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Jean
Fabre (SMAC) Intérêt des aiguilles chaudes dans le
traitement des lombalgies chroniques. |
La
méthode des aiguilles chauffées (WEN TCHEN) représente un apport majeur au
traitement des lombalgies d'origine arthrosique, particulièrement celles qui
sont aggravées par le vent, le froid et l'humidité (nous
signalerons à titre anecdotique que dans la région marseillaise, le Mistral qui
balaye rues et campagnes, est souvent décrit par les malades comme facteur
indéniable d' aggravation de leurs douleurs ).A l'époque moderne de nombreux
auteurs asiatiques et occidentaux, comme Wu Wei Ping et Jacques -André Lavier,
sont venus rappeler son importance et sa grande efficacité.
Il
faut signaler que les anciens Chinois, dont la conception des rhumatismes était
beaucoup plus vaste que la nôtre,avaient étendu l'indication de la méthode à
d'autres pathologies en dehors de la sphère ostéo-articulaire, par exemple à
des problèmes digestifs ou ORL qui apparaissaient, eux aussi, aggravés par le
froid, le vent, l'humidité.Ces facteurs atmosphériques induisant et faisant
prospérer les rhumatismes sont hélas! trop souvent négligés par la médecine
classique qui ne veut y voir, quand le malade s'en plaint, que des coïncidences
sans signification particulière.
C'est
dans le domaine des rhumatismes dégénératifs, particulièrement ceux qui, par
leur fréquence, posent aujourd'hui, comme
les lombalgies d'origine arthrosique,un véritable problème de santé
publique, que l'utilisation des aiguilles chaudes peut s'avérer la plus
fructueuse.
1.
Le matériel utilisé.
Il
s'agit d'abord d'aiguilles chinoises de 8 cm, relevant d'un modèle traditionnel,
c'est à dire bimétalliques, faites d'un manche de cuivre surmonté d'une
boucle à son extrémité libre (ce motif arrondi représentant, pour la Chine
ancienne, le ciel) tandis qu'un
filament du même métal s'enroule ensuite
en spirale autour d'une tige d'acier inox affûtée à sa pointe, pour lui
permettre, bien entendu de pénétrer la peau et les tissus sous-jacents.
Le
diamètre de l'acier doit être de l'ordre de 3,5 ou 4 dixièmes de millimètres.
Dans
le cas de ces aiguilles de 8 cm, la proportion traditionnelle des longueurs est
la suivante : un tiers de la dimension totale est occupé par le manche, les
deux tiers restants par l'acier de l'instrument.
Le
second élément employé dans la technique n'est autre que l'armoise,
utilisée sous la forme de petites boulettes d 'herbes séchées, destinées à être
disposées puis brûlées autour du manche de l'aiguille. Ces boulettes sont
réalisées à partir de "feutre d'armoise ", obtenu en broyant très
finement des feuilles d' Artemisia Vulgaris, préalablement séchées et
débarrassées de toutes leurs tiges.Le résidu ainsi obtenu est un agglomérat non
pulvérulent que l'on pourra aisément modeler en boule, comme dans la technique
ici décrite, ou en cônes et petites pyramides, destinées à être posées sur la
peau, dans le cas par exemple du moxa de contact.
Pour
assurer une meilleure adhérence du moxa autour du manche et parer à tout
risque de chute, certains fabricants incorporaient, il y a quelques années, des
ailettes au manche, obtenues à partir d'expansions latérales en boucle
du filament de cuivre qui le constitue.
D'après
notre expérience personnelle, nous ne pensons pas que ce dispositif adjoint
soit vraiment indispensable.Aucun risque de chute du moxa n'est à craindre si
la boulette est soigneusement disposée, sa masse étant uniformément répartie autour
du manche, qui la traverse bien en son milieu
pour éviter tout déséquilibre. Il faut également veiller à ne pas la
toucher avec le matériel qui va l'allumer, seule sa flamme devant venir au contact (risque d'adhérence au bois de
l'allumette s'il vient a être appliqué contre le moxa).
2.
Lieu des interventions
Les
aiguilles seront implantées sur le 25 Vessie, bilatéralement et, en cas
d'irradiation unilatérale de la douleur, sur le 47 Vessie du coté intéressé.La
profondeur d'implantation devra avoisiner, en moyenne, les deux tiers de la dimension de l'acier de
l'aiguille ( à moduler bien sûr selon la corpulence du patient ou de la
patiente ).
