
Variable secondaire
* augmentation de l’abduction par rapport à la
mesure initiale
Des 125 patients choisis, 107 ont consenti à
participer à l'étude et ont signé le consentement éclairé : 53 patients dans le
groupe expérimental et 54 patients dans le groupe contrôle.
Aucun effet secondaire
relatif à la technique de puncture ou de manipulation n’a été signalé.
Pour déterminer si les deux populations étaient
équivalentes en terme d’âge, une analyse de variance a été effectuée montrant
que l’âge moyen des groupes (avec la valeur moyenne et l’écart type pour le
groupe expérimental et celui du groupe contrôle est de 59,64 (13,25) et 59,87
(10,54) respectivement) et ne différent pas de façon significative (p = 0,921).
Ont été également analysées les variables
quantitatives déterminantes des caractéristiques décrivant la douleur d'épaule
des patients (ancienneté du processus, degré d'abduction active, intensité de
la douleur au cours du mouvement) où le test de Levene par égalité de variance
nous confirme que ces variables sont homogènes (p > 0,05). Voici ci-dessous
les résultats de ce test :
* Âge : groupe expérimental 59,64 (13,25) et groupe
contrôle 59,87 (10,54) ; avec F (2,64) = 0,107
* Ancienneté en mois : groupe expérimental 8,3
(7,80) et groupe contrôle 11,06 (10,7) ; avec F (2,87) = 0,93
* Degrés d'abduction active : groupe expérimental
33,02 (15,33) et groupe contrôle 41,67 (17,56) ; avec F (1,71) = 0,1934
*
Intensité de la douleur : groupe expérimental 8,36 (1,09) et groupe contrôle
8,20 (1,22) ; avec F (1,37) = 0,244
Pour déterminer si les groupes étaient homogènes et,
donc comparables en ce qui concerne les variables déterminantes des
caractéristiques des patients (sexe, épaule dominante, douleur nocturne), ont
été réalisés les contrôles des différences de fréquence par groupe de
traitement au moyen du test statistique c2 de Pearson, dont les
résultats ont révélé qu’il n’y a pas de différence significative entre le
groupe expérimental et le groupe contrôle :
Donc, bien que quelques unes de ces variables aient
eu un effet sur les variables dépendantes, il est possible d'affirmer que cela
n'a pas présenté de biais dans le contraste des groupes,
dans la mesure où ces deux groupes sont
équivalents vis à vis des variables sélectionnées.
Pour apprécier
l'existence d'une différence d’efficacité des
traitements à partir des mesures finales, une évaluation des moyennes est
réalisée par une analyse de variance. Les résultats obtenus indiquent
des différences statistiques significatives (p < 0,001) entre les deux
groupes :
Tableau 1 : différences absolues et relatives
des variables principale et secondaire
|
groupe |
N |
Moyenne |
Déviation type |
Ecart type de la moyenne |
Amélioration de la douleur / basal * |
Contrôle |
54 |
2,80 |
1,76 |
0,24 |
|
Expérimental |
53 |
5,26 |
1,33 |
0,18 |
Amélioration de l’abduction/ basal † |
Contrôle |
54 |
18,70 |
19,67 |
2,68 |
|
Expérimental |
53 |
100,28 |
40,61 |
5,58 |
Différence relative Intensité de la douleur ‡ |
Contrôle |
54 |
33,06 |
18,25 |
2,48 |
|
Expérimental |
53 |
62,46 |
12,07 |
1,66 |
Différence relative Degré abduction ‡ |
Contrôle |
54 |
70,41 |
126,97 |
17,28 |
|
Expérimental |
53 |
410,20 |
314,14 |
43,15 |
(*) Echelle Visuelle Analogique de 0 a 10. (†) Degré
d’abduction de 0 a 180. (‡) Pourcentage |
Schéma 1 : Évaluation initiale et
finale du degré d'abduction dans les groupes expérimental et contrôle
Schéma 2 : Évaluation initiale et finale de l’intensité de la douleur
dans les groupes expérimental et contrôle
Une régression linéaire a été calculée afin de
déterminer l'association possible de deux variables dépendantes (changements de
l'intensité de la douleur par rapport à la mesure de base ainsi que
l'amélioration du degré d'abduction par rapport au niveau initial) en fonction
du groupe d’appartenance, limitant l’étude à ces deux
variables par souci de clarté.
