L’acupuncture autour de la naissance : bases scientifiques et état des lieux dans les versions, induction du travail et maturation du col

Durians à maturité – Battambang – Cambodge
Durians à maturité – Battambang – Cambodge

Résumé : Selon les essais contrôlés randomisés, l’acupuncture ou la moxibustion du point 67V (zhiyin) sur les parturientes ayant une présentation de siège permettrait dès 34 SA d’induire une version céphalique et d’éviter ainsi une césarisation.  L’induction du travail et la maturation du col sont un autre versant de l’acupuncture obstétricale. Un état des lieux des études contrôlées randomisées (ECR) dans ces problématiques obstétricales permet de déterminer que l’acupuncture, l’électroacupuncture ou la moxibustion peuvent être raisonnablement indiquées avec un grade B (présomption scientifique) selon le niveau des recommandations de la Haute Autorité de Santé Française. Mots-clés : obstétrique  versions de siège – induction du travail – acupuncture – maturation du col – ECR – recommandations.

Summary: According to the randomised controlled trial, the acupuncture or the moxibustion of the point BL67 (zhiyin) on pregnants women having a breech presentation would allow from 34 weeks of gestational age to induce a cephalic presentation and so to avoid cesarean section. The induction of the labour and the cervical ripening are another side of acupunctural obstetrics. An inventory of fixtures of the randomized controlled trials will allow to determine that the acupuncture can be reasonably indicated with a grade B (scientific presumption) according to the levels of recommendations of the High Authority of French Health. Keywords: obstetrics – correction of breech presentation – induction of the labour – acupuncture – cervical ripening – RTC – recommendations.

Après avoir fait l’état des lieux de l’acupuncture dans les nausées et vomissements gravidiques du premier trimestre et dans le syndrome de Lacomme [[1]], nous abordons dans ce deuxième article l’implication de l’acupuncture dans les versions, l’induction du travail et la maturation du col. Quel niveau de preuves avons nous ? Peut-on en 2009 recommander l’acupuncture dans ces problématiques obstétricales ?

Version des fœtus en présentation du siège

En France, 68% des nouveaux-nés en présentation du siège sont césarisés. Afin de diminuer la fréquence de ce problème, la réalisation d’une version par manœuvres externes est habituellement proposée vers la 36ème semaine d’aménorrhée (SA). En fonction de la parité, il existe des taux de version spontanée jusqu’à la 34ème SA, 78% de versions spontanées par exemple chez les multipares et 46% chez les nullipares à 32 SA. Méthode efficace dans 65% des cas lorsqu’elle est réalisée à 36 SA, elle est néanmoins souvent douloureuse, pouvant engendrer exceptionnellement une souffrance fœtale et onéreuse en frais hospitaliers [ [2] ]. De ce fait, la moxibustion associée éventuellement à l’acupuncture ou l’électroacupuncture semble être une alternative intéressante car méthode simple et dénuée d’effets secondaires. La moxibustion, qui utilise la chaleur produite en brûlant des préparations généralement sous forme de bâton contenant de l’armoise (Artemisia vulgaris : figure 1a et b) est appliquée sur le point d’acupuncture 67V (zhiyin). L’intensité de la moxibution doit être suffisamment forte, au seuil de la douleur, mais sans provoquer de brûlures.


Figure 1a. Artemisia vulgaris
 
Figure 1b. Inflorescence de l’ armoise vulgaire

En 1996 Li et coll. a comparé la moxibustion (n=32) versus électroacupuncture (n=48) versus groupe contrôle sans traitement (n=31). Les cent onze femmes étaient incluses à partir de 28 SA. L’électro-acupuncture est réalisée tous les jours à une fréquence inconnue et à une intensité tolérable sur le point 67V pendant six séances de 30mn et 20mn pour la moxibustion. Les auteurs observent en fin de session, un taux de version de 81,3% dans le groupe électroacupuncture et 75% dans le groupe moxibustion sans différence significative dans les deux groupes, alors que l’on a que 16,1% dans le groupe contrôle [ [3] ]. Hélas, cet ECR souffre d’une très basse qualité méthodologique (Jadad=1/5) avec une randomisation non décrite, des participants non décrits en aveugle, une analyse en intention de sortie non décrite et une inclusion trop précoce.

L’ECR de Cardini paru en 1998 dans la revue Jama a montré que la moxibustion sur le 67V entraîne de manière statistiquement significative (p<0,001) un taux de présentation céphalique de 75,4% plus élevé que dans le groupe témoin (47,7%) à 35SA. Cette différence était encore significative (p<0,02) lors de l’accouchement avec une présentation céphalique chez 75,4% du groupe moxibustion versus 62,3% du groupe témoin. Les 130 primigestes incluses dans cette étude à 33 SA ont reçu dans le groupe moxibustion une à deux séances de 30mn (15 mn à chaque pied) par jour pendant une semaine, voire deux semaines si nécessaire alors que le groupe contrôle (n=130) n’avait aucun traitement. Cet ECR en intention de traiter est de bonne qualité méthodologique (Jadad=3/5), mais non en aveugle. En effet, les patientes réalisaient leur traitement elles-mêmes après deux séances d’apprentissage, sans oublier qu’il s’agit d’une population asiatique déjà habituée à se traiter par acupuncture [ [4] ].

Habek en 2003 a réalisé un ECR en Croatie sur 67 patientes à 34SA, randomisées en deux groupes : groupe contrôle (n=33 sans traitement) et groupe acupuncture manuelle (n=34 : 2 séances de 30 mn par semaine jusqu’à la 38ème SA avec puncture du 67V bilatéral avec recherche du deqi). La version est obtenue de manière statistiquement significative (p<0,001) dans 76,4% dans le groupe acupuncture versus groupe contrôle (45,4%)[ [5] ]. Cette étude est intéressante car confirme pour des patientes européennes les résultats trouvés chez des femmes asiatiques. Malheureusement, l’étude est encore peu puissante (peu d’inclusion) et surtout souffre aussi d’une qualité méthodologique insuffisante : score de Jadad à 2/5 (pas de description de randomisation, patients et évaluateurs non aveugles). De ce fait, cette étude doit être confirmée car comme le dit Nguyen, « si l’amplitude de l’effet thérapeutique observé dans les essais de Cardini et Habek est confirmée cela permet une projection d’une diminution de 20000 cas (d’accouchements par le siège) par an. Le bénéfice est considérable » [ [6] ].

 En 2004, le travail de Neri et coll. a concerné 240 patientes italiennes entre 33 et 35 SA. Deux groupes : l’un a bénéficié d’acupuncture du 67V pendant 20mn avec obtention du deqi suivi de 20mn de moxibustion (deux fois par semaine durant deux semaines). L’autre groupe était sans traitement. Les auteurs retrouvaient un taux de 53,6% de présentation céphalique à l’accouchement versus 36,7% dans le groupe contrôle (p<0,01) [ [7] ]. Hélas, encore une fois, la qualité méthodologique n’était pas au rendez-vous ! Pourtant la randomisation est bonne, réalisée par liste générée au hasard par ordinateur, mais les patients et les évaluateurs ne sont pas décrits comme aveugles. Enfin, il y a bien description des perdues de vues (n=14), mais elles ne sont pas incluses dans les analyses, donc étude non en intention de traiter (Jadad=2).

D’ailleurs, Coyle et coll. concluent dans leur revue que les preuves sont insuffisantes pour soutenir l’utilisation de la moxibustion dans la correction de la présentation du siège. Néanmoins, ils déclarent que la moxibustion peut être avantageuse pour réduire l’utilisation des versions par manœuvre externe mais qu’il y a besoin de réaliser des essais contrôlés randomisés bien conçus et de haute qualité méthodologique, mais aussi de vérifier que la méthode est sûre [ [8] ].

Plus récemment, la métananalyse de Li et coll. parue en février 2009, a analysé dix ECR impliquant 2090 participants et sept essais cliniques non randomisés (n=1409), y compris la revue Cochrane de Coyle et celle de Van den Berg et coll. [ [9] ]. Les auteurs concluent que la moxibustion, l’acupuncture ou la stimulation laser au point d’acupuncture zhiyin (67V) montrent un effet bénéfique dans la correction de la présentation du siège. La moxibustion est par exemple plus efficace qu’aucun traitement (RR 1,29, IC à 95% 1,17 à 1,42) dans la version. Néanmoins, compte-tenu d’une méthodologie pas toujours suffisante, les auteurs préconisent que des essais contrôlés randomisés multicentriques et de haute qualité méthodologique doivent fournir davantage de preuves d’efficacité de l’acupuncture [ [10] ].

En juin 2009, dans leur ECR monocentrique en simple insu concernant 68 femmes à 33,9 SA`0,4, Millereau et coll. montrait que la moxibustion n’avait pas modifié de manière significative le taux de version fœtale que ce soit chez les primipares ou les multipares  [ [11] ].  Cet essai contrôlé randomisé de bonne qualité méthodologique avec un Jadad évalué à 4/5 (randomisation décrite et appropriée, insu évaluateur, analyse en intention de traiter) souffrait néanmoins d’une puissance insuffisante. Les auteurs avaient d’ailleurs notifié que leur ECR était d’une puissance de 60%, alors qu’il était nécessaire d’inclure au moins 100 patientes pour avoir une puissance efficace de 80%. Notons donc l’erreur de type II, erreur très courante dans ce type d’étude qui objective une inclusion insuffisante de sujets. Un autre biais important était la compliance au traitement. En effet, les auteurs trouvaient illusoire de faire revenir la patiente à plusieurs consultations d’acupuncture et de ce fait, ont confié le soin d’administrer le moxa incandescent au conjoint ou un tiers. Or l’on sait depuis l’étude de Cardini [13 ] que la moxibustion à domicile est très souvent arrêtée. On aurait d’ailleurs bien aimer avoir un questionnaire mettant en évidence la procédure d’application de la thérapeutique et les effets secondaires rencontrés. Nguyen analyse aussi cet ECR et conclut « les modalités quantitatives et qualitatives du recrutement sont inappropriées ; les modalités d’application de la moxibustion sont divergentes par rapport aux études antérieures.. » [ [12] ].

Cardini avait ainsi décrit dans son dernier ECR de 2005 des désagréments suffisamment importants chez 27 patientes (41%) du groupe moxibustion (n=65) pour que cela entraîne l’interruption de son étude qui devait concerner 130 patientes par groupe. Seulement 46% de l’effectif prévu a été analysé en intention de traiter. Les femmes primipares incluses à 32 ou 33 SA devaient appliquer elles-même 2 fois par jour la moxibustion sur le point 67V durant sept jours, et sept jours supplémentaires si nécessaire. La mauvaise compliance était due chez 14 femmes à des plaintes liées essentiellement  à la mauvaise odeur pouvant entraîner nausées, voire maux de gorge. Onze patientes se sont plaintes de douleurs abdominales liées aux contractions. L’étude n’a pas montré de différence significative entre le groupe contrôle (n=58) et le groupe moxibustion [ [13] ]. Nguyen dans son évaluation concluait que « l’utilisation de l’acupuncture au lieu de la moxibustion à domicile permet à l’évidence de contrôler le problème de l’observance » [ [14] ].

En ce qui concerne les effets indésirables ou iatrogènes, Neri et coll. avaient objectivé un petit ralentissement des bruits cardiaques fœtaux et davantage de mouvements fœtaux dans le groupe acupuncture suivi de moxibustion au 67V comparativement au groupe placebo, mais aucun signe de détresse fœtale, ni aucune contraction utérine. Les auteurs considéraient que ces changements étaient en rapport avec l’acupuncture, mais non dangereux pour la sécurité du fœtus [[15]].

Guittier et coll. [36 ] montrent aussi chez les 12 premières participantes à un ECR en cours sur les versions par moxibustion chez des femmes entre 34 et 36 SA aucune altération au cardiotocogramme. Aucun effet secondaire maternel ou fœtal significatif n’a été observé, confirmant ainsi les précédents travaux, même si la taille de la population était faible pour détecter un éventuel effet rare.

En conclusion, l’acupuncture peut être recommandée dans les versions des fœtus en présentation de siège au grade B (présomption scientifique) selon le niveau des recommandations de la Haute Autorité de Santé sur  une échelle allant de C (faible niveau de preuves) à A (preuve scientifique établie).

Induction du travail et maturation du col

Nombreux sont ceux qui ont étudié l’induction de travail utilisant l’électroacupuncture. Dans trois études, la majorité des femmes enceintes en terme dépassé ont commencé le travail pendant le traitement électroacupunctural (fréquences entre 2 et 8 Hz sur les points 6RP et 4GI). Cependant, aucune de ces études n’a inclus de groupes témoins et c’est la raison pour laquelle la progression du travail ne peut être nécessairement en rapport avec le traitement [16-18].

L’équipe française de Tremeau a montré que la maturation cervicale pouvait probablement être améliorée si les séances d’acupuncture (2VC, 3VC, 4VC, 3F, 4GI, 6RP, 60V, 67V, 34VB, 36E) étaient effectuées au début du 9ème mois. L’étude contrôlée randomisée a porté sur 98 femmes enceintes de 37 à 38 SA réparties en trois groupes (groupe témoin, placebo et acupuncture). La comparaison des scores de Bishop à 10 jours d’intervalle a montré une progression significative de 2,61 points dans le groupe acupuncture versus 0,89 et 1,08 respectivement dans les groupes placebo et témoin [ 19,20]. Une autre étude contrôlée randomisée a évalué l’effet sur les contractions utérines (par monitoring sous cardiotocographie) de la stimulation électrique transcutanée (TENS) appliquée sur les points d’acupuncture pendant plus de quatre heures chez les femmes en dépassement de terme. Vingt femmes ont donc été aléatoirement assignées à l’un ou l’autre des deux groupes : groupe acupuncture avec courant à une fréquence de 30 Hz aux points, ou groupe placebo avec les mêmes électrodes de surfaces aux mêmes endroits mais sans stimulation électrique. La fréquence et la force des contractions utérines ont été enregistrées pendant une heure avant stimulation, puis durant les deux heures qui suivent la phase de traitement de quatre heures. Il est noté une augmentation statistiquement significative (p<0,01) de la fréquence et de la force de contractions utérines dans le groupe acupuncture versus groupe placebo. Néanmoins, il est nécessaire d’obtenir une plus grande fréquence et une plus grande intensité des contractions pendant une période plus longue pour avoir le déclenchement de l’accouchement [ [21] ].

Un autre travail a rapporté un raccourcissement du premier stade du travail chez les femmes bénéficiant d’acupuncture par rapport au groupe contrôle [ [22] ]. Mais ce travail de faible puissance (n= 57) dans le groupe acupuncture (20VG baihui, 7C shenmen, 6MC neiguan pendant 20mn) n’est pas un essai contrôlé randomisé, juste une étude de cas versus groupe contrôle (n=63). Les mêmes auteurs ont montré que l’effet de l’acupuncture sur le travail était associé à une élévation statistiquement significative de la prostaglandine PGE2 plasmatique [ [23] ]. D’autre part, ils démontraient que la stimulation de 6RP suivie 15mn plus tard de celle de 4GI influençait le flux sanguin dans l’artère utérine en diminuant le ratio systolique/diastolique mesuré par doppler  [ [24] ].

La revue Cochrane réalisée en 2004 et réactualisée en 2008 concluait qu’on avait besoin d’essais contrôlés randomisés bien conçus et de haute qualité méthodologique pour évaluer le rôle de l’acupuncture dans l’induction du travail avec des résultats cliniquement significatifs. Les auteurs s’appuyaient sur trois ECR (n=212). Ceux-ci objectivaient pourtant une efficacité clinique de l’acupuncture statistiquement significative (147 femmes, risque relatif 1,45 avec un intervalle de confiance à 95% de  1,08 to 1,95, p=0,01) par rapport au  groupe contrôle relatant que l’acupuncture nécessitait moins l’utilisation des autres techniques d’induction versus les groupes contrôles. Néanmoins, les auteurs concluaient que la population incluse était trop petite et que les femmes n’étaient pas décrites comme aveugles dans leur groupe. De ce fait, les résultats pouvaient être dus à un effet placebo [ [25] ].

Le premier ECR inclus dans la revue Cochrane concernait 45 femmes randomisées en un groupe acupuncture (n=25) et un groupe contrôle (n=20). Le but de cette étude était d’évaluer si l’acupuncture peut influencer la maturation du col, induire le travail et réduire de ce fait les besoins d’induction en post-terme. A partir de leur date estimée d’accouchement, le groupe acupuncture bénéficia tous les deux jours de stimulation avec obtention du deqi des points d’acupuncture 4GI (hegu) et 6RP (sanyinjiao) durant des séances de 20 mn. Si elles n’accouchaient pas au bout de 10 jours après la date prévue, on leur administrait des prostaglandines vaginales. On observe un raccourcissement significatif (p= 0,04) au 6ème et 8ème jour du groupe acupuncture versus groupe sans traitement. L’accouchement survenait en moyenne à 5 jours après la date prévue versus 7,9 jours dans le groupe contrôle, soit 69 heures plus tôt dans le groupe acupuncture (p=0,03). En conclusion, l’acupuncture entraîne une induction du travail et raccourcit l’intervalle entre la date estimée d’accouchement et le terme  réel [[26]]. Le problème posé par cette étude est qu’il y avait au départ 56 femmes incluses avec 45 femmes au final (20% de perdues de vue). De ce fait, cet ECR outre la faible puissance et non en double insu, n’a pas eu d’analyse en intention de traiter, d’où un score de Jadad estimé à 2/5 et une qualité méthodologique médiocre.

Le deuxième ECR inclus dans la revue Cochrane est celui de Harper et coll. Il s’agit d’évaluer l’utilité de l’acupuncture dans l’induction du travail en consultation externe chez des nullipares entre 39 SA 4/7 et 41 SA avec un score de Bishop de moins de 7. Deux groupes ont été randomisés en groupe acupuncture (n=30, trois ou quatre séances) et groupe contrôle sans acupuncture (n=26, 3 ou 4 séances). Le traitement n’était pas individualisé mais standard avec puncture des points 4GI (hegu), 6RP (sanyinjiao), 31V (shangliao) et 32V (ciliao). Une stimulation électrique à 2Hz sur 31V et 32V a été utilisée pendant toute la durée de l’intervention (30mn). Les auteurs observent que l’accouchement est survenu 21 heures plus tôt dans le groupe acupuncture versus groupe contrôle, mais cette différence de temps n’est pas statistiquement significative (p=0,36). Les femmes dans le groupe d’acupuncture ont eu tendance à avoir moins de césariennes que le groupe contrôle (39 % contre 17 %, p = 0,07 non significatif) [ [27] ]. Là aussi les limitations de ce travail sont l’inclusion d’un petit nombre de femmes (manque de puissance) et étude réalisée non en aveugle.

Smith et coll. relance le débat avec une étude concernant 181 femmes dans le groupe acupuncture et 183 dans le groupe sham (acupuncture feinte) afin d’estimer à nouveau l’efficacité clinique de l’acupuncture dans l’induction du travail. Les auteurs ont testé l’hypothèse que l’intervention acupuncturale administrée pendant deux jours aux parturientes en post-terme à 41 SA avec indication d’induction pharmacologique ou chirurgicale pourrait réduire le temps d’attente entre induction et accouchement. Mais il n’y a pas eu de différence statistiquement significative entre les deux groupes pour les besoins en induction classique, que ce soit par induction par prostaglandine, rupture artificielle de membranes, ocytocine etc.. Le temps médian entre le traitement par acupuncture à l’accouchement était 68,6 heures versus 65 heures pour des femmes dans le groupe sham acupuncture. Les points utilisés dans le protocole acupunctural étaient 4GI, 6RP, 31 et 32V, 36E, 3F additionnés selon les circonstances par 7R, 20VB, 21VB. Après obtention du deqi, la stimulation était administrée pendant 30-40 minutes deux jours de suite. Les points du groupe sham acupuncture étaient situés sur des points à distance des véritables points et considérés comme des non-points d’acupuncture [ [28] ]. Cet ECR de haute qualité méthodologique en double aveugle et en intention de traiter est de forte puissance. Il objective l’inefficacité de l’acupuncture manuelle à entraîner l’induction du travail chez les femmes en post-terme à 41SA avec deux séances d’acupuncture à une journée d’intervalle.

Même constat retrouvé dans l’essai contrôlé randomisé contre placebo et partiellement en aveugle d’Asher et coll. [ [29] ] : l’acupuncture n’est pas efficace dans l’induction du travail ou dans la réduction du taux de césarienne. Leur ECR est de haute qualité méthodologique (Jadad = 4) et puissant (n=89 avec calcul de puissance estimé à 82% pour détecter une différence entre les trois groupes étudiés (acupuncture n=30 : 4GI, 6RP, 32V et 54V ; acupuncture sham n=29 : non-points d’acupuncture ; groupe contrôle n=30 : conseils habituels). Le critère principal d’étude, l’induction du travail qui mesure le temps entre la première séance thérapeutique lors de l’inclusion et l’accouchement ne montre pas de différence significative entre les trois groupes (p= 0,20). Il n’y a pas non plus de différence significative pour le second critère qui mesure le taux de travail spontané (p=0,66) et de césariennes (p=0,37). Néanmoins par rapport au travail antérieur des mêmes auteurs qui avaient objectivé une certaine efficacité [ 27 ], il existe de nombreuses différences qui pourraient expliquer ces résultats. Les principales sont : un âge d’inclusion ici plus précoce à 38SA, un protocole d’acupuncture différent avec remplacement du point 31V par 54V, l’ignorance des investigateurs du groupe d’appartenance des femmes (évaluateur décrit comme aveugle) et enfin protocole d’acupuncture sans aucune électroacupuncture.