3.
Le protocole thérapeutique
Il
comporte d'abord une préparation du point d'acupuncture à traiter, que l'on
réalise en appuyant fortement sur lui avec l'index.
L'aiguille,
bien entendu tenue à deux mains, est enfoncée rapidement à la profondeur
voulue, en lui imprimant des mouvements de rotation d'un demi tour dans chaque
sens.
Elle
sera laissée en place 25 minutes, durant lesquelles elle subira les chauffages
nécessaires.
Elle
sera retirée lentement par petits mouvements de haut en bas.
Modalités
des chauffages :
5 minutes après l'implantation de ce matériel,
une première boulette d'armoise, placée autour du manche est portée à
incandescence. Il faut répéter encore deux fois l'opération à 5 minutes
d'intervalle avant de retirer l'instrument, qu'on a donc chauffé 3 fois.
La
méthode Wen Tchen peut, avec une grande efficacité, se suffire à elle même,
mais en pratique quotidienne, devant des lombalgies arthrosiques rebelles, nous
l'associons volontiers à deux autres actes techniques, qui viennent le plus
souvent la compléter avec bonheur.
Nous
agissons ainsi d'une part sur le méridien de Vessie en aval, plus précisément
au membre inférieur, d'autre part sur deux points hors méridiens médians de la
région lombaire.
D'anciens
textes énoncent en substance que si le
bas est malade, il faut souvent traiter en haut, tandis que si le haut souffre
il ne faut jamais oublier de traiter en bas.C'est dans cette optique qu'on été
définies les règles de points harmoniques, à un point d'acupuncture du tronc
pouvant répondre, dans ce système, par affinité, un ou plusieurs points du
membre inférieur.
Pour
sa part, le point 25 Vessie répond analogiquement au 40 Vessie.
Une
fois que les aiguilles destinées a être chauffées ont été implantées sur le
25 Vessie (et éventuellement le 47 Vessie), l'attention doit se porter sur le
40 Vessie, qu'il faudra aborder en tonification.
Les
manipulations de l'aiguille sont ici l'inverse des précédentes, où il convenait
de l'insérer rapidement avec des petits mouvements semi-circulaires.
Dans
ce deuxième type d'abord, il convient de l'enfoncer lentement en lui imprimant
de petits mouvements, non plus semi -circulaires comme dans les protocoles de
dispersion, mais de haut en bas, en saccade, un peu comme avec un marteau
piqueur en miniature.
Une
fois la profondeur voulue atteinte, l'aiguille doit être retirée très
rapidement, avec des petits mouvements semi -circulaires que l'on fait exécuter
au manche tenu entre pouce et index, l'ensemble de la manœuvre ne demandant
pas, plus de quelques secondes.
Si
les techniques précédentes se révèlent insuffisantes pour entraîner, dans
certains cas difficiles, la sédation des algies, nous associons volontiers,
lors de séances d'acupunctures ultérieures, la piqûre de deux points hors
méridiens, SHI QI ZHUI et XIA QI
YU, situés respectivement sur la pointe des apophyses épineuses de L5 et
L3, en utilisant des aiguilles courtes, insérées très superficiellement et
laissées en place une vingtaine de minutes.
Au
total, la méthode des aiguilles chauffées s'avère particulièrement fructueuse,
permettant souvent de trouver une solution à des problèmes rhumatologiques
difficiles.Elle va bien entendu de pair
avec l'étude du terrain du patient, de sa configuration énergétique, des
renseignements fournis par le teint, la langue, le pouls, la palpation
systématique des points Hérault, les corrections thérapeutiques éventuelles des
anomalies décelées, qui permettront de
conférer un caractère durable voir définitif aux bons résultats des
moxas sur aiguilles.
BIBLIOGRAPHIE
-
Fabre Jean "B.A. - BA de
l'acupuncture" Editions Pardès
"Les Repères de
l'Empereur Jaune" Editions Pardès
-
Lavier Jacques-André "Médecine Chinoise Médecine Totale" Editions
Grasset
"Vademecum d'Acupuncture Symptomatique" Editions Maloine
"Histoire, Doctrine et Pratique de l'Acupuncture Chinoise"
Editions Tchou