Pour le premier modèle, nous observons dans le groupe expérimental
versus groupe contrôle, à égalité d'abduction et d'intensité de douleur basale,
une amélioration de l'abduction de 75 degrés en moyenne par rapport à la mesure
initiale de base.
Pour le second modèle, en incluant comme variable dépendante l'amélioration de l'intensité de la douleur par rapport au niveau de base, nous observons que le groupe expérimental est amélioré de 2,26 points versus groupe contrôle, à égalité d'intensité de douleur et d’ancienneté basale du processus douloureux.
L'objet de cette étude était de déterminer si une
manipulation avec obtention de la sensation propagée le long des méridiens
différait de la puncture simple sur le même point dans la tendinite du
sus-épineux. Le choix de sélectionner cette pathologie était motivé par le fait
qu’à l'intérieur des processus douloureux de l'épaule, capsulites rétractiles,
bursites sous-acromiales, tendinites sus-épineuses qui affectent le territoire
du méridien du shouyangming (Gros Intestin), ces dernières représentent
la plus grande prévalence. L’utilisation du point tiaokou n'est pas
fortuite non plus ; depuis le début du fonctionnement de l'Unité de Traitement
de la Douleur (UTD), en 1997, où l’on voyait en moyenne 320 patients par mois
[28] jusqu'à ce jour où l’on soigne une moyenne de 850 patients par mois, nous
avons étudié les différences d’efficacité de divers points distaux indiqués
dans les problèmes des tissus péri-articulaires de l'épaule, comme peuvent
l’être, entre autres, le yanglingquan (VB34), zhongping du pied
(point hors méridiens), lingxia (point hors méridiens) ou tiaokou
(ES38), ce dernier étant celui qui réalisait un effet plus rapide et durable.
En raison de son emplacement anatomique et de la technique transfixiante
appliquée, il semble que l’on puisse léser les structures de l'espace
interosseux quoique, dans notre expérience, aucun patient ne nous ait informés
des effets secondaires. Il est vrai que de stricts critères de sélection ont
été employés, avec un choix scrupuleux des patients pour éviter les hématomes
ou les infections. Dans notre UTD, le traitement habituel de ce type de
pathologie inclut comme première phase cette technique, avec une moyenne de 4 à
5 sessions (une par semaine) considérée comme suffisante pour assurer le
traitement. Dans le cas contraire, on procède à la combinaison de points locaux
et distaux, qui en cas de prévalence du Froid pathogène dans l'étiopathogénie,
sont associés à l’application de moxibustion sur l'aiguille. Aussi
l'amélioration moyenne relative dans l’abduction de l'épaule, qui augmente dans
le groupe expérimental de 410 %, comme la diminution relative de la douleur (62
%) conduisent à la réflexion sur la nécessité d'incorporer ces techniques dans
la pratique médicale habituelle.
Il s’agit d’une étude courte, étant donné que
l’objectif était d’évaluer l’effet immédiat de la puncture, mais celle-ci nous a servi d’étude pilote pour la réalisation d'un
protocole d'étude clinique multicentrique dans 20 services de rééducation, où
nous essayons de démontrer l'efficacité à long terme avec un suivi de 6 à 12
mois.
Ces
dernières années sont apparues des études contrôlées randomisées qui incitent à
l'utilisation de l'acupuncture dans le traitement des périarthrites
scapulo-humérales. Par exemple, J.
Kleinhenz et al [30] objectivent une augmentation dans l'échelle de Constant de
19,2 points dans le groupe expérimental versus 8,37 points dans le groupe
contrôle, employant un placebo au moyen des aiguilles rétractables, mais il
semble qu'ils se soient davantage axés à démontrer l’efficacité de la technique
employée dans le groupe contrôle que la spécificité du choix des points
d'acupuncture ; de plus dans l'analyse de la variable du résultat principal
(amélioration absolue), l'ajustement n'a pas été effectué avec la mesure initiale.
