Collège Français d’Acupuncture : un document d’information à l’usage des patients traités par acupuncture

Afin d’aider le médecin acupuncteur dans son devoir d’information, le Collège Français d’Acupuncture et de Médecine Traditionnelle Chinoise (CFA-MTC) a élaboré, en avril 2014, un document écrit d’information à l’intention des patients traités par acupuncture. Ce document est disponible en version imprimable sur les sites du Collège Français d’Acupuncture : www.cfa-mtc-org et de la Fédération des Acupuncteurs pour leur Formation Médicale Continue : www.acupuncture-medic.com

 La consultation d'acupuncture

 L’acupuncture est une discipline thérapeutique issue de la tradition médicale chinoise, consistant en une stimulation de « points d’acupuncture ». Son application repose à des degrés divers sur des concepts médicaux spécifiques à la médecine chinoise. Les points sont définis par leurs dénominations, localisations, fonctions, indications et leurs modalités d'utilisation.

Au cours d’une même consultation, votre médecin acupuncteur établit le diagnostic de votre pathologie selon les critères de la médecine occidentale et ceux de l’acupuncture, vérifie que l’acupuncture constitue bien un moyen de traitement adapté compatible avec l’ensemble des pathologies et traitements en cours et effectue son propre traitement.

 

 Comment se déroule la séance d'acupuncture ?

 Vous pouvez venir consulter un médecin acupuncteur directement ou adressé par un médecin.

Votre médecin acupuncteur établit un diagnostic médical à partir d’un interrogatoire et d'un examen clinique avec souvent l’examen de la langue et la prise des pouls. A chaque consultation, le diagnostic est réévalué pour ajuster la prise de décision thérapeutique.

La consultation est suivie d'une séance d'acupuncture : un ensemble de points d’acupuncture est stimulé par différents moyens qui peuvent être associés (aiguilles et moxibustion).

L’aiguille stérile et à usage unique est insérée en traversant la peau et laissée en place pendant une durée variable. L’insertion de l’aiguille peut provoquer une sensation ressentie comme parfois douloureuse et passagère. L'aiguille ou le point d'acupuncture peuvent être chauffés (moxibustion, par bâtonnet d’armoise ou autre stimulation thermique).

Les points d’acupuncture peuvent être aussi stimulés par électro-acupuncture ou encore par laser.

Tout le matériel utilisé répond aux normes d’hygiène et de stérilisation en vigueur. Comme tout matériel à usage unique, à la fin de la séance, les aiguilles sont recueillies dans des collecteurs spécifiques, qui sont ensuite ramassés et traités conformément à la réglementation.

La désinfection cutanée est recommandée chez le patient immunodéprimé, en cas d’infections cutanées, chez le diabétique ou en cas de pathologie cardiaque valvulaire. Le rythme et la fréquence des séances dépendent de l’indication et de la réponse thérapeutique.

L'acupuncture : pour quelles indications ?

 Un certain nombre d’indications sont validées par la Haute Autorité de Santé (HAS) : par exemple, les douleurs, les nausées et vomissements postopératoires, induits par la chimiothérapie, pendant la grossesse, les conduites addictives, les troubles anxio-dépressifs, l'énurésie, la récupération après accident vasculaire cérébral, la paralysie faciale.

Les indications et bénéfices de l’acupuncture sont nombreux et variés. Pour votre traitement, votre médecin vous indiquera les indications préférentielles mises à jour par le Collège Français d’Acupuncture.

 Quels sont les incidents possibles pendant une séance d'acupuncture ?

 Les événements indésirables fréquents pouvant survenir à la suite d’une séance d’acupuncture sont le plus souvent bénins : saignements et hématomes au point de puncture, sensation de malaise, altération de la vigilance, étourdissement, sensation de fatigue ou aggravation des symptômes qui ont motivé la consultation pendant 24 à 48 H après la séance. La moxibustion peut être source de brûlures.

 Comment éviter les complications éventuelles ?

La formation correcte du professionnel médical est le garant de votre sécurité : sa qualité de médecin évitera de prendre en charge par acupuncture une pathologie qui doit être traitée d’une manière autre, ce qui nécessite une formation au diagnostic occidental et le respect des règles professionnelles.

Les risques de transmission de maladies infectieuses sont évités par l’utilisation de matériel stérile à usage unique et la désinfection des mains et de la peau selon les circonstances.

Prévenez votre médecin acupuncteur si vous ressentez une sensation d’inconfort, de froid ou une gêne pour respirer au cours de la séance. Il est formé pour prendre en charge ce type de situation.

 Quelques conseils pour une bonne séance d'acupuncture

 Vous êtes en position allongée ou assise : évitez de manipuler vous-même les aiguilles, de vous lever ou de faire des gestes brusques.

Il est conseillé de ne pas faire d’effort violent après la séance. Signalez vos antécédents notables, vos maladies, vos traitements en cours, l'existence de prothèse, de pace-maker ou de défibrillateur cardiaque implantable.

