L’acupuncture en France : présent et avenir

Dr Jean-Marc STEPHAN

Depuis les précurseurs George Soulié de Morant, Niboyet, Nogier en passant par Chamfrault, Claude Larre et Nguyen Van Nghi, l’acupuncture française est-elle sortie de la discipline empirique et empreinte de philosophie dans lequel le système hospitalo-universitaire ne manquait pas de la placer ? Voici une revue représentative de l’acupuncture et de la Médecine Traditionnelle Chinoise en France

 

1/ La formation : le Diplôme Inter Universitaire

En France, l’acupuncture, reconnue comme pratique médicale par l'Académie Nationale de médecine depuis les années 1950, peut être pratiquée légalement par tous les docteurs en médecine.

Les soins font l'objet d'un remboursement par la Sécurité Sociale dans le cadre de la nomenclature des actes médicaux. Les acupuncteurs non-médecins ayant obtenu un diplôme d’acupuncture dans une des nombreuses écoles qui fleurissent en France ne sont pas reconnus par la législation, mais bénéficient actuellement d’une tolérance des pouvoirs publics et de l’administration française.

Pour avoir le droit d’inscrire le titre de médecin acupuncteur sur les plaques et les ordonnances médicales, il est nécessaire actuellement d’avoir le diplôme inter-universitaire d’acupuncture délivré par 9 universités : Université d’Aix-Marseille II, Université de Bordeaux, Université de Lille, Université de Lyon, Université de Montpellier,  Université de Nantes, Université de Nice, Université de Paris 13, Université de Strasbourg, ou pour certains anciens acupuncteurs, avoir un diplôme d’école ou d’Université antérieur à 1991 ou simplement en avoir fait la déclaration au Conseil de l’Ordre.

Les conditions d’accès

 L’inscription est subordonnée à l’avis favorable d’une commission, dirigée par le Directeur de l’enseignement.

Sont autorisés à s’inscrire :

-        Les Docteurs en Médecine ayant le droit d’exercer,

-        Les titulaires d’un Diplôme de Doctorat en Médecine étranger, permettant d’exercer dans leur pays ou le pays d’obtention du diplôme,

-        Les internes ayant validé 2 semestres.

L’enseignement

L’enseignement dure en général 3 ans, souvent réparti en  7 séminaires de fin de semaine.

La 1ère année concerne les bases fondamentales, la 2ème année, la sémiologie et nosologie et la 3ème année s’intéresse à la clinique, à la thérapeutique. Enfin, l’étudiant doit préparer un mémoire de fin d’études. A cela s’ajoutent des stages à passer dans le milieu hospitalier des neuf universités organisatrices des D.I.U et des travaux dirigés. Voir le programme en annexe.

 

 

2/ Les associations et la F.A.FOR.ME.C (Fédération des Acupuncteurs pour leur Formation Médicale Continue)

La vie associative acupuncturale française est très riche. Lors d’un premier congrès à Bordeaux, en 1997, les associations françaises se sont regroupées au sein d’une fédération, la F.A.FOR.ME.C. Celle-ci est formée de la quasi-totalité des associations des Médecins Acupuncteurs. En mai 2003, elle compte 26 associations originaires des quatre coins de l'hexagone (voir annexe 2). Comme son nom l'indique, elle a une fonction de soutien et de coordination de la formation médicale continue en acupuncture. Elle a aussi pour tâche d'aider les associations dans leurs actions de formation. Elle organise aussi un congrès national annuel en fin d'année, lieu de rencontre privilégié des médecins acupuncteurs français. La F.A.FOR.ME.C est composée de six commissions qui oeuvrent toutes pour le développement de l’acupuncture. Il s’agit des commissions médico-sinologique, pédagogie, Internet, acupuncture auriculaire, évaluation et communication.