Ainsi, l’électroacupuncture à la différence de l’acupuncture manuelle serait plus efficace comme le laissent entendre les travaux canadiens parus en décembre 2008.

En effet, une étude contrôlée randomisée canadienne [ [30] ] a essayé de déterminer l’efficacité de l’acupuncture pour induire le travail chez les femmes à terme à 41 SA (282 jours de grossesse en moyenne). Dans cet ECR pilote prospectif, 16 femmes ont été affectées, au hasard, à un groupe « acupuncture selon des points reconnus comme permettant d’amorcer le travail » (traitement n=9) ou à un groupe « acupuncture selon des points factices avoisinants » (placebo n=7). Les points utilisés ont été 6RP, 43E, 60V, 4GI et 36VB puncturés puis stimulés électriquement à une fréquence de 1 à 2 Hz pendant 30 à 45mn. Le groupe d’acupuncture feinte était puncturé à des points situés sur des sites adjacents mais hors méridiens et stimulé également électriquement. Les deux groupes devaient aussi utiliser l’acupression toutes les deux trois heures pendant 3 à 5mn. Le critère d’évaluation principal était l’intervalle séparant le traitement d’acupuncture initial et l’accouchement. Les auteurs ont constaté une différence de 62 heures, pour ce qui est de l’intervalle séparant l’intervention et l’accouchement, entre les deux groupes (en faveur du groupe « traitement »). De surcroît, les femmes de ce groupe ont connu des périodes de travail plus courtes (réduction moyenne de la période de travail : 2 heures et 20 minutes). Bien sûr cette étude pilote en double placebo bien qu’elle soit de haute qualité méthodologique (Jadad à 5/5) est de très faible puissance. Les auteurs ont d’ailleurs calculé que pour avoir une puissance à 80% avec un risque alpha α de 5%, il fallait 38 parturientes par groupe pour détecter une différence. En conclusion, l’électroacupuncture à une fréquence de 2 Hz favorisait l’induction du travail mais nécessite à nouveau un ECR en double aveugle sur une grande population. D’où la nécessité d’estimer correctement le nombre de sujets nécessaires pour garantir une puissance supérieure ou égale à 80% afin d’éviter de commettre une erreur de type II (pas assez de sujets inclus).

Un autre point important à connaître est la sécurité et les effets secondaires de l’utilisation de l’électroacupuncture. Ceux-ci ont été étudiés dans une étude chinoise réalisée sur 276 parturientes entre 37 SA et 42 SA au premier stade du travail réparties en un groupe électroacupuncture EA (n=138) et un groupe ocytocine (n=138). Le groupe EA bénéficiait d’EA au point 4GI après recherche du deqipuis stimulation électrique à une fréquence alternée 2 et 100 Hz pendant 30 mn associée à une perfusion d’ocytocine. Le groupe ocytocine n’avait pour seul traitement que la perfusion d’ocytocine. La fréquence cardiaque, la fréquence respiratoire, la pression artérielle des femmes, la fréquence cardiaque fœtale ainsi que le score d’apgar à la naissance ont été enregistrés. Pas d’effets secondaires ni d’incidents n’ont été rapportés dans les deux groupes. Les auteurs ont juste remarqué que l’EA au 4GI associé à la perfusion d’ocytocine permettait d’intensifier les contractions utérines et de raccourcir le travail [[31]].

Induction du travail après rupture spontanée des membranes

L’objectif du troisième ECR étudié dans la revue Cochrane [25 ] était d’objectiver si l’acupuncture pouvait, au terme et après rupture spontanée des membranes, accélérer le travail. Quarante-trois parturientes ont donc été assignées dans le groupe acupuncture et quarante-huit dans le groupe contrôle sans traitement acupunctural. Ont été étudiés la durée de travail actif, la moyenne d’ocytocine administrée et le nombre d’induction. Chaque femme a reçu un traitement standard de stimulation des points d’acupuncture 36E, 3F, 4VC pendant la séance de 20 mn. Par ailleurs, un traitement individualisé par le diagnostic établi sur l’examen de la langue et de la sphygmologie selon les principes de la Médecine Traditionnelle Chinoise a été appliqué variable en fonction de chaque patiente :  6TR, 4GI, 7P, 7C, 3R, 6R, 6RP, 41VB. La durée de travail a été réduite de manière statistiquement significative (différence moyenne de 1,7 heure, p=0,03) et il y avait également une réduction significative de l’utilisation d’ocytocine dans le groupe acupuncture comparé au groupe témoin (odds ratio 2,0 ; p=0,018). Par ailleurs, le groupe acupuncture avait une durée significativement plus courte de la phase active du travail que celles du groupe contrôle (différence moyenne de 3,6 h, p=0,002) [ [32] ].

En 2007, l’essai contrôlé randomisé de Selmer-Olsen et coll. a étudié l’influence de l’acupuncture chez des femmes nullipares dans l’induction du travail suite à la rupture prématurée des membranes à terme. Le deuxième critère évalué fut le bien-être. Cet ECR portait sur 106 femmes nullipares entre 37 et 42 SA avec rupture prématurée des membranes et sans contraction, réparties en un groupe acupuncture (n=51) et un groupe contrôle (n=55). Le groupe acupuncture a été réparti en trois groupes selon le diagnostic de médecine traditionnelle chinois appliquant le questionnaire sur les symptômes, l’examen de langue et la sphygmologie. Le groupe en vide de qi de Rate-Pancréas a été traité par 20V (pishu), 6RP (sanyinjiao) et 36E (zusanli). Les points 18V (ganshu), 3F (taichong) et 4GI (hegu) ont été utilisés dans la stagnation du qi de Foie et enfin  23V (shenshu), 3R (taixi) dans le vide de qi de Rein. Chaque groupe d’acupuncture a bénéficié de la puncture systématique du 4VC (guanyuan) et quand ils étaient appropriés, on rajoutait en plus 4VG (mingmen), 20VG (baihui), 7C (shenmen), 15V (xinshu), 7P (lieque), 32V (ciliao), 6MC (neiguan) et 6TR (zhigou). Après obtention du deqi, les aiguilles étaient laissées pendant 30 minutes. Au final, il n’y a pas de différence statistiquement significative entre les deux groupes dans l’induction du travail de la rupture prématurée des membranes jusqu’à la phase active du travail (15h pour  le groupe acupuncture versus 20,5h dans le groupe contrôle, p=0,34). Pas de réduction également du travail actif ni dans la nécessité d’induction par ocytocine. Les auteurs n’ont pas trouvé de différence significative du bien-être dans les deux groupes, cependant les femmes recevant l’acupuncture ont envisagé leur traitement plus positivement que dans le groupe contrôle (p=0,003). Aucun effet secondaire n’a été annoncé [ [33] ].

Bref, cette étude de moyenne qualité méthodologique (Jadad à 3/5) mais non en double aveugle montre que l’acupuncture n’influence pas l’induction du travail. Cependant, il est à noter que cet ECR est de faible puissance. S’il y avait une différence entre les groupes, celle-ci ne pouvait pas être détectée, les auteurs ayant déterminé eux mêmes que pour avoir une puissance de 80% donnant un pourcentage significatif de 5%, il fallait inclure 104 patientes dans chaque bras.

En conclusion, l’acupuncture peut aussi être proposée dans l’induction du travail avec un grade B (présomption scientifique) selon le niveau des recommandations de la Haute Autorité de Santé [[34]], mais il est nécessaire de réaliser des ECR de plus grande puissance (tableau I).

Tableau I. Les principales études dans l’induction du travail et la maturation du col (qualité méthodologique insuffisante si Jadad < 3 ; qualité moyenne : Jadad=3 ; haute qualité ≥ 4).

Conclusion

Dans les versions, l’acupuncture peut être utilisée avec un grade B selon les recommandations de l’HAS, mais il est nécessaire d’obtenir des études de plus grande puissance et de meilleure qualité méthodologique pour avoir des certitudes de preuve scientifique établie (grade A). De ce fait, de nombreuses études de haute qualité sont en cours, dont une à Lille, l’étude Acuverse qui devrait être achevée vers 2010 [2], en Andalousie (étude multicentrique de Vas) [[35]], mais aussi à Genève [[36]] etc. Quant à l’induction du travail et la maturation du col, le niveau de preuves atteint également le grade B selon les recommandations de l’HAS. Cependant devant l’hétérogénéité des résultats et les nombreux protocoles, il convient de réaliser de nouveaux ECR et de trouver des protocoles d’acupuncture ou d’électroacupuncture de méthodologie correcte.

Références

[1]. Stéphan JM. Acupuncture autour de la naissance : bases scientifiques et état des lieux dans les nausées et le syndrome de Lacomme. Acupuncture & Moxibustion. 2009;8(2):86-93.

[2]. Battisti-Gascard C. Version des fœtus en présentation du siège par acupuncture. Présentation de l’étude Acuverse. [thèse de Docteur en Médecine]. Lille: Université du droit et de la santé-Lille 2; 2006.

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Stéphan JM. L’acupuncture autour de la naissance : bases scientifiques et état des lieux dans les versions, induction du travail et maturation du col. Acupuncture & Moxibustion. 2009;8(3):157-166. (Version PDF imprimable)

Stéphan JM. L’acupuncture autour de la naissance : bases scientifiques et état des lieux dans les versions, induction du travail et maturation du col. Acupuncture & Moxibustion. 2009;8(3):157-166. (Version 2009)  

Pathologies du premier trimestre de grossesse accessibles à l’acupuncture

Mission District – Murs mexicains de la maison des femmes, San Francisco -Californie – USA
Mission District – Murs mexicains de la maison des femmes, San Francisco -Californie – USA

Formation : mise au point

Pathologies du premier trimestre de grossesse accessibles à l’acupuncture

 Objectif : Connaître les pathologies du premier trimestre de la grossesse accessibles à l’acupuncture, savoir en faire le diagnostic selon la Médecine Traditionnelle Chinoise et en établir le traitement.

Les nausées, les vomissements, l’anxiété, l’insomnie du premier trimestre de la grossesse ainsi que la prévention de l’avortement spontané sont les pathologies du premier trimestre accessibles à l’acupuncture. La notion des points interdits doit être connue également. Il s’agit à partir des éléments de diagnostic incluant la sphygmologie et l’examen de langue de traiter selon la différenciation des zheng.

 Rappels des mécanismes physiopathologiques de la grossesse

Mer des 12 méridiens, Mer des 5 organes yin (zang) et des 5 entrailles ou viscères yang (fu), le chongmai est en rapport avec le Sang (xue).

Renmai, encore appelé vaisseau conception, considéré par la Tradition comme la réunion de tous les méridiens yin, est en rapport avec l’énergie, le qi. Ces deux méridiens règlent l’équilibre sang-énergie de la vie génitale en général et leur rôle est particulièrement important lors de la grossesse.

Zushaoyin, le méridien du Rein qui double le chongmai sur la partie haute du corps (de RE11 à RE21) a aussi un rôle majeur aussi dans la grossesse, car il intervient dans la croissance foetale.

Deux fonctions du Rein : à gauche c’est le Rein, à droite, c’est mingmen, la porte de la vitalité qui abrite l’énergie essentielle acquise (jing qi) et selon les auteurs l’énergie originelle (yuan qi), énergie issue du Ciel Antérieur, qui préside à la conception. Chez la femme, mingmen est en rapport avec l’utérus, tout comme mingmen est aussi la source de chongmai.

Le qi et le Sang se concentrent dans l’utérus de façon à nourrir et protéger l’embryon, puis le foetus. Le renmai et le chongmai et à fortiori le zushaoyin consacrent donc toutes leurs énergies au foetus. Leurs Vides mettent la grossesse en danger.

On peut donc en déduire que les causes de menace pour une grossesse [[1]] sont :

–        un yin insuffisant (peut entraîner une hypotrophie),

–        une perturbation par un excès de yang (déclenche le mouvement et l’expulsion d’une fausse couche ou d’une menace d’accouchement prématuré),

–        un déséquilibre du qi et du Sang,

–        une descente du qi du haut du corps vers le bas du corps (autre mécanisme de fausse couche).

Notion de points interdits

Il faut éviter les déséquilibres qui pourraient perturber l’évolution de la grossesse.

Malheureusement, la notion de points interdits varie en fonction des différents auteurs et des différentes écoles [1-3]. Les points ont une action cybernétique, ce qui veut dire que leur action est variable en fonction des circonstances. Ainsi certains points sont fortement déconseillés et d’autres le sont de manière relative ou temporaire. Quelques exemples :

–        67V est contre-indiqué jusqu’aux dernières semaines de la grossesse, mais utilisé pour la version foetale et plus tard pour la sollicitation du col.

–        3VC, 4VC et en règle générale tous les points de Vaisseau Conception sous le nombril (2VC, 5VC, 6VC, 7VC), sont déconseillés en puncture vers le bas, sauf en cas de préparation à l’accouchement.

–        60V, 67V sont à éviter aussi sauf en cas de préparation à l’accouchement.

–        Les autres points les plus fréquemment cités : 25E, 30E, 36E, 44E, 6RP, 4RP, 3F, 4GI, 2VB, 9VB, 21VB, 34VB, 6R et 20 VG.

–        36E est à éviter surtout lorsqu’il est associé à des points entraînant un mouvement de qi vers le bas, comme 4GI ; autre association à éviter : 6RP et 4GI ou 3F et 6RP : ces points favoriseraient le travail.

–        Les points liao sont au nombre de huit et souvent appelés les baliao (ba = huit) : 31V (1èr trou sacré), 32V (2ème trou sacré), 33V (3ème trou sacré), 34V (4ème trou sacré). On les utilise dans le traitement de la lombalgie de la parturiente dans le fameux syndrome de l’accouchement par les reins [[4]].

Ces précautions ont été établies de manière empirique. Néanmoins des preuves de leur action par l’acupuncture expérimentale ont permis de justifier quelques uns de ces interdits et de jeter un doute sur d’autres. On va mettre ainsi en lumière les deux écoles de pensées actuelles qui peuvent sembler antinomiques : l’action ocytocique et l’action tocolytique de l’acupuncture.

Action ocytocique

Tempfer et coll. [[5]], Zeisler et coll. [[6]] montraient que l’acupuncture avait un effet inducteur du travail par action ocytocique sur l’utérus gravide alors que Tsuei et coll. en 1977 [[7]], Lyrenas et coll en 1987 [[8]] démontraient l’inverse, c’est-à-dire une tocolyse avec allongement de la durée du travail.

En fonction des points utilisés, nous aurons soit une induction ou un ralentissement du travail [[9]], et selon les auteurs, 6RP devait être considéré comme ocytocique [7] ou tocolytique [8]. En 2006, une étude chez des rates montrait qu’il faut prendre en compte la combinaison des points et la procédure temporelle de mise en oeuvre du protocole thérapeutique. Ainsi la stimulation de 4GI en électroacupuncture à 20Hz pendant 20mn suivie d’une puncture manuelle de 6RP pendant 5 mn augmente de manière statistiquement significative l’amplitude, la fréquence et la contractilité des contractions utérines (p<0,05). Le point 6RP stimulé seul pendant 5mn augmente la fréquence et la contractilité des contractions utérines. 4GI seul en électroacupuncture n’aurait quant à lui aucune influence sur la fréquence et la contractilité utérine [[10]].

Action tocolytique

Le point 4GI (hegu) a été puncturé dans deux groupes de rates gravides et non gravides afin d’évaluer son efficacité dans l’expression des enzymes COX-2 et dans la motilité utérine. Celle-ci est réduite de 67% chez les rates non gravides, et de 75% chez les rates gravides lors de la stimulation acupuncturale au point 4GI qui inhibe l’expression de l’enzyme COX-2, d’où inactivation des prostaglandines [[11]]. En 2003, Kim et coll. sur des rates gravides, ont démontré aussi que le traitement acupunctural au point 6RP (sanyinjiao) contrôle la motilité utérine pendant la grossesse. En effet, la stimulation par acupuncture pendant 30 mn au point 6RP diminue l’enzyme COX-2 (qui voit son expression s’intensifier au cours de la grossesse et augmenter dans l’amnios avec le travail, suggérant que cette isoforme serait impliquée dans l’initiation du travail). De même sous acupuncture (6RP et 4GI), la motilité utérine est réduite de 28,15% (p < 0,05) chez les rates gravides et de 19,88% (p < 0,05) chez les rates non gravides [[12]]. Les travaux réalisés par Pak et coll. en 2000 démontraient aussi que l’acupuncture avec recherche du deqi au point 4GI supprimait les contractions utérines induites chez la rate gravide par perfusion d’ocytocine [[13]] mais par contre, toujours selon les mêmes auteurs, la stimulation acupuncturale au point 6RP et la moxibustion au point 4VC (guanyuan) n’avaient pas d’effet tocolytique statistiquement efficace.

En conclusion, on peut donc affirmer qu’il est préférable de s’abstenir de puncturer 6RP et 4GI conjointement, mais il faudra attendre de nouveaux travaux pour confirmer s’il y a action tocolytique ou ocytocique de 6RP et/ou de 4GI du fait des travaux d’acupuncture expérimentale contradictoires.


Prévention de l’avortement spontané

En l’absence de toute pathologie déclarée, Soulié de Morant indique de puncturer le zhubin (9R) pour équilibrer la grossesse et éviter un avortement spontané. « Tonifier ce point  au cours de la grossesse, de préférence deux fois : la première fois à 3 mois et la seconde à six mois » [[14]]. C’est le point xi de yinweimai. Pour prévenir l’avortement spontané, zushaoyin est au premier plan, car abrite le yuanqi et le jingqi. Soulié de Morant insiste sur l’action du zhubin : « préventif des fausses couches ; fait aussitôt que possible, et même avant la conception, empêche les spasmes de la grossesse ».

Pourtant, d’autres auteurs considèrent que c’est un point accessoire dans la gestion de la grossesse, mais l’utilisent malgré tout dans la menace d’accouchement prématuré [[15]].

Néanmoins, utilisons le point 9R, comme le préconise aussi Rempp [1] qui dit « la puncture semble équilibrer non seulement la femme, mais surtout l’évolution de sa grossesse ». 


Nausées et vomissements gravidiques

Selon la théorie de la Médecine Traditionnelle Chinoise, un vomissement est dû à ce qu’on appelle un ni, qui est un reflux d’énergie en rapport avec un contre-courant de l’Estomac. Il s’agit d’une fraction de qi qui normalement descend vers le bas du corps, qui pour une raison physiopathologique ne le peut plus et remonte vers le haut, à contre-courant.

Deux mécanismes physiopathologiques en sont à l’origine dans la plupart des cas : le trouble du qi de l’Estomac et le vide du yin de foie qui vont s’associer plus ou moins ensemble.

Il peut aussi se combiner à eux une atteinte des cinq Entités Viscérales dans la correspondance des cinq éléments : colère (hun), joie (shen), soucis (yi), tristesse (po), peur (zhi). Ainsi le stress, les soucis, le surmenage, l’appréhension, les angoisses éventuelles liées à une fausse couche etc., vont décompenser le couple Rate-Pancréas  Estomac. Chez certains auteurs, on parle même des sept Sentiments : colère (nu), joie (xi), inquiétude (you), pensée obsessionnelle (si), tristesse (bei), peur (kong) et effroi (jing) [1,[16]]. Mais le tableau le plus habituel correspond aux troubles liés au Coeur (le shen) avec Vide du qi du Coeur et Feu du Coeur.

Un trouble du qi de l’Estomac

Après la conception, la Médecine Traditionnelle Chinoise considère que la matrice baozang se ferme et le qi de l’Estomac est perturbé. En effet, normalement, du fait de la grossesse, le qi de chongmai augmente car nourrit le qi du foetus dans le pelvis. La croissance progressive du foetus enclenche une augmentation progressive du qi, lequel associé à l’accumulation du qi du chongmai va déclencher une remontée de qi à contre-courant. Ce mécanisme contrarie le mouvement de descente normale du qi de l’Estomac qui va alors s’épuiser progressivement. S’il y avait un vide préalable du qi de l’Estomac ou s’il y a  un qi de la Rate vide, alors l’Humidité s’accumule et va entraîner au final la formation de Mucosités-Glaires (tanyin). Ce déséquilibre de fonctionnement de la Rate et de l’Estomac correspond au tableau de « Mucosités – Glaires ». Nous avons le même mécanisme observé par exemple dans les hernies hiatales [[17]]. Deux tableaux sont évoqués dans ce cadre par Macioca [[18]] : vide de qi d’Estomac ou vide de qi de Rate, Mucosités-Glaires.