Vous pourrez ressentir les effets bénéfiques de la séance immédiatement ou de façon décalée. Plusieurs séances seront souvent nécessaires pour un effet bénéfique durable selon les indications.

 

Cette fiche d’information ne peut sans doute pas répondre à toutes vos interrogations. N’hésitez pas à poser au médecin acupuncteur toutes les questions qui vous viennent à l’esprit.

 Promoteurs 

Collège Français d’Acupuncture : www.cfa-mtc-org.

Fédération des Acupuncteurs pour leur Formation Médicale Continue: www.acupuncture-medic.com

 Patrick Baudin, Sylvie Bidon, Dominique Célerier-Fouconnier, Gilles Cury, Dominique Fouet, Alain Huchet, Marc Martin, Florence Phan-Choffrut, Alain Schmidt, Nicole Thurière et Henri Truong Tan Trung.

 

 

Du respect au bon usage des points interdits pendant la grossesse

La première notion enseignée par le Dr Christian Rempp dans le cadre d’une initiation à l’acupuncture obstétricale était celle des points contre-indiqués pendant la grossesse. Il insistait sur le fait que l’acupuncture n’était pas une médecine douce et que l’affirmation « l’acupuncture ne peut pas faire de mal » était fausse

La notion de points interdits s’impose au regard de la physiologie : la grossesse est une accumulation de yin dans le pelvis avec un certain équilibre de qi et de Sang.

L’accouchement qui est l’aboutissement de la grossesse est un mécanisme yang : le yin protecteur de la grossesse se transforme en yang ; ce mouvement vers le bas expulse le fœtus, le qi pousse le Sang et la porte de l’Utérus s’ouvre.

Le chapitre 47 du Suwen cité par B. Auteroche et P. Navailh  [1] dit « de ne pas endommager ce qui est en insuffisance et de ne pas avantager ce qui a du surcroît… Lorsqu’il y a un être dans le ventre, la dispersion donne issue à l’essence et le mal, régnant en maître sur l’organisme devient chronique ». Il ne faut pas nuire à l’équilibre yin/yang, Sang/Energie qui préside à chaque moment de la grossesse.

Si dans la littérature de nombreux points sont à éviter, nous nous sommes rendus compte que selon les auteurs certains pouvaient avoir une action tocolytique  (ils protègent la grossesse non à terme) ou ocytocique : il semblerait qu’ils ne déclenchent qu’en cas de grossesse à terme, ou arrêtée dans les fausses couches. Notre expérience dans le déclenchement du travail à terme ou en cas d’interruption thérapeutique de grossesse confirme ce point de vue : il n’est efficace qu’avec un score de Bishop supérieur ou égal à 7, ou quand la grossesse est arrêtée. Le Dr Jean-Marc Stéphan résume ces notions en parlant d’action cybernétique des points : leur action est variable en fonction des circonstances [2].

Nous avons voulu savoir quels points étaient réellement interdits. Seul un nombre limité de points est interdit dans pratiquement tous les atlas de points d’acupuncture : GI4, E12, E25, E36, Rte2, Rte6, V60, V67, VB21, VC4, VC5, VC9, VC10.

Le docteur Christian Rempp en particulier ne pratiquait pas tout à fait ce qu’il enseignait [3], et très prudent, il nous conseillait de nous abstenir d’une telle pratique dans un premier temps. En effet si les points non-contre-indiqués nous semblaient insuffisants, il valait mieux orienter la patiente éloignée du terme vers un acupuncteur expérimenté.

A noter qu’il se gardait bien de nous fournir une liste de ces fameux points, préférant nous orienter vers la littérature [4,5]. En 1990, dans la Revue Française de l’Acupuncture [6], il écrivait : « La femme enceinte est dans un état physiologique et pourtant inhabituel ; tout traitement par acupuncture doit la préserver d'un éventuel désordre énergétique qui pourrait mettre sa grossesse en péril. Les divers ouvrages et articles citent de nombreux points interdits pendant la grossesse, points qui ne sont pas toujours les mêmes selon les publications, ce qui peut susciter bien des angoisses chez le malheureux acupuncteur consulté par une femme enceinte. Par ailleurs, la grossesse peut s'accompagner de troubles qui s'échelonnent entre ce que de nombreux auteurs appellent les troubles physiologiques (les vomissements gravidiques par exemple), et les troubles les plus sévères, susceptibles de mettre en danger la vie de la mère ou celle de l'enfant, et ceci depuis le début de la grossesse jusqu'au terme. L'acupuncture intelligemment comprise doit trouver dans ces conditions un champ d'application des plus larges, même et surtout quotidienne au cabinet d'acupuncture ».

 

Cinq observations en particulier avaient attiré mon attention.