 

 

3/ La société savante d’acupuncture : le Collège Français d’Acupuncture (CFA)

Le Collège Français d'Acupuncture est une société savante née officiellement le 22 mars 2003. Elle a pour objet de réaliser les recherches en acupuncture et médecine chinoise, d’organiser des réunions scientifiques, de publier des documents scientifiques, d’éditer des ouvrages, d’octroyer des bourses et des prix de recherche en acupuncture et médecine chinoise, de collecter, gérer et diffuser la documentation, de coordonner et échanger des travaux avec les associations et structures équivalentes au niveau européen et mondial et enfin de constituer le pôle de référence et d’expertise pour l’acupuncture et la médecine chinoise auprès des instances professionnelles, universitaires, ordinales, sociales ou autres.

Un accord lie la F.A.FOR.ME.C au CFA afin de coordonner les différentes actions.

 

 

4/ Les revues

Les deux revues françaises les plus importantes sont la Revue Française d'Acupuncture qui est une émanation de l’Association Française d’Acupuncture (AFA) et la revue Acupuncture & Moxibustion.

Acupuncture & moxibustion devient actuellement la revue de référence des médecins acupuncteurs francophones. Elle est issue de la fusion en janvier 2002 de deux autres revues importantes  Méridiens  et de la Revue Française de Médecine Traditionnelle Chinoise .

Tous les courants associatifs français mais aussi étrangers y sont représentés. Acupuncture & moxibustion se veut le reflet aussi bien de la médecine scientifique expérimentale ou clinique que celui de la recherche traditionnelle chinoise.

D’ailleurs, les différentes commissions de la F.A.FOR.ME.C, en particulier les commissions médico-sinologique, évaluation ou acupuncture auriculaire y ont déjà publié quelques-uns de leurs travaux.

 

 

5/ Internet et les bases de données

C’est le média qui permet à l’heure actuelle d’atteindre le plus grand nombre, aussi bien le Grand Public que les médecins acupuncteurs ou non acupuncteurs. De nombreux sites sont présents sur la toile. En voici les principaux :

  • Méridiens version Internet

Méridiens la revue d’acupuncture continue d’exister sous sa version internet. On y retrouve outre les anciens numéros, des articles complets, un forum, des listes de diffusion et des liens en abondance.

  • Acudoc-Pro

Se veut le site de référence et professionnel des médecins acupuncteurs de France. Qu’y découvre-t-on ? Tout d’abord l’annuaire de tous les médecins inscrits à la F.A.FOR.ME.C, mais aussi un forum, l’agenda des différentes manifestations associatives et congrès, les liens vers les autres associations présentes sur l’Internet et surtout l’entrée vers les bases de données d’Acudoc2.

  • Acudoc2-ECR et Acupuncture-EBM

Ces deux sites sont une émanation de la commission évaluation de la F.A.FOR.ME.C. Ils se font donc l’écho des travaux sur la base de données spécialisée sur les essais contrôlés randomisés, mais aussi sur ceux de l’acupuncture et de l’Evidence-Based Medicine.

6/ Le Syndicat National des Médecins Acupuncteurs Français (le  S.N.M.A.F)

Le syndicat est l’interlocuteur permanent des médecins acupuncteurs avec l’administration politique de la France ; il lutte pour une juste rémunération de l’activité médicale des acupuncteurs. Son cheval de bataille actuel est le réajustement de la valeur clé et du statut de médecin spécialiste du médecin acupuncteur. Beaucoup de travail en perspective.

7/ Les écoles d’acupuncture

Une multitude d’écoles existe en France. En voici quelques unes : l’école d'acupuncture de Philippe Sionneau, l’institut ShaoYang : école de Médecine Traditionnelle chinoise de Lyon, Lausanne et Paris, l’institut Chuzhen de Médecine Chinoise, le Centre Imhotep : centre d'enseignement d'acupuncture traditionnelle chinoise.

Toutes ces écoles sont des établissements privés dirigés par des acupuncteurs non-médecins. En règle générale, ces formations proposent un cursus de médecine Traditionnelle Chinoise et d’acupuncture réalisé par des praticiens qui ont eux-mêmes été souvent formés en Chine. Ces études durent, comme pour le D.I.U, 3 années et s’achèvent sur un diplôme d’école, sans valeur légale. 