Diagnostic et traitement au stade de vide de qi de l’Estomac ou vide de qi de Rate

En cas de vide de qi de l’Estomac, il existe outre les nausées et les vomissements, une inappétence, une oppression post-prandiale, une fatigabilité, voire une asthénie. le diagnostic se fera par l’examen de la langue qui sera décolorée, blanche avec absence d’enduit lingual car l’enduit est le produit de l’Estomac. Les pouls sont vides (xu), mous (ruo). En cas de vide de qi de Rate, la langue est pâle avec un enduit fin et blanc ; le pouls est fin (xi) et mou (ruo) [17]. 20V (pishu), point assentiment shu de Rate-Pancréas et 21V (weishu), point assentiment shu d’Estomac seront d’excellents moyens pour tonifier ce vide, en privilégiant la moxibustion.

Diagnostic et traitement au stade de Mucosités – Glaires

Le tableau de « Mucosités – Glaires » objective cliniquement une hypersialorrhée et des crachats mousseux, des vomissements clairs de glaires et salive. La langue est épaisse avec empreinte des dents latéralement et enduit lingual central blanc et gras. Par contre, la palpation des pouls est plus délicate car le pouls glissant, perlé (hua), signe d’une stagnation des Mucosités-Glaires est aussi un signe normal de grossesse chez la femme quand il est perçu à la localisation du Pied.

Le point 40E (fenglong), point luo du zuyangming (Estomac) est considéré comme dispersant les Mucosités-Glaires. On peut aussi l’associer avec le 3RP (taibai), point yuan (source) qui servira à les harmoniser. En effet, les points luo ont cette particularité de régulariser l’énergie nourricière rong qi entre les méridiens couplés, à condition de puncturer aussi le point yuan du méridien concerné qui absorbera l’excès d’énergie, en l’occurrence, ici le 3RP. Macioca préconise en plus le 21R (youmen) car fortifie la Rate et harmonise l’Estomac.

Un vide de yin du Foie entraînant une dysharmonie Foie/Estomac

Le foetus se nourrit du Sang du Foie, ce qui entraîne son affaiblissement. Le Sang du Foie correspond au yin du Foie et de ce fait, nous avons un vide de yin de Foie. La Médecine Traditionnelle Chinoise postule que si le yin d’un organe ne peut équilibrer le yang de cet organe, alors le yang en excès s’échappe. Dans le cas de la grossesse, le yang de Foie se dégage sous forme de chaleur : c’est la Chaleur de Foie qui agresse ensuite l’Estomac. Cela s’explique par le cycle ko impliquant une inhibition de la Terre par le Foie dans la correspondance des cinq Mouvements.

On peut aussi  constater que ce mécanisme peut être favorisé par des antécédents de vide de yin des Reins qui déclenche aussi le vide de yin du Foie, ou des troubles du Sang. Selon la loi d’engendrement un vide de Rein qui nourrit mal son Fils (le Foie) engendre un vide de yin de Foie. En effet, chaque organe revêt un aspect fonctionnel yin (racine yin dont la fonction est de concentrer, élaborer) et yang (racine yang qui distribue et fait circuler l’Energie, le Sang).

Le tout peut se compliquer par l’apparition de « Glaires Chaleur » par perturbation du couple Rate-Estomac [1].

En conclusion, on a encore ici impact sur l’Estomac avec constitution d’un blocage du Réchauffeur Moyen.

Diagnostic et traitement de la Chaleur de Foie et Chaleur de l’Estomac

La symptomatologie de la Chaleur de Foie engendrée par le vide de yin de Foie se caractérise par des vomissements de liquides amers, voire acides, des sensations d’oppression et de douleurs costales, des vertiges, des acouphènes, des céphalées, migraines, des éructations avec soupirs, insomnie, irritation, constipation… La bouche est amère. La langue est rouge, enduit jaune. Le pouls est tendu, en corde (xian) et rapide (shu).

Le traitement à ce stade :

–        3F (taichong), point yuan et point de dispersion apaise le Foie en dispersant la Chaleur et le Feu en faisant communiquer le luo.

–        37VB (guangming), point luo couplé au 3F, rééquilibre le Foie.

–        21R (youmen) est indiqué dans des symptômes correspondant à la Chaleur de Foie [1].

Macioca propose aussi le 34VB (yanglingquan), 13VC (shangwan) et 34E (liangqiu).

Le tableau de chaleur de Foie peut se compliquer par la Chaleur de l’Estomac avec vomissements de mucosités toujours acides ou amères, mais accompagnés de grande soif, bouche sèche, haleine fétide, urines rares et foncées. La langue est rouge, cramoisie en son milieu. Le pouls est rapide (shu), glissant (hua) [[19]]. Le traitement consiste essentiellement à puncturer le 44E (neiting), point froid qui élimine la Chaleur de l’Estomac. Rempp préconise de ne pas l’associer au 36E car abaisse trop le qi mais on pourra le remplacer par le 34E (liangqiu), le 21E (liangmen) et le 11VC (xuanji) [18].

Vide de qi de Cœur et Feu du Cœur

L’influence du shen est primordiale dans la grossesse. L’émotion de l’événement, mais aussi la crainte, l’angoisse, l’anxiété et les divers troubles émotionnels peuvent engendrer un vide de qi du Coeur. Les pathologies des organes et des entrailles en vide ou plénitude peuvent entraîner le Feu Mental en rapport avec l’âme viscérale du Cœur, le shen. Celui-ci sera perturbé en cas d’insuffisance du yin du Rein, de Foie ou de Rate entraînant un yang apparent par non-contrôle du yin de Coeur.  Comme nous l’avons vu plus haut, la Médecine Traditionnelle Chinoise postule que si le yin d’un organe ne peut équilibrer le yang de cet organe, alors le yang en excès s’échappe. Le yang du Coeur se dégage sous forme de chaleur : c’est le Feu de Cœur qui agresse ensuite l’Estomac. 

Diagnostic et traitement du vide de qi du Cœur

Les symptômes à rechercher  sont les palpitations avec une sensation de vide dans le Coeur, un souffle court avec une dyspnée, une insomnie ou un sommeil agité parsemé de rêves, une asthénie. La langue est pâle. Les pouls sont fins (xi) et faibles (ruo).

5C (tongli), point luo du Coeur, 6MC (neiguan), 36E (zusanli), 14VC (juque), point mu du Coeur, 7C (shenmen) point source et point Terre du Coeur sont les différents points à utiliser. 

Diagnostic et traitement du Feu du Cœur 

Dans le Feu du Coeur, on retrouve les palpitations avec agitation, insomnie avec réveils fréquents associés à des cauchemars, aphtes, gingivites, urines rares et foncées. La langue est rouge avec la pointe plus rouge et un enduit jaune. Les pouls sont rapides (shu) et vastes (hong).

On piquera : 6MC (neiguan), 14VC (juque), 15V (xinshu), point assentiment shu de Coeur, 7C (shenmen), point source.

Le traitement commun quel que soit le mécanisme physiopathologique

On constate que les vomissements gravidiques dépendent globalement de la régulation du zujueyin (Foie), de zutaiyin (Rate-Pancréas) et des troubles des benshen (âmes viscérales). De ce fait, on peut inclure systématiquement aux points précédemment décrits les points suivants sauf exception :

– 6MC (neiguan), point clé du yinweimai, point luo du shoujueyin (Maître du Coeur).  Le yinweimai, merveilleux vaisseau intervient préférentiellement sur la sphère neuropsychique (dépression, anxiété, angoisse, instabilité mentale, troubles du sommeil etc..) et sur la sphère digestive (gastralgie, dyspepsie, vomissements&).

– 12VC (zhongwan), point mu de l’Estomac. Il harmonise Rate-Pancréas et Estomac. Selon Soulié de Morant [14], les points mu sont recommandés dans toutes les insuffisances d’énergie originelle et sont à utiliser pour combattre les déséquilibres internes (entrailles-organes).

– 36E (zusanli), point he du méridien d’estomac, utilisé pour faire descendre le qi et rafraîchir la Chaleur. Les points he sont les points d’entrée et de sortie de l’énergie. Ils permettent de relier l’Intérieur à l’Extérieur et sont souvent indiqués dans les affections gastro-intestinales et dans les maladies où le yin et le yang circulent en direction inverse (circulation d’Énergie à contre-courant, reflux), les maladies des fu (entrailles). Sa puncture permet de calmer, contrôler, équilibrer le qi et donc d’abaisser la Chaleur de l’Estomac.

– 4RP (gongsun), point luo de Rate, mais aussi point clé du chongmai.

Les essais contrôlés randomisés (ECR)

En 2004, une synthèse méthodique des essais comparatifs randomisés concernant le traitement des nausées et des vomissements gravidiques a permis de recenser dix-huit ECR, dont quatorze objectivaient des résultats favorables à l’acupuncture. Ces essais étaient très hétérogènes mais de qualité méthodologique correcte selon l’échelle de Jadad. Deux techniques se sont révélées les plus efficaces avec un niveau de preuve élevé : la puncture du 6MC (neiguan) et le port d’un bracelet d’acustimulation électrique sur 6MC. L’acupression sur le 6MC est efficace aussi mais avec un niveau de preuves plus faible [[20]]. Une seule étude pragmatique a comparé l’acupuncture (6MC, 12VC, 36E et acupression au 6MC) versus métoclopramide en perfusion avec supplémentation en vitamine B12. Le protocole acupunctural apparaît aussi efficace que celui au métoclopramide dans la réduction de l’intensité des nausées et la fréquence des vomissements [[21]]. On remarquera qu’un essai contrôlé randomisé [[22]], de très bonne qualité méthodologique (Jadad très satisfaisant 5/5) a montré la supériorité d’un protocole d’acupuncture traditionnelle selon la différenciation des syndromes (zheng) (stase de qi de Foie, Chaleur de l’Estomac etc..) versus acupuncture factice. Par ailleurs, leur effet est plus rapide que l’action du seul point 6MC, en réalisant 2 séances la première semaine, puis une séance par semaine sur trois semaines (5 séances au total) [[23]]. Pour terminer au Canada, l’algorithme de Motherisk décrit les stratégies applicables aux nausées et vomissements dans la grossesse. Le point 6MC en acupressure et en acupuncture est cité comme faisant systématiquement partie du traitement [[24]]. 


 Insomnie, anxiété de début de grossesse

L’anxiété, l’angoisse de début de grossesse, et souvent l’appréhension, peuvent engendrer l’insomnie.. Selon les Textes (SuwenLingshou) l’insomnie, dysharmonie yin – yang, aura généralement pour mécanisme physiopathologique un déséquilibre dans les états de vide ou plénitude des différents méridiens.  Ainsi on pourra constater un état d’insomnie en présence d’une plénitude de Foie, Coeur, Maître du Coeur, Triple Réchauffeur, Estomac, Poumon, Vessie ou d’une insuffisance de yin de Coeur, Maître du Coeur, Rate-Pancréas, Rein, Foie. En cas de grossesse, l’insomnie résultera essentiellement du vide du qi de Coeur, puis Feu du Coeur. En fait, dans tous les cas d’insomnie, l’âme viscérale du Coeur, le shen ne reste pas dans son logis le Coeur. On veillera donc essentiellement à équilibrer le qi par action sur le shoushaoyin (méridien de Coeur). 5C (tongli), point luo de Coeur et surtout 7C (shenmen) sont les points les mieux adaptés dès qu’il y a de l’anxiété. Le shenmen (7C), point de dispersion, sera utilisé en tant que point yuan (source) et porte de l’âme viscérale shen.

Le neiguan (6MC) sera stimulé en tant que point clé du yinweimai, merveilleux vaisseau qui contrôle qualitativement le yin. Par ailleurs, le neiguan (6MC barrière interne), point luo du shoujueyin permet de faire croître le yin et de stabiliser le shen. 6MC et 7C sont d’ailleurs aussi utilisés dans les troubles du sommeil du nourrisson [[25]].

Enfin le point 15V (xinshu), point assentiment shu de Coeur et le point 23V (shenshu), point assentiment shu de Rein équilibrent le Grand Méridien shaoyin.

Le chapitre LI du Lingshu : « les points iu d’organes » : « Si vous appuyez du doigt sur ces points, la douleur siégeant à l’organe correspondant est immédiatement soulagée. Il ne faut jamais puncturer ces points, qu’il y ait plénitude ou vide, il faut faire uniquement des moxas.». Les points beishu ont une action dispersante. Il est aussi possible de les puncturer. En effet le chapitre X du Suwen : « Ce que commandent les cinq organes » : « Il y a douze points d’assentiment shu. Tous ces points correspondent à l’énergie de l’extérieur, et c’est à ces points que l’on trouvera l’énergie perverse du dehors, d’où on pourra la chasser avec des aiguilles d’acupuncture ». A ce titre les points beishu gèrent les rapports de l’organisme avec l’extérieur et permettent de traiter les états pathologiques de type plénitude [[26]]. Mais dans le cas de l’insomnie qui est provoquée ici par un excès de yang vers le yin, on évitera de moxer et on se contentera d’équilibrer le shaoyin par la simple pose des aiguilles.

Enfin, dans certains cas, le point 3C (shaohai) pourra être utilisé en particulier si le stress ou l’anxiété sont manifestement associés à l’insomnie.

De nombreuses études d’acupuncture expérimentale ont permis d’évaluer l’efficacité de 7C, 3C, 6MC sur le stress et montrer leur action sur l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien et le système limbique [[27]].

Références

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Stéphan JM. Pathologies du premier trimestre de grossesse accessibles à l’acupuncture. Acupuncture & Moxibustion. 2008;7(3):256-262. (Version imprimable PDF)

Stéphan JM. Pathologies du premier trimestre de grossesse accessibles à l’acupuncture. Acupuncture & Moxibustion. 2008;7(3):256-262. (Version globale en HTML)

Assistance médicale à la procréation et infertilité selon les zheng

Temple Tamoul du Petit Bazar dédié à Shiva – Saint André – île de la Réunion – France
Temple Tamoul du Petit Bazar dédié à Shiva – Saint André – île de la Réunion – France

Formation : mise au point
OBJECTIF : Connaître les facteurs étiologiques de la stérilité conduisant à la mise en place de techniques de l’assistance médicale à la procréation. Connaître les différents tableaux cliniques zheng permettant de traiter une infertilité par acupuncture.
L’utilisation de l’acupuncture dans l’assistance médicale à la procréation (AMC), surtout dans la fécondation in vitro (FIV) devient de plus en plus fréquente, bien que son rôle dans l’infertilité soit encore débattu. Les facteurs étiologiques des stérilités seront tout d’abord étudiés, puis les différentes techniques de l’AMC, enfin la séquence thérapeutique et les résultats de la FIV. La stérilité selon la Médecine Traditionnelle Chinoise sera abordée selon la différenciation des syndromes (zheng). Un traitement appliqué à chaque zheng sera proposé en fonction des données de la sphygmologie et de l’examen de langue.

 Introduction

L’assistance médicale à la procréation (AMP) correspond aux pratiques cliniques et biologiques permettant l’insémination artificielle (IAC) et la conception in vitro, le transfert d’embryons ainsi que toute technique d’effet équivalent réalisée en dehors du processus naturel. En France, l’arrêté du 3 août 2010 [[1]] a légiféré les règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques d’assistance médicale à la procréation. La probabilité mensuelle d’obtenir naturellement une grossesse est de 25 % chez une femme âgée de 25 ans. Cette probabilité baisse avec l’âge et passe à 12% si la femme est âgée de 35 ans et seulement 6% à 42 ans, tout en restant très variable dans la population [[2]]. En 2009, selon les données de l’agence de la biomédecine, agence publique nationale de l’État français créée par la loi de bioéthique de 2004, il y a eu 131 716 tentatives d’AMP engendrant 21 759 enfants nés vivants (soit 2,6% des naissances). Le nombre de bébés nés dans le monde entier grâce à l’AMP en 2002 a été estimé entre 219 000 et 246 000. L’ICMART (The international Committee for Monitoring Assisted Reproductive Technology) précise ces chiffres en particulier pour la France et pour cinquante-trois autres pays recensés. Les naissances par FIV conventionnelle  sont, en moyenne, de 22,4% pour les 53 pays et 16,6% pour la France, et les FIV-ICSI sont respectivement de 21,2% et 18,3%, soit plus de 80% d’échec à chaque tentative de grossesse [[3]].

Le coût d’un cycle complet d’AMP n’est pas négligeable et dépend de la technique. Ainsi en 2007, une IAC coûtait entre 700 et 1200€, une FIV entre 3100 et 4100€, une FIV/ISCI de 3300 à 4500€, prix s’entendant calqués sur le tarif « sécurité sociale » hors dépassement d’honoraires [4].  Les chances de grossesse varient ainsi de 12% à 38% par tentative d’AMP en fonction de la technique. Suite à la première étude de Paulus parue en 2002, l’acupuncture semblait en mesure d’améliorer sensiblement ce pourcentage. Les études ultérieures offraient des résultats plus contrastés. Que doit-on en penser en 2011 ?

Rappels étiologiques

 Les causes de stérilité sont multiples. Chez la femme, les facteurs ovulatoires (aménorrhée, spanioménorrhée, cycles anovulatoires, insuffisance lutéale) en rapport avec des causes supra ou hypothalamiques, ou hypophysaires, sans oublier le syndrome des ovaires polykystiques, viennent au premier plan (plus de 30 % des cas) des causes de stérilité. Les facteurs tubopéritonéaux (occlusion tubaire, adhérences pelviennes, autres anomalies tubaires) à la suite par exemple d’une grossesse extra-utérine ou d’une infection, endométriose etc. sont également fréquents, bien que l’usage accru du préservatif a réduit le nombre de maladies sexuellement transmissibles qui favorisaient autrefois les infections des trompes. On peut aussi retrouver un facteur utérin ou cervical avec des malformations congénitales, des anomalies du col de l’utérus etc., des modifications de la glaire cervicale.

Chez l’homme, toutes les causes d’hypogonadismes hypogonadotropes, les insuffisances testiculaires primaires hyper ou normogonadotropes peuvent entraîner une infertilité. On pourra retrouver ainsi une oligospermie avec un nombre inférieur à 10millions/ml voire une azoospermie, une asthénospermie (mobilité inférieure à 40%), nécrospermie, tératospermie mais aussi  des anticorps anti-spermatozoïdes et les troubles de l’éjaculation etc.

Les différentes techniques d’AMP

L’AMP regroupe diverses techniques avec les gamètes des deux conjoints, mais aussi par don de gamètes (ovocytes, sperme ou embryon). 

L’insémination artificielle (IAC)

L’insémination artificielle intra-utérine avec sperme du conjoint (IAC) consiste à injecter des spermatozoïdes « préparés » dans la cavité utérine, le jour de l’ovulation. La stimulation des ovaires va permettre de maîtriser et d’améliorer l’ovulation. Elle est différente de celle utilisée en FIV car ne cherche à obtenir qu’un nombre restreint de follicules (deux à quatre). Plusieurs protocoles sont possibles : clomifène seul (exemple Clomid® ou Pergotime®, clomifène associée à de la FSH (Puregon® ou Gonal-F®) ou à de la  gonadotrophine postménopausique humaine (HMG) (Ménopur®), ou de la FSH ou des HMG seuls.

La fécondation in vitro (FIV)

La stimulation des ovaires va permettre le développement de plusieurs follicules. La ponction de ces follicules, faite juste avant l’ovulation, permet le recueil de plusieurs ovocytes. Après l’aspiration dans les follicules du fluide folliculaire et des ovocytes, ceux-ci sont mis en présence d’un pool de spermatozoïdes pour obtenir la fécondation. On procède ensuite à la « culture » de l’embryon dans un milieu enrichi en acides aminés, facteurs de croissance, etc.). Cette technique permet de court-circuiter les trompes (stérilités tubaires) et de rapprocher les spermatozoïdes des ovocytes (stérilités masculines).

L’injection intra-cytoplasmique de spermatozoïde (ICSI)

L’ICSI (Intra Cytoplasmique Sperm Injection), procédé récent (1992) de fécondation est comme son nom l’indique une technique qui injecte directement un spermatozoïde dans le noyau de l’ovocyte. C’est une technique de micromanipulation qui permet de pallier certaines anomalies des spermatozoïdes empêchant la fécondation. A l’aide d’une micropipette, on injecte directement un spermatozoïde dans l’ovocyte. Cette intervention se fait au laboratoire après un traitement de stimulation ovarienne et une ponction des ovocytes identiques à une FIV, tout comme le transfert et la congélation des embryons. L’ICSI utilise une technologie permettant de visionner et de manipuler les spermatozoïdes à un grossissement important de l’ordre de X200 à X400. En cas d’échec, on pourra effectuer un grossissement de l’ordre de X5000 à X10000, c’est l’IMSI (Intra cytoplasmic magnified sperm injection) qui permet de rechercher les défauts morphologiques de la tête du spermatozoïde.

Transfert d’embryons congelés (TEC)

La possibilité de congeler les embryons a été proposée dès 1983. Les embryons stockés dans l’azote liquide (-196°C) conservent un potentiel évolutif. Si le nombre d’embryons obtenus est supérieur au nombre d’embryons à transférer, les embryons surnuméraires peuvent être congelés à condition qu’ils soient de très bonne qualité. Lors du transfert, les embryons sont placés dans un cathéter, puis introduits délicatement dans la cavité utérine.

Don de gamètes

Les mêmes techniques sont réalisées : FIV, ICSI et TEC. Cependant, même si cette activité d’AMP augmente, elle reste très inférieure à la demande avec une situation de pénurie. De ce fait, de nombreux couples, confrontés à de très longs délais d’attente, se déplacent dans des pays étrangers où existe un recours à une AMP avec don d’ovocytes beaucoup plus facile qu’en France [2].