K.O. Sun et
al. qui recherchent la spécificité des points ont déterminé le choix d'un point
distal de la zone affectée [31] par un essai contrôlé randomisé de deux
groupes, 13 patients furent traités par acupuncture et exercices de l'épaule et
22 patients avec uniquement des exercices. La conception est similaire à ce que
nous présentons dans ce projet bien qu’il nous semble que l’échantillon soit
insuffisant et qu’il existe un biais important, étant donné que le groupe
contrôle (exercices seuls) ne recevait pas la même assistance médicale que le
groupe expérimental. Néanmoins, les résultats qu'ils obtiennent dans le groupe
expérimental sont significativement meilleurs que dans le groupe contrôle.
D'autre part, le point qu'ils proposent (zhongping de pied) est de
localisation difficile puisque son emplacement n'est pas constant, à la
différence de tiaokou (ES38) qui est situé exactement à 8 cun
au-dessous de la ligne articulaire du genou et à 1 cun latéralement à la
crête tibiale.
B.
Gilbertson et al [32] présentent un autre essai clinique, après intervention
arthroscopique de l'épaule, comparant l'acupuncture traditionnelle versus « fausse » acupuncture ('sham'). Ils concluent que la « vraie » acupuncture réelle offre une amélioration significative
tant dans le degré d'analgésie obtenue, que dans la réduction de la prise
d'antalgiques, de l'augmentation de la mobilité et la satisfaction des patients
; néanmoins ils ne décrivent pas le choix des points, c’est pourquoi l'essai n'est pas reproductible.
Il n'échappe à
personne que les possibilités de l’acupuncture dans la réduction de la prise
des médicaments antalgiques et anti-inflammatoires [29], aussi bien dans la
réduction des effets iatrogènes ou de l'incapacité de travail, ouvrant des
voies à de nouvelles investigations..
Cette étude montre que la puncture du ES38 avec
obtention du deqi et manipulation active est significativement plus
efficace que la puncture simple pour soulager la douleur et améliorer la
fonction de l'épaule douloureuse d’origine tendineuse (sus-épineux).
Il est démontré également que c’est une technique
dénuée d’effets secondaires qui permet de réduire le temps de récupération de
ces patients.
Références
1. Pope DP, Croft PR, Pritchard CM.. ARC Epidemiology Research Unit. University of
Manchester. Br J Rheumatol 1996; 35: 1137-1141.
2. Cunningham LS, Kelsey JL..
Epidemiology of musculoskeletal impairments and associated disability. Am J
Public Health 1984; 74: 574-579.
3. Pope DP, Croft PR, Pritchard CM.. Artritis and Rheumatism Councils Epidemiology
Research Unit University of Manchester. Ann Rheumatic Dis 1997; 56: 308-312
4. Lamberts H, Brouwer HJ, Mohrs J. Reason for
encounter-episode and process-oriented standard output from transition project.
Part I. Amsterdam: Department of General Practice/Family Medicine, University
of Amsterdam: 1991
5. Croft P. Soft-tissue rheumatism. In: Silman
AJ, Hochberg MC, eds. Epidemiology of the rheumatic diseases. Oxford: Oxford
University Press; 1993:375-421.
6. Van der Windt DAWM, Koes BW, De Jong BA, Bouter
LM. Shoulder disorders in
general practice: incidence, patient characteristics, and management. Ann Rheum
Dis 1995;54:959-64.
7. Edelson JG. Patterns of degenerative change
in the glenohumeral point. J Bone Surg Br 1995; 77 (Supl B): 288-292.
8. Winters JC, Jorritsma W, Groenier KH, Sobel JS,
Meyboom-de Jong B, Arendzen HJ.. Treatment of shoulder complaints in general practice: long term results
of a randomised, single blind study comparing physiotherapy, manipulation, and
corticosteroid injection. BMJ
1999;318(7195):1395-6.
9. Winters JC, Sobel JS, Groenier KH, Arendzen HJ,
Meyboom-de Jong B.. Comparison
of physiotherapy, manipulation, and corticosteroid injection for treating
shoulder complaints in general practice: randomised, single blind study. BMJ
1997;314(7090):1320-5.
10. Strobel G. Long-term therapeutic effect of
different intra-articular injection treatments of the painful shoulder: effect
on pain, mobility and work capacity. Rehabilitation (Stuttg) 1996;35(3):176-8.