 

8/ L’ANAES

La reconnaissance de l’acupuncture comme une spécialité à part entière doit passer par son évaluation.

Les pouvoirs publics s’appuient sur l’Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation en Santé (ANAES) pour réaliser des évaluations des pratiques médicales. En 1998, une conférence de consensus a ainsi déterminé le rôle de l’acupuncture dans l’arrêt du tabagisme. D’autres évaluations sont en cours : acupuncture dans les pathologies fonctionnelles uro-génitales, dans les syndromes anxio-dépressifs, dans l’aide à la récupération neuro-motrice et enfin l’acupuncture dans les affections à composante allergique.

Le rôle du CFA et de la F.A.FOR.ME.C est à ce titre primordial. Le Collège Français d’Acupuncture, en tant que société savante est l’interlocuteur privilégié auprès de l’ANAES, émanation du ministère français de la Santé.

Sans ce travail qui doit intéresser au plus haut niveau les acupuncteurs, il ne peut exister ni  reconnaissance, ni avenir de l’acupuncture !

 

Dr Jean-Marc STÉPHAN

ASMAF-EFA

Jmstephff@aol.com


Annexe 1 : programme du DIU

1ère année : Bases fondamentales

-        Introduction, généralités, historique, Yin-Yang, Qi-Xue

-         Méridiens et points d’acupuncture (y compris rapports anatomiques)

-         Anatomo-physiologie traditionnelle orientale

-         Etiopathogénie

-         Bases modernes

2ème année : Sémiologie et nosologie

-         Principes de l’examen et du diagnostic

-        Sémiologie des méridiens, sémiologie traditionnelle, points hors méridien

-        Prévention, législation, matériel thérapeutique

 3ème année : Clinique, thérapeutique et mémoire

-        Conduite générale d’un traitement : techniques thérapeutiques par acupuncture et moxibustion

-         Nosologie occidentale et acupuncture

-         Nosologie traditionnelle orientale

Annexe 2 : Les 26 associations françaises membres de la F.A.FOR.ME.C

A.A.S.F. (acupuncture auriculaire sans frontières),

A.F.A.(association française d'acupuncture),

A.F.E.R.A. (association française pour l'étude des réflexothérapies et de l'acupuncture),

A.F.M.C.A.P.N. (association   de formation médicale continue en acupuncture de Paris-Nord),

Médiale (alliance Médicale),

A.M.A.74. (association des médecins acupuncteurs de Haute-Savoie),

A.M.A.C. (association médicale d'acupuncture du centre),

A.M.A.I. (association des médecins acupuncteurs de l'Isère),

A.M.A.R.R.A. (amicale des médecins acupuncteurs de la région Rhône-Alpes),

A.M.O. (association de la médecine orientale),

A.R.E.A (association pour la recherche et l’étude en acupuncture),

A.R.M.A. (association pour la recherche de médecine asiatique),

A.S.M.A.F - E.F.A. (association scientifique des médecins acupuncteurs français - école française d'acupuncture),

C.A.O. (collège d'acupuncture de l'Ouest),

C.D.M.T.C. (centre de développement de médecine traditionnelle chinoise),

C.L.A. (centre lyonnais d'acupuncture),

COTACUP,

E.E.A. (école européenne d'acupuncture),

E.I.P.N. (école internationale Paul Nogier),

F.M.C.R.D.A.O. (association de formation médicale continue et de recherche pour le diplôme d'acupuncture de l'Ouest),

G.E.R.A. (groupe d'études et de recherches en acupuncture),

G.L.E.M. (groupe lyonnais d'études médicales),

S.A.A. (société d'acupuncture d'Aquitaine),

S.A.H.N. (société d'acupuncture de Haute-Normandie),

S.A.M.P. (société d'acupuncture de Midi-Pyrénées),

S.M.A.C. (société médicale d'acupuncture chinoise)

© Stéphan JM. L’Acupuncture en France : présent et avenir. Acupuncture & Moxibustion. 2003;2(3):158-161