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Acupuncture expérimentale et isoformes de l’oxyde nitrique synthase

    En 2006, on objectivait sur un modèle de hamster hypertendu que l’électroacupuncture (EA) au point ES36 (30mn par jour pendant cinq jours) réduisait l’hypertension artérielle par activation des mécanismes de la réaction de biosynthèse du monoxyde d’azote (NO) sous dépendance des NO synthases. Il était montré que l’EA augmentait la concentration périartériolaire de NO. Chez le hamster, l’HTA réduit l’oxyde nitrique synthase endothéliale (eNOS3) et l’oxyde nitrique synthase neuronale (nNOS1), réduction inhibée donc par l’EA au 36E [1]. Sur cette image, vous pouvez justement observer la structure de l’oxyde nitrique synthase endothéliale (NOS3) humaine avec un substrat d’arginine.

    1. Kim DD, Pica AM, Duran RG, Duran WN.Acupuncture reduces experimental renovascular hypertension through mechanisms involving nitric oxide synthases. Microcirculation. 2006 Oct-Nov;13(7):577-85. 

    Stéphan JM. Acupuncture expérimentale et isoformes de l’oxyde nitrique synthase ? Acupuncture & Moxibustion. 2010;9(2):76. (Version PDF)

    Stéphan JM. Acupuncture expérimentale et isoformes de l’oxyde nitrique synthase ? Acupuncture & Moxibustion. 2010;9(2):76. (Version 2010)

    Acupuncture autour de la naissance

      Les Acupuncteurs Chinois, comme l’attestent les textes anciens, savaient tirer profit de l’acupuncture lors de la grossesse. Comme le montre cette image, le zhiyin (67V) était déjà préconisé dans les versions foetales de siège, le travail prolongé et difficile et les rétentions de placenta.

      L’acupuncture est une médecine idéale [1] dans l’accompagnement d’une grossesse parce qu’elle n’oblige pas la femme enceinte à prendre des thérapeutiques médicamenteuses pouvant entraîner des effets tératogènes. Les sages-femmes, les obstétriciens mais aussi les patientes elles-mêmes, sont de plus en plus demandeurs, ainsi que nous pouvons le mesurer par les parutions croissantes d’articles dans les journaux féminins ou même généraux [2,3] mais aussi dans les revues professionnelles [4].

      Il était grand temps que la revue « Acupuncture & Moxibustion » ouvre un dossier sur le sujet.

      Nous entamons avec ce numéro riche de trois articles concernant l’obstétrique (Johan Nguyen et Jean-Marc Stéphan), une série de publications qui objectiveront ce que l’acupuncture, la moxibustion et l’électroacupuncture offrent de mieux aux femmes enceintes et parturientes.

      Coeur de la médecine,  date 984.  Textes chinois des dynasties Jin (265-420) et Tang (618-907). 1ère réédition au Japon en 1854, d’où le nom japonais (Ishinpo) [image extraite de l’encyclopédie Internet du GERA :  www.gera.fr]. 

      Références

      1. Spellerberg E, Smidt-Jensen SL. [A retrospective analysis of the results of obstetric acupuncture at Frederiksberg Hospital]. Ugeskr Laeger. 2003 Mar 3;165(10):1023-7. 
      2. Doucy Marig. Les bienfaits des aiguilles à la maternité Paul-Gellé Roubaix. Méridiens [online]. 2009 mai [cité 30 mai 2009]: 1 écran. Available from URL: http://www.meridiens.org/mrd/spip.php?breve149.
      3. Durand Stéphane. Un plus pour les grossesses.  Méridiens [online].  2008 novembre [cité 30 mai 2009]: 1 écran. Available from URL: http://www.meridiens.org/mrd/spip.php?breve119.
      4. Gaffney L, Smith CA. Use of complementary therapies in pregnancy: the perceptions of obstetricians and midwives in South Australia. Aust N Z J Obstet Gynaecol. 2004 Feb;44(1):24-9. 

      Stéphan JM. Acupuncture autour de la naissance. Acupuncture & Moxibustion. 2009;8(2):68. (Version PDF)

      Stéphan JM. Acupuncture autour de la naissance. Acupuncture & Moxibustion. 2009;8(2):68. (Version 2008)

      Gaudí, Barcelone et ICMART 2007

        Du 1er au 3 juin 2007, Barcelone a été le siège du Congrès international d’acupuncture de l’ICMART qui, comme chaque année depuis 1983, a lieu dans une ville différente. Le Dr Isabel Giralt, Présidente du Congrès, mais aussi Présidente de la section d’acupuncture du Col.legi de Metges (Conseil de l’Ordre) de Barcelone et toute son équipe a réussi à organiser un congrès de grande qualité ayant pour thème « art, preuves et défis ».

        C’est dans cette ville d’art que naquit entre 1890 et 1920, l’architecture moderniste (Modernismo), la version catalane de l’Art Nouveau qui se développa aux côtés de la Renaixença, mouvement artistique typiquement catalan qui visait la promotion d’un art et d’une littérature authentiquement régionaux.

        Antonio Gaudí y Cornet (1852-1926), le célèbre bâtisseur de la Sagrada Familia parsema la ville de toutes ses oeuvres. On peut en voir ici le long de l’arête d’un toit un détail architectural (toiture de la casa Batlló -1905- montrant l’utilisation alternée de tuiles sphériques et cylindriques), simulant le dos couvert d’écailles d’un Dragon de l’Empire Céleste en visite pour ce congrès de l’International Council of Medical Acupunture and Related Techniques 2007.

        Toiture casa Batlló (1905) - Antonio Gaudí y Cornet (1852-1926) - Barcelone - Catalogne - Espagne
        Toiture casa Batlló (1905) – Antonio Gaudí y Cornet (1852-1926) – Barcelone – Catalogne – Espagne

        Stéphan JM. Gaudí, Barcelone et ICMART 2007. Acupuncture & Moxibustion. 2007;6(3):192. (Version PDF)

        Stéphan JM. Gaudí, Barcelone et ICMART 2007. Acupuncture & Moxibustion. 2007;6(3):192. (Version 2007)

        Mucha, Prague et ICMART 2005

        Prague, capitale de la République Tchèque a accueilli du 20 au 22 mai 2005 le congrès annuel d’acupuncture de l’ICMART (International Council of Medical Acupuncture and Related Techniques). La FAFORMEC, qui adhère depuis 2004 à cette fédération internationale de plus de 80 associations d’acupuncture à travers le monde et forte d’environ 30000 acupuncteurs était représentée pour la première fois. Vous trouverez dans ce numéro un compte-rendu détaillé de cet événement qui laissa malheureusement peu de place pour la visite détaillée de cette ville d’art dont vous pouvez admirer ce vitrail, style Sécession, d’Alfons Mucha, de la glorieuse cathédrale St Guy.

        Vitrail style Sécession -Alfons Mucha (1931) -Cathédrale - St Guy (1344-1929) - Prague -Tchéquie
        Vitrail style Sécession -Alfons Mucha (1931) -Cathédrale – St Guy (1344-1929) – Prague -Tchéquie

          Stéphan JM. Mucha, Prague et ICMART 2005. Acupuncture & Moxibustion. 2006;5(1):4.

          Stéphan JM. Mucha, Prague et ICMART 2005. Acupuncture & Moxibustion. 2006;5(1):4. (Version 2006)

          Jean, F. Borsarello

          Pionnier de l’Acupuncture, le Dr Jean, F. Borsarello a rejoint en cette fin d’année 2007 le panthéon des grands noms des acupuncteurs français au sein du Dao.

          « Le principe qui peut être énoncé, n’est pas celui qui fut toujours. L’être qui peut être nommé, n’est pas celui qui fut de tout temps. Avant les temps, fut un être ineffable, innommable.

          Alors qu’il était encore innommable, il conçut le ciel et la terre. Après qu’il fut ainsi devenu nommable, il donna naissance à tous les êtres.

          Ces deux actes n’en sont qu’un, sous deux dénominations différentes. L’acte générateur unique, c’est le mystère de l’origine. Mystère des mystères.

          Porte par laquelle ont débouché sur la scène de l’univers, toutes les merveilles qui le remplissent.

          La connaissance que l’homme a du principe universel, dépend de l’état de son esprit. L’esprit habituellement libre de passions, connaît sa mystérieuse essence. L’esprit habituellement passionné, ne connaîtra que ses effets.»

          Lao-Tzeu – Livre I – Chapitre 1 par Léon Wieger S.J 

          Dr Jean F. Borsarello
          Dr Jean F. Borsarello

          Stéphan JM. Jean, F. Borsarello. Acupuncture & Moxibustion. 2007;6(4):4. (Version PDF)

          Stéphan JM. Jean, F. Borsarello. Acupuncture & Moxibustion. 2007;6(4):4. (Version 2007)

          La Giralda (Séville)

          La statue de la Foi de la Giralda de Séville sert de logo à l’Association scientifique des Médecins Acupuncteurs de Séville (ACMAS) Huangdi.

          La Giralda (girouette), haute de 96 m est un ancien minaret Almohade, construit au 12e siècle, emblème de la ville et qui doit son nom à cette fameuse statue en bronze qui la surmonte et tourne au gré du vent.

           Le 28 et 29 juin 2003, l’ACMAS organisait, en collaboration avec l’Université Pablo de Olavide de Séville, l’université des sciences médicales de Beijing, l’hôpital Guanganmen de Beijing et l’académie de Médecine Traditionnelle de Chine son congrès international d’acupuncture dont vous trouverez quelques échos dans ce numéro.

          Statue Foi victorieuse (XVIe) - Giralda (minaret) - Cathédrale Notre dame du siège (XII- XVIe) - Séville - Andalousie -Espagne
          Statue Foi victorieuse (XVIe) – Giralda (minaret) – Cathédrale Notre dame du siège (XII- XVIe) – Séville – Andalousie -Espagne

          Stéphan JM. La Giralda (Séville). Acupuncture & Moxibustion. 2003;2(4):190. 

          Psoriasis

          Tatouage – Miami – Floride - USA
          Tatouage – Miami – Floride – USA

          Echanges

          Questions et réponses

          Question :  J’ai un cas de psoriasis très difficile. J’ai commencé à traiter le sentiment nu (colère), « stagnation -nouure de qi de foie avec dégagement de chaleur du Sang »… J’ai aussi traité la partie liquidienne pour redonner de l’Eau. Ensuite, j’ai utilisé le yangqiaomai à chaque séance et j’ai eu de bons résultats, améliorant notablement le déséquilibre énergétique observé aux pouls et à la langue. Mais persiste l’érythème psoriasique bien que sans prurit sur le visage, surtout au niveau des plis nasaux. J’ai de bons résultats localement quand je traite avec le 4GI et le 11 GI, mais en peu de jours le problème réapparaît. Quelle autre technique pourrais-je utiliser ? Pouvez vous me conseiller pour un meilleur diagnostic différentiel ? (SL.., Argentine, traduction de l’espagnol : Dr JM Stéphan)

          Réponse : Le psoriasis est une dermatose érythémato-squameuse, d’évolution chronique assez difficile à traiter en médecine occidentale. En médecine chinoise, et par acupuncture, on a des résultats qui ne sont pas du tout mauvais. Le psoriasis selon la physiopathologie de la médecine traditionnelle chinoise est une maladie qui atteint le mouvement Métal (Poumon – Gros Intestin), correspondance classique avec la peau. C’est aussi une maladie qui atteint le Grand Méridien taiyang car c’est la première couche touchée par atteinte des énergies perverses dans la relation Extérieur-Intérieur. Le taiyang (Intestin Grêle-Vessie) est la barrière de défense et s’ouvre à l’extérieur.

          1. Les terrains :

          En pratique, il existe trois terrains victimes de choix de cette maladie : le terrain Métal, le terrain Terre, et le terrain Eau avec atteinte respectivement du shoutaiyin (Poumons) ou shouyangming (Gros Intestin), zutaiyin (Rate-Pancréas) ou zuyangming (Estomac), et enfin zutaiyang (Vessie). On a souvent donc un vide d’un de ces méridiens.

          1. Les énergies perverses

          A cela, il faut aussi tenir compte des énergies perverses (xié) responsables : la Sécheresse ou le Froid associé à la Sécheresse, l’Humidité associée au Froid et plus rarement l’Humidité associée à la Chaleur et enfin le Vent. Le psoriasis Froid-Sec dépend d’un excès de l’Energie Cosmique yangming (Sécheresse) (ceci en fonction de la chronobiologie : prédominance excessive du qi Céleste en position à la source ou à la présidence en fonction de la loi « Maître de maison- hôte de passage (pour de plus amples explications consultez Méridiens 1994 n°103 p103-152).