La séquence thérapeutique de la FIV


Stimulation de l’ovulation

La stimulation ovarienne doit maitriser quatre points : bloquer une ovulation prématurée, provoquer la maturation folliculaire, déclencher l’ovulation et bien sûr éviter une hyperstimulation ovarienne qui entraîne prise de poids, hypovolémie et troubles hydroélectrolytiques. Dans le but d’éviter que l’ovulation ne se produise spontanément, on utilisera soit les agonistes du GnRH (Gonadotropin Releasing Hormone, encore nommée LHRH Luteinizing Hormone Releasing Hormone) : Décapeptyl®, Enantone®, Lucrin®, Synarel® etc. ; soit les antagonistes du GnRH (Cetrotide®, Orgalutran®, Antagon® etc.).

On fera augmenter le taux de l’hormone FSH afin d’obtenir la maturation de plusieurs ovocytes. Ceci est possible, soit indirectement par l’action sur l’hypothalamus par les comprimés de clomifène (ancien protocole), soit surtout en stimulant directement les ovaires par injection de la FSH comme le Purégon®, le Gonal-F® voire apport de ménotropine (HMG) apportant à la fois FSH et LH comme le Ménogon® ou le Ménopur®.

Il existe de nombreux protocoles avec de nombreuses variantes afin de s’adapter aux multiples cas particuliers [[4]]. Voici les principaux :

-protocole long lutéal qui commence par une phase de blocage hormonal avec les agonistes à partir du 21ème jour du cycle précédent, suivi après dosage d’œstradiol et échographie de contrôle du blocage par une phase de stimulation et de maturation folliculaire par la FSH ou HMG ;

– protocole long folliculaire qui commence au 2ème jour des règles avec utilisation aussi des agonistes et suivi également par une phase de maturation par FSH ou HMG ;

– protocole court antagoniste : il n’y a pas de phase de blocage. La stimulation débute au premier jour du cycle par l’injection sous-cutanée de FSH ou  HMG. La surveillance commence au 7ème jour du cycle selon les mêmes modalités que pour les protocoles longs. Lorsque la taille des follicules atteint un certain seuil ou que le taux d’estradiol arrive à un certain niveau, on injecte alors l’antagoniste du GnRH.

Le déclenchement de l’ovulation

Lorsque la stimulation et la maturation folliculaire sont suffisantes, l’ovulation est déclenchée, mimant le pic de LH. Le déclenchement de l’ovulation impose l’arrêt des autres traitements. Il se fait dans les mêmes conditions quel que soit le protocole long ou court de stimulation. On utilise par injection sous-cutanée, soit les gonadotrophines chorioniques (HCG) naturelle (HCG endo®, Choriomon®, Novarel®…), soit l’HCG recombinante (Ovitrelle®, Ovidrel®…). Les HCG ont le pouvoir, par leur action LH de déclencher l’ovulation une quarantaine d’heure après leur injection.

Le recueil des ovocytes : la ponction folliculaire ; recueil du sperme

La ponction s’effectue environ 34 à 36 heures après l’injection d’HCG. Elle est réalisée sous contrôle échographique à l’aide d’une aiguille permettant de ponctionner les follicules à travers la paroi du vagin et de recueillir les ovocytes par aspiration du liquide folliculaire. Le recueil du sperme quant à lui, s’effectue le jour de la ponction des ovocytes, après un délai d’abstinence sexuelle compris entre deux et six jours.

Le transfert d’embryons

Après insémination et fécondation des ovocytes, la surveillance de la croissance embryonnaire est réalisée et on observe des embryons de deux, quatre ou huit cellules. Deux ou trois jours après la ponction selon les cas, le transfert d’embryons (entre un à quatre) est réalisé (voir figure 1).

Figure 1. Schéma récapitulatif de la fécondation in vitro et des différentes étapes qui se déroulent normalement dans les trompes. Graphique issu du site http://www.oriade.fr/fertilite/techniques_pma.htm consulté le 4 octobre 2011.

Les résultats

A chaque technique correspondent des indications et des résultats spécifiques. Les chances de grossesse varient ainsi de 12% à 38% par tentative. Les meilleurs taux de grossesse sont obtenus après ICSI et après don de gamètes. En ICSI, des taux proches de 32% de grossesses échographiques par ponction avec don de spermatozoïdes et de 38% avec don d’ovocytes sont observés (figure  2).

Figure 2. Taux de grossesses échographiques après tentative d’AMP selon la technique et l’origine des gamètes en 2009 (figure issue du rapport de l’activité de l’AMP 2009) [2].

Une fois la grossesse obtenue, les risques de fausses-couches spontanées sont comparables à ceux des grossesses obtenues naturellement. Les taux de naissance sont en moyenne de 11% à 31% par tentative. La figure 3 montre la part respective des enfants nés selon les techniques d’AMP et l’origine des gamètes et des embryons : 6,1% des enfants sont nés grâce à un don ; 5,1% des enfants sont issus de don de spermatozoïdes (1110 enfants), 0,9% de dons d’ovocytes (190 enfants) etc.

Figure 3. La part des enfants nés après AMP en 2009 selon la technique et l’origine des gamètes (N = 21 759), (figure issue du rapport de l’activité de l’AMP 2009) [2].

La stérilité selon la Médecine Traditionnelle Chinoise

L’infertilité selon les Textes

Selon le Suwen [[5]], « A 2 fois 7, 14 ans la vie sexuelle (Tian gui) apparaît.  Le vaisseau conception se perméabilise, le vaisseau Tai Chong s’est pleinement développé, les menstrues amènent régulièrement un état de fécondité (Livre I. Chapitre 1)». Ainsi on sait depuis le Suwenque le renmai et le chongmaisont liés tous deux à la fécondité. Mais, c’est dans le livre neuf du Maijing 脈經 «Classique des Pouls», écrit par WangShuhe 王叔和 au IIIème siècle [[6]] qu’un chapitre fait référence à la stérilité. On y distinguait les stérilités primaires wuzi (qui signifie non enfantement) et les stérilités secondaires duanxi (interruption de descendance) [[7]]. Chao Yuanfang en 610 EC dans son ouvrage le Zhu Bing Yuan Hou Zong Lun (Traité Général de l’Etiologie et de la Symptomatologie des Maladies) dit que l’infertilité féminine est provoquée par l’énergie perverse du Froid s’installant dans les méridiens et atteignant le Sang. Le Sheng Ji Zong Lu (Encyclopédie Impériale de la Médecine), rédigé et terminé en 1117 par un groupe de médecins aux ordres de l’empereur, explique qu’en cas de vide de yang du Rein entraînant le Froid interne, l’utérus ne sera pas apte à enfanter [[8]]. Wang Zhi Zhong  (dynastie Song XIIème) dans le rouleau VII du Zhen Jiu Sheng Jing (Traité d’acupuncture et de moxibustion) [[9]] est plus pragmatique et sans s’intéresser à la physiopathologie offre toute une série de points à puncturer en fonction de symptômes bien précis de la stérilité féminine wuzi comme par exemple 8F (ququan), 3VC (zhongji), 4VC (guanyuan), 11F (yinlian), 32V (ciliao), 2R (rangu), 30E (qichong) etc..

Li Gao 李杲 en 1249 (figure 4) dans son Pi Wei Lun (Traité de la Rate et de l’Estomac) dit que les quatre plus importants méridiens impliqués dans les menstruations sont les chongmai et renmai qui gouvernent essentiellement les menstruations et la conception ainsi que dumai et daimai. Il impliqua la Rate et l’Estomac comme les organes pivots des problèmes d’infertilité [[10]]. Zhu Danxi (Zhu Zhenheng 朱震亨) durant la dynastie Jin-Yuan (1115-1368), puis Chen Xiu-yuan dans son Nu Ke Yao Zhi (traité de gynécologie) expliquent que le traitement d’une infertilité chez la femme doit passer par la régulation des menstruations. Plus récemment, un fameux lao yi sheng, Huang Shouren (1905-1978) dans son Huang Shouren yijing (黄寿人醫鏡) montre que l’utérus bao gong est gouverné par le chongmai et renmai et que Rein et Foie étaient également impliqués dans la stérilité [8].

Figure 4. Li Gao 李杲 1180-1252.

Les tableaux cliniques

Il en résulte selon la Médecine Traditionnelle Chinoise (MTC) qu’une infertilité féminine aura pour mécanisme une insuffisance ou une stagnation de qi et de Sang. On observera donc selon la différenciation des syndromes (zheng) : Vide de yin du Rein, Vide de yang du Rein, Vide de Sang, Vide de Rate, Stagnation du qi du Foie, Glaires-Humidité et Chaleur Humidité [7, 8, 11-15]. Liang dans le cadre de la médecine intégrative va associer Vide de yin du Rein, Vide de yang du Rein, Vide de Sang au diagnostic occidental des troubles de l’ovulation, malformation utérine, baisse en œstrogène ou en progestérone, taux élevé de FSH, qualité insuffisante ou pauvre des follicules et/ou des ovules. Les tableaux de Vide de Rate, Stagnation du qi du Foie, Glaires-Humidité seront associés à l’occlusion tubaire et autres anomalies tubaires, fibromes utérins, adhérences pelviennes, kystes ovariens et stress. Enfin la Chaleur Humidité inclura tous les troubles infectieux utérins, vaginaux, pelviens, de l’arbre urinaire et des trompes de Fallope [[16]].

Dans l’infertilité masculine, la MTC retient essentiellement selon les zheng : Vide de Rate, Glaires-Humidité, Vide de yang du Rein, Vide de yin du Rein[12,[17]].

Traitement de l’infertilité féminine selon les zheng [7,11-15,18]]

Traitement commun

Quel que soit le tableau zheng, on punctera systématiquement les points : 3VC (zhongji), 4VC (guanyuan) et zigong(« palais de l’enfant », point hors méridien situé à 3 cunde la ligne médiane au niveau du 3VC).

Vide de yin du Rein

Les signes cliniques principaux sont : vertiges, acouphènes, douleurs lombaires, transpiration nocturne, troubles de la mémoire, bouche sèche la nuit. La langue est normale sans enduit. Elle peut être rouge avec quelques fissures et toujours sans enduit si on a une atteinte Chaleur-Vide avec comme signes cliniques la sensation de chaleur en soirée et les pommettes rouges. Les pouls sont xi (fin) et shuo (rapide). Les points communs proposés par les différents auteurs sont : 52V (zhishi), 23V (shenshu), 3R  (taixi), 6Rte (sanyinjiao), 7P (lieque), 6R (zhaohai).

Vide de yang du Rein

Les signes cliniques principaux sont : lombalgies, vertiges, acouphènes, sensation de froid, fatigue, faiblesse des jambes, baisse de la libido, dépression, selles molles. La langue est pâle avec un enduit blanc. Les pouls sont xi (fin) et chen(profond) ou chi (lent) et chen (profond). Les points à utiliser sont : 23V, 3R, 13R (qixue) et moxibustion sur 4VG (mingmen) et 4VC.

Vide de Rate, Vide de Sang

Les signes cliniques principaux sont : asthénie, dépression, insomnie, menstruations peu abondantes ou aménorrhée, douleurs articulaires… La langue est mince et pâle. Les pouls sont xi (fin) et ruo(faible). Le Vide de Rate recoupe le Vide de Sang. Si Vide de Rate : 6Rte, 36E (zusanli), 20V (pishu), 12VC (zhongwan), auxquels on pourra rajouter si davantage un vide de Sang : 23V, 3R, 17V, 10Rte (xuehai) (20V et 36E en moxibustion).

Stagnation du qi du Foie

Les signes cliniques principaux sont : distension des hypochondres et de la poitrine, mélancolie, dépression, irritabilité, cycles irréguliers avec syndrome prémentruel. La langue a un enduit mince et gras de stase ou les bords légèrement rouges. Les pouls sont xian (tendu). Les points communs proposés sont : 3F (taichong), 6Rte, 6MC (neiguan), 34VB (yanglingquan).

Glaires Humidité

Les signes cliniques principaux sont : obésité, sensation d’étouffement dans la poitrine, nausées, leucorrhées blanchâtres, distension abdominale… La langue a un enduit blanc, épais et gras. Les pouls sont hua (glissant) et ru (mou). Les points communs proposés par les différents auteurs sont : 12VC, 40E (fenglong), 28V (panguangshu).

Chaleur Humidité

Les signes cliniques principaux sont : sensation de plénitude de l’épigastre,  éruptions cutanées, sensation de lourdeur du corps, nausées, vomissements, inappétence, ballonnements, céphalées, soif… La langue est rouge avec un enduit jaune et gras. Les pouls sont ru (mou) ou hua (glissant) et shuo (rapide). Les points communs proposés par les différents auteurs sont : 4GI (hegu), 9Rte (yinlingquan), 6Rte, 11GI (quchi), 28V.

Références

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Stéphan JM. Assistance médicale à la procréation et infertilité selon les zheng. Acupuncture & Moxibustion. 2011;10(4):299-304. (Version PDF imprimable)

Stéphan JM. Assistance médicale à la procréation et infertilité selon les zheng. Acupuncture & Moxibustion. 2011;10(4):299-304. (Version globale couleur)

L’acupuncture autour de la naissance : bases scientifiques et état des lieux en 2010

Acupuncture around birth: Scientific basis and evaluation

Soir de septembre – Maurice Denis 1911 – Musée des Beaux-Arts – Nantes – France
Soir de septembre – Maurice Denis 1911 – Musée des Beaux-Arts – Nantes – France

Jean-Marc Stéphan

Résumé :  L’acupuncture autour de la naissance implique médecins, sages-femmes mais aussi patientes à la recherche de traitements efficaces non tératogènes pendant leur grossesse. Un état des lieux des études contrôlés randomisées (ECR) permet de déterminer si l’acupuncture peut être raisonnablement indiquée selon les niveaux de recommandations de la Haute Autorité de Santé Française en consultation prénatale, en préparation maternelle, en salle de naissance et en suites de couches. Mots-clés : obstétrique nausées – vomissements – acupuncture – syndrome douloureux pelvien gravidique – syndrome de Lacomme – versions – maturation et induction du col – analgésie – hypogalactie – mastite – ECR – recommandations

Autour de la naissance, les hôpitaux et maternités offrent de plus en plus de soins par acupuncture aux femmes en demande de grossesse ou enceintes. Ainsi en Europe, l’acupuncture a trouvé sa place dans de nombreux services de maternités et cela dès six semaines de gestation jusqu’à six semaines en post-partum [[1],[2]]. En effet, en théorie, l’acupuncture est une médecine idéale dans l’accompagnement d’une grossesse parce qu’elle n’oblige pas la femme enceinte à prendre des thérapeutiques médicamenteuses pouvant entraîner des effets tératogènes. L’utilisation de l’acupuncture peut se faire en consultation prénatale, en préparation maternelle, en salle de naissance et enfin en suites de couches.

En consultation prénatale

Nausées et vomissements du premier trimestre et hyperemesis gravidarum

En 2004, une synthèse méthodique des essais comparatifs randomisés (ECR) a permis de recenser dix-huit ECR, dont quatorze objectivaient des résultats favorables à l’acupuncture. La puncture du point 6MC (neiguan) a montré un niveau de preuve élevé [[3]] et de ce fait la Haute Autorité de santé en France recommande depuis 2005 son utilisation dans les nausées et vomissements gravidiques avec un grade de recommandation A, c’est à dire preuve scientifique établie [[4]].

Syndrome douloureux pelvien gravidique (syndrome de Lacomme)

Le syndrome de Lacomme, avec sa prévalence estimée à 20% des femmes enceintes [[5]] est l’une des autres grandes indications en consultation prénatale. Ceci se base sur des essais contrôlés randomisés de bonne qualité méthodologique [[6],[7]], qui ont objectivé une atténuation statistiquement significative dans le groupe acupuncture versus le groupe traitement standard chez des femmes entre 32 et 37 semaines de grossesse. En 2007 et 2008, deux revues systématiques recommandaient d’ailleurs l’utilisation de l’acupuncture dans les douleurs pelviennes et lombaires basses [[8],[9]]. On peut donc reprendre les conclusions des recommandations européennes de Vleeming et coll. [5] qui donnaient un grade de recommandations de niveau B à l’acupuncture dans le syndrome de Lacomme.

Version des fœtus en présentation du siège

En France, 68% des nouveaux-nés en présentation du siège sont césarisés. Afin de diminuer la fréquence de ce problème, la réalisation d’une version par manœuvres externes est habituellement proposée vers la 36ème semaine d’aménorrhée (SA). La moxibustion associée éventuellement à l’acupuncture ou l’électroacupuncture semble être une alternative intéressante car méthode simple et dénuée d’effets secondaires. La moxibustion, qui utilise la chaleur produite en brûlant des préparations contenant de l’armoise (Artemisia vulgaris) est appliquée sur le point d’acupuncture 67VE (zhiyin). De nombreux travaux ont objectivé son efficacité. Ainsi les travaux de Cardini paru en 1998 dans la revue Jama a montré que la moxibustion entraîne de manière statistiquement significative un taux de présentation céphalique de 75,4% plus élevé que dans le groupe témoin (47,7%) à 35SA [[10]]. Habek en 2003[[11]], Neri en 2004 [[12]] confirment. Coyle et coll. dans leur revue Cochrane déclarent que la moxibustion peut être avantageuse pour réduire les versions par manœuvre externe mais qu’il y a besoin de réaliser des essais contrôlés randomisés bien conçus et de haute qualité méthodologique [[13]]. Plus récemment la métananalyse de Li parue en février 2009 a analysé dix ECR impliquant 2090 participantes et sept essais cliniques non randomisés (n=1409). Les auteurs concluent que la moxibustion, l’acupuncture ou la stimulation laser au point d’acupuncture zhiyin (67V) montrent un effet bénéfique dans la correction de la présentation du siège. La moxibustion est par exemple plus efficace qu’aucun traitement (RR 1,29 ; IC à 95% 1,17 à 1,42) dans la version [[14]].

En conclusion, l’acupuncture peut être recommandée dans les versions des fœtus en présentation de siège au grade B (présomption scientifique) selon le niveau des recommandations de la Haute Autorité de Santé sur une échelle allant de C (faible niveau de preuves) à A (preuve scientifique établie).

En préparation maternelle

Maturation du col et induction du travail

La revue Cochrane réalisée en 2004 et réactualisée en 2008 objective que l’acupuncture offre une efficacité clinique statistiquement significative par rapport au groupe contrôle dans l’induction du travail. En outre, on utilise moins les autres techniques d’induction [[15]]. Ainsi on observe un raccourcissement significatif (p=0,04) aux 6ème et 8ème jours dans le groupe acupuncture versus le groupe sans traitement. L’accouchement survenait en moyenne 5 jours après la date prévue versus 7,9 jours dans le groupe contrôle, soit 69 heures plus tôt dans le groupe acupuncture (p=0,03) [[16]].

L’électroacupuncture serait également efficace dans l’induction du travail. En 2008, dans un ECR pilote prospectif canadien chez des femmes à terme à 41SA, les points ont été stimulés électriquement à une fréquence de 1 à 2 Hz pendant 30 à 45mn. Les auteurs ont constaté une différence de 62 heures entre les deux groupes (en faveur du groupe « traitement »). De surcroît, dans le groupe traitement, il y avait une réduction moyenne de la période de travail de 2 heures et 20 minutes [[17]].

L’acupuncture peut également, au terme et après rupture spontanée des membranes, accélérer le travail. La durée de travail a été réduite de manière statistiquement significative (différence moyenne de 1,7 heure, p=0,03) ainsi que l’utilisation d’ocytocine dans le groupe acupuncture comparé au groupe témoin. Par ailleurs, le groupe acupuncture avait une durée significativement plus courte de la phase active du travail que celle du groupe contrôle (différence moyenne de 3,6h ; p=0,002) [[18]].

En conclusion, l’acupuncture peut aussi être proposée dans la maturation et l’induction du travail avec un grade B (présomption scientifique) selon le niveau des recommandations de la Haute Autorité de Santé [[19]].

En salle de naissance

Analgésie obstétricale durant l’accouchement

Durant l’accouchement, l’acupuncture réduit de façon importante l’usage d’autres thérapeutiques analgésiques éventuellement pourvoyeuses d’effets secondaires pour la mère et le fœtus.

En 2004, une revue systématique a évalué les preuves d’efficacité de l’acupuncture dans les douleurs lors du travail. Trois ECR sur 390 essais cliniques ont été identifiés ayant une qualité méthodologique généralement bonne. Deux ECR ont comparé l’acupuncture versus le traitement habituel et ont conclu à une réduction de la mépéridine et/ou de l’analgésie péridurale. Les auteurs ont conclu que les preuves pour utiliser l’acupuncture en adjonction étaient prometteuses mais nécessitaient encore de nouvelles études de plus grande puissance [[20]]. Ainsi l’essai suédois de Ramnero, concernant une population de 90 parturientes a objectivé que le traitement par acupuncture pendant le travail a significativement réduit le besoin en analgésie péridurale (12 % versus 22 % dans le groupe contrôle (n=44). Aucun effet secondaire n’a été signalé [[21]]. La revue de la Cochrane de 2006 montre que l’acupuncture peut être bénéfique dans la gestion de la douleur du travail en obstétrique. Les auteurs objectivent moins de nécessité de soulager la douleur dans les groupes acupuncture par rapport aux groupes contrôles (RR=0,70 avec IC à 95% : 0,49 à 1,00 dans 2 ECR de 288 femmes) [[22]].