11. Adebajo AO, Nash P, Hazleman BL.. A
prospective double blind dummy placebo controlled study comparing triamcinolone
hexacetonide injection with oral diclofenac 50 mg TDS in patients with rotator
cuff tendinitis. J Rheumatol
1990;17(9):1207-10
12. Goupille P, Sibilia J.. Local corticosteroid injections in the treatment of rotator cuff
tendinitis (except for frozen shoulder and calcific tendinitis). Clin Exp Rheumatol 1996;14(5):561-6.
13. Van der Windt DAWM, Koes BW, De Jong BA,
Bouter LM. Shoulder disorders in general practice: incidence, patient
characteristics and management. Ann Rheum Dis 1995;54:95964.
14. Van der Heijden GJMG, Van der Windt DAWM,
Kleijnen J, Koes BW, Bouter LM. Steroid injections for shoulder disorders: a
systematic review of randomised clinical trials. Br J Gen Pract 1996;46:30916.
15. Van der Heijden GJMG, Van der Windt DAWM, de
Winter AF. Physiotherapy for soft tissue shoulder disorders: a systematic
review of randomised clinical trials. BMJ 1997;315:2530.
16. Green S, Buchbinder R, Glazier R, Forbes A.
Systematic review of randomised controlled clinical trials of interventions for
painful shoulder: selection criteria, outcome assessment, and efficacy. BMJ
1998;316:35460.
17. Tukmachi ES. Acupuncture and pain: general
consideration. Inter Medica 1991;1:11-9.
18. Camp V. Acupuncture for shoulder pain.
Acupunct Med 1986; 3:28-32.
19. Tukmachi ES. A place for acupuncture in
treatment of osteoarthritis: two case reports. Br J Acupunct 1991;14:2-3.
20. Tukmachi ES. Acupuncture therapy in
patients unresponsive to orthodox treatment. Inter Medica 1991;1:19-23.
21. Tukmachi ES. Lumbago: theoretical studies
and treatment by traditional Chinese acupuncture. Br J Acupunct 1992;15:8-12.
22. Sodipo JO. Therapeutic acupuncture for
chronic pain. Pain 1979;7:359-65.
23. Junnila SY. Long-term treatment of chronic
pain with acupuncture. Part I. Acupunct Electrother Res 1987;12:23-36.
24. Patel M, Gutzwiller F, Paccaud F, Marazzi
A. A meta-analysis of acupuncture for chronic pain. Int J Epidemiol
1989;18:900-6.
25. Lewith GT, Machin D. On the evaluation of
the clinical effects of acupuncture. Pain 1983;16:111-27.
26. Lewith GT. How effective is acupuncture in the management of pain? J R Coll Gen Pract 1984;34:275-8.
27. Beauchamp T, Childress J. Principles of
biomedical ethics. Oxford, New York, Toronto: Oxford University Press, 2001.
28. Vas J, Vega
E, Méndez C. Tratamiento con acupuntura del dolor crónico benigno. Medicina de Familia (And)
2002;4:239-244
29. Vas Ruiz J, Panadero Ruz D, Pérez Blanco
JL, Méndez Martínez C, Gaspar Navarro O, Aguilar Domínguez I. Acupuntura. Una
alternativa al tratamiento del dolor. Aten Farm 2003;5(1):18-24
30. Kleinhenz J,
Streitberger K, Windeler J, Gübbacher A, Mavridis G, Martin E. Randomised clinical
trial comparing the effects of acupuncture and a newly designed placebo needle in rotator cuff
tendinitis. Pain 1999;83:235-241
31. Sun KO, Chan KC, Lo SL, Fong DYT. Acupuncture for frozen shoulder. Hong Kong Med J. 2001;7(4):381-91
32. Gilbertson
B, Wenner K, Russell LC. Acupuncture and arthroscopic
acromioplasty. J Orthop Res. 2003 Jul;21(4):752-8.
Correspondance : Dr Jorge Vas Centro de Salud Dos Hermanas “A” (Unidad de Tratamiento del Dolor) 41700 Dos Hermanas (Sevilla) España Tél : 95 4114368 e-mail : jvas@acmas.com |
Jorge Vas est docteur en médecine, responsable universitaire de la formation des médecins acupuncteurs à l’Université Pablo de Olavide de Séville, vice-président de l’association scientifique des médecins acupuncteurs de Séville (ACMAS) et directeur médical de l’unité anti-douleur du centre de santé de « Dos Hermanas » à Séville |