          Cette forme de psoriasis survient donc sur le terrain Métal (Poumons – Gros Intestin), avec insuffisance de Sang. D’où ceci peut ressembler au mécanisme de Froid-Chaud atteignant le jueyin. D’ailleurs le cas particulier du psoriasis du cuir chevelu constitue un syndrome atteignant spécifiquement le zujueyin. On a alors atteinte par les énergies perverses (Vent, Chaleur, Humidité) qui agressent le weiqi, le Sang (xue), d’où vide de Sang ou de Foie entraînant en corollaire un reflux de yang qui déferle vers le haut du corps et la tête.

          Intérêt du point 20VG dans ce cas précis. Par contre dans l’atteinte du Poumon ou Gros Intestin, c’est surtout un psoriasis idiopathique constitutionnel apparu très rapidement avec des antécédents de psoriasis dans la famille.

           Le traitement habituel est d’agir sur le yangming.

          Le psoriasis Eau-Humidité dépend de l’empiètement de la Terre sur l’Eau ou inversement. Dans les deux cas, il y a une perturbation du sang avec insuffisance de Rate. On trouvera dans les symptômes associés des signes d’humidité avec diarrhées, troubles digestifs, et aussi des signes de froid avec troubles intestinaux, douleurs osseuses et arthralgies liées à l’atteinte du taiyang. Cette variété se transforme après de nombreuses années en rhumatisme psoriasique. Le traitement est d’agir sur le taiyin et le taiyang

          Le psoriasis Chaleur-Humidité : les énergies perverses Chaleur due au qi Céleste shaoyin peut s’associer à l’Humidité en excès et entraîner cette variété de psoriasis qui est développé souvent chez le diabétique. L’étiologie peut être aussi interne par des excès alimentaires ou alcoolisés. La conséquence est la Chaleur du Sang puis excès et stagnation du Sang. Le zutaiyin (Rate-Pancréas) et le zuyangming (Estomac) sont les méridiens préférentiellement atteints. Le traitement consiste à réguler bien sûr taiyin et yangming.

          En conclusion, il est essentiel de connaître l’atteinte étiologique par les xié  Froid-Sec, Froid Humide…, voir la constitution du patient Terre, Métal, Eau ou éventuellement Bois. Le psoriasis qui résulte de la perturbation du Sang peut être considéré alors comme un Froid et Chaud, ce que Husson dans sa traduction du Su Wen appelle nué, et de ce fait, le traitement doit consister à tonifier ou disperser le Sang, tonifier ou disperser la Rate-Pancréas, le Poumon ; disperser le Froid, la Chaleur ou l’Humidité selon le cas.

          Par ailleurs, il faudra aussi tenir compte des Âmes Viscérales.

          1. Les Entités Viscérales

          Dans les causes des maladies, la Médecine Traditionnelle Chinoise distingue deux causes principales :

          les causes externes et les causes internes.

          Par cause externe, on entend les énergies perverses (xié), Vent, Froid, Humidité, Sécheresse, Chaleur qui agressent l’organisme que l’on vient de voir plus haut, mais aussi tous les traumatismes physiques. A noter que le Su Wen spécifie que si l’homme subit les attaques du xie, c’est parce que son énergie essentielle est déjà affaiblie.  » Les trésors des cinq viscères : le Cœur abrite le shen (esprit défini comme la perfection du qi essentiel), le Poumon abrite le po (âme végétative, suppléant du qi essentiel), le Foie abrite le hun (âme spirituelle, conseiller du shen)…  » (Su Wen). De ce fait les causes internes opèrent sur l’homme. Il s’agit des perturbations psychiques, c’est à dire les shen ou zang ou entités viscérales, âmes végétatives ou même âmes viscérales selon les auteurs : colère (hun), joie ( shen), soucis (yi), tristesse (po), peur (zhi). Ainsi le stress, les soucis, le surmenage vont décompenser le mouvement de la Terre (Rate-Pancréas – Estomac) entraînant un vide de yin de Rate-Pancréas et un Feu d’Estomac ou une plénitude de yang de Rate-pancréas. Cet excès de yang va tarir le yin de Rate-Pancréas. Le sujet ne trouve pas le repos ; il est préoccupé, soucieux, témoignage d’un trouble du yi et d’un épuisement du Sang (xue).

          D’où l’intérêt d’agir aussi sur les shen.

          Enfin pour terminer, un cas clinique. J’ai traité en mars 2000 un homme atteint d’un psoriasis depuis 20 ans, évoluant par poussée, de type psoriasis eau-humidité, avec vide de yin de Rate-Pancréas, un shen et un zhi perturbés. J’ai traité les 5 âmes viscérales et rééquilibré le Sang et la Rate-Pancréas, sans me préoccuper d’un traitement local. Le résultat ne s’est pas fait attendre. En 4 séances, sa peau est revenue quasi normale. Et depuis mars, il n’a plus eu de poussée. Je l’ai vu la dernière fois fin juillet, et toujours en rémission complète. Cela ne lui était jamais arrivé. Ceci pour dire que traiter les âmes viscérales me parait aussi important que rééquilibrer par exemple une atteinte du Sang.

          Stéphan JM. Psoriasis. Acupuncture & Moxibustion. 2002;1(3-4),98-9

           Le traitement des rides en acupuncture esthétique 

          Bain recouvert de boue noire dans la Mer Morte – Jordanie
          Bain recouvert de boue noire dans la Mer Morte – Jordanie

          Madame I.S., infirmière dans un centre hospitalier de la région parisienne, vient de « subir » trois séances d’acupuncture sur le visage pour traiter ses rides. Elle va en toute confiance chez ce médecin généraliste qui pratique l’acupuncture (séance de 30 mn sur deux patientes groupées dans des cabines pendant qu’une troisième consultation est réalisée en médecine générale).

          «  Après des renseignements d’ordre administratif, mais aucun sur mes antécédents médicaux, la séance commence. Je me suis d’emblée étonnée de l’absence de passage d’un produit antiseptique sur ma peau avant la séance. Pas de commentaire particulier. Ce médecin m’a remis les aiguilles dans un tube à essai pour les rapporter à la séance suivante. Seconde séance : même technique avec encore plus d’aiguilles…une quarantaine environ !! (figure 1) Et une douleur qui m’a fait monter les larmes aux yeux. Les aiguilles sont déposées dans un plateau et « arrosées » d’alcool à 70° pendant une minute à peine…Je repars ensanglantée…

          Je constate le lendemain l’apparition d’hématomes très importants sur le visage.

          3e séance idem, où elle m’a semblée contrariée car je lui ai reformulé mon étonnement sur le manque de désinfection cutanée sans oser évoquer davantage le problème du manque d’hygiène.

          J’ai néanmoins abordé le fait que les aiguilles pouvaient s’émousser à la longue, ce qui pouvait expliquer la douleur.  Le soir,  je me sens ridicule d’avoir toléré cela. J’ai deux énormes hématomes sur le visage (figure 2). Je suis scandalisée, mon entourage médical l’était tout autant et me conseille même de la dénoncer au Conseil de l’Ordre des Médecins. Il est vrai que de telles pratiques dans mon hôpital seraient tout de suite signalées ».

          Figure 1. Près de 40 aiguilles.

          Figure 2. Les deux hématomes sur la joue. 

          Ce cas clinique très parlant objective des fautes à ne pas commettre et aborde la problématique de l’acupuncture esthétique. 

          L’hygiène au cabinet médical

          Plusieurs problèmes sont évoqués : le consentement éclairé, la désinfection de la peau, les aiguilles.

          Tout d’abord avant tout traitement, le praticien a l’obligation d’informer son patient des risques des actes médicaux et lui fournir tous les éléments qui lui permettent d’accepter ou de refuser les actes à visée thérapeutique [[1]] et encore plus quand il s’agit comme ici d’actes esthétiques. L’information orale est considérée comme primordiale. Il est aussi nécessaire de donner un formulaire de consentement sans bien sûr faire l’impasse sur son explication. Le défaut d’information est une faute ! La loi du 4 mars 2002, appelée encore loi Kouchner précise ainsi qu’« aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment » [[2]].

          Dans ce cas clinique, il semble que le simple interrogatoire médical ait été ignoré ; pas d’explications sur le traitement ; refus d’explication aussi sur les risques encourus.

          L’interrogatoire est pourtant important, de façon à ce que le praticien n’ignore pas une maladie hémorragique, la prise d’anticoagulants ou d’antiagrégants plaquettaires, un diabète éventuel, une maladie des valves cardiaques, bref de façon à éviter tout risque infectieux pour les patients et les professionnels. Les treize recommandations de bonnes pratiques médicales que nous avions annoncées en 2008 [[3]] ont été acceptées et reprises entièrement par le Collège Français d’Acupuncture et de MTC, et surtout font partie intégrante des recommandations diffusées par la Haute Autorité de Santé (HAS) et diffusées à tous les médecins de France, qu’ils soient acupuncteurs ou pas [[4]]. De ce fait, il est inacceptable que ce praticien continue à utiliser des aiguilles « individuelles » qui ne sont pas à usage unique. L’on peut même s’interroger, du fait que les aiguilles semblent émoussées, si les aiguilles utilisées ne sont pas effectivement des aiguilles à usage unique réutilisées, ce qui va à l’encontre de toutes les recommandations. Je ne m’attarderai pas sur l’élimination de ces dispositifs piquants que ce praticien semble totalement ignorer ! 

          Les effets secondaires

          Les petits saignements et les hématomes peuvent se produire après acupuncture. On retrouve cela dans environ 3% des cas. Le risque est d’autant plus grand que l’on met beaucoup d’aiguilles. Cependant même si ces incidents sont souvent mineurs et toujours transitoires, il apparait qu’ils peuvent être source de désagréments importants pouvant nécessiter un arrêt de travail, surtout pour des personnes exerçant en contact avec le public. Le coût n’est pas négligeable pour la société. Encore un fois une simple information du patient avant tout acte médical paraît absolument nécessaire. 

          Problématique de l’acupuncture esthétique

          D’après une étude de 2005 [[5]], le comblement des rides représenterait de 30 à 50 % de l’activité esthétique des dermatologues français car le vieillissement semble être de moins en moins accepté dans notre société occidentale.

          D’ailleurs en naviguant sur Internet, on peut voir fleurir ici et là des annonces spectaculaires vous annonçant comment faire un lifting sans passer par la chirurgie ou par les injections de produits de comblement (collagène, acide hyaluronique etc..). Les réactions indésirables des produits dégradables, généralement dues à des mécanismes immunologiques, de type œdème, granulomes, nodules, sont souvent transitoires mais peuvent parfois persister quelques semaines. Par contre, les produits non dégradables, comme les hydrogels acryliques, alkylimide ou dimethylsiloxane, peuvent entrainer des granulomes définitifs.

          De fait, nombreux sont les patients qui se tournent vers l’acupuncture, réputée plus sûre.

          Ces actes sont réalisés par des acupuncteurs qui prétendent utiliser des aiguilles en or (en fait souvent juste « plaquées or ») ou de simples aiguilles en acier inoxydable comme dans ce cas et qui font payer très cher des actes controversés d’un point de vue efficacité.

          Pourquoi et sur quelles bases scientifiques reposent ces techniques ?

          On sait que l’acupuncture agit par l’intermédiaire de la mécanotransduction au niveau du tissu conjonctif [[6],[7]]. Puncturer des ridules voire des rides pourrait entraîner théoriquement une réaction du tissu conjonctif avec stimulation des fibroblastes engendrant une synthèse du collagène et des fibres élastiques. La microcirculation serait également activée.

          Cela provoque donc localement une vasodilatation avec une action trophique par augmentation du flux sanguin, et, également une action anti-inflammatoire et antalgique. L’acupuncture accélère par exemple de manière significative la régénération de la peau dans les brûlures de second degré par rapport au classique pansement hydrocolloïde chez la souris [[8]], mais aussi aide dans la cicatrisation de certaines plaies comme les escarres [[9]] ou les ulcères cutanés [[10]]. Par contre, l’efficacité sur une peau considérée saine n’est pas prouvée. En effet, les rides ne correspondent pas à une maladie au sens propre du terme. Il s’agit d’un processus physiologique plurifactoriel à la fois intrinsèque (ou chronologique génétiquement déterminé) et extrinsèque héliodermique, lié à l’action néfaste des rayons ultraviolets.