On peut faire le même constat d’efficacité pour l’électroacupuncture (EA) à une fréquence alternée de 2 et 100 Hz pendant 20 mn [[23]].

L’ECR de Borup et coll. a été conduit chez 607 femmes saines en travail et à terme bénéficiant d’acupuncture (n=314), TENS (n=144) ou analgésiques traditionnels (n=149). Les résultats objectivent que l’utilisation des méthodes invasives ou pharmacologiques était significativement plus basse dans le groupe acupuncture versus groupe analgésique traditionnel (p < 0,001) et versus TENS (p=0,031). L’acupuncture réduit le besoin en utilisation d’analgésie pharmacologique (principalement le protoxyde d’azote) ou invasive durant l’accouchement [[24]]. Pour conclure, on peut recommander l’acupuncture dans l’analgésie du travail de l’accouchement, au grade B (présomption scientifique).

En suites de couches

Engorgement, mastite

Dans le soulagement des symptômes inflammatoires du sein pendant la lactation, l’acupuncture peut également être proposée [[25]] avec amélioration significative (p=0,01) de l’index de sévérité des signes cliniques. Elle serait un meilleur choix thérapeutique que l’utilisation d’ocytocine en spray nasal.

Hypogalactie

Un ECR a évalué l’efficacité du point IG1 (shaoze) dans l’insuffisance de lactation après accouchement en fonction de l’âge de la patiente.  Quatre-vingt-douze mères souffrant d’hypogalactie ont été randomisées dans un groupe traité IG1 (n=46) et un groupe témoin GI1 (n=46). Les résultats montrent une efficacité statistiquement significative (p<0,01) de 100% dans le groupe traité versus 69,6% dans le groupe contrôle [[26]]. Dans un autre ECR multicentrique en simple aveugle publié en langue chinoise, on constate que selon le même protocole concernant 276 femmes, le groupe EA (n=138) au point IG1 (shaoze) offre une amélioration de l’allaitement de 97,8% versus 24,3% dans le groupe contrôle GI1 (p<0,05). D’autre part, le groupe traitement montre une augmentation significative de la quantité de lait et un taux de prolactine meilleur que dans le groupe contrôle (p<0,01). En conclusion, il semble que l’acupuncture possède des effets thérapeutiques sur l’allaitement [[27]].

Conclusion

Pour nombre de sages-femmes et d’obstétriciens, l’acupuncture peut être un moyen de pallier la frustration engendrée par le manque de molécules sûres à offrir aux femmes dans les petites affections de la grossesse. Celles-ci pourront bénéficier d’un traitement efficace dans les nausées du premier trimestre, le syndrome du canal carpien, les céphalées, les migraines, les douleurs de poitrine, les hémorroïdes, les douleurs abdominales, la constipation, les diarrhées, les sciatiques, les lombalgies, le syndrome de Lacomme, l’hyperemesis gravidarum etc., mais aussi dans les corrections des mauvaises présentations. L’acupuncture pourra aussi être utilisée en fin de grossesse dans la maturation du col puis en salle de naissance dans les douleurs de l’accouchement et l’induction du travail. En suites de couches, il existe des indications dans le traitement des douleurs périnéales, l’engorgement mammaire ou l’insuffisance de lactation, les mastites et les dépressions post-natales. Enfin, l’acupuncture joue un rôle croissant dans l’assistance médicale à la procréation et la fécondation in vitro comme le laisse entendre la méta-analyse de Manheimer [[28]] de 2008 et la revue Cochrane de Cheong [[29]]. Néanmoins, il est encore nécessaire de réaliser de nouveaux essais contrôlés randomisés de grande puissance et de bonne qualité méthodologique car seules à l’heure actuelle les nausées gravidiques ont un grade A dans les recommandations HAS, les autres n’ayant pour la plupart qu’un grade B.

Selon le décret n° 2008-863 du 27 août 2008, les sages-femmes sont autorisées à pratiquer des actes d’acupuncture, sous réserve que la sage-femme possède le DIU d’acupuncture obstétricale (JORF n°0261, arrêté du 2 novembre 2009). Le diplôme universitaire d’acupuncture scientifique de Paris Sud XI qui vient de se créer pourrait aussi très bientôt faire partie des diplômes validants.

Dr Jean-Marc Stéphan

jm.stephan@acupuncture-medicale.org

Directeur de la revue Acupuncture & Moxibustion

Vice-Président de la FA.FOR.MEC (fédération des acupuncteurs pour leur formation médicale)

Secrétaire-Général de l’Ecole Française d’Acupuncture et de l’Association Scientifique des Médecins Acupuncteurs de France (ASMAF-EFA)

Médecin acupuncteur attaché au CH de Denain
Attaché d’enseignement à la faculté de médecine de Lille, Rouen et Paris Sud XI

Renseignements

DU Acupuncture Scientifique : Contacts : Secrétariat d’Anesthésie-Réanimation Hôpital Bicêtre Université Paris XI – UFR de Médecine : 0145213447/ 3441 ; courriel : dar.anesthesie@bct.aphp.fr ;

www.acuscience.com

DIU Acupuncture Obstétricale :  Contacts : Secrétariat de FMC des Universités de Lille, Rouen, Nîmes, Strasbourg ou Paris. 

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L’acupuncture en suite de couches : l’hypogalactie

Femmes lors d’une cérémonie de mariage dans un village du désert du Thar – Rajasthan – Inde
Femmes lors d’une cérémonie de mariage dans un village du désert du Thar – Rajasthan – Inde

Résumé : L’hypogalactie peut entraîner un arrêt de l’allaitement maternel avec pour conséquence des risques de morbidité pour le nourrisson. La thérapeutique usuelle passe par l’optimisation de la pratique de l’allaitement et un soutien psychologique de la mère. Selon les conceptions de la MTC et de la différenciation des syndromes (zheng), on distingue l’hypogalactie de type Plénitude (stase du qi du Foie) de celle de type Vide (Vide de qi et de Sang), principalement due à une carence de l’Estomac et du chongmai. Les essais contrôlés randomisés qu’ils soient de type pragmatique ou explicatif permettent de conclure que l’acupuncture peut s’intégrer idéalement dans le cadre d’une médecine intégrative. Mots clés : hypogalactie – acupuncture – prolactine – ocytocine – lactation – zheng – ECR pragmatique.

Summary: Hypogalactia may result in cessation of breastfeeding with the consequent risk of morbidity for the infant. The usual treatment involves the optimization of the practice of breastfeeding and counseling of the mother. According to the concepts of TCM and differentiation of syndromes (zheng), we distinguish the type hypogalactia Fullness (stagnation of Liver qi) of the type Deficiency (Deficiency of qi and blood), mainly due to a deficiency of the Stomach and chongmai. Randomized controlled trials that they are pragmatic or explanatory style can be concluded that acupuncture can fit ideally in the context of integrative medicine. Keywords: hypogalactia – acupuncture – prolactin – oxytocin – lactation – zheng – pragmatic RCT.

Comme l’engorgement mammaire étudié dans un précédent article [[1]], le défaut d’allaitement maternel et notamment l’hypogalactie voire l’agalactie sont des facteurs de risques de morbidité, voire de mortalité pour l’enfant. En effet, l’allaitement a un effet protecteur vis-à-vis des infections gastro-intestinales et dans une moindre mesure vis-à-vis des infections ORL et respiratoires. La France affiche un retard important quant à la pratique de l’allaitement maternel. En 2000, le pourcentage d’enfants allaités exclusivement par leur mère huit jours après la naissance était de 52,3 % et de 54,8 % en 2001. Le principal motif d’arrêt de la lactation des femmes avant neuf semaines est la perception d’une insuffisance de lait (38% des cas). Cela pourrait être davantage la conséquence de facteurs psychologiques et socioculturels et de pratiques inappropriées d’allaitement que d’une incapacité physiologique à produire suffisamment de lait. Ainsi dans les sociétés où l’allaitement est la norme, les échecs d’allaitement sont nettement moins fréquents.

La thérapeutique passe par l’optimisation de la pratique de l’allaitement associée à des encouragements et du soutien visant à restaurer la confiance de la mère dans ses capacités à satisfaire les besoins de son bébé. La stagnation staturo-pondérale du nourrisson sera  évaluée afin d’identifier le retentissement de l’insuffisance des apports de lait maternel chez l’enfant [[2]]. L’acupuncture aurait-elle une place dans le contexte du panel de soins de la médecine intégrative ?

Rappel de la biologie de la lactation

Chez la femme, la montée laiteuse se produit environ quarante huit heures après l’accouchement, suite à l’expulsion du placenta, source importante d’hormones placentaires comme les estrogènes et la progestérone qui bloquent la fonction de lactation et d’éjection du lait jusqu’à l’accouchement. Dès cette expulsion, on observe une chute du taux d’œstradiol et surtout de progestérone qui va entraîner une libération de prolactine. Celle-ci est une hormone antéhypophysaire dont les concentrations sanguines varient en fonction du sexe et du stade physiologique et physiopathologique de l’individu. Pendant la grossesse, elle augmente progressivement pour atteindre 150 à 250 ng/ml. La libération de cette hormone est sous l’influence stimulatrice de la PRH (Prolactin Releasing Factor) et de la TRH (Thyrotropine Releasing Hormone). Elle est inhibée par la PIF (Prolactin Inhibiting Factor), identifiée comme étant la dopamine. Le tonus dopaminergique inhibiteur est continu, assurant l’inhibition de la libération d’une hormone par ailleurs à synthèse constante. Le contrôle de ce tonus permet en conséquence de moduler la sécrétion de prolactine. Trois facteurs sont donc nécessaires à la lactogénèse : un épithélium mammaire développé, une concentration très élevée de prolactine et une chute de la concentration d’estrogènes et de progestérone. Incidemment, dans certains cas de rétention placentaire, la montée laiteuse sera encore plus retardée. Il est à noter que le moment de la montée laiteuse ne dépend pas de la tétée  par le nouveau-né mais bien des changements hormonaux associés à la parturition.

La lactogénèse est associée à une augmentation abrupte du volume de lait sécrété. En effet, celui-ci passe de 50 ml par jour au 2ème jour à environ 500 ml au 4ème jour.  Il y a ensuite une augmentation graduelle pour atteindre environ 850 ml par jour 3 mois après l’accouchement. Deux hormones sont nécessaires pour le maintien de la sécrétion lactée : l’ocytocine et la prolactine (figure 1). L’ocytocine est nécessaire pour l’éjection du lait. La prolactine est essentielle pour maintenir la différenciation des cellules alvéolaires.  La sécrétion de prolactine est augmentée pendant la tétée. Cette augmentation est proportionnelle à la force et la durée du stimulus de  tétée.  Le pic de prolactine lors de l’allaitement diminue à mesure que la lactation se prolonge. Néanmoins, les niveaux de prolactine semblent suffisants pour maintenir la lactation.

Figure 1. La mise en place de la lactation nécessite la prolactine (prolactogène) et l’ocytocine qui permet l’éjection du lait grâce à la contraction des cellules myoépithéliales. L’entretien de la lactation sera réalisé par l’action mécanique de la vidange (la tétée) entraînant un rétrocontrôle hypothalamo-hypophysaire avec augmentation à nouveau de la prolactine et de l’ocytocine.

Stratégies diagnostiques et thérapeutiques

Le sentiment d’insuffisance de production de lait, ou hypogalactie est très répandu chez les mères. Elles fondent ce sentiment sur des constatations diverses : seins mous, pleurs du bébé, selles moins fréquentes, seins qui ne coulent plus etc. En réalité, l’insuffisance de lait physiologique est très rare. Dans la majorité des cas, il s’agit soit de la perception d’une insuffisance de lait, soit d’une insuffisance de lait secondaire, conséquence d’une conduite inappropriée de l’allaitement  due à des tétées inefficaces et peu nombreuses. Donc il s’agit bien souvent d’un phénomène transitoire et susceptible d’être corrigé par l’optimisation de la pratique de l’allaitement.

L’allaitement selon les conceptions de la Médecine Traditionnelle Chinoise

Dans un précédent article, a été montré que le chongmai a une forte influence sur les seins [1].  De même, le renmai, Mer des Méridiens yin, Vaisseau Conception, qui a un rôle essentiel autant durant la grossesse que durant l’accouchement, favorise la transformation des jinye (les Liquides Organiques), régule le Sang (xue) que le chongmai gouverne. La lactation est, selon Rempp, en rapport « avec le Sang, les jinye, mais aussi avec zhong qi (l’énergie du milieu de la poitrine), la Mer du qi et la Mer de la Nourriture » [[3]]. Ainsi le lait résulterait selon la MTC de la transformation du Sang sous l’action du chongmai et du renmai. « Tant qu’il y a allaitement, le Sang produit par la femme est transformé en lait » [3]. Wang Zhi Zhong  (dynastie Song XIIème) dans le rouleau VII du Zhen Jiu Sheng Jing (Traité d’acupuncture et de moxibustion) propose d’utiliser le ES30 (qichong) en cas de difficulté de lactation ou le VC17 (shanzhong) en moxibustion si la montée laiteuse est insuffisante (Tong Ren) [[4]].

Maciocia distingue deux étiologies aux hypogalacties, toutes deux provoquées par une atteinte du chongmai. La première résulte d’une stase de son qi, c’est l’hypogalactie de type Plénitude ; la seconde est de type Vide en rapport à une déficience du Sang [[5]].

D’autres auteurs [3,[6-8] s’accordent à reconnaître selon la différenciation des syndromes (zheng) :

–   une hypogalactie de type Plénitude liée à la stase du qi du Foie avec seins gonflés, tendus, douloureux, la langue est normale avec fin enduit jaune, le pouls tendu (xian) et glissant (hua) ;

–   une hypogalactie de type Vide avec seins peu gonflés, mous et non douloureux en rapport avec un vide de qi et de Sang, principalement due à une carence de l’Estomac et du chongmai, la langue est pâle avec léger enduit, le pouls est fin (xi) et faible (ruo).

Les essais contrôlés randomisés en acupuncture

Les études cliniques pour évaluer l’action de l’acupuncture dans l’hypogalactie sont nombreuses et pratiquement toutes d’origine chinoise.

Par exemple, une étude de cinquante-quatre femmes présentant une insuffisance de lactation sont traitées par stimulation des points d’acupuncture, IG1 (shaoze), VC17 (shanzhong), ES18 (rugen), VE20 (pishu), ES36 (zusanli) et RA6 (sanyinjiao). Les résultats montrent que quarante-deux d’entres-elles bénéficièrent d’une amélioration significative de leur lactation, neuf eurent une petite amélioration et trois cessèrent le traitement [[9]]. De manière similaire mais traitant uniquement le zheng de déficience de qi et de Sang par injection de vitamine B12 sur les points VC17, ES18, VB21 (jianjing),VE20 et ES36, d’autres auteurs chinois ont observé un taux d’amélioration de l’hypogalactie de 96,8% [[10]].

Pelletier-Lambert dans une étude de cas sur l’engorgement mammaire suivi d’une insuffisance de lactation par un Vide de qi et de Sang préconise la puncture de VC17, IG1, VB41 (zulinqi) et ES36 [[11]].

ECR pragmatiques

Les ECR pragmatiques cherchent à vérifier l’efficacité d’une thérapeutique en la comparant au traitement de référence habituel. Son objectif vise donc à étudier une stratégie thérapeutique par rapport au traitement classique dans la pratique réelle sans qu’il n’y ait nécessairement un contrôle placebo et une intervention en aveugle (excepté éventuellement pour l’analyse des résultats) [[12],[13]]. Il doit y avoir un équilibre entre la validité interne (fiabilité des résultats dont on se rendra compte par exemple par les critères de Jadad) et la validité externe (généralisation ou reproductibilité des résultats). Dans un ECR pragmatique, il s’agira de répondre à la question : l’intervention peut-elle être utilisée efficacement  dans ma réalité quotidienne ?

Ainsi un ECR multicentrique (n=276) en simple aveugle fut mis en place pour évaluer l’efficacité clinique du VC17 dans l’hypogalactie postpartum. Deux groupes : un groupe acupuncture et un groupe de phytothérapie chinoise (décoction Tongrutang, active selon la MTC sur l’hypogalactie). Le taux de prolactine mesuré avant et trois jours après traitement, est réduit significativement (p<0,05) dans le groupe phytothérapie, alors qu’il n’y a pas de différence significative dans le groupe acupuncture, objectivant la modulation de l’axe hypothalomo-hypophysaire. Dans les deux groupes, on observe une élévation significative de la lactation mais sans différence significative entre les deux groupes [[14]]. Cet ECR de bonne qualité méthodologique (Jadad à 3) est malheureusement sans groupe placebo comme souvent les ECR pragmatiques et compare l’acupuncture à une thérapeutique de phytothérapie de référence en Chine, mais non suffisamment évaluée en Occident. Le même ECR est paru également la même année en langue chinoise dans une autre revue [[15]].

Une autre étude a été réalisée en Italie en 2011 avec suivi jusqu’à trois mois après traitement. Quatre-vingt dix femmes ont été randomisées en deux groupes : groupe acupuncture (IG1, ES18, VC17 et points selon le zheng) et groupe conseils de soins habituels. En outre, en fonction de l’atteinte du zheng,les femmes du groupe « Vide de qi et de Sang » ont bénéficié de la puncture des points ES36, RA6 et VE20, alors que celles dont le diagnostic était « stase du qi du Foie » ont eu FO3 (taichong) et MC6 (neiguan) en plus. L’allaitement exclusif à 3 semaines était de 60% dans le groupe contrôle versus 100% dans le groupe acupuncture, différence significative (p <0,03). A trois mois on retrouvait 35% dans le groupe acupuncture versus 15% (p<0,03). Ces données préliminaires suggèrent que trois semaines de traitement d’acupuncture ont été plus efficaces que la seule observation des mesures de routine habituelle dans le maintien de l’allaitement jusqu’au troisième mois de la vie des nouveau-nés. Néanmoins, il faut tempérer ces bons résultats par le fait que cet ECR n’est pas en aveugle et qu’il existe de nombreux biais liés à l’attention portée aux femmes bénéficiant d’acupuncture et qu’enfin on ignore si le groupe acupuncture a bénéficié des soins habituels en plus de l’acupuncture [[16]].

ECR explicatifs

Les ECR explicatifs ont pour objectif d’essayer de comprendre l’origine de l’efficacité du traitement dans une situation idéale. De ce fait, la validité interne doit être forte et nécessite un groupe homogène de patients avec des critères d’inclusions stricts (à la différence des ECR pragmatiques, où ils sont plus larges), mais correspondant à des conditions souvent éloignées de la réalité. Dans l’ECR explicatif, il s’agira de répondre à la question : l’intervention peut-elle être efficace et fonctionner dans des conditions optimales [12,13] ?

Un autre ECR en 2008 a évalué l’efficacité du point IG1 (shaoze) dans l’insuffisance de lactation après accouchement en fonction de l’âge de la patiente mais aussi selon la différenciation des syndromes. Quatre-vingt-douze mères souffrant d’hypogalactie ont été randomisées dans un groupe traité IG1 (n=46) et un groupe témoin GI1 (n=46). Le groupe traitement IG1 a bénéficié d’électroacupuncture (EA) sur le point IG1 bilatéralement, alors que le groupe contrôle bénéficiait d’EA sur le point GI1 non indiqué dans la lactation. Le suivi a été réalisé sur un mois. Selon la différenciation des syndromes, les femmes (n=92) ont été classées selon deux zheng : déficience de qi et de Sang pour le premier sous-groupe et stase de qi de Foie pour le second ; et selon la classe d’âge : 20-29 ans et 30-39 ans. Les résultats montrent une efficacité statistiquement significative (p<0,01) de 100% dans le groupe traité versus 69,6% dans le groupe contrôle. Quel que soit le syndrome zheng et l’âge des patientes, le groupe traité par IG1 a obtenu de manière statistiquement significative (p<0,01) un meilleur effet que le groupe contrôle GI1 dans l’accroissement de la lactation. Par ailleurs le taux de prolactine se maintient dans le groupe traité alors qu’il diminue dans le groupe contrôle (p<0,01) [[17]]. Cet essai contrôlé randomisé est de bonne qualité méthodologique avec un score de Jadad à 3/5. Néanmoins certains critères méthodologiques ne sont pas décrits comme le calcul de la taille et de la puissance suffisante entre les deux groupes. De surcroît, ni les patients, ni les évaluateurs ne sont en aveugle alors qu’il s’agit non pas d’un ECR pragmatique, mais plutôt explicatif (acupuncture contre fausse acupuncture sur un point non spécifique visant à différencier l’effet spécifique de l’effet non spécifique). De ce fait, un ECR de plus grande puissance est nécessaire en simple ou double insu.

Cela semble avoir été réalisé par les mêmes auteurs dans cet autre ECR multicentrique en simple aveugle concernant 276 femmes. Ainsi le groupe EA (n=138) au point IG1 (shaoze) offre une amélioration de l’allaitement de 97,8% versus 24,3% dans le groupe contrôle GI1 (p<0,05). D’autre part, le groupe traitement montre une augmentation significative de la quantité de lait et un taux de prolactine meilleur que dans le groupe contrôle (p<0,01) [[18]]. Malheureusement cet ECR explicatif en langue chinoise ne peut être analysé.