E36

 Une primipare enceinte de deux mois et demi consultait pour des nausées régulièrement accompagnées de vomissements. Le Docteur Rempp préconisait VC12, MC6 et Rn21 dans les nausées du premier trimestre, en nous déconseillant vivement d’autres points de la littérature tels E36 ou encore Rte4 qui étaient absolument contre-indiqués chez la femme enceinte, sauf à proximité du terme. Chez cette patiente, il a associé E36 aux trois points précédents. Devant mon regard perplexe, il s’est aussitôt justifié en m’expliquant que cette patiente était en Vide évident de Rate/Estomac, ce qui justifiait l’ajout du point E36 pour être suffisamment efficace. De plus, le qi remontait à contre-courant : nous n’étions pas en train de faire descendre le qi, mais de lui donner l’occasion dans le cadre de ce tableau clinique de s’abaisser physiologiquement.

 

 

V67

 Un autre exemple frappant concernant le V67 : ce point est indiqué pendant l’accouchement pour activer la descente fœtale, donc contre-indiqué pendant la grossesse ; or c’est également celui indiqué pour la malposition fœtale, que l’on puncture de préférence entre 32 et 35 SA, et non à terme. Le docteur Rempp l’associait au Rn9 protecteur de la grossesse pour prévenir l’apparition de contractions utérines. Il nous expliquait alors que le fait de chauffer l’aiguille amenait suffisamment de yang pour qu’à son apogée, il se retransforme en yin ; ainsi, son action se limite à placer la tête en bas (la tête, yang par rapport au siège yin est ainsi attirée vers le bas puisque le yang est appelé en bas). Pendant le travail, seul le yang est sollicité pour amener la tête vers le bas. Il serait donc dangereux de chauffer ce point pendant le travail (risque de brûlure) dans la mesure où la grossesse vient d’arriver à son terme, et que le yang n’est pas encore à son apogée pour redevenir yin protecteur de la grossesse : il ne pourra redevenir yin qu’après expulsion du fœtus. 

E44

 Dans le syndrome de Lacomme, il m’avait présenté E44 comme également contre-indiqué pendant la grossesse, et l’avait associé à Rn9 à 33 SA en m’expliquant que « shaoyin monte quand yangming descend ». Rn9 peut donc faire monter shaoyin si on ajoute E44 qui fait descendre yangming en rétablissant une circulation physiologique du qi antalgique : les deux effets sont contrebalancés et ne mettent pas la grossesse en péril.

 

F3

Lors d’une menace d’accouchement prématurée à 28 SA associée à une tension limite (14/9) dans le cadre d’une « grossesse précieuse » induite par FIV chez une primipare de 38 ans, il a choisi Rn9 et VC3 à l’aiguille dirigée vers le haut. A ma grande stupéfaction à l’époque, il avait ajouté le F3 qu’il m’avait enseigné en tant que « point qui fait lâcher le col, fortement contre-indiqué dans la grossesse ». Ce choix se justifiait par un pouls en corde évoquant une stagnation de qi du Foie. F3 en tonifiant le yin du Foie permettait en cela de retenir le yang en prévention d’une hypertension artérielle et de protéger la grossesse dans le cadre de ce tableau clinique.

 V60

 Un autre exemple lors de lombalgies de type taiyang de la grossesse : tandis qu’il nous présentait V60 comme contre-indiqué avant terme, il l’avait choisi à 32 SA chez une deuxième geste, associé à Rn9 pour « protéger la grossesse ». Il l’avait toutefois puncturé vers le haut pour ne pas « faire tomber le fœtus » en m’expliquant que comme il y avait trop d’Energie perverse xie qi à chasser, cela aurait pour effet de permettre à nouveau la circulation physiologique du qi et de calmer la douleur.

Aussi dans la pratique d’hier, en traitant en fonction du symptôme, les points supposés dangereux étaient rigoureusement évités. Aujourd’hui, l’expérience m’a incitée à m’intéresser à l’action physiologique du point plutôt qu’à son indication de symptômes, quitte à choisir un point interdit. Demain : les études actuelles semblent démontrer l’action cybernétique des points. Existe t-il dès lors des points interdits dans un contexte donné ?

Cette conclusion renvoie au champ d’application de la grossesse le plus large cher au Docteur Christian Rempp à qui je voulais rendre hommage. Cela ne signifie pas cependant que la prudence ne s’impose plus pendant la grossesse.

 

 


Mme Annabelle Pelletier-Lambert

Sage-femme

 « Les Myrtes » - Bâtiment A

15 avenue Roger Salengro, 83130 La Garde.

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Références

 

1. Auteroche B, Navailh P. Acupuncture en gynécologie et obstétrique. Paris: éd. Maloine;1986. 

2. Stéphan JM. Pathologies du premier trimestre de grossesse accessibles à l’acupuncture. Acupuncture et Moxibustion. 2008;7(3):256-262.

3. Rempp C, Bigler A. La pratique de l’acupuncture en obstétrique. Paris: éd. La Tisserande; 1992.

4. Macciocia G. Gynécologie et obstétrique en médecine chinoise. Bruxelles: éd Satas; 2001.

5. Salagnac B. Naissance et acupuncture. Bruxelles: éd. Satas; 1998.

6. Rempp C. et al. Suivre, traiter et préparer la femme enceinte. Revue Française d'Acupuncture. 1990;64:5-15.

 

 

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