          Pourtant, une étude d’acupuncture expérimentale parue en  2008 [[11]] montre que l’acupuncture anti-âge entraînerait une augmentation de la teneur en hydroxyproline et du collagène soluble… Mais ceci ne concerne que la peau du rat et non celle de l’homme. Est ce suffisant pour transposer ces résultats obtenus chez l’animal à une possible efficacité chez l’homme ?

          Il est d’ailleurs bien malaisé de découvrir des études cliniques parues dans la littérature médicale scientifique internationale fournissant des preuves formelles.

          Tout au plus, retrouve-t-on  l’étude de Schnitzler et Adrien paru en 1991 dans la revue française de gynéco obstétrique [[12]]. Elle objective que l’électroacupuncture (et non l’acupuncture) montre des améliorations consistantes dans environ 70% des cas après dix à quinze séances et maintenues par des séances de rappel périodiques. Mais cette étude subjective est bien imparfaite d’un point de vue méthodologique et il est difficile de s’y fier surtout en ce qui concerne l’acupuncture manuelle. De plus les méthodes scientifiques d’exploration et d’évaluation de la surface cutanée à partir de l’analyse de l’anisotropie et d’information en 3D qui permettent de quantifier une ride et d’évaluer les effets réels d’un traitement antirides sont assez récentes.

          En conclusion, il apparait que le traitement antirides par acupuncture doit encore faire l’objet de recherche pour prouver sa réelle efficacité.

          Nous sommes donc toujours en attente d’un essai contrôlé randomisé (ECR) en double aveugle et contre placebo. Le problème, c’est que l’on risque d’attendre longtemps, car, jusqu’à présent le méta-registre d’essais cliniques contrôlés (mRCT) ne comporte aucun ECR de grande puissance sur ce sujet [[13]].

          Note : je remercie Madame I.S. d’avoir accepté de témoigner et d’avoir accepté la publication des photos.

          Références

          [1]. Rouxeville Y, Nguyen J. Information du patient et consentement éclairé en acupuncture. Acupuncture & Moxibustion. 2003;2(3):153-5.

          [2]. Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Available from :URL:http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=E2C6AF0F427389ECA418BB4307239596.tpdjo08v_3?cidTexte=JORFTEXT000000227015&idArticle=&dateTexte=20090604

          [3]. Stéphan JM et Nguyen J. 13 recommandations des bonnes pratiques médicales. Acupuncture & Moxibustion. 2008;7(1):49-51.

          [4]. HAS. Hygiène et prévention du risque infectieux en cabinet médical ou paramédical. France; Juin 2007. Available from : URL: http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_607182/hygiene-et-prevention-du-risque-infectieux-en-cabinet-medical-ou-paramedical.  

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          Acupuncture, psoriasis et insuffisance surrénalienne

          Bain recouvert de boue noire dans la Mer Morte – Jordanie
          Bain recouvert de boue noire dans la Mer Morte – Jordanie

          Résumé : Introduction. Le psoriasis est une maladie inflammatoire multifactorielle de la peau. Outre une prédisposition génétique, les facteurs psychologiques, tels que les chocs affectifs, stress, etc., interviennent par l’intermédiaire d’une sécrétion accrue de neuromédiateurs et d’hormones surrénaliennes, comme le cortisol.  L’objectif de ce travail est de savoir si l’acupuncture et techniques associées (électroacupuncture, moxibustion, neurostimulation électrique transcutanée appliquée aux points d’acupuncture (TEAS) peuvent améliorer la qualité de vie voire guérir les patients atteints de psoriasis sans entraîner d’effets indésirables comme une insuffisance surrénalienne. Cette étude fait suite à la plainte d’un patient traité pendant deux ans et qui se découvre une insuffisance surrénale concomitante à l’arrêt de l’acupuncture. Méthodes. A partir de ce cas clinique de psoriasis en gouttes étendu ayant bénéficié d’un traitement corticoïde à la fois sous forme topique que per os pendant vingt ans, la discussion établira un état des lieux des essais comparatifs randomisés (ECR) et des méta-analyses des traitements par acupuncture et techniques associées. L’acupuncture expérimentale est abordée également, permettant de mieux appréhender les mécanismes neurophysiologiques de l’action de l’acupuncture sur l’axe hypotalamo-hypophyso-surrénalien et la sécrétion de cortisol. Résultats. L’utilisation de l’acupuncture et techniques associées potentialise les effets du traitement usuel de dermocorticoïdes mais sans entraîner comme ceux-ci une éventuelle insuffisance surrénale souvent en rapport avec des doses et des durées de traitement non recommandées en pratique courante. Grâce à l’acupuncture, on observe dans la majorité des cas une diminution de la concentration plasmatique du cortisol au préalable élevée et qui sera, de ce fait, régulée de manière cybernétique. Conclusion. Selon les preuves issues des ECR et des études expérimentales, l’acupuncture et techniques associées doivent rejoindre le panel de soins du psoriasis et s’intégrer dans le cadre de la médecine intégrative. On ne peut que la recommander avec un grade C de faible niveau de preuve scientifique selon les recommandations de la Haute Autorité de Santé française (HAS). Mots clés : Acupuncture – Électroacupuncture – Dermatologie – Psoriasis – Insuffisance surrénalienne – Cortisol – Mécanismes neurophysiologiques – Axe hypotalamo-hypophyso-surrénalien.

          SummaryIntroduction. Psoriasis is a multifactorial inflammatory disease of the skin. In addition to a genetic predisposition, psychological factors, such as affective shocks, stress, etc., are mediated through increased secretion of neurotransmitters and adrenal hormones, such as cortisol. The objective of this work is to know whether acupuncture and related techniques (electroacupuncture, moxibustion, transcutaneous electrical neurostimulation applied to acupuncture points (TEAS) can improve the quality of life and even cure patients with psoriasis without causing adverse effects such as adrenal insufficiency. This study follows the complaint of a patient treated for two years and discovers adrenal insufficiency concomitant with the cessation of acupuncture. Methods: From this clinical case of extended-droplet psoriasis treated with topical corticosteroid treatment for 20 years, the discussion will establish an inventory of randomized controlled trials (RCTs) and meta-analyzes acupuncture treatments and associated techniques. Experimental acupuncture is also discussed, allowing better understanding of the neurophysiological mechanisms of the action of acupuncture on the hypotalamo-pituitary-adrenal axis and cortisol secretion. Results. The use of acupuncture and associated techniques potentiates the effects of the usual treatment of dermocorticoids but with no risk of potential side effect of adrenal insufficiency often related to doses and duration of treatment not recommended in current practice. By virtue of acupuncture, in the majority of cases, a reduction in the plasma concentration of the pre-high cortisol is observed and will, therefore, be regulated cybernetically. Conclusion. According to evidence from RCTs and experimental studies, acupuncture and associated techniques must join the psoriasis care panel and integrate within the framework of integrative medicine. One can only recommend it with a grade B scientific presumption of level 2 of evidence according to the recommendations of the High Authority of French Health (HAS). Keywords: Acupuncture – Electroacupuncture – Dermatology – Psoriasis – Adrenal insufficiency – Cortisol – Neurophysiological mechanisms – Hypotalamo-hypophyso-adrenal axis.

          Le psoriasis est une maladie inflammatoire chronique de la peau se manifestant par des plaques rouges présentant des squames. La maladie est le plus souvent bénigne, 20% des cas sont des formes sévères qui associent atteinte généralisée et/ou douleurs articulaires.

          Le psoriasis en plaques a pour lésion typique une plaque érythémato-squameuse. La taille des lésions est variable allant de lésions simples arrondies, nummulaires de un à plusieurs centimètres de diamètre (psoriasis en gouttes), à de véritables plaques étendues (psoriasis en plaques). Les lésions sont habituellement nombreuses dans le psoriasis en gouttes, alors que dans le psoriasis en plaques, on peut voir aussi bien une plaque isolée ou au contraire de multiples lésions étendues. Les zones les plus fréquemment atteintes sont les zones exposées aux frottements : coudes et bord externe de l’avant-bras, genoux, région lombo-sacrée, cuir chevelu et ongles. Ces lésions sont prurigineuses lors des poussées dans 20 à 30 % des cas.

          Rappels : facteurs étiologiques, physiopathologie et principes du traitement

           Facteurs étiologiques 

          Le psoriasis est une maladie inflammatoire multifactorielle de la peau qui touche environ 2% de la population française. Dans 30% des cas, il existe une prédisposition génétique qui correspond à des formes familiales. Plusieurs variants génétiques associés à la maladie sont très majoritairement situés au niveau de gènes impliqués dans l’immunité, codant le système Human Leukocyte Antigen (HLA), les lymphocytes T ou encore les interleukines 17 et 22 agissant dans l’inflammation de la peau. Ces variants sont nombreux et seule l’association de plusieurs d’entre eux est associée au psoriasis. Aucune mutation ne peut déclencher la maladie à elle seule. Ainsi, lorsque l’affection survient durant l’enfance, elle est fréquemment liée aux antigènes d’histocompatibilité HLA Cw6 et DR7. Ce terrain génétique augmenterait la sensibilité du système immunitaire, en abaissant le seuil de déclenchement de l’inflammation face à des facteurs d’environnement (stress, infection, frottements, traumatisme, des modifications climatiques, consommation d’alcool, tabac ou encore la prise de médicaments comme les sels de lithium, bêta-bloquants, inhibiteurs de l’enzyme de conversion, etc. Le rôle des facteurs psychologiques, tels que les chocs affectifs, les traumatismes affectifs est également bien connu. Les stress psychologiques agiraient par l’intermédiaire d’une sécrétion accrue de neuromédiateurs et d’hormones surrénaliennes, comme le cortisol. 

          Physiopathologie 

          Un dérèglement immunitaire, entraînant une inflammation chronique et exagérée de la peau et une surproduction de kératinocytes est à l’origine de la maladie. Des cellules immunitaires (lymphocytes T activés et polynucléaires neutrophiles) se retrouvent dans la peau et y produisent des molécules inflammatoires (cytokines Il-17, Il-22, TNF-alpha qui agit sur la synthèse de l’IL-8, et autres substances). Ces dernières stimulent la prolifération des kératinocytes. Le délai de renouvellement de ces cellules, normalement de trois semaines, passe alors à trois jours. Il en résulte une accumulation des kératinocytes immatures à la surface de la peau, augmentant l’épaisseur de la couche externe engendrant l’hyperkératose. 

          Principes du traitement 

          Tous les traitements ont pour seul objectif de réduire les symptômes et d’améliorer la qualité de vie du malade. Aucune thérapeutique n’est à l’heure actuelle capable d’engendrer une guérison complète du psoriasis.

          Les médicaments de première intention sont des pommades anti-inflammatoires, les dermocorticoïdes (bétaméthasone, clobétasol, fluticasone, hydrocortisone, etc.) ou les analogues de la vitamine D (calcipotriol, tacalcitol, calcitriol). Les kératolytiques (acide salicylique à la concentration de 2 à 5 % dans un excipient gras, urée à 10 ou 20 %) sont utiles dans les lésions très kératosiques ; des dérivés de la vitamine A (tazarotène) sont efficaces mais ont un effet irritatif important. Les bains et les émollients permettent également de décaper les lésions.

          Quand le psoriasis est étendu au-delà de 20 à 30% de la surface corporelle, un traitement par voie orale (acitrétine – analogue aromatique de synthèse de l’acide rétinoïque, méthotrexate, ciclosporine…) ou par exposition aux ultraviolets sous contrôle dermatologique (puvathérapie) est indiqué, avec une efficacité d’environ 50%.

          Si le psoriasis résiste à au moins deux de ces traitements, le dernier recours est la biothérapie qui offre le plus souvent des résultats remarquables sur les psoriasis résistants et les rhumatismes psoriasiques. Elle consiste en l’injection d’anticorps monoclonaux, les anti-TNF (étanercept, infliximab, adalimunab, golimumab, certolizumab pegol) qui ciblent spécifiquement un médiateur de l’inflammation (TNF-alpha). Avec ces traitements, plus de deux tiers des patients obtiennent la rémission de plus de 75% de leurs symptômes.