Le tableau I récapitule toutes ces études.

Tableau I. Principales études de l’hypogalactie et leurs caractéristiques (bonne qualité méthodologique si Jadad > 3). 

Auteur (année, pays)Type d’étude et populationJadadGroupe intervention
Traitement
Résultats sur l’hypogalactieCommentaires
Wang (2004, Chine)Étude de cas (N=54)0IG1, VC17, ES18, VE20, ES36, RA6 (recherche deqi) : séance de 30mn
Moxibustion 20mn sur ES18 et VC17 (1 séance/j durant 11 jours)
Efficacité : 78%
Amélioration : 16%
Échec : 6%
Au niveau le plus bas de la hiérarchie classique de la force des preuves
Tian (1998, Chine)Étude de cas (N=63)0Vide de qi et de Sang :VC17, ES18, VB21, VE20 et ES36 (recherche deqi)
Injection sur les points 0,5mg Vitamine B121 séance 1 jour sur 2 (6-8 séances)
Efficacité : 89%
Amélioration : 8%
Échec : 3%
Au niveau le plus bas de la hiérarchie classique de la force des preuves
Huang (2008, Chine)ECR pragmatique, parallèle, multicentrique en simple aveugle (N=276)31. groupe Acu (n=138) : VC17 (EA 2,5 Hz 1 fois / j pendant 3 jours)
2. groupe phytothérapie (n=138) : décoction  Tongrutang (Fructus Liquidambaris : 15g ; Radix Angelicae Sinensis 15g  Semen Vaccariae 15g Radix Codonopsis 15g Rhizoma Cyperi 15g)
Équivalence d’efficacité sur la lactation  dans les deux groupes– Pas de groupe placebo
– étude en intention de traiter non précisé
– critère de succès du groupe phytothérapie non évalué
Neri (2011, Italie)ECR pragmatique, parallèle, sans insu (N=90)31. groupe acupuncture-traitement commun : IG1, ES18 et VC17
– vide de qi et de Sang : ES36, RA6 et VE20
– stase du qi du Foie : FO3, MC62. groupe conseils de soins habituels
Traitement  de trois semaines : 2 fois par semaine
Suivi : 3 mois
– Efficacité 100% à  3 semaines supérieure (p <0,03) au groupe contrôle (60%)
– A 3 mois : 35% versus 15% (p<0,03) dans le groupe contrôle.
-Acupuncture supérieure aux conseils de soins habituels
– ECR non en aveugle en intention de traiter
– biais liés à l’attente des femmes
Wei (2008, Chine)ECR analytique, parallèle, sans insu (N=92)31. groupe Acu IG1 avec deqi (n=46)
– vide de qi et de Sang (n=27)
– stase de qi de Foie (n=19) EA 30 minutes après (20 Hz,  0,1A) 1 fois par jour : 5 jours, puis renouvellement de la session après un intervalle libre de 2 jours
2. groupe contrôle GI1 (n=46) : même stratégie de session 
suivi : 1 mois
Efficacité 100% dans groupe IG1 versus 69,6% groupe contrôle (p<0,01)– groupe contrôle sur un point non actif pouvant être considéré point placebo- ECR non en aveugle
-établit la spécificité de l’IG1 dans l’hypogalactie
Wang (2007, Chine)ECR analytique, parallèle, multicentrique en simple aveugle (N=276)  ?1. groupe EA (n=138) IG1 (shaoze)
2. groupe contrôle GI1 (n=138)
Efficacité de l’allaitement de 97,8% versus 24,3% dans le groupe contrôle (p<0,05). -ECR en langue chinoise, excepté le résumé
– établit la spécificité de l’IG1 dans l’hypogalactie

En conclusion, il semble que l’acupuncture possède des effets thérapeutiques sur l’allaitement. Cependant l’évaluation méthodologique montre de nombreux biais et il faudra attendre des ECR répondant aux normes CONSORT [[19]] et STRICTA [[20]] pour recommander l’acupuncture dans l’hypogalactie.

Réalité de la spécificité du point IG1 ?

A la lecture des deux ECR chinois, il semble que le point IG1 (shaoze) favorise spécifiquement la lactation après accouchement, essentiellement dans la stase de qi du Foie, comme il est indiqué empiriquement dans la littérature de MTC [5,7]. Jenner et Filshie [[21]] objectivent d’ailleurs un épisode de galactorrhée du sein gauche six jours après puncture de trigger points sur le muscle suprascapulaire et surtout infraépineux droit (correspondant au point IG11 tianzong, point indiqué pour promouvoir aussi la lactation) et GI4 (hegu) gauche. Cette femme mastectomisée suite à un cancer du sein droit et n’ayant pas allaité depuis quatre ans bénéficiait d’acupuncture à visée antalgique dans le cadre d’algies axillaires droites irradiant vers le coude. Il était reporté aussi une élévation de prolactine et d’ocytocine, malheureusement non documentée avant l’intervention acupuncturale. Cette étude de cas semblait donc confirmer la théorie de la spécificité de certains points connus pour leur effet dans la lactation.

Pourtant, suite à l’observation d’une patiente de 33 ans  n’ayant pas allaité depuis 12 mois et traitée pour algie du pied gauche, cette théorie semblait être infirmée. En effet, une galactorrhée ipsilatérale survenait quelques heures après la puncture au niveau du métatarse et des phalanges de l’hallux. Les auteurs concluaient à la non-spécificité de l’action de l’acupuncture du fait que la puncture en dehors de l’IG11 pouvait entraîner aussi une galactorrhée [[22]]. Ils n’avaient peut-être pas noté que la zone du métatarsien du gros orteil correspond au Méridien zutaiyin et en particulier au gongsun (RA4), point clé du chongmai qui est fortement impliqué dans la grossesse. D’où la puncture du point clé du chongmai pourrait, selon la physiopathologie de la MTC résumée plus haut, intervenir dans la physiologie de l’allaitement, même si d’un point de vue neurophysiologique occidentale, ce point ne fait pas du tout partie du métamère en rapport avec le sein.    

D’un point de vue expérimental, il a été objectivé sur le rat que  l’acupuncture pouvait entraîner une sécrétion de prolactine [[23]]. Sheng et coll. objectivent d’ailleurs que la puncture du point VC17 (shanzhong) augmente, toujours chez la rate allaitante, le taux de prolactine par l’intermédiaire des catécholamines (la noradrénaline du système nerveux central) et de l’acide gamma amino butyrique (GABA) [[24]]. Cela a été aussi démontré chez la parturiente par stimulation d’un acupoint mais cette fois par massage tuina [[25]].

L’ocytocine qui est nécessaire pour l’éjection du lait  est également stimulée par acupuncture. On connaît ainsi de nombreux travaux qui montrent sa libération par stimulation acupuncturale avec pour effet une action analgésique et anxiolytique [26-29]. Par contre, il n’existe pas à l’heure actuelle de travaux montrant la contribution de l’acupuncture à la lactation même si des analogies peuvent être objectivées [[30]].

Conclusion

L’insuffisance de lait physiologique est très rare. Dans la majorité des cas, l’optimisation de la pratique de l’allaitement et les encouragements visant à restaurer la confiance de la mère permettent de rétablir la situation. Cependant, l’acupuncture semble offrir une possibilité non négligeable d’accélérer le rétablissement de l’allaitement sans nécessité de recourir à l’alimentation de substitution. Bien sûr les preuves actuelles fournies dans l’hypogalactie proviennent d’études de faible qualité et, comme souvent en acupuncture, médecine encore nouvelle dans la perspective factuelle et scientifique, de nouveaux ECR de haute qualité méthodologique sont souhaités. 

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Stéphan JM. L’acupuncture en suite de couches : l’hypogalactie. Acupuncture & Moxibustion. 2011;10(4):254-260. (Version PDF imprimable)

Stéphan JM. L’acupuncture en suite de couches : l’hypogalactie. Acupuncture & Moxibustion. 2011;10(4):254-260. (Version globale couleur)

Problématique de la place de l’acupuncture dans la FIV

Romance de Liang Shanbo et Zhu Yingtai – 梁山伯与祝英台 (les amants papillons) – festival sino-italien de la culture de l’amour 2008 – Vérone (ville natale littéraire de Roméo et Juliette de Shakespeare) – Italie
Romance de Liang Shanbo et Zhu Yingtai – 梁山伯与祝英台 (les amants papillons) – festival sino-italien de la culture de l’amour 2008 – Vérone (ville natale littéraire de Roméo et Juliette de Shakespeare) – Italie


Résumé :
 Suite à la première publication allemande de Paulus sur l’influence de l’acupuncture dans la fécondation in vitro (FIV) parue en 2002 et objectivant une grossesse obtenue dans 42,5% du groupe acupuncture versus 26,3% dans le groupe contrôle, de très nombreux essais contrôlés randomisés ont étudié la possibilité d’augmenter le pourcentage d’implantation embryonnaire et celui des naissances viables lorsque les séances encadrent de 25 mn le transfert embryonnaire. Les résultats sont souvent contradictoires. Huit méta-analyses et revues sont parues depuis la première de Manheimer (n= 1366 patientes) qui montrait que le recours à l’acupuncture augmentait les chances de tomber enceinte de manière statistiquement significative. Leurs analyses sont aussi contradictoires. Cette synthèse permet d’évaluer la problématique de la place de l’acupuncture dans la FIV et d’établir pour toutes les femmes infertiles des protocoles à appliquer selon les zheng, mais aussi selon la technique de puncture et le temps optimum pour la séance d’acupuncture. Mots-clés : FIV – pregnancy – in vitro fertilization -acupuncture – synthèse – zheng –indications.

Summary: Following the first German publication of Paulus on the influence of acupuncture in in vitro fertilization (IVF) published in 2002 and objectified a pregnancy achieved in 42.5% of the acupuncture group versus 26.3% in the control group, numerous randomized controlled trials have studied the possibility of increasing the embryo implantation rate and live birth rate when framing sessions of 25 minutes embryo transfer. The results are often contradictory. Eight meta-analyses and reviews have appeared since the first of Manheimer (n = 1366 patients) that showed that the use of needles increased the chances of getting pregnant statistically significant. Their findings are also contradictory. This synthesis assesses the issue of place of acupuncture in IVF and establishes protocols for all infertile women to apply as zheng, but also according to the technique and the optimum time for acupuncture. Keywords: IVF – pregnancy – in vitro fertilization-acupuncture – synthesis – zheng-indications.

En 2002, Paulus et coll. publièrent le premier essai contrôlé randomisé (ECR) sur l’impact de l’acupuncture lors d’une FIV ou FIC-ICSI [[1]]. Le protocole de traitement encadre la phase de transfert des embryons de deux séances d’acupuncture 25 mn avant et 25 mn après le transfert. Le taux de grossesse clinique est amélioré de manière significative, avec une augmentation relative du bénéfice de 61,6% [[2]]. Avant le transfert, les points utilisés sont : 6MC, 8Rte, 3F, 20VG, 29E et les points auriculaires shenmen, utérus, endocrine, subcortex (deux à droite et deux à gauche). Après transfert les points sont : 36E, 6Rte, 10Rte, 4GI avec les mêmes points auriculaires mais inversés. Dans les différents ECR, les critères de jugement sont le pourcentage de grossesses cliniques que l’on note par l’observation du sac gestationnel ou les battements cardiaques à l’échographie après six ou sept semaines de gestation, ou le pourcentage de naissances viables.

Essais contrôlés randomisés, revues systématiques et méta-analyses à la recherche de l’efficacité de l’acupuncture dans la FIV

Les ECR

De nombreux ECR se sont inspirés de ce protocole de Paulus avec puncture ou non des points auriculaires [3-15] ainsi que quelques essais cliniques ouverts [[16],[17]]. D’autres auteurs ont utilisé des protocoles différents. Ainsi, Dieterle et coll. [[18]] ont préconisé une séance immédiatement après le transfert (4VC, 6VC, 29E, 6MC, 8 et 10Rte) et la seconde séance trois jours après (4GI, 6Rte, 36E, 3R et 3F). Wang et coll. puncturaient à distance du transfert (deux fois par semaine durant la phase folliculaire (6MC, 8 et 9VB, 29 et 36E, 8 et 10Rte, 3F, zizong, 4 et 6VC) puis durant la phase lutéale (36E, 9 et 10Rte, 3F, 15V, 20 et 23V) pendant le protocole de traitement de la FIV [[19]]. Chen et coll. ont préféré utiliser un traitement selon les tableaux zheng [[20],[21]] etc.

Quoi qu’il en soit, les résultats sont très hétérogènes : il est possible de trouver soit un bénéfice statistiquement significatif de l’acupuncture par rapport au groupe contrôle [1,8,10,11,18, 20,21], soit aucune différence significative [3,6,7,9,12,13,19], voire même une efficacité du placebo par rapport au groupe contrôle [3,15].

Les méta-analyses

Huit méta-analyses se sont succédées depuis 2008 pour essayer de faire la part des choses [22-29]. La première de Manheimer [22] (n=1366 patientes) conclut que l’acupuncture administrée pendant la période de transfert élève le taux de grossesse et de naissance avec respectivement un odds ratio (OR) de 1,65 (intervalle de confiance à 95 % de 1,27 à 2,14 ; nombre de sujets à traiter (NNT) : 10 ; de 7 à 17) et à 1,91 (IC 95% : 1,39 à 2,64 ; NNT 9 ; de 6 à 17) par rapport au groupe contrôle. Cependant, Nguyen [2] dans l’étude de cette méta-analyse notait des incohérences comme le fait de ne pas avoir analysé les ECR chinois [10,11] ou d’avoir exclus cinq ECR [30-34] ayant comme critère de jugement principal l’analgésie [[35]]. Et il s’étonnait des discordances d’autres méta-analyses.

En effet la méta-analyse de Cheong [25] (méta-analyse Cochrane) de 2008, puis mise à jour en décembre 2011, analysant treize ECR confirme que lorsque l’acupuncture est exécutée le jour du transfert d’embryons, il y a des preuves du bénéfice de l’acupuncture sur le taux de naissance d’un enfant vivant (OR : 1,86 ; IC à 95% 1,29 à 2,77) mais pas d’efficacité lorsqu’elle est exécutée deux à trois jours après le transfert (OR : 1,79 ; IC 95% : 0,93 à 3,44). Pas de preuve non plus du bénéfice de l’acupuncture sur la grossesse quand l’acupuncture est réalisée autour du temps du recueil de l’ovocyte. Les auteurs objectivent que même si un effet bénéfique de l’acupuncture est observé sur le taux de naissance d’enfants vivants, il est possible que l’effet placebo en soit la cause, du fait d’une population insuffisante incluse dans les essais [25]. La méta-analyse de Ng et coll. confirme aussi les bénéfices de l’acupuncture avec un taux de grossesse significativement augmenté lorsqu’elle est pratiquée le jour du transfert des embryons (OR 1,83 ; IC 95% 1,40–2,9) [23].

Par contre, les quatre dernières méta-analyses parues entre fin 2008 et 2010 [24,26,27,28] concluent toutes que l’augmentation du pourcentage de grossesse ainsi que celui des naissances viables par acupuncture manque de preuves statistiquement significatives.

Une huitième méta-analyse (n=5807) vient de paraître en janvier 2012 [29] qui inclut vingt-quatre ECR, soit dix de plus en moyenne que les précédentes méta-analyses. En fait par rapport à la méta-analyse de Manheimer, les auteurs vont réintroduire les cinq ECR que Nguyen avait relevés ayant comme critère principal l’analgésie [2]. En outre, on trouvera d’autres ECR d’électroacupuncture (EA) non analysés [63,64], des ECR chinois [20,[36]], un ECR à cinq bras utilisant le laser [[37]] sur les points d’acupuncture selon le protocole de Paulus, un autre sur le transfert des embryons congelés [[38]] et enfin un résumé issu des actes d’un congrès européen [[39]]. L’équipe de Zheng a montré que, globalement, les femmes qui ont bénéficié d’acupuncture ont eu un pourcentage de grossesse légèrement plus élevé que les femmes qui n’ont pas eu de thérapie (OR=1,22 ; IC 95% 1,01-1,47 ; p=0,04), mais pas un taux de natalité plus élevé. Hélas comme on pouvait s’y attendre, le gros problème de cette méta-analyse est l’hétérogénéité très importante (I²=58% ; p=0,0002). Les auteurs combinent des études trop différentes d’un point de vue méthodologique : acupuncture manuelle, EA, laser acupuncture etc., groupes témoins contrôles différents, calendriers des séances d’acupuncture différents. Ainsi en excluant cinq études utilisant dans le groupe témoin les aiguilles Streitberger, les résultats concernant le pourcentage de grossesse clinique étaient meilleurs (OR= 1,34 ; IC 95% =1,08-1,67 ; p=0,007) bien que toujours hétérogènes (I²=52% p=0,005). De manière similaire, le pourcentage de naissance viable était plus élevé versus groupe témoin sans aiguilles Streitberger (OR= 1,63 ; IC 95% = 1,16-2,30 ; p=0,005), mais hélas ne concernait que trois ECR [14,30,64]. De ce fait, on peut émettre des réserves sur cette étude qui paraît juste montrer que les aiguilles placebo ne sont pas si inertes que cela.

Ainsi, il apparaît important d’essayer d’apporter plusieurs explications à ces résultats discordants.

 Problématique des discordances de résultats dans les méta-analyses et ECR

Problème du groupe témoin et de l’acupuncture factice

La source d’hétérogénéité retrouvée dans les méta-analyses peut être en rapport avec les différents groupes témoins (contrôle). En effet, les groupes acupuncture sont comparés soit à des groupes témoins sans acupuncture, soit à des groupes témoins avec acupuncture sur des non-points, soit acupuncture factice avec aiguilles placebo (de type aiguille Streitberger [[40]]) sur les vrais points ou sur des non-points. Il est donc aisé de comprendre la large hétérogénéité des résultats (figure 1).

Figure 1. Les sources d’hétérogénéité en fonction des groupes témoins.

Il est fort possible que les interventions avec acupuncture factice aient des effets plus grands que les placebos aussi bien pharmacologiques que physiques [[41]]. Ainsi l’acupuncture feinte sur des non-points, surtout appliquée sur le même dermatome, n’est pas inerte et ne peut être considérée comme placebo car faisant intervenir le système limbique [[42]].

Par ailleurs, les travaux de Linde et coll. montrent que la différenciation entre effet spécifique de l’acupuncture et effet non-spécifique (placebo) nécessite le recrutement de huit cents sujets par ECR en double bras pour une puissance de 80% et ceci afin d’obtenir une différence moyenne standardisée (SMD) de 0,2 pour un effet spécifique [[43]]. Cela suggère de ce fait que tous les ECR qui actuellement comparent l’acupuncture véritable à l’acupuncture factice sont tous de petite puissance. Cela peut expliquer aussi pourquoi certains ECR peuvent montrer une acupuncture factice aussi efficace que l’acupuncture véritable voire plus efficace.

D’autre part, l’acupuncture réalisée avec des aiguilles factices qui paraissent pénétrer la peau mais qui en réalité coulissent dans le manche, entraîne également une sensation de piqûre ou de pénétration pouvant simuler, chez un sujet naïf en acupuncture, la sensation de réaliser une véritable séance. Malheureusement, ces dispositifs semblent aussi être actifs comme l’attestent certains ECR réalisés en acupression (qui déclenche une réaction similaire) pour réduire les douleurs du travail [[44]] ou les lombalgies [[45]], ou comme semblent le penser certains auteurs [3].

Un autre point à souligner est le caractère subjectif ou objectif du critère principal de jugement.

Ainsi, dans les études cliniques concernant l’efficacité de l’acupuncture dans les algies, critère de jugement subjectif, il est judicieux de réaliser idéalement des ECR à trois bras : un bras acupuncture,  un bras contrôle ou témoin et un bras acupuncture factice. Le but est double : différencier l’effet spécifique de l’effet non-spécifique (c’est le fait de comparer le bras acupuncture à celui de l’acupuncture factice), démontrer l’efficacité de l’acupuncture (comparaison entre bras acupuncture versus bras témoin sans traitement) et éventuellement de définir sa place dans la stratégie thérapeutique (bras acupuncture versus bras contrôle avec traitement).

Par contre dans les ECR concernant la FIV, les effets liés aux effets placebo semblent moins importants à prendre en compte parce que le critère de jugement principal est totalement objectif : la grossesse. Il n’y a donc pas lieu de tenir compte d’un groupe témoin avec acupuncture factice comme pour les ECR d’acupuncture à visée antalgique, où le caractère placebo peut entraîner le patient, en attente d’un bénéfice, à minorer sa douleur. Manheimer considère d’ailleurs que dans les ECR concernant la FIV où le critère de jugement est la grossesse, critère non subjectif, le fait de prévenir les patientes qu’elles peuvent se retrouver dans un groupe placebo peut être source de biais [47]. En effet, on sait que la relation existant entre stress, anxiété et FIV est susceptible d’être modulée par l’acupuncture [4]. De ce fait un biais de confusion peut être trouvé car les femmes participant à un ECR sur la FIV pourraient bénéficier de manière subjective d’une réduction de leur niveau de stress psychologique, même si elles se trouvent dans un groupe d’acupuncture factice. Aussi, selon Stener-Victorin et Mainheimer [[46],[47]], il est judicieux de se poser la question de l’utilisation du groupe témoin avec acupuncture factice.