          Les traitements disponibles peuvent être améliorés, notamment en ce qui concerne leur efficacité chez certains patients, et leur sécurité. Ainsi, les biothérapies ne sont pas dénuées d’effets indésirables, avec notamment un risque infectieux en raison de la dépression du système immunitaire qu’elles induisent. En outre, en cas d’arrêt, le psoriasis revient en général après quelques semaines.

          Deux inhibiteurs des interleukines peuvent être aussi utilisés dans le psoriasis résistant : un anticorps monoclonal anti Il-17 (secukinumab) et un anticorps monoclonal anti Il-12 et IL-23 (ustékinumab). Autre médicament d’exception, l’immunosuppresseur (apremilast) qui inhibe l’enzyme phosphodiestérase-4 nécessaire au bon fonctionnement des lymphocytes T est en attente d’évaluation à long terme [1-4]. Quoi qu’il en soit, tous ces traitements généraux, utilisés exceptionnellement, doivent faire l’objet d’une surveillance particulière.

          Cas clinique

          Un médecin a traité par acupuncture pendant deux ans un patient présentant un psoriasis en gouttes étendu. La première consultation survient après une longue période de vingt ans de corticothérapie percutanée et orale.  Le patient âgé de 41 ans, aux antécédents d’intoxication alcoolo-tabagique sevré depuis 2005, 1m70, 66 kg (indice de masse corporelle : 22,8) se plaint également de troubles de l’humeur.

          Dans les mois précédents cette première consultation, le patient avait été victime d’un accident de la voie publique justifiant six mois d’arrêt de travail en raison d’une fracture du bras nécessitant une intervention chirurgicale suivie d’une complication infectieuse à staphylocoque. Cet accident avait élevé considérablement son niveau de stress et aggravé l’étendue de son psoriasis.

          Seule une élévation de son taux de cholestérol et triglycérides avait été signalée par le patient comme justifiant pour lui son recours à l’acupuncture. Dès le début du traitement, il avait présenté des signes d’hypercorticisme non spécifiques qui nécessitaient par ailleurs, d’être suivi régulièrement par un médecin généraliste, un dermatologue, un phlébologue et un psychiatre.

          Sur la base de ce tableau clinique, le patient avait été traité par acupuncture dans le but de réduire essentiellement son stress et d’agir sur le psoriasis avec une fréquence d’une séance en moyenne par quinzaine au début du traitement, puis, une par semaine, fréquence adaptée en fonction de l’évolution du psoriasis et des ressentis tels que sueurs, sensation de chaleur, nervosité, etc.

          Le traitement a consisté à harmoniser généralement le couple Foie, Vésicule Biliaire, calmer le shen et réguler le Poumon. Le traitement le plus couramment appliqué : VB24 (rihu), RM14 (juque), DM24 (shenting), V2 (zanzhu), P5 (chize), P9 (taiyuan).

          Les examens biologiques effectués une dizaine de jours après l’interruption des séances d’acupuncture avaient mis en évidence une insuffisance surrénale corticotrope documentée par une concentration plasmatique diminuée du cortisol et de l’ACTH, le tout associé à de l’ostéoporose.

          Problème médico-légal car le patient étant persuadé que l’acupuncture réalisée avait entraîné son insuffisance surrénale, a déposé plainte auprès du Procureur de la République. Confondant aiguilles d’acupuncture et aiguilles sous-cutanées, il soutient que le médecin acupuncteur lui aurait injecté des corticoïdes en lieu et place des séances d’acupuncture. Il se fonde notamment sur la présence de nodules sous cutanés et d’hématomes apparus approximativement autour des points d’implantations des aiguilles d’acupuncture, de pétéchies, de rougeurs sur le visage ; et sur le fait de l’amélioration rapide et notable (mais au terme d’un trimestre) pendant plusieurs mois de son psoriasis que l’acupuncture, selon lui, ne pourrait expliquer à elle-seule. Il se plaint également d’un état de dépendance aux séances d’acupuncture et d’un dysfonctionnement érectile consécutif, toujours selon lui, au traitement acupunctural.

          Ce qui pose la problématique suivante :

          – peut-on affirmer que l’acupuncture apporte une amélioration notable des signes physiques du psoriasis, notamment en diminuant le niveau de stress ?

          – peut-on expliquer que l’action de l’acupuncture sur le stress et par voie de conséquence sur la sécrétion du cortisol (inhibition voire activation de l’axe hypotalamo-hypophyso-surrénalien) puisse entraîner un épuisement des glandes surrénales. L’insuffisance surrénale révélée postérieurement aux séances d’acupuncture (mais malheureusement, aucun bilan biologique n’a été réalisé antérieurement), viendrait ainsi s’ajouter à vingt années de corticothérapie ?

          En résumé, l’acupuncture a-t-elle pu masquer, voire stabiliser ou accentuer un dysfonctionnement préalable au traitement acupunctural ?

           Les preuves de l’efficacité de l’acupuncture

          Le premier essai comparatif randomisé (ECR) a été réalisé par l’équipe du Suédois Jerner en 1997 [[5]]. Cinquante-six patients souffrant de longue date de psoriasis en plaques ont été randomisés pour bénéficier deux fois par semaine pendant dix semaines soit d’un traitement actif selon les principes de la médecine traditionnelle chinoise par électroacupuncture (EA à une fréquence de 10-20 Hz pendant 20mn ; n=35) associé à un traitement d’auriculothérapie, soit d’un traitement sans EA, placebo par puncture des points situés à 1cm des points classiques. La sévérité des lésions de la peau a été notée par le score Psoriasis Area and Severity Index (PASI) [[6],[7]] avant, pendant et trois mois après la thérapie. Après dix semaines de traitement, la valeur moyenne du PASI avait diminué de 9,6 à 8,3 dans le groupe «actif» et 9,2 à 6,9 dans le groupe placebo (statistiquement significatif avec p <0,05 dans les deux groupes). Mais ces effets sont inférieurs à l’effet placebo, habituellement d’environ 30%. Pas de différence statistiquement significative entre les résultats des deux groupes au cours et au bout des trois mois de thérapie. Les auteurs concluaient que l’EA n’était donc pas supérieure à l’acupuncture placebo dans le traitement du psoriasis et qu’en tout état de cause aucun des deux traitements n’engendrait une amélioration du PASI supérieure aux 30% habituellement admis par l’effet placebo [[8]].

          En 2009, Naldi et al. [[9]], à partir d’une revue systématique de toutes études concernant le traitement du psoriasis confirmaient en ré-analysant l’ECR de Jerner, que l’EA n’était pas plus efficace que l’acupuncture placebo. Mais on peut se poser la question de savoir si c’est bien de l’acupuncture placebo [[10]]. Par ailleurs, on sait que depuis les travaux de Linde et coll. que la différenciation entre effet spécifique de l’acupuncture et effet non-spécifique (placebo) nécessite le recrutement de huit-cents sujets par ECR en double bras pour une puissance de 80% et ceci afin d’obtenir une différence moyenne standardisée (SMD) de 0,2 pour un effet spécifique [[11]]. Cela suggère de ce fait que tous les ECR qui actuellement comparent l’acupuncture véritable à l’acupuncture factice sont tous de petite puissance. Cela peut expliquer aussi pourquoi certains ECR peuvent montrer une acupuncture factice aussi efficace que l’acupuncture véritable voire plus efficace. Quoi qu’il en soit dans cet ECR, ni l’acupuncture réelle, ni celle placebo ne dépasse les 30% d’efficacité.

          Par contre, Wu et al. en 2011démontrent dans leur ECR chinois que l’acupuncture associée à la moxibustion est plus efficace que l’acitrétine (20 mg / jour pendant douze semaines). Soixante cas de psoriasis étaient ainsi randomisés dans un groupe acitrétine (A, n=30) et un groupe acu-moxibustion (A-M, n=30). Les principaux points utilisés étaient feishu (V13), geshu (V17), gansu (V18), pishu (V20) et shenshu (V23), combinés avec hegu (GI4), weizhong (V40), etc. en fonction de la partie du corps affectée. La moxibustion a été appliquée sur le shenshu (V23) et sur les zones lésées de la peau pendant environ 3 min à chaque fois. Ce traitement a été réalisé une fois tous les deux jours en continu pendant douze semaines. L’effet thérapeutique a été évalué par le score PASI. Après le traitement, les scores du PASI dans les deux groupes étaient diminués de manière significative (p <0,01) mais PASI significativement inférieur dans le groupe AM par rapport au groupe A (p<0,05) [[12]].

          De ce fait, il est difficile d’évaluer l’efficacité des traitements d’acupuncture dans le traitement du psoriasis. Coyle et al. en 2015 [[13]] ont essayé de réaliser une méta-analyse à partir des ECR retrouvés jusqu’en mai 2013 dans les bases de données internationales (PubMed, Embase, Library Cochrane, China National Knowledge Infrastructure CNKI, Wanfang, etc.). Six études (n=522) ont été incluses. Mais, en raison de la diversité des interventions, des comparateurs et des critères de jugements PASI ou pas, la méta-analyse n’a pas été possible. Il existe néanmoins certaines preuves de l’intérêt de l’acupuncture-moxibustion et techniques associées dans le psoriasis. Cependant, les conclusions sont limitées par les deux seuls essais inclus qui concernaient l’acupuncture-moxibustion ou EA [5,12], les autres études traitaient par ventouses, saignées, champs magnétiques ou phytothérapie appliquée sur point d’acupuncture [14-16].

          Ainsi un autre ECR de Li et al. publié en 2014 montre l’efficacité dans le psoriasis en rapport avec une stase de Sang selon la différenciation des syndromes bianzheng. Il s’agit d’un ECR (n=56) à quatre bras (n=14) utilisant une thérapie combinant acupuncture appliquée sur dazhui (VG14), feishu (V13), gansu (V18) et geshu (V17), saignée auriculaire, phytothérapie chinoise et techniques de puncture auriculaire. Cet ECR a montré que l’indice de sévérité (PASI) avant et après le traitement est diminué dans chaque groupe traité (p<0,05) versus groupe témoin. Cette diminution est plus importante dans le groupe thérapeutique combinant saignée auriculaire, phytothérapie et acupuncture [[17]]. Encore une fois, les méthodes utilisées sont trop hétérogènes pour être appliquées de manière pragmatique.


           Discussion

          Nous sommes toujours en attente de plusieurs ECR de grande qualité méthodologique, de grande puissance respectant les normes STRICTA qui s’appliquent aux ECR d’acupuncture, extension de la norme CONSORT [[18]], de façon à réaliser une méta-analyse réellement applicable à l’acupuncture comme le préconisent Wang et al. afin d’évaluer l’efficacité et la sécurité de l’acupuncture dans le psoriasis [[19]].

          Néanmoins, comme le laisse entendre cet auteur croate qui objective une spectaculaire amélioration du psoriasis par acupuncture, il serait regrettable de priver les malades de cette possibilité de traitement [[20]]. Même efficacité aussi dans ce cas clinique s’intéressant essentiellement à traiter les Âmes Viscérales (shen) qui permettent d’inhiber le stress et par voie de conséquence le cortisol [[21]]. Mais si efficacité il y a, il est aussi nécessaire d’évaluer les possibles effets indésirables.

          On peut également affirmer que l’acupuncture apporte une amélioration des signes physiques du psoriasis, indépendamment du niveau de stress, même si cela y contribue comme on peut le comprendre par les mécanismes étiologiques et par l’acupuncture expérimentale.


          Acupuncture expérimentale concernant la modulation du cortisol chez l’animal et chez l’homme

          L’acupuncture peut s’assimiler à une action cybernétique permettant à l’organisme humain de maintenir son homéostasie par des mécanismes d’autorégulation et de rétrocontrôle engendrés par la puncture des points. Ainsi, ces mécanismes par des processus de feedback négatif ou positif visent à empêcher une dérive hors de la norme. De ce fait, en fonction de la pathologie, le point d’acupuncture stimulé pourra engendrer diverses réponses. Le psoriasis est lié à un dérèglement immunitaire entrainant une inflammation chronique et dont les dermocorticoïdes sont utilisés en première intention. Le stress et les facteurs psychologiques ont un rôle de premier plan.  Au cours du stress, on sait que le taux de cortisol sérique augmente significativement ainsi que paradoxalement de nombreuses cytokines pro-inflammatoires (IL-1b , IL-6…). Or, à partir des modèles d’animaux stressés, les travaux d’acupuncture expérimentale ont objectivé en général une diminution du cortisol grâce à l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien et adrénergique (HPS) [[22]].

          Il est possible aussi d’observer en fonction de la forme du stress une action de l’acupuncture sur le système immunitaire en diminuant par exemple l’activité de l’IL-1b, mais aussi en augmentant l’interleukine 2, généralement diminuée en cas de stress. L’IL-2 joue un rôle important dans la régulation du système immunitaire en assurant la stimulation générale de l’immunité cellulaire [[23]]. On peut alors se poser la question de savoir dans quelle mesure l’acupuncture et les techniques associées qui diminuent la production endogène et naturelle du cortisol à action anti-inflammatoire chez l’homme en cas de stress, pourraient déclencher un effet iatrogène, du style insuffisance surrénale associée à l’ostéoporose.

          Effectivement, le cortisol est un glucocorticoïde endogène produit dans la glande surrénale dans des conditions physiologiques de stress. Il est nécessaire à la fonction cellulaire normale, y compris la fonction immunitaire, le métabolisme et le tonus vasculaire. Sa production est régulée par l’hypothalamus. Les sources exogènes de corticostéroïdes peuvent affecter la régulation de l’axe HPS en inhibant les voies en amont impliquées dans la production de cortisol (figure 1). Quid des sources endogènes ?

          Figure 1. L’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien et régulation des corticostéroïdes pouvant entraîner un freinage corticotrope d’autant plus important que la corticothérapie est à forte dose et/ou prolongée dans le temps.

          Chez l’homme, les études ont objectivé trois effets de l’acupuncture sur la sécrétion de cortisol, et cela en fonction des différentes conditions ou stress pathologiques. 

          L’acupuncture augmente le cortisol

           Hypnotique pur à brève durée d’action, l’étomidate peut être utilisé comme agent inducteur de l’anesthésie générale ou hypnotique unique pour des interventions peu douloureuses de courte durée nécessitant un réveil rapide. Aux doses d’induction, l’étomidate a été associé à un abaissement des concentrations plasmatiques de cortisol et d’aldostérone ne répondant pas à l’injection de l’adrénocorticotrophine (ACTH). Chez les patients soumis à un stress important, particulièrement en cas de dysfonctionnement corticosurrénalien, une supplémentation en cortisol doit être discutée. Une stimulation de la glande surrénale n’est pas utile. Un ECR a permis de montrer que l’EA (fréquence basse en alternance 18/3,85 Hz) sur zusanli (ES36) et sanyinjiao (Rt6) peut atténuer l’inhibition corticale-surrénale induite par l’étomidate et peut réduire aussi la sécrétion de catécholamines pendant la chirurgie. Quatre groupes (n=20 chacun) ont été étudiés : groupe étomidate (ETO), groupe étomidate + électroacupuncture (ETO+EA), groupe étomidate + acupuncture simulée (ETO+SEA) et le groupe propofol (PRO), anesthésique n’inhibant pas la synthèse des hormones cortico-surrénaliennes). On a mesuré les concentrations de cortisol plasmatique avant induction de l’anesthésie (T0), 2 heures après le début de la chirurgie (T1), à la fin de l’intervention chirurgicale (T2) et 2h après l’opération (T3). Ainsi, les concentrations de cortisol étaient significativement plus élevées en tout temps sauf au temps T0 dans le groupe ETO+EA versus groupe ETO (figure 2) [[24]]. Cet ECR confirme ce que l’on avait observé dans des études antérieures qui avaient objectivé une augmentation de la concentration de l’hormone corticotrope (adrénocorticotrope, ACTH) chez l’homme [[25]], chez le rat [[26]] et des niveaux de glucocorticoïdes dans d’autres études d’acupuncture expérimentale chez les rats [[27],[28]]. Bref, tout cela suggère que l’EA peut activer les glandes surrénales pour augmenter la sécrétion de glucocorticoïdes, conduisant à la suppression des réponses inflammatoires.

          Figure 2. Comparaison des concentrations de cortisol entre les quatre groupes. Les concentrations de cortisol ont augmenté de façon significative en T1, T2 et T3 par rapport aux valeurs de base dans le groupe PRO (^ p<0,001). Au contraire, il a été significativement diminué aux temps T1, T2 et T3 par rapport aux valeurs de base dans le groupe ETO et ETO+SEA (* p<0,01, ^ p<0,001). Notons cependant que les concentrations de cortisol ont seulement diminué au T3 dans le groupe ETO+EA (a p<0,01). En comparaison avec le groupe PRO, les concentrations de cortisol ont diminué de façon significative, à tout moment, sauf T0 dans le groupe ETO, ETO + EA et ETO+SEA (# p <0,001). Néanmoins, par rapport au groupe ETO, les concentrations de cortisol ont augmenté significativement à tout moment, sauf T0 dans le groupe ETO+EA (b p<0,05, c p<0,001). Figure adaptée et traduite selon « Creative Commons Attribution » et issue de [24].

          Magarelli et al. ont étudié les variations dans le sérum du cortisol et de la prolactine associées aux séances d’acupuncture chez les femmes bénéficiant d’un traitement d’hyperstimulation ovarienne en vue d’un transfert d’embryon lors d’une fécondation in vitro (FIV). Les taux de cortisol dans le groupe acupuncture étaient significativement (p<0,05) plus élevés lors des jours de traitement comparativement au groupe témoin. Idem pour les taux de prolactine (p<0,034). Et pourtant les auteurs s’attentaient à une diminution de la concentration du cortisol chez ces femmes que l’on pourrait croire anxieuses. Quoi qu’il en soit il apparaît que l’acupuncture a un effet bénéfique sur la régulation du cortisol et de la prolactine permettant une meilleure efficacité de la FIV [[29]].

          L’acupuncture diminue le cortisol

          L’étude pilote randomisée en simple insu de Painovich et al. (n=33) a permis d’étudier l’efficacité de l’acupuncture traditionnelle dans les troubles vasomoteurs des femmes en ménopause ou périménopause, avec mesures plasmatiques du cortisol urinaire des 24h et de ses métabolites, de la déhydroépiandrostérone (DHEA) et un test de stimulation de l’ACTH. Le traitement a été donné trois fois par semaine pendant une période de douze semaines. Outre le fait de réduire les bouffées vasomotrices versus groupe acupuncture et groupe témoin (p=0,04), les auteurs observent une action sur l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien avec diminution du cortisol et de ses métabolites (tableau I) [[30]].

          Tableau I. Mesures plasmatiques du cortisol urinaire des 24h et de ses métabolites, de la déhydroépiandrostérone (DHEA) Toutes les données sont présentées sous forme de moyenne ± écart-type ; DHEA = sulfate de déhydroépiandrostérone ; Androgènes surrénales = étiocholanolone + androstérone ; a valeur de P pour le test de Kruskal-Wallis. Adapté et traduit selon « Creative Commons Attribution » et issue de [30].  

           Acupuncture traditionnelle (n=12)Acupuncture placebo (n=12)Groupe témoin (n=9)P valuea
          Entrée dans l’étude
          DHEA47.7 ± 38.7104.0 ± 127.1265.7 ± 551.80.41
          F (Cortisol)40.8 ± 17.450.4 ± 32.539.7 ± 16.00.90
          Total F métabolites4,907.3 ± 2128.16,923.5 ± 3687.16,507.4 ± 4952.90.35
          Androgènes surrénales972.5 ± 626.01,543.7 ± 1,508.41,524.4 ± 1,120.10.41
          Sortie d’étude
           DHEA41.4 ± 27.4161.2 ± 222.7252.4 ± 385.40.04
           F (Cortisol)37.3 ± 16.766.2 ± 56.330.4 ± 11.30.05
           Total F métabolites4,658.9 ± 1,670.97,735.8 ± 3,747.95,166.0 ± 2,234.50.03
          Androgènes surrénales888.1 ± 614.61,506.1 ± 766.61,219.0 ± 684.30.09

          Dans la constipation fonctionnelle qui affecte la qualité de vie, l’électroacupuncture à basse et haute fréquence sur quchi (GI11) et shangjuxu (ES37) durant seize séances réparties sur quatre semaines engendre de manière statistiquement significative (respectivement p<0,01 et 0,05) une diminution de la concentration plasmatique en cortisol par rapport à la ligne de base. Par ailleurs, on objective une amélioration de la fréquence des selles, une diminution à la fois de l’anxiété et de la dépression alors que dans le groupe témoin traité par citrate de mosapride (agoniste des récepteurs 5-HT4 à la sérotonine), la concentration en cortisol augmente significativement (p<0,05) [[31]].

          Dans les arthralgies du rachis, Bragin et al. ont montré que l’EA à basse fréquence réduisaient les concentrations plasmatiques du cortisol et de l’aldostérone s’accompagnant d’un effet antalgique [[32]].

          De même, dans les gonalgies arthrosiques chroniques, Ahsin et coll. ont comparé les effets de l’EA (3Hz) appliquée tous les jours pendant dix jours [[33]]. Ils ont constaté une amélioration significative des algies à l’index WOMAC (Western Ontario Mc master universities index for osteoarthritis knee)[a] et sur l’échelle visuelle analogique (p=0,001), mais aussi une augmentation significative de la β-endorphine plasmatique (p=0,001) et une baisse significative du cortisol plasmatique (p=0,016). Dans cet ECR (n=84) avec stimulation des points locaux et à distance liangqiu (ES34), dubai (ES35), zusanli (ES36), ququan (F8), xuehai (Rt10), neiting (ES44), la concentration de cortisol plasmatique a été significativement réduite dans le groupe d’électroacupuncture alors que dans le groupe témoin, elle était augmentée. Les auteurs expliquaient cet effet par l’hypothèse que la baisse était plutôt le reflet d’une réduction du stress de la douleur et qu’il ne pouvait pas avoir dans ce cas une augmentation du cortisol, agent anti-inflammatoire. Dans le groupe placebo, l’augmentation du cortisol plasmatique après dix jours de traitement pourrait être liée à l’action du stress en raison d’une inefficacité du traitement.

          L’ECR de Wu et al. (n=40) a étudié l’effet de la neurostimulation électrique transcutanée appliquée aux points d’acupuncture (TEAS = transcutaneous electrical acupoint stimulation) sur le stress chez des patients ayant été perfusés par propofol lors d’une chirurgie cérébrale. On sait que le propofol n’engendre aucune interaction avec le cortisol. Les auteurs constatent que le TEAS réduit le stress de manière significative versus groupe témoin en stabilisant l’amplitude de la variation de la concentration en cortisol à 60 mn après l’incision céphalique par comparaison au début de la chirurgie (p<0,05), mais aussi de la fréquence cardiaque, de la pression artérielle et de la concentration en adrénaline [[34]].

          De nombreux autres ECR ont démontré une diminution de la concentration du cortisol. Ainsi au cours du stress de l’anesthésie [[35]] ; immédiatement après le transfert d’embryon dans un ECR en double aveugle (n=226) [[36]], ou 25 mn avant et 25 mn après le transfert de l’embryon dans un ECR également en double aveugle (n=370) [[37]] (mais dans ces deux ECR, on ne retrouve pas de différence significative entre les deux groupes acupuncture et placebo) ; dans l’état dépressif traité par EA (80/100 Hz) sur baihui (VG20) et yintang, action statistiquement significative (p<0,01) [[38]]. Dans le syndrome du côlon irritable, l’ECR de Schneider et coll. réalisé en 2007 avec utilisation des aiguilles placebo de type Streitberger montre outre l’amélioration de la qualité de vie, une diminution statiquement significative (p=0,005) du cortisol salivaire [[39]]. Même diminution du cortisol salivaire lors de la stimulation du GI4 (hegu), ES36, ES6 (jiache), P6 (kongzui) quatre heures avant l’épreuve chez des footballeuses professionnelles durant la période de compétition [[40]]. L’acupuncture, en préopératoire va réduire les douleurs post-opératoires (p<0,05) tout en réduisant la concentration en cortisone plasmatique entre 30 et 50% dans le groupe acupuncture (p<0,01) [[41]].

          L’acupuncture n’objective aucune variation

          Mesurés avant, pendant et après stimulation du GI4 et Rt6 (sanyinjiao), points sélectionnés en vue de diminuer les douleurs et la durée du travail chez la femme enceinte, les concentrations en cortisol ne varient pas [[42]] alors que ce paramètre est habituellement augmenté lors du travail en raison du stress [[43]]. A la maternité de Kayseri en Turquie, Mucuk et al. ont également étudié la variation de la concentration de l’ACTH et du cortisol plasmatique dans un groupe traité par TEAS (5/10 Hz ; 20 mn) sur le GI4 (hegu) versus groupe témoin sans traitement d’EA. Ils ont objectivé une diminution de ces deux concentrations, mais diminution non statistiquement significative [[44]].