 Le lieu de l’intervention

En étudiant l’hétérogénéité de certaines méta-analyses comme celles de El-Toukhy (I²=68,2%, p=0,003) [24] ou de Cheong (I²=71%, p=0,01) [25] qui ne montrent aucune différence significative dans le taux de grossesse clinique avec respectivement un RR=1,23 (IC 95%=0,96-1,58 ; p=0,1) et un OR=1,38 (IC=0,78-2,44 ; p=0,27) entre les groupes témoin et acupuncture, on constate que cette hétérogénéité semble due à l’étude de Craig et coll. qui est le seul ECR objectivant un taux de grossesse clinique nettement en faveur du groupe contrôle [15].

On s’aperçoit ainsi que même si cette étude a utilisé le protocole de Paulus, elle est néanmoins la seule dont les séances d’acupuncture n’ont pas été faites in situ dans le centre de PMA comme tous les autres ECR, mais en dehors du site avant et après le transfert, ce qui peut engendrer un stress lui-même responsable d’échecs de FIV.

Le choix des points

Se pose aussi la question des points interdits durant la grossesse qui pourraient entraîner l’échec de la FIV. On constate que le protocole de Paulus utilise 25mn après le transfert les points 4GI et 6Rte. Or selon différents auteurs [48-51] la puncture de ces points est à éviter durant la grossesse car ayant une action ocytocique sur un utérus gravide. Donc ils favoriseraient la motilité utérine et induiraient le travail chez la femme enceinte [[52],[53]]. Néanmoins une étude expérimentale récente de 2011 réalisée chez des rates gravides a démontré que l’utilisation conjointe de ces deux points ne favorisait ni avortements, ni augmentation de morts in utéro durant la grossesse [[54]]. D’ailleurs d’autres travaux optaient pour une action tocolytique ou régulatrice de la motilité utérine [55-57]. Le débat semble n’être pas clos [[58],[59]]. Néanmoins dans le cadre de la FIV et dans le doute d’une éventuelle augmentation de la motilité utérine qui serait préjudiciable, ces points sont peut être mal choisis. 

Le nombre d’embryons transférés

Toujours dans cette étude de Craig, mais aussi dans celles de So [3] et de Moy [12] qui objectivent l’inefficacité de l’acupuncture, voire l’efficacité du placebo, on peut remarquer que le pourcentage de grossesse clinique est très important dans le groupe témoin par rapport au groupe acupuncture. Par exemple, on retrouve respectivement pour ces trois ECR un pourcentage de grossesse clinique de 69,6% dans le groupe témoin versus 43,8% dans le groupe acupuncture [15], 55,1% versus 43,8% [3],  52,7% versus 45,3% [12]. Ceci est à opposer aux pourcentages des autres ECR positifs où la moyenne des grossesses cliniques ne dépasse pas les 30% dans les groupes témoins. Stener-Victorin et Manheimer mettent en exergue le fait que ces pourcentages aussi élevés dans le groupe témoin sont déjà la limite maximale que l’on peut obtenir avec le traitement classique de la FIV et que l’acupuncture, ni d’ailleurs aucune autre intervention ne pourrait les augmenter davantage [46]. La raison potentielle serait les multiples transferts d’embryons. En effet, on peut observer par exemple dans l’ECR de So qu’il y a environ 90% de transfert de deux embryons (figure 2) pour à peine 10% de transfert d’un unique embryon.

Figure 2. Transfert de deux embryons au stade de quatre cellules.

Il est donc possible que l’acupuncture soit mieux indiquée dans les FIV avec transfert mono-embryonnaire plutôt que pluri-embryonnaire. Ce qui d’ailleurs va dans le bon sens car on sait que les grossesses multiples constituent l’une des complications les plus fréquentes de la fécondation in vitro et sont associées à un taux important de morbidité et de mortalité maternelle et périnatale. Le coût peut être élevé pour la santé publique sans oublier les conséquences sociales et psychologiques. De ce fait, de plus en plus de centres de FIV en Europe appliquent actuellement le transfert électif d’un seul embryon comme pratique standard chez les jeunes femmes. Une étude confirme d’ailleurs les recommandations actuelles visant à limiter le nombre d’embryons transférés à un ou à deux par cycle et ils suggèrent que le transfert de trois embryons ou plus devrait être évité, quel que soit l’âge de la femme [[60]].

 La stimulation électrique des points d’acupuncture

A la suite de ses méta-analyses [24,26,27], El-Toukhy et coll. ont recommandé de ne pas utiliser l’acupuncture au moment du transfert de l’embryon durant la FIV. En raison du manque de preuves, ils proclament d’autre part qu’il est inutile de mener des recherches dans ce domaine ou d’incorporer l’acupuncture dans la pratique quotidienne [[61]].

Pourtant, toutes les possibilités d’intervenir par différents protocoles et techniques n’ont pas été explorées. Ainsi on remarque que les ECR analysés dans les différentes méta-analyses ont été réalisés par utilisation de l’acupuncture traditionnelle avec recherche du deqi.

Un ECR paru en octobre 2011 va employer non plus l’acupuncture mais la stimulation électrique percutanée acupuncturale (TEAS= transcutaneous electrical acupoint stimulation) à l’aide d’électrodes collées sur la peau en regard des points d’acupuncture [[62]]. Il s’agit d’un ECR prospectif en simple aveugle avec trois groupes de femmes suivies pour FIV et FIV-ICSI. Le groupe 1 (n=99) est le groupe placebo utilisant un faux traitement TEAS (2Hz intermittent 10s avec stimulation et 10s sans, 5mA). Le groupe 2 (n=110) est le groupe TEAS avec administration de la stimulation électrique à une fréquence de 2Hz (10-12mA) pendant 30mn après le transfert. Le groupe 3 (n=100) est le groupe double TEAS avec stimulation de 30 mn (2Hz, 15-20mA) 24 h avant le transfert sur les points 8Rte (diji), 29E (guilai), 10Rte, zigong suivi d’une autre séance 30mn après le transfert avec les mêmes paramètres électriques que le groupe 2.

Pour les trois groupes, les points utilisés après transfert sont : 36E (zusanli), 13R (taixi), 23V (shenshu) et 4VC (guanyuan).

Le critère principal de jugement est le pourcentage de grossesse clinique confirmée par une observation ultrasonique de l’activité cardiaque fœtale six semaines après le transfert. Les critères de jugement secondaires sont le pourcentage d’implantation embryonnaire et celui de naissances viables. Les auteurs obtiennent une amélioration statistiquement significative dans le groupe 2 respectivement 42,7% de grossesse clinique (p=0,044) et 37,3% de naissance viable (p=0,011) par rapport au groupe 1 placebo respectivement 29,3% de grossesse clinique et 21,2% de naissance viable et même davantage d’amélioration en cas de double TEAS, respectivement 50% (p=0,003), 42% (p=0,002). Pas de différence significative entre les groupes 2 et 3.

En conclusion les auteurs montrent une amélioration significative de grossesse par TEAS lors de la FIV, tout particulièrement en cas de double stimulation à 2Hz, 24h avant et 30mn après transfert.

Cet ECR en intention de traiter, bien randomisé, en simple aveugle offrant une qualité méthodologique satisfaisante (Jadad=4) peut réouvrir la voie vers d’autres ECR de plus grande puissance concernant cette fois l’électroacupuncture (EA).

En effet, il faut noter que si cet ECR est le premier à utiliser le TEAS, l’EA elle-même a déjà montré un bénéfice dans la FIV [20,21] en utilisant le traitement selon les syndromes zheng et non celui de Paulus et coll. [1]. Mais ces ECR n’avaient pas été inclus dans les différentes méta-analyses car étaient en langue chinoise et de mauvaise qualité méthodologique. De même, d’autres ECR utilisant l’EA, mais ayant comme critère de jugement principal soit l’analgésie [30-34], soit plusieurs critères de jugements [[63],[64]] et non uniquement le taux de grossesse clinique, n’avaient pas été incorporés dans les méta-analyses, sauf dans celui de Zheng [29] dont on connait les réserves.

Acupuncture de l’infertilité selon les indications

L’acupuncture dans l’assistance médicale à la procréation semble donc pouvoir être recommandée en appliquant certains protocoles et indications.

Protocole de traitement précédant de plusieurs mois la FIV et selon les zheng

Szabó propose un protocole de traitement de fond à commencer idéalement dans les trois mois avant la FIV en fonction de la différenciation des syndromes (zheng) avec une séance une fois par semaine ou tous les quinze jours, puis on continue par le traitement adapté du protocole de Paulus durant le transfert [16].

Cela ne diffère guère du protocole de Guiraud-Sobral [[65]] qui préconise également le traitement en fonction des zheng à faire une fois en début de cycle, puis une séance en 2ème partie du cycle pendant un ou plusieurs mois jusqu’à obtention de cycles réguliers et l’équilibre des pouls. Puis, il est proposé de puncturer dans les trois jours qui suivent le transfert les points 36E, 6Rte et 7C et selon la pathologie (par exemple en cas d’ovaires polykystiques : 25E, 12Rte et 13R).

Agissant également sur la différenciation des syndromes zhengCui et coll. [21] ont réalisé un essai clinique avec stimulation électroacupuncturale tous les jours pendant 30mn  avant et pendant l’hyperstimulation de l’ovulation contrôlée, deux jours après les règles du cycle précédent la FIV et cela jusqu’au jour du prélèvement ovarien. Les points choisis communs à tous les zhengsont : 4VC (guanyuan), zigong et 6Rte (sanyinjiao). Puis selon le diagnostic différentiel, en cas de Vide du Rein, il est ajouté 3R (taixi) ; en cas de Glaires-Humidité, 40E (fenglong) ; et si Stagnation du qi du Foie 3F (taichong), 4GI (hegu).  Ont été comparés dans cet essai clinique cinquante-deux cas de type Vide du Rein,  quarante-quatre cas de type Stagnation du qi du Foie, 30 cas de type Glaires-Humidité. Les auteurs constatent que le pourcentage de grossesse clinique était supérieur chez les patientes stériles de type Vide du Rein et de type Stagnation du qi du Foie comparé au type Glaires-Humidité. Cet essai clinique est bien entendu de faible qualité méthodologique (Jadad=0) et de faible puissance, néanmoins il a le mérite de montrer la possibilité de traiter selon les zheng.

Notons aussi l’intérêt de puncturer dans la phase lutéale de la FIV : trois jours après le transfert selon l’ECR de Dieterle [18].

FIV dans les infertilités non affectées par une influence ovarienne ou séminale

L’équipe brésilienne de Madaschi et coll. [14] a étudié l’influence de l’acupuncture chez des femmes en FIV-ICSI dans un ECR comprenant un groupe acupuncture (n=208) et un groupe témoin (n=208) sans acupuncture. Aucun effet bénéfique de l’acupuncture n’est retrouvé en appliquant le protocole de Paulus. Le pourcentage de grossesse clinique évalué par échographie entre quatre et six semaines après le transfert est de 32,8% dans le groupe témoin versus 40,4% dans le groupe acupuncture (p=0,652) et les naissances viables respectivement 27,4% versus 33,7% (p=0,763). Cependant dans un sous-groupe concernant les facteurs tubo-utérins ou les causes idiopathiques, en d’autres termes toutes les causes non affectées par une influence ovarienne ou séminale, un bénéfice est observé de manière statistiquement significative (OR=5,15 ; IC 95% de 1,03-34,5 ; p=0,048).

Cet ECR de qualité moyenne selon les normes méthodologiques (Jadad=3 – manque de groupe placebo, mais problématique elle-même controversée comme nous l’avons vu plus haut dans le cadre de la FIV) objective un intervalle de confiance bien trop large pour un échantillon de population réduit (n=77). Néanmoins, c’est donc aussi une voie de recherche à poursuivre.

Conclusion

Bien que l’acupuncture dans la FIV soit encore controversée, il semble que l’engouement ne cesse pas. Ainsi actuellement sont référencés encore dix ECR en phase de recrutement ou de publication dans le méta-registre d’essais cliniques contrôlés (mRCT) et cela uniquement en langue anglaise [[66]], ce qui pourrait peut-être faire évoluer les connaissances. Et il est tout à fait licite de  recommander l’acupuncture dans l’assistance médicale à la procréation selon certains protocoles et indications chez toutes les femmes infertiles.


Degré de signification (p)

Risque de se tromper lorsque l’on conclut à une différence dans un test statistique, la plupart des tests étant construits pour mettre en évidence une différence. Lorsqu’on fait un test statistique, le logiciel donne le résultat du test mais surtout le « p » ou degré de signification. Le risque d’erreur considéré comme acceptable est le seuil de signification. Classiquement, le risque d’erreur acceptable est inférieur à 5 %. Donc, si p < 0,05, on a moins de 5 % de chances de se tromper en concluant à une différence, on dit que la différence est significative.

Essai contrôlé

Essai dans lequel il y a un groupe considéré comme témoin (contrôle) et un groupe de sujets traités.

Essai en double aveugle ou double insu

Essai au cours duquel, ni le patient, ni le médecin ne connaissent le traitement pris. Cela permet d’éliminer l’effet placebo chez le patient et les biais de mesure liés à la subjectivité du médecin. Dans l’essai en triple aveugle, le chercheur qui analyse les résultats ne sait pas quel groupe de patients a reçu quel type de traitement.

Essai ouvert

Essai thérapeutique souvent mené sur un petit groupe de sujets, parfois comparatif, permettant d’étudier la faisabilité d’un essai comparatif à plus grande échelle.

Groupe contrôle (groupe témoin)

Groupe qui reçoit le traitement de référence ou le placebo, par opposition au groupe qui reçoit le nouveau traitement dans un essai thérapeutique contrôlé.

Hétérogénéité

Le test d’hétérogénéité teste si les résultats de tous les essais peuvent être considérés comme similaires. C’est l’hypothèse d’homogénéité. Le regroupement de ces essais est alors licite. Si le test d’hétérogénéité est significatif, il existe au moins un essai dont le résultat ne peut pas être considéré comme identique aux autres. Cette situation pose le problème du recours à un modèle aléatoire (encore appelé modèle mixte) pour rendre le regroupement des essais licite. Le test Ide Higgins souvent utilisé qui calcule le pourcentage de variation entre les ECR lié à une hétérogénéité et non au seul hasard doit être inférieur à 25% pour indiquer une hétérogénéité faible.

Intervalle de confiance

Fourchette de valeurs qui encadre une estimation. Quand on parle d’un intervalle de confiance à 95 %, c’est que la probabilité que la vraie valeur du paramètre estimé soit comprise dans cette fourchette est de 0,95.

Jadad (score de)

Score établi par Jadad, élaboré pour évaluer la qualité méthodologique des ECR. Ce score comprend trois critères : la randomisation qui doit être citée, décrite et appropriée (2 points), le caractère aveugle (insu-patient et insu-évaluateur : 2 points) et la mention des sorties d’études et des arrêts de traitements par analyse en intention de traiter (1 point). Sur cinq points possibles, un score inférieur à 3 indique une qualité insuffisante. Actuellement, un Jadad supérieur à 3 est nécessaire pour être inclus dans une méta-analyse rigoureuse.

Méta-analyse

Analyse globale qui fait la synthèse entre différentes études au moyen de méthodes statistiques appropriées. Elle comporte un volet qualitatif (évaluation de la qualité d’une étude, c’est-à-dire de l’absence de biais et de la force du plan d’étude, etc. au moyen de critère) et un volet quantitatif (intégration des données numériques pour augmenter la puissance statistique d’une étude).

Odds ratio (rapport de cotes) OR

Rapport de deux odds : celui estimé chez les exposés sur celui estimé chez les non exposés.

 MaladeNon Malade 
Exposé au risqueABA+B
Non exposé au risqueCDC+D
 A+CB+DN (total)

Le rapport (A x D) / (B x C) =  odds ratio (OR). Si la prévalence est faible, OR est équivalent au risque relatif RR.

La valeur de l’OR doit s’interpréter avec son intervalle de confiance ou la valeur du test du Chi-2 calculée sur le tableau.

Un OR supérieur à 1 signifie que le « facteur de risque » augmente la proportion de maladie. Si l’OR est inférieur à 1, le «facteur de risque» étudié représente plutôt un facteur préventif (exemple un traitement) efficace qui diminue la proportion de malades.

Puissance

Dans un test statistique, c’est la probabilité de conclure à l’existence d’une différence qui existe dans la réalité entre deux groupes lorsqu’elle existe vraiment dans une population (P=1-erreur β). Elle augmente avec le nombre de sujets inclus dans l’étude. Elle est fixée a priori. Elle peut être recalculée à la fin de l’étude, en fonction du nombre de patients qui ont effectivement participé à l’étude.

Randomisation

Tirage au sort des patients permettant une répartition au hasard, aléatoire, des patients dans deux ou plusieurs groupes : un groupe expérimental exposé à un effet et un groupe de contrôle qui ne l’est pas. Dans l’idéal, elle aboutit à un profil de biais potentiels inconnus qui est similaire dans les deux groupes.

Risque relatif

C’est un indicateur qui mesure l’association entre un facteur d’exposition et un événement (survenu d’une maladie, décès, etc.)

Sur un tableau de contingence, on peut définir :

 MaladeNon Malade 
Exposé au risqueABA+B
Non exposé au risqueCDC+D
 A+CB+DN (total)

Incidence chez les exposés : I E = A / (A + B) 

Incidence chez les non exposés : I NE = C / (C + D)

A/(A+B)/C/(C+D) est appelé : « risque relatif RR ».

Les exposés ont RR fois plus de risques de développer la maladie que les non exposés. Un risque relatif supérieur à 1 signifie que l’exposition augmente le risque (facteur de risque), un risque inférieur à 1 signifie que l’exposition diminue le risque (facteur protecteur). Lorsqu’il est égal à 1, les probabilités de la survenue de l’événement dans les deux groupes sont égales.


 Références

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Stéphan JM. Problématique de la place de l’acupuncture dans la FIV. Acupuncture & Moxibustion. 2012;11(1):15-23. (Version Globale couleur)

A propos d’un cas clinique : intérêt de la moxibustion, de l’acupuncture et de l’électroacupuncture dans une oligoasthénozoospermie

Bhaktapur. Temple de Pashupatinath. XVIIe siècle. Position du couple en maithuna décrite dans le Kama Sutra – Népal
Bhaktapur. Temple de Pashupatinath. XVIIe siècle. Position du couple en maithuna décrite dans le Kama Sutra – Népal


Résumé 
Introduction : La baisse de la fertilité chez l’homme objectivée par de nombreuses études observationnelles est l’une des problématiques dans le cadre de l’assistance médicale à la procréation. L’objectif de ce travail est d’étudier l’intérêt de la moxibustion associée à l’acupuncture et l’électroacupuncture (EA) en cas d’oligoasthénozoospermie. Méthodes. Une étude d’un cas clinique étudie un protocole de traitement suivant la différenciation des syndromes zheng. Ce cas entre dans le cadre d’un Vide de yang du Rein. Résultats. La moxibustion associée à l’acupuncture améliore nettement la mobilité et le nombre de spermatozoïdes. La discussion permet de tempérer ces résultats en fonction de la physiologie de la spermatogenèse et des autres syndromes zheng, même si les nombreux essais contrôlés randomisés et les études expérimentales montrent des résultats positifs. Conclusion. En cas de Vide de yang du Rein, une des causes d’oligoasthénozoospermie, il existe des preuves suffisantes d’efficacité pour que la moxibustion associée à l’acupuncture et l’EA fasse partie du panel de soins de santé. Mots-clés : oligo-asthénozoospermie –  infertilité – acupuncture – moxibustion – étude de cas – Vide de yang de Rein.

Summary: Background: The decline of fertility in men objectified by many observational studies is one of the issues in the context of assisted reproductive technology. The objective of this work is to study the benefit of moxibustion combined with acupuncture and electroacupuncture (EA) in case of oligo-asthenospermia. Methods: A study of a clinical case study of a treatment according to syndrome differentiation (bian zheng). This case is part of an Kidney-yang deficiency. Results. Moxibustion combined withacupuncture significantly improves mobility and sperm count. The discussion served to temper these results based on the physiology of spermatogenesis and other syndromes zheng, although the many randomized controlled trials and experimental studies showing positive results. Conclusion. In case of a Kidney-yang deficiency, one of the causes of oligo-asthenozoospermia, there is sufficient evidence of effectiveness for that moxibustion combined with acupuncture and EA is part of the panel of health care. Keywords:oligo-asthenozoospermia – Infertility – Acupuncture – Moxibustion – case study – Kidney-yang deficiency.

Introduction

Une étude fondée sur soixante et un articles a objectivé que les concentrations de spermatozoïdes diminuait de 1% par an en moyenne, de 113 millions/ml dans les années 1930 à 66 millions/ml dans les années 1990 aux Etats-Unis [[1]]. Très discutée, cette première étude observationnelle fut réactualisée par Swan et coll. en 1997. En intégrant d’autres études et en prenant en compte l’origine géographique des sujets,  ils confirmaient la baisse de la concentration spermatique aussi bien en Amérique du Nord qu’en Europe (figure 1), mais non dans les pays non occidentaux [[2]]. En France, trois études menées grâce aux donnée transmises par les Cecos (centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humains) suggéraient également une diminution du nombre de spermatozoïdes mais montraient une disparité régionale avec par exemple un nombre de gamètes significativement plus élevé dans le Nord et plus bas dans le Sud-ouest [[3]]. Il était aussi observé au Cecos de Tours une diminution du pourcentage de spermatozoïdes mobiles passant de 64 à 49% entre 1976 et 2009 [[4]].

Figure 1. Densité moyenne du sperme observée sur les études Nord-Américaines (1), Européennes et australiennes (2) et non occidentaux (3) entre 1935 et 1995, d’après Swan [2].

Toutes ces observations épidémiologiques posent de ce fait le postulat qu’en dehors des facteurs géographiques, ethniques ou génétiques, il est possible que des facteurs environnementaux interviennent sur la production de spermatozoïdes chez l’homme [3]. De nombreux produits chimiques ont été incriminés comme l’exposition professionnelle au pesticide dibromochloropropane (DPCP) [[5]], au plomb inorganique [[6]], aux éthers de glycol [[7]], au dibromure d’éthylène [[8]] et autres pesticides [[9]], au disulfide de carbone [[10]]. Le stress et les conditions de vie [[11],[12]] interviennent également, ainsi que l’exposition à la chaleur [[13]]. D’autres arguments scientifiques plaident en faveur d’une exposition croissante à différents polluants environnementaux, comme les phtalates (Di-éthyl-hexyl-phtalate – DEHP ; DBP Dibutyl-phtalate ; BBP ; DEP etc.) et dérivés comme le MEHP (métabolite du DEHP). Ceux-ci sont largement utilisés dans la vie courante car produits en grandes quantités par les industries des plastiques. On les trouve dans les adhésifs, les revêtements de sol en vinyle, les détergents, les produits pharmaceutiques, les câbles électriques ou encore les huiles lubrifiantes. Ils entraîneraient une baisse de la fertilité chez l’homme par altération endocrinienne [[14],[15]]. D’autres composants fort répandus (bisphénol A, composés perfluorés, retardateurs de flamme (composés polybromés : PBDE- polybromodiphényléthers- etc.), parabènes) ont été analysés dans une expertise collective de l’Inserm et sont considérés aussi comme perturbateurs endocriniens. Un perturbateur endocrinien est une substance étrangère, produisant des effets pathologiques par modification de la fonction hormonale au niveau de l’appareil reproducteur en interférant avec la cascade de réactions intervenant dans le métabolisme et le catabolisme des ligands naturels responsables du maintien de l’homéostasie et de la régulation du développement de l’organisme [[16]]. Ainsi ont été mis en évidence chez l’homme le rôle de certaines molécules, comme le DDT (dichlorodiphényltrichloroéthane), le PCB, les phtalates DBP etc. qui agissent en agonistes ou antagonistes des stéroïdes sexuels pouvant avoir une action avant ou après la naissance [17-19].

Par ailleurs, il semble également que l’âge de l’homme intervienne dans l’infertilité d’origine masculine. En effet, un âge supérieur à 35 ans apparait comme un facteur majeur de risque d’échec dans la conception d’un enfant [[20]], tout comme un surpoids [[21]], l’exposition au tabac durant la vie intra-utérine [[22],[23]] ou la consommation d’alcool par la maman lors de la grossesse [[24]]. Bref, il s’avère que l’infertilité masculine peut résulter de causes multifactorielles.

Méthodes

Présentation du cas clinique et protocole de traitement

Mr Patrick S, âgé de 41 ans aux antécédents médicaux de syndrome dépressif, consulte fin août 2011 pour un problème d’infertilité. Il est en surpoids avec un indice de masse corporelle (IMC) à 27,7. Une insémination artificielle intra-utérine avec sperme du conjoint (IAC) est programmée chez son épouse fin octobre 2011.

Il me présente un spermogramme réalisé en janvier 2011 objectivant une oligoasthénozoospermie primaire puisque son nombre de spermatozoïdes est à 5,36 millions/ml avec une mobilité à la première heure de 26%. Le second spermogramme de contrôle idéalement réalisé à un mois d’intervalle n’a malheureusement pas été réalisé. L’évaluation endocrinienne avec dosage sérique de la FSH et de la testostérone est normale. Le bilan urologique ne relève ni varicocèle, ni infection génitale, ni auto-immunisation antispermatozoïde isolée. Il s’agit donc bien d’une oligoasthénozoospermie idiopathique.

Lors de sa première séance, on retrouve parmi les signes cliniques des lombalgies chroniques évaluées à l’échelle visuelle analogique à 2/10, une fatigue, des selles molles, une baisse de la libido. La langue est pâle. Les pouls sont xi (fin) et chen (profond). Aucun traitement médical n’a été prescrit. Tout ceci évoque un Vide de yang du Rein. Le traitement acupunctural va comporter l’utilisation d’acupuncture avec recherche du deqisur les points 3R (taixi), 13R (qixue), 23V (shenshu) et de moxibustion à l’armoise sur les points 3VC (zhongji), 4VC (guanyuan) et zigong (« palais de l’enfant »), 4VG (mingmen) et aussi sur le 23V. Une électroacupuncture (EA) est appliquée aussi sur le 29E (guilai) à la fréquence de 10Hz (durée d’impulsion rectangulaire asymétrique de 0,5ms d’un courant pulsé alternatif à moyenne nulle) par l’intermédiaire d’un stimulateur électrique Agistim duo Sédatelec® à une intensité supportable par le patient.  

Deux séances en moyenne de 25mn de stimulation acupuncturale et d’EA par semaine sont réalisées (douze séances au total) dont 10 à 15mn de moxibustion réalisées en début de séance, temps fonction de l’érythème et de la sensation de cuisson à chaque point chauffé.

A la sixième séance, sont rajoutés en acupuncture 6Rte (sanyinjiao) et 36E (zusanli en moxibustion) qui en tonifiant la Rate, renforcent le Sang, 20VG (baihui), 6MC (neiguan) et 7C (shenmen) qui calment le shen. En effet, se surajoutent des signes de Vide de Sang du Cœur, avec une langue toujours pâle et toujours des pouls xi (fin) et chen(profond). Mais les signes cliniques évoluent avec une asthénie physique et mentale plus intense. Apparaissent aussi quelques palpitations et acouphènes occasionnels, une insomnie avec anxiété associée à un état de stress plus marqué.

Résultats

Le spermogramme réalisé lors de l’insémination objective un nombre de spermatozoïdes de 8,01 millions/ml avec une mobilité 40%. Après optimisation, la mobilité passe à 80% et on insémine 1,11 million de spermatozoïdes mobiles. Malheureusement, la fécondation ne sera pas viable et le couple s’orientera vers une fécondation in vitro. Néanmoins, ce cas clinique permet d’observer une augmentation mais surtout une mobilité nettement accrue des spermatozoïdes.

Discussion

Le spermogramme est le reflet de la spermatogenèse (celle-ci dure  de 72 à 74 jours entre le moment de la maturation de l’état de cellule germinale –spermatogonie- à celui de spermatozoïde) qui va varier en fonction des tous les évènements intercurrents durant cette période. On sait aussi qu’il existe de grandes variations d’un spermogramme à l’autre chez un même patient, d’une semaine ou d’un mois à l’autre. On peut découvrir ainsi un spermogramme normal une semaine puis une oligozoospermie la semaine suivante, d’où la nécessité d’en réaliser plusieurs dans le temps avant de conclure [[25]]. De ce fait, il est difficile de donner des valeurs seuils pour un spermogramme insuffisant. Néanmoins pour avoir une bonne fertilité, il est retenu que le nombre de spermatozoïdes doit être supérieur à 15 millions/ml avec un pourcentage de mobilité totale supérieur à 40% [[26]].

L’oligoasthénozoospermie selon la Médecine Traditionnelle Chinoise ne s’embarrasse pas de chiffres. Elle répond aux tableaux cliniques de la différenciation des syndromes zheng.

Les syndromes zheng

L’oligoasthénozoospermie se manifeste selon la différenciation des syndromes zheng essentiellement par les tableaux cliniques de : Vide de yang du Rein ; Vide du yin du Foie et du Rein ; Vide de Rate ; syndromes Humidité-Chaleur du Réchauffeur inférieur et/ou du Foie ; Glaires-Humidité [27-30]. Néanmoins, peuvent se surajouter en plus du tableau clinique principal d’autres atteintes, comme dans ce cas clinique, le Vide de Sang du Cœur.

Les deux syndromes les plus fréquemment observés sont d’une part le Vide de yang du Rein et d’autre part les syndromes Humidité-Chaleur.

Le Vide de yang du Rein

Il correspond également au tableau de Vide du jing inné des Reins. L’Essence du Ciel antérieur est d’un point de vue physiologique le jing qui peut être désigné comme l’« Essence originelle séminale ». Ainsi, lors de l’acte sexuel, la vie naît de la rencontre des jing de l’homme et de la femme. Cette Essence du Ciel antérieur résulte donc de la dotation originelle et est transmise au fœtus. Elle est stockée au niveau des Reins qui sont dépositaires et transmetteurs de l’hérédité. Il s’agira donc de tonifier le Rein et aussi redonner de la vigueur à la Rate. Selon Zheng [35], c’est le syndrome essentiel de l’infertilité masculine.

On pourra remarquer par ailleurs que d’un point de vue physiopathologique, le jing étant en vide pourra entraîner un Vide de qi de Rate  qui recoupe le Vide de Sang. Le Cœur n’étant plus nourri en Sang, sa communication entre le shen du Cœur et le jing des Reins sera perturbée provoquant ainsi le Vide de Sang du Cœur, tel qu’on le retrouve dans ce cas clinique.

Les syndromes d’Humidité-Chaleur du Réchauffeur inférieur

Il faut les comprendre comme Humidité-Chaleur de la Rate et/ou Humidité-Chaleur du Foie. Ce sont des formes plénitudes. La langue n’est pas pâle et les pouls fins (xi) comme précédemment mais elle est rouge avec un enduit jaune et gras et les pouls sont mous (ru) ou  glissants (hua) et rapides (shuo). Ces syndromes sont considérés comme responsables des syndromes inflammatoires, voire infectieux des voies génitales.

Ce cas clinique semble donc objectiver qu’il est possible d’utiliser l’acupuncture en cas d’infertilité masculine. Les essais contrôlés randomisés (ECR) paraissent aussi le démontrer.

Les ECR

L’indication de traiter l’infertilité masculine est importante dans le cadre de l’assistance médicale à la procréation. Ainsi Zhang et coll. ont réalisé une petite étude clinique sur vingt-deux patients dont deux cycles de FIV-ISCI en rapport avec une infertilité masculine avaient échoué. Les patients étaient traités par acupuncture deux fois par semaine pendant huit semaines, séances suivies d’un nouveau traitement ICSI. Par rapport au spermogramme de départ, on observait que l’acupuncture avait significativement amélioré la motilité des spermatozoïdes rapides (18,3% versus 11,0% ; p<0,01), ainsi que le ratio des formes normales (21,1% vs 16,2% ; p<0,05). Le pourcentage de fécondation après l’acupuncture (66,2%) était statistiquement (p<0,01) plus élevé que celui avant le traitement (40,2%) [[31]].

Une étude de Trong Khanh et Nguyen avait d’ailleurs montré en 2005 l’intérêt de l’acupuncture pour améliorer le spermogramme en se basant sur sept études cliniques occidentales et chinoises parues entre 1997 et 2005 [[32]]. Mais à part les ECR de Gunfinkel [[33]] et de Pei [[34]], la plupart des autres essais cliniques [30,[35],[36]] étaient hétérogènes, non randomisés, de petits effectifs et qualité méthodologique non satisfaisante.

Deux autres essais parus en 2008 montraient également une amélioration de l’oligoasthénozoospermie ou des anomalies du liquide séminal. Petit bémol néanmoins car ces deux essais en langue chinoise, l’un utilisant l’électroacupuncture et se comparant à la phytothérapie chinoise [[37]] et l’autre acupuncture et moxibustion associées à la phytothérapie chinoise [[38]] étaient difficilement analysables.

Bien meilleur est l’ECR de Dieterle et coll. [[39]] en simple aveugle et contre placebo, respectant les critères méthodologiques d’acupuncture STRICTA (Jadad=4) et qui s’est intéressé aux sévères oligoasthénozoospermies (concentration de spermatozoïdes < 1 million/ml). Deux groupes, groupe acupuncture (n=28) et un groupe placebo (n=29) ont bénéficié de deux séances de 45mn d’acupuncture par semaine pendant six semaines. Les points utilisés sont ceux inspirés du protocole de Pei [31] : 36E, 6Rte, 3R, 3F, 23V, 32V, 29E, 10Rte et 4VC (le 20VG est omis du protocole en raison de la difficulté technique de fixer une aiguille placebo). On utilisait des aiguilles factices non pénétrantes dans le groupe placebo, avec recherche du deqi dans le groupe acupuncture. Les résultats montraient une augmentation statistiquement significative (p=0,035) du pourcentage de motilité des spermatozoïdes par rapport au groupe placebo, mais pas sur leur concentration.

Mécanismes d’action

Le mécanisme d’action de l’acupuncture résulterait, similairement à l’ovaire, d’une augmentation du débit sanguin dans l’artère testiculaire (ou spermatique) comme cela a été démontré dans un ECR par l’équipe turque de Cakmak [[40]]. Ainsi la stimulation électroacupuncturale à une fréquence de 10hz au niveau du 29E (guilai) l’augmente de manière statistiquement significative (p<0,005) par rapport à l’état basal. Les auteurs notent qu’il n’y a aucun effet si la stimulation se fait à 2 Hz ou à la simple puncture. Idem, il n’existe aucun effet lors de la stimulation du 25E de quelque façon que ce soit.

L’hyperthermie scrotale (au-delà de 33°) est connue pour entraîner certaines altérations de la spermatogénèse dont l’oligoasthéno-tératozoospermie voire l’azoospermie [[41],[42]]. Siterman et coll. démontrent que l’acupuncture diminue la température scrotale et de ce fait améliore l’oligozoospermie. Ils ont réalisé huit à dix traitements appliqués selon la différenciation des syndromes : les points 6Rte, 4VC, 7P, 6R, 30E ont tous été stimulés pendant 25mn  en cas de Vide du  Rein ou d’Humidité-Chaleur. Sont rajoutés 3R, 23V, 11R et 52V en cas de Vide de yang du Rein exclusivement (attribué à un défaut de la spermatogenèse) ; ou 9Rte, 5F, 11GI, 28E et 41VB si Humidité-Chaleur (correspondant à une inflammation de l’arbre génital). Des points secondaires peuvent aussi être associés selon les zheng: 4GI, 36E, 10Rte, 7C, 20V, 6MC, 1VC, 2VC, 6VC, 4VG, 20VG, 20VB, 3F, 7R et 27VB. Pas plus de douze points par séance [[43]].

Siterman et coll. objectivent ainsi que l’acupuncture est d’autant plus efficace que l’on traite les tableaux zheng d’Humidité-Chaleur. L’acupuncture agirait en stimulant la réponse immunitaire de l’organisme.

L’action de l’EA sur l’hyperthermie scrotale est également analysée dans cette récente étude de Gao. Une augmentation du nombre de spermatozoïdes épididymaires mobiles est observée qui s’expliquerait par la prolifération des cellules germinales (spermatogonies) en rapport avec l’amélioration des fonctions des cellules de Sertoli [[44]] (figure 2).

Figure 2. Schéma montrant le protocole de traitement d’EA chez un rat Sprague-Dawley. Ce modèle de rat a été mis en condition pendant 30 min par augmentation de la chaleur du scrotum (43°C) dans le groupe traité ou température à 22°C dans le groupe témoin. Au 9ème jour, l’EA a été effectuée tous les trois jours pour un total de 10 séances (25 minutes chacun). Des échantillons de tissus ont été prélevés au jour 0, 1, 9, 25, 37, 46, 56 et 79. L’EA a été réalisée en six points d’acupuncture : baihui(20VG), guanyuan(4VC), sanyinjiao (6Rte; bilatéralement), zusanli(36E ; bilatéralement). Les points d’acupuncture ont été stimulés électriquement avec une alternance de fréquences de 3Hz et 9Hz pour éviter le phénomène de tolérance des tissus à la stimulation (figure d’après [44]).

Les traitements habituels de l’oligoasthénozoospermie

Nombreux sont les traitements non spécifiques proposés : androgénothérapie, antioestrogènes (comme le clomifène, le tamoxifène), GnRH, kallicréines, bromocriptine, pentoxifylline, gonadotrophines (HCG, HMG), carnitine, glutathion, arginine, zinc, sélénium, vitamines A, C, E, indométacine, coenzyme Q10 etc.. Mais par manque d’études contrôlés randomisées (ECR) en aveugle avec cross-over, aucun traitement n’a montré une efficacité certaine pour être recommandé dans le cadre d’une infertilité idiopathique sans anomalie biologique [45-48]. Par ailleurs, excepté certaines molécules comme les vitamines, ces thérapeutiques ne sont pas exemptes d’effets indésirables. De nombreuses autres molécules sont encore à l’étude comme on peut le constater dans le méta-registre d’essais cliniques contrôlés (mRCT) concernant la transplantation de cellules souches, l’utilisation de metformine, de la lisinopril, des inhibiteurs des aromatases, la supplémentation en vitamine D ou en oméga 3 etc., mais aucune concernant l’efficacité de l’acupuncture [[49]].

Conclusion

De nombreuses thérapeutiques, basées sur leur mode d’action in vitro ou des essais cliniques ouverts non contrôlés, ont été proposées pour jouer un rôle possible dans la gestion de l’infertilité masculine idiopathique.

Il existe aussi quelques essais contrôlés randomisés mais qui ne parviennent pas à démontrer clairement un avantage décisif de leur efficacité. D’autre part, certaines thérapies, tels que les androgènes et gonadotrophines, peuvent nuire à la spermatogenèse ou entraîner des complications importantes. En dehors de l’assistance médicale à la procréation, les options thérapeutiques conventionnelles sont limitées et certains experts préconisent de continuer à prescrire ce genre de médicaments. Cette politique de traitement peut être acceptable si le patient et le médecin pensent avoir des attentes réalistes de résultat, tout en préconisant les autres modalités thérapeutiques s’il n’y a pas d’amélioration après une période de trois à six mois.

Pourtant, d’autres protocoles sont possibles, comme en témoigne encore cette étude de cas iranienne de Bidouee et coll. [[50]]. En effet, ils montrent que quarante séances d’acupuncture utilisant l’approche de Siterman [43] à raison de deux par semaine chez un homme de 31 ans initialement en azoospermie a permis d’obtenir un spermogramme avec 18 millions de spermatozoïdes/ml dont 10% ayant une bonne motilité et 60% de forme normale.

Et dans notre étude de traitement d’un Vide de yang du Rein selon la différenciation des syndromes zhenget en appliquant les données en rapport avec la recherche physiologique des mécanismes d’action (EA à 10Hz), l’oligoasthénozoospermie peut être également améliorée par la moxibustion associée à l’acupuncture et l’EA.

Quoi qu’il en soit et compte tenu du fait que l’acupuncture est une thérapeutique sûre et sans effets secondaires significatifs, on se doit donc de la considérer comme ayant toute sa place dans le panel de soins de santé.

David de Michel-Ange (1501-1504) – Galleria dell’ Accademia – Florence – Italie
David de Michel-Ange (1501-1504) – Galleria dell’ Accademia – Florence – Italie

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Stéphan JM. A propos d’un cas clinique : intérêt de la moxibustion, de l’acupuncture et de l’électroacupuncture dans une oligoasthénozoospermie. Acupuncture & Moxibustion. 2012;11(2):118-125. (Version PDF imprimable)

Stéphan JM. A propos d’un cas clinique : intérêt de la moxibustion, de l’acupuncture et de l’électroacupuncture dans une oligoasthénozoospermie. Acupuncture & Moxibustion. 2012;11(2):118-125. (Version globale couleur).

Hypogalactie et asthénie du post-partum

Dame dans son bain (1571) – François Clouet – National Gallery Of Art – Washington DC – USA
Dame dans son bain (1571) – François Clouet – National Gallery Of Art – Washington DC – USA

Mme Laure est une primipare de 32 ans qui a eu une grossesse après la deuxième insémination. Suite au bilan clinique fait avant les inséminations, elle n’avait pas de cause physique détectée pour être étiquetée d’infertile et son conjoint non plus, cependant la grossesse s’est fait attendre 3 ans. La grossesse s’est passée sans problèmes, mise à part quelques nausées en début de grossesse, des contractions vers le sixième mois sans modification du col et vite passées avec le repos et une légère anémie. Elle a accouché à terme d’une petite Anne qui pesait 3020g après un travail long car elle avait des contractions irrégulières et inefficaces.

Maintenant elle est à J4 et souhaite allaiter mais ses seins sont mous, la montée laiteuse se fait attendre, elle est fatiguée, dort mal même quand Anne dort, a des étourdissements quand se met debout et des palpitations. Elle a des crises d’angoisse et de pleurs car se sent « incapable » de nourrir son enfant ce qui est «certainement un signe» qu’