          Même chose, pas de variation du cortisol salivaire après acupuncture dans un ECR (n=151) évaluant son efficacité sur le système nerveux autonome par mesure de la variabilité de la fréquence cardiaque chez des patients coronariens [[45]]. L’EA (2Hz) appliquée chez des patients facilite l’anesthésie sous sevoflurane dans cet ECR (n=55) versus groupe témoin. On retrouve une augmentation statistiquement significative (p<0,05) de l’adrénaline, possible reflet de l’activation sympathique mais pas de changement du taux de cortisol [[46]]. D’autres ECR en fonction de diverses pathologies ne montrent pas de variation du taux de cortisol : dans le stress émotionnel lié à une dysphonie phono-traumatique chez la femme [[47]], lors d’une analgésie electroacupuncturale en vue d’une colononoscopie [[48]], mais aussi tout simplement chez le sujet sain par puncture de ES36, GI11, Rt10 et VG14 [[49]].


          Discussion

          Il ressort de tous ces ECR que l’organisme humain en réponse à l’acupuncture et techniques associées offre une variabilité et une modulation très importante de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien. En général, les études cliniques sur l’homme autant que sur l’animal montrent la plupart du temps une diminution statistiquement significative de la sécrétion du cortisol en cas de stress, même en cas d’algies où une augmentation du cortisol pourrait engendrer un effet antalgique par son action anti-inflammatoire [33]. Nous l’avons vu, le stress est partie intégrante du psoriasis, mais le traitement acupunctural n’intervient pas systématiquement dessus. Et la diminution du cortisol que l’on peut observer n’est pas toujours au rendez-vous, comme l’attestent de nombreux ECR où l’acupuncture est utilisée pour limiter le stress et l’anxiété [24,29,44,45,46, 47,48].

          Quoi qu’il en soit, aucune étude n’a démontré un quelconque épuisement des glandes surrénales. Il faut remarquer toutefois que l’ECR le plus long a duré trois mois [30] mais à raison de trois séances par semaine, ce qui correspondrait entre neuf mois à dix-huit mois de traitement en France (il est habituel de faire une séance par semaine pendant trois à quatre semaines puis d’espacer à deux puis quatre semaines d’intervalle.

          En conclusion dans le cas préalablement décrit, il serait plus judicieux de s’orienter vers les effets iatrogènes liés à la corticothérapie orale ou cutanée pour expliquer l’épuisement des glandes surrénales dans ce cas clinique.


           Les effets iatrogènes de la corticothérapie orale ou cutanée

          Le cortisol est un glucocorticoïde endogène produit dans la glande surrénale dans des conditions physiologiques de stress (comme par exemple une infection, une lésion tissulaire). Sa production est régulée par l’axe hypothalamo-hypophysaire-surrénalien (HPS). Les sources exogènes de corticostéroïdes peuvent affecter la régulation de l’axe HPS en inhibant les voies en amont impliquées dans la production de cortisol (voir figure 1).

          Comme le psoriasis est une maladie chronique, les dermocorticoïdes (DC) sont habituellement utilisés pendant de longues périodes de temps, souvent au-delà des recommandations contenues dans l’information sur la prescription. Leur utilisation en usage chronique peut entraîner des effets secondaires similaires à ceux des corticostéroïdes systémiques tels que troubles endocriniens et métaboliques (syndrome de Cushing iatrogène, inertie de la sécrétion d’ACTH, atrophie cortico-surrénalienne parfois définitive, diminution de la tolérance au glucose, révélation d’un diabète latent). On pourra aussi retrouver des troubles musculo-squelettiques (atrophie musculaire, ostéoporose, fractures pathologiques, en particulier tassements vertébraux, ostéonécrose aseptique des têtes fémorales), mais aussi des troubles digestifs, des troubles cutanés (atrophie cutanée, acné, purpura, ecchymose, hypertrichose, retard de cicatrisation), des troubles neuropsychiques (euphorie, insomnie, excitation mais aussi plus rarement : accès d’allure maniaque, états confusionnels et état dépressif à l’arrêt du traitement), troubles oculaires (glaucome et cataracte). Enfin on n’oubliera pas tous les désordres hydro-électrolytiques tels que l’hypokaliémie, rétention hydrosodée, hypertension artérielle, etc. Bref, tous ces effets secondaires sont bien connus et très bien documentés [[50]].

          Les patients utilisant les DC ne sont pas systématiquement dépistés en ce qui concerne l’insuffisance surrénalienne. Cependant, des études ont démontré que cette insuffisance peut se produire dès la première semaine suivant l’utilisation du DC. 19% des sujets utilisant un DC de très grande puissance sur plus de 20% de la surface corporelle peuvent déclencher ce déficit de l’axe HPS. La méthode la plus courante pour diagnostiquer la déplétion surrénalienne est le test de stimulation à la cosyntropine (hormone corticotrope synthétique). La suppression surrénalienne est confirmée si le niveau de cortisol post-ACTH synthétique est inférieur à 18 mcg/dL. Lam et al. ont ainsi démontré par une étude rétrospective chez les sujets atteints de psoriasis modéré à sévère affectant 16 à 20% de la surface corporelle totale (SCT) que l’utilisation d’un DC de forte puissance avaient un niveau plus bas de cortisol post-cosyntropine 18,83 mcg/dL) que ceux ayant un psoriasis modéré impliquant 10 à 15% de la SCT totale et utilisant un DC de puissance inférieure au criblage (p=0,03).  Néanmoins, les deux groupes de sujets présentaient des niveaux inférieurs de cortisol post-cosyntropine par rapport aux adultes sains normaux (P <0,001 pour les deux). Les auteurs concluaient à la vigilance concernant l’utilisation chronique de ces topiques [[51]].

          Une revue systématique de Castella et al. réalisée entre 1980 et janvier 2011 a eu pour but d’évaluer le risque de déplétion de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HPS) et le risque d’atrophie cutanée par des dermocorticostéroïdes dans le traitement du psoriasis en plaques. Au total, 1269 références ont été trouvées, dont vingt-deux ECR ont été sélectionnés. L’effet sur l’axe HPS a été évalué par le taux de cortisol matin (11 études), les stéroïdes urinaires de 24 heures (cinq études) et/ou par le test à la corticostimuline de synthèse (synacthène®) dans trois études. La réduction du cortisol du matin a été observée chez 0-25% des patients dans dix études à court terme (deux dans le psoriasis du cuir chevelu, huit dans le psoriasis de corps) et dans 48% des patients dans des ECR avec traitement à court terme sur le psoriasis en plaques sur le corps. Seulement quatre de ces ECR ont évalué l’effet du traitement à long terme (durée de traitement de 6 mois ou plus) et n’ont pas identifié d’insuffisance de l’HPS au niveau de cortisol. Les auteurs démontraient qu’il n’y avait aucune preuve d’une déplétion cliniquement significative de l’axe de l’HPS due aux dermocorticostéroïdes et que l’analyse de la littérature dans le psoriasis était rassurante. Ils soulignaient néanmoins que la majorité des études étaient à court terme, d’où selon eux, la difficulté à conclure et la nécessité des études sur le long terme. On peut rajouter à cela qu’il existe un conflit d’intérêt majeur car tous les auteurs ont bénéficié d’honoraires de consultant réglés par les plus grands laboratoires pharmaceutiques de dermocorticoïdes [[52]].

          Une autre revue plus récente de Levin et al. en 2014, n’objective pas d’insuffisance surrénale dans quinze des seize essais cliniques concernant la prise de topiques corticoïdes pour maladie cutanée. Dans l’unique ECR qui a rapporté une insuffisance surrénale, les patients avaient utilisé deux fois la quantité maximale recommandée de propionate de clobétasol en continu durant plus de dix-huit mois. Les auteurs concluaient néanmoins que si une insuffisance surrénale se produit, les dermocorticostéroïdes sont peu susceptibles d’être associés à des signes ou des symptômes de la suppression d’axe HPS cliniques s’ils sont utilisés dans le cadre des directives de sécurité en vigueur [[53]].

          Conclusion

          Dans le cas clinique relaté, il est plus qu’invraisemblable que le traitement durant une période de deux ans par acupuncture puisse engendrer une déplétion de cortisol suffisante pour entraîner une insuffisance surrénalienne au contraire de l’application chronique de dermocorticoïdes et de corticoïdes per os pendant vingt années. De manière plus générale, les personnes atteintes de psoriasis se doivent de bénéficier d’un traitement de médecine intégrative associant l’acupuncture à des doses moindres de thérapeutiques conventionnelles agressives susceptibles d’engendrer des effets iatrogènes secondaires en cas d’utilisation à fortes doses ou à utilisation prolongée. L’acupuncture réalisée dans les règles de l’art est sûre et sans effets secondaires. Elle améliorera à la fois la qualité de vie en diminuant l’état de stress mais aussi aura une activité spécifique sur l’inflammation du fait de son action cybernétique. On ne peut que la recommander avec un grade C de faible niveau de preuve scientifique selon les recommandations de la Haute Autorité de Santé française (HAS) [[54] ] en attendant d’avoir un ECR de très grande qualité méthodologique.  


          Notes

          [a] . American College of Rheumatology. Western Ontario and McMaster Universities Osteoarthritis Index (WOMAC). À consulter sur le site :  http://www.rheumatology.org/I-Am-A/Rheumatologist/Research/Clinician-Researchers/Western-Ontario-McMaster-Universities-Osteoarthritis-Index-WOMAC.

          Protection solaire avec le thanaka – Birmanie
          Protection solaire avec le thanaka – Birmanie

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          Abrégé de l’histoire de la médecine chinoise

          Pétra – cité nabatéenne – La Khazneh (1siècle AEC) – patrimoine mondial de l’UNESCO (1985) – Jordanie
          Pétra – cité nabatéenne – La Khazneh (1siècle AEC) – patrimoine mondial de l’UNESCO (1985) – Jordanie

          Formation : mise au point 
          OBJECTIF : Connaître l’essentiel de l’histoire de la médecine chinoise, des civilisations protohistoriques à nos jours.
          Tradition inventée ou médecine intégrative ? De la naissance de l’acupuncture au cours des dynasties Xia, Shang et Zhou au 16 novembre 2010, date de l’inscription de l’acupuncture – moxibustion au patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO, un abrégé de l’histoire de la médecine vous propose de comprendre son évolution au cours des siècles.

          Introduction

          Il semble difficile d’isoler l’Acupuncture de la Médecine Chinoise dans son ensemble [[1]]. De même, on peut se poser la question de savoir si « Médecine Chinoise » correspond bien à la « Médecine Traditionnelle Chinoise » (MTC).

          Il est généralement admis que la MTC comporte cinq disciplines qui sont la diététique 营养学 (yingyangxue), l’acupuncture et moxibustion 针灸 (zhenjiu), les massages 推拏 (tuina), la pharmacopée 制藥学 (shiyaoxue comprenant la phytothérapie chinoise à base de plantes, mais également l’utilisation des minéraux et des substances animales) et les exercices énergétiques 太極拳氣功 (taijiquan et qigong).

          Mais, en fait la MTC serait une « tradition inventée » [[2],[3]]. Dès la fondation de la Chine communiste en 1949 par Mao Zedong, des « médecins aux pieds nus » furent formés sur le terrain pour offrir leurs soins autant à l’armée qu’à la population. Les formes traditionnelles de la médecine, y compris l’acupuncture, ont été utilisées, autant par fierté nationale que par simple aspect pratique. Cette médecine était peu coûteuse et fournissait ainsi les niveaux de base en soins de santé à une population massive. De fait, Mao Zedong affirme en octobre 1958 pour promouvoir la MTC : « La médecine chinoise est un grand trésor du patrimoine et tout doit être fait pour l’explorer et l’élever à un plus haut niveau de connaissance » [[4]].

          Civilisations protohistoriques 

          Ces civilisations sont représentées par trois dynasties : la dynastie Xia 夏(2205‐1766 AEC1), Shang 商 (1765-1122 AEC) et Zhou 周 (1121-722 AEC)  [ 5]].
          Les plus anciennes origines de la médecine chinoise sont liées au chamanisme ancestral chinois [[6]]. Les chamans avaient pour rôle de communiquer aux hommes la volonté et la puissance des esprits. On faisait appel à leurs aptitudes pour rétablir la continuité de l’Ordre Cosmique. Un cauchemar réveillant un Prince, une douleur abdominale chronique ou une sécheresse étaient perçus comme autant de problèmes qui nécessitaient l’intervention du chaman. Durant cette période, il semble que la médecine est dominée par les charmes, les incantations, les amulettes. Des inscriptions d’ordre médical sont retrouvées sur os gravés ou écaille de tortues [ 5 ].

          Les premiers indices relevant de l’acupuncture se situent à la période de l’âge de bronze (durant la dynastie Shang). C’est Quan Yuan Qi de l’époque de la dynastie du Sud Liang (502 – 557 EC) qui proposa pour la première fois que la thérapeutique au poinçon de pierre (pierre 砭 Bian) était à l’origine de l’acupuncture à aiguille métallique. Mais suite aux découvertes archéologiques de Mawangdui, il apparaît que l’invention de la thérapeutique par acupuncture n’a pas de lien direct avec la thérapeutique au poinçon de pierre, instrument médical de la forme d’un couteau principalement utilisé plutôt pour ouvrir et faire suppurer les furoncles ou pour procéder aux saignées. Bref, la croyance selon laquelle la thérapeutique au poinçon de pierre était à l’origine de l’acupuncture à aiguille métallique peut être considérée comme erronée [[7]]. Des aiguilles de bambou, d’os, de terre cuite, ou même de piquants herbacés ont aussi été utilisées ensuite avant d’être supplantées par les aiguilles métalliques en bronze.

          Le Yijing (易經, également transcris Yi King ou Yi-King) ou «Classique des Changements ou des Mutations » date de la dynastie Zhou. Il s’agit d’un livre de divination dont les principes vont imprégner à la fois le Confucianisme, mais surtout le Taoïsme [[8]].

          Époque des Printemps et des Automnes (722‐481 AEC)

           À cette époque, la Chine est soumise à un régime féodal. Les rois de la dynastie des Zhou ne contrôlent directement qu’un petit domaine royal, centré sur leur capitale (l’actuelle Luoyang). Partout ailleurs, le pouvoir est exercé par la noblesse, au travers de fiefs. On compte, au huitième siècle, plusieurs centaines de petits États vassaux des Zhou. La plus ancienne mention écrite concernant l’acupuncture date de 580 AEC, il s’agit des Annales des Printemps et des Automnes (春秋 Chunqiu), description historique de l’État de Lu. Le Zuozhuan (左傳) se présente sous la forme d’un commentaire du Chunqiu et rend compte de l’état de la médecine à l’époque des Annales des Printemps et des Automnes qui est encore mal séparée de la magie. La sphygmologie et l’acupuncture systématisée sont inconnues [ 5 ].

          Époque des Royaumes Combattants (Vème‐ 221 AEC)

          Si les croyances de base dans la cosmologie chamanique n’évoluent pas au cours des Royaumes Combattants, la perception de l’organisation du monde change. Les phénomènes naturels sont désormais perçus comme tous liés les uns aux autres dans une cosmologie corrélative. Tout événement est analysé et reporté dans des almanachs afin de comprendre les différents cycles. L’Univers semble en perpétuel mouvement. Dans ce contexte vont s’élaborer toutes les concepts théoriques et les fondements dialectiques du qi, du yin et du yang, des Cinq Phases ou Mouvements (wuxing), de la divination issue du Yijing observant les mutations. Cette intense intellectualisation aboutit à une redéfinition de l’Univers qui offre une nouvelle perception de l’espace et du temps, des pratiques rituelles et même de la médecine. La médecine chinoise devient alors une « médecine scientifique » à part entière.

          C’est à cette époque que vécurent deux personnages, Laozi (auteur présumé du Daodejing 道德經)  et Confucius (Kongfuzi 孔夫子) dont les pensées exercèrent une influence déterminante sur la philosophie chinoise et indirectement sur la médecine.

          Le Huangdi neijing (黄帝内經) ou Classique interne de l’empereur Jaune, considéré comme le plus ancien ouvrage de médecine chinoise aurait été publié au cours de cette époque, mais selon les dernières découvertes issues des manuscrits de Mawangdui 馬王堆 (168AEC), l’ouvrage sous la forme que l’on connaît serait bien plus tardif et remanié dès le IIème EC [8].

          Dynastie Qin (-221 à -206 AEC)

           Cette dynastie a mis fin à des siècles de féodalité en jetant les bases administratives d’un État centralisé qui favorisa l’unité culturelle du territoire. Son fondateur, le Premier Empereur, Qin Shi Huangdi (秦始皇帝), connu pour son régime cruel, autoritaire et impopulaire a été redécouvert en 1974 par l’intermédiaire de son monumental mausolée à Xi’an et de ses milliers de soldats en terre cuite. Il est parfois considéré comme le « père » de la Grande Muraille (figure 1) et fut à l’origine en 213 AEC d’un autodafé visant à la destruction de tous les ouvrages de l’empire, à l’exception des manuels d’agriculture et de divination. Néanmoins le Huangdi neijing fut sauvé du désastre [[9]].

          La grande muraille de Chine à Badaling (1504) - dynastie Ming - Chine
          La grande muraille de Chine à Badaling (1504) – dynastie Ming – Chine

          Figure 1. La grande muraille  de Chine à Badaling.

          Dynastie des Han (206 AEC‐ 220 EC)

          Cette période est prolifique aussi bien en classiques renommés qu’en médecins célèbres. Le Nanjing 難經, encore appelé Classique des difficultés daterait du I ou IIème AEC (mais discuté [8]), les manuscrits de “Mawangdui” (168 AEC), le Shanghanlun 傷寒論 (Traité des atteintes du froid), le Shennong bencaojing 神农本草經 (L’herbier de Shennong) qui est le premier traité de matière médicale (Ier AEC) sont quelques uns des ouvrages réputés. Le chirurgien Hua Tuo 華佗 (110-207EC) pratiqua des interventions chirurgicales abdominales avec anesthésie par les plantes (chanvre indien, datura). On lui attribue d’autre part l’unité de mesure variable permettant de localiser les points : le cun  [9,[10]]. Zhang Zhongjing (158-219 EC), autre médecin célèbre qui rédigea le Shanghanlun a été surnommé l’Hippocrate chinois.

          Les Trois Royaumes, Dynastie Jin, dynasties du Nord et du Sud (220-581)

           Durant cette période, le Maijing 脈經 « Classique des Pouls », écrit par Wang Shuhe 王叔和 au IIIème siècle et reconnu pour sa description des vingt-huit pouls pathologiques donne au diagnostic en acupuncture toute son originalité [[11]].

          Le premier ouvrage de «simplification» de la médecine chinoise, le Zhenjiu jiayijing (針灸甲乙經, L’ABC d’Acupuncture et de Moxibustion) fut écrit en 259 de notre ère par Huangfu Mi 皇甫謐 (215-282) sous la dynastie des Jin. Cet ouvrage rassemble toutes les théories traditionnelles dans le domaine médical, et donne le nom et le nombre de points de chaque méridien selon leur localisation exacte ainsi que leurs indications [8].

          Ge Hong 葛洪 (283–343 EC), alchimiste et médecin taoïste a laissé deux traités médicaux importants : les « Médications du Coffre d’Or » (Jinkui yaofang 金匱藥方) et les « Prescriptions d’Urgence » (Zhou hou bei jifang 肘後備急方) qui donnent des conseils de médecine préventive pour prolonger la vie et éviter les maladies [[12]]. Il est aussi l’auteur du célèbre Baopuzi (抱朴子), traité sur l’alchimie, la diététique et certaines pratiques médicales magiques, à la recherche de l’immortalité physique. La partie ésotérique de son œuvre, le Baopuzi neipian 抱朴子內篇 est d’ailleurs entièrement consacrée à cette quête de longévité. Il s’agit en effet d’un véritable traité d’immortalité, dans lequel la question est abordée sous tous ses aspects, philosophiques comme techniques [[13]].

          Dynasties Sui et Tang (581-907)

           Cette époque a vu un grand développement de l’acupuncture, comme l’attestent les manuscrits de Dunhuang (Dunhuang yiyao wenxian jijiao 敦煌醫藥文獻輯校)découverts dans les grottes de cette cité importante de la Route de la Soie, point d’échanges entre la Chine et le monde extérieur. Plus d’une centaine de manuscrits médicaux des dynasties Sui et Tang a ainsi été répertoriée. L’importance de ces manuscrits est considérable dans l’optique d’une approche historique de la médecine chinoise et pour l’histoire de la médecine dans son ensemble [[14]]. Ainsi de nombreux manuscrits décrivent les fléaux et les maladies retrouvés le long de la route de la soie. Par exemple, l’un d’eux écrit vers 803 EC est un texte intitulé « Les dix Maladies mortelles » qui sont apparemment des maladies contagieuses : nuebing 疟病 (fièvre intermittente), tianxing 天行 (terme générique pour les maladies épidémiques), zubing 卒病 (maladies mortelles), zhongbing 肿病 (maladies inflammatoires), chanbing 产病 (maladies lors de l’accouchement) huanfu 患腹 (maladies abdominales), huanyong 痈患 (maladies dermatologique, furoncles), fenghuangbing 风黄病 (maladies liées au vent, hépatites, normalement associées à un ictère), shuili 水痢 (diarrhées), yanbing 眼病 (maladies de l’œil) [[15]]. Un autre manuscrit est un schéma de l’utilisation des points de moxibustion, datant de 600-900 EC (figure 2), la plus ancienne des cartographies de moxibustion que l’on ait découverte [[16]]. Les textes retrouvés ont des similitudes avec le Huangdi neijing, mais aussi le Shanghanlun (傷寒論), le Maijing et bien d’autres classiques moins connus comme le Tangren xuanfang (唐人選方) ou le Bingxing maizhen (形脈診).

          Figure 2Jiufa tu (灸法圖) : schéma des points de moxibustion (Or.8210/S.6168a)

          Sous la dynastie Tang, un grand médecin Sun Simiao 孫思邈 (581-682) se fait connaître au travers de ses œuvres, le Yinhai Jingwei (la Mer d’Argent) [[17]], premier traité chinois d’ophtalmologie s’intéressant aux 81 maladies de l’œil et son traité principal le Qianjin Fang (Prescriptions Valant Mille Pièces d’Or) dans lesquelles sont abordées la diététique, la sphygmologie, l’acupuncture, la phytothérapie. Il recommande ainsi les algues marines pour le goitre thyroïdien et des haricots pour le béri-béri [9].

          Sun Simiao serait aussi à l’origine des points ashi, points douloureux que l’on puncture et que l’on reconnaît actuellement comme des trigger points.

          Chao Yuanfang 巢元方(550-630), médecin de l’Empereur Yang Di de la dynastie des Sui, prit en charge la rédaction du célèbre ouvrage Zhubing yuanhou zonglun (« Traité général de l’étiologie et la symptomatologie des maladies » qui fut le premier travail chinois dans ce domaine et resta un ouvrage de référence pendant longtemps. Il a été écrit en 610, en 50 volumes  (67 parties avec 1720 cas) avec étiologie et symptômes des maladies diverses.

          Dynastie Song du nord (960‐1127)

          Au cours de cette dynastie et sous l’autorité de l’Empereur, de nombreuses écoles d’acupuncture fleurissent afin de systématiser la connaissance médicale. Wang Weiyi (987-1067), acupuncteur célèbre fit couler ainsi deux statues creuses grandeur nature en bronze, sur la surface de laquelle étaient marqués les trajets des méridiens et la localisation exacte des points. Il récapitula ses recherches détaillées sur les 657 points d’acupuncture dans son livre, le Tongren shuxue zhen jiu jujing (Manuel illustré des points d’acupuncture et de moxibustion indiqués sur la statue de bronze) (1027). D’autres statuettes en réplique réduite seront fondues pour différentes écoles. Les statues enduites d’une couche de cire jaune et remplies d’eau servaient aux étudiants pour localiser avec exactitude les points d’acupuncture. En perçant la couche de cire avec une aiguille, ils devaient faire jaillir l’eau du modèle si le point était bien repéré (figure 3). Une faculté est ouverte entre 1068 et 1086 à Kaifeng, ce qui facilitera l’enseignement de l’acupuncture [9].

          Figure 3. Exemple de reproduction d’une statue en bronze de la dynastie Song (extrait du Zhong Guo Yi Xue Tong Shi Tu Pu Juan. [consulté 10 avril 2011],en.tcm-china.info/acupuncture/origin/75565_2.shtml. 

          Dynasties Jin-Yuan (1115 – 1368), Ming (1368 ‐1644) et Qing (1644 ‐1911)

          Même si l’acupuncture est pratiquée hors des frontières de Chine comme le Japon, la Corée, le Vietnam ou le Tibet, l’importance de l’acupuncture décline rapidement. Mais quatre nouvelles écoles sous les dynasties Jin et Yuan auront encore une grande influence avec des médecins de valeur : Liu Wansu 劉完素 et l’École du Froid et du Frais, Zhang Conzheng 張從正 et l’École de la Purgation, Li Gao 李杲 et l’École de la Tonification de la Terre et enfin Zhu Zhenheng 朱震亨 et l’École de l’Entretien du yin [[18]].

          Sous la dynastie Ming, de grands ouvrages paraissent néanmoins comme le Bencao Gangmu 本草纲目 (Compendium de materia medica), le Binhu Maixue 濒湖脉学 (Étude du pouls de Bin Hu) et le « Compendium d’Acupuncture et Moxibustion » 針灸大成 (Zhenjiu dacheng), compilé par Yang Jizhou en 1601 [8]. Celui-ci s’inspire directement du Suwen, du Nanjing et bien d’autres ouvrages antérieurs et va demeurer l’ouvrage de référence pour tous les acupuncteurs traditionnels. Le Bencao Gangmu deLi Shizhen 李時珍 (1518-1593), gigantesque travail dressant la liste de 1892 substances médicales est le résultat de presque 30 ans de travail. Il s’agit non seulement d’un grand traité de pathologie et de thérapeutique, mais aussi un traité étendu sur différentes parties de l’histoire naturelle, comprenant la botanique, la zoologie, la minéralogie et la métallurgie [[19]] (figure 4). Le Binhu Maixue, écrit aussi par Li Shizhen en 1564 est quant à lui, un traité sur les vingt-sept types de pouls et leur valeur diagnostique [[20]].

          Un autre traité, le Wen Relun 溫熱論(Traité sur les maladies fébriles) de Ye Tianshi sous la dynastie Qing (1690-1760) est édité en 1740, livre sur le diagnostic et le traitement des maladies fébriles dans lequel une théorie sur l’émergence de la maladie est expliquée. La pathologie se développe en fonction du niveau de wei (résistance superficielle), qi (énergie), ying (nutrition) et xue (Sang) [10].

          Figure 4. Bencao Gangmu (Compendium de materia medica).

           Le Yixue yuanliu lun (Origines et histoire de la médecine) est écrit par Xu Dachun 徐大椿, un autre médecin célèbre de la dynastie Qing en 1757. Il retrace l’histoire de la médecine traditionnelle chinoise et aborde de manière critique tous les différents systèmes théoriques, diagnostiques et thérapeutiques de ces prédécesseurs. Il construit son propre système médical en ne tenant compte que des seuls classiques NeijingShennong bencaojing et Shanghanlun [[21]]. Ainsi on s’aperçoit que la majorité des médecins dédaigne l’acupuncture et la moxibustion au profit de la phytothérapie ou des massages tuina.

          Et, l’acupuncture faillit disparaître !

          En 1822, les autorités ordonnèrent d’abolir l’acupuncture et la moxibustion à titre définitif de la faculté de médecine impériale parce qu’elles ne pouvaient convenir pour traiter l’empereur [[22],26]. Bien que l’interdiction ne s’étende pas au-delà des limites de la cité interdite, il est clair que les médecins avaient de ce fait peu de chances de se spécialiser en acupuncture.

          Néanmoins des ouvrages sortent encore comme le Yilin Gaicuo 醫林改錯, écrit par Wang Qingren 王清任 en 1830 qui discute sur les erreurs anatomiques retrouvées dans la littérature classique et ses suggestions de corrections basées sur ses études des cadavres. Il ne se contenta pas de corriger les erreurs commises par les générations passées concernant les organes en aidant ainsi au passage des concepts de la médecine occidentale mais proposa aussi de nouvelles méthodes de traitement des troubles circulatoires et de l’hémiplégie.

          République de Chine (1912‐1949)

          La révolution de 1911 sonne le glas de la dynastie Qing, mais ne rétablit pas l’acupuncture dans ses prérogatives. Elle ne cesse de décliner et faillit à nouveau disparaître. En effet, en 1929, sous la pression de certains intellectuels progressifs du Mouvement du 4 mai 1919 et du Dr Yu Yunxiu, le gouvernement du Guomindang alla jusqu’à proposer l’abolition de la médecine chinoise qualifiée de vieille médecine réactionnaire, superstitieuse et irrationnelle en opposition à la nouvelle médecine venue de l’Ouest dont le Dr Sun Yat Sen (1866-1925), médecin formé à la manière occidentale était adepte. Aucune résolution d’abolition ne fut heureusement adoptée. Au contraire cela aboutit à une structuration de la médecine chinoise grâce entre autres à un célèbre acupuncteur Qin Bowei qui participera à la fondation d’un « Institut Chinois de Médecine » [3,23-25,31].

          Et ce sursaut va venir aussi de quelques médecins qui vont promouvoir l’acupuncture comme une alternative bon marché à la médecine occidentale. L’un d’entre eux est Cheng Danan 承淡安 (1899-1957), un acupuncteur et pédiatre de Jiangsu, qui avait visité le Japon dans les années 1930. En Chine, il crée une « société pour la recherche sur l’acupuncture chinoise » à Wuxi avant de lancer sa propre revue. Son acupuncture est fondée sur les Classiques (Zhenjiu jiayijing, Dacheng etc.) qu’il tente de systématiser, mais aussi sur la théorie que le mécanisme d’action acupunctural pouvait être en rapport avec la stimulation des nerfs telle qu’elle était décrite à ce moment en médecine occidentale. Cheng (figure 5) insista pour que les points d’acupuncture soient redéfinis à la lumière de cette idée [[26]]. Par le biais de ses élèves (Gao Zhenwu, Shao Jingming etc.), ses écrits (Zhongguo zhenjiu zhiliaoxue [[27]] et son activité politique (il fut membre de nombreux comités nationaux en charge de la politique médicale et de l’éducation) Cheng a exercé une profonde influence sur le développement de l’acupuncture en Chine [[28]]. Il va d’ailleurs s’aider de l’évolution de l’acupuncture hors des frontières chinoises comme au Japon où un renouveau existe sous l’influence de Yanagiya Sorei [[29]] et Takeshi Sawada [[30]] qui développent une acupuncture en rapport avec les Méridiens et en France grâce à George Soulié de Morant (1875-1955) en poste au consulat de Kunming en 1908. D’ailleurs, il écrit un article sur l’acupuncture française où il montre l’intérêt des Français dès 1820 avec les travaux de Jules Cloquet, Dantu mais aussi ceux de Soulié de Morant [[31]]. Cheng ignore que son approche moderne initiale est à l’opposée de l’approche française qui s’appuie sur l’ésotérisme chère à Guénon [25] et le néo-hippocratisme influencé par les médecins du Carrefour de Cos dans un contexte du non-conformisme [1,2,[32],[33]].    

          Figure 5. Cheng Danan 承淡安 (1898-1957).

          République Populaire de Chine (1949 à nos jours)

           Mao Zedong qui fonda la République Populaire Chinoise en 1949 rejeta tout d’abord la médecine traditionnelle mais sous la pression économique (coût moindre) et politique (reconnaissance des paysans qui représentait à ce moment la plus grande part de la population), il redonna l’impulsion nécessaire à la renaissance ou l’invention de la médecine traditionnelle chinoise [2,3], tout en sachant que le Gouvernement Communiste devait faire face à une insuffisance importante de personnel médical et que le praticien traditionnel était donc une solution à ce problème.

          En effet, les dirigeants communistes considéraient depuis longtemps la médecine chinoise comme une médecine ésotérique, superstitieuse et «féodale ». Mais, leur but non avoué était l’union des médecins à éducation moderne scientifique et des praticiens traditionnels pour un meilleur service de santé envers le peuple dans le concept de la médecine dite intégrative [[34]]. Ainsi on peut constater dans les articles médicaux de la période 1951-1955 du journal Beijing Zhonyi, des essais intensifs pour éduquer les médecins traditionnels selon les principes d’anatomie moderne [[35]]. Et à partir de 1954 des Collèges de médecine chinoise sont ouverts à Shanghai, Guangzhou, Chengdu et Pékin avec réédition des grands Classiques. En 1958, la médecine chinoise est déclarée « trésor national » par le gouvernement. Mais la médecine chinoise doit se moderniser, devenir plus scientifique et même intégrer la médecine occidentale.

          Dans les années 1980, une loi est promulguée définissant la MTC comme faisant partie du système de soins de santé. Depuis les années 1990, le gouvernement chinois fait des efforts dans la mondialisation de la médecine chinoise pour développer son potentiel économique.

          Néanmoins, à l’heure actuelle, même s’il existe un engouement important du monde occidental pour la MTC et plus particulièrement l’acupuncture, elle tend à avoir une place de moins en moins importante en Chine.

          Ainsi il est apparu qu’il existait en Chine une remise en question de l’efficacité de la MTC. En 2006, Zhang Gong-Yao, professeur à l’Université chinoise de South Central dans le Hunan, a lancé une pétition en ligne pour la suppression de la MTC du système de santé de la Chine. Zhang explique qu’il n’y a aucune percée majeure de la MTC dans le traitement des maladies et que les syndromes tels que « Déficience du Rein yin » ou « Déficit du qi de Cœur » ne peuvent être définis comme de véritables maladies. Cette déclaration met en lumière la situation déplorable de la MTC en Chine où la médecine occidentale influence de manière déterminante les traitements, comme au temps où Mao Zedong, pourtant promoteur de la MTC, utilisait pour tous ses problèmes médicaux la médecine occidentale. Dans l’enseignement de la médecine chinoise, l’occidentalisation de la formation de la médecine chinoise est la norme. L’étude des grands Classiques est remplacée par des formations en recherche biomédicale occidentale et nombreux sont les étudiants inscrits à un doctorat de médecine chinoise qui ne connaissent pas le Huangdi neijing[23].

          La réplique peut-être à cet état de fait est retentissante car l’acupuncture, à la demande de la Chine, est inscrite au patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO le 16 novembre 2010. Deux des motifs d’inscription : « l’acupuncture et la moxibustion sont un savoir et une pratique traditionnels transmis de génération en génération et reconnus par les communautés chinoises dans le monde entier comme élément de leur patrimoine culturel immatériel ; leur inscription sur la Liste représentative pourrait contribuer à la sensibilisation concernant la médecine traditionnelle dans le monde entier, tout en favorisant les échanges culturels entre la Chine et d’autres pays » [[36]].

          Conclusion

           L’histoire de la médecine chinoise est en constante évolution. La « tradition inventée » par Mao semble n’être plutôt qu’une transformation, une mutation de la médecine chinoise en une médecine chinoise « intégrative » comme cela a été réalisé déjà au cours des siècles. Les acupuncteurs chinois ont toujours eu la prudence de ne pas rejeter les précédents concepts et ont préféré les intégrer au corpus initial. Ainsi, les anciens concepts Taoïstes du yin et du yang tirés du Naturalisme se mêlent aux idées de maladies dues aux possessions par les démons, aux théories des cinq éléments, aux méridiens et aux syndromes zheng plus modernes dans un respect tout à fait confucéen pour les précédents paradigmes. Les concepts de chaque période ont été assimilés, digérés comme le sont actuellement ceux de la médecine moderne. En Chine, même si l’acupuncture a été progressivement rejetée au profit de la médecine Occidentale, de nombreux modèles différents persistent où l’on voit se côtoyer acupuncture occidentale et acupuncture traditionnelle basée sur les grands Classiques dans une tentative d’unifier et de moderniser la pratique, que l’Occident a appelé MTC, mais qui pour les chinois n’est tout simplement que de la médecine chinoise.

          Notes

          Mes remerciements à Pierre Dinouart-Jatteau pour l’insertion des caractères chinois.


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          Stéphan JM. Abrégé de l’histoire de la médecine chinoise. Acupuncture & Moxibustion. 2011;10(2):138-146. (Version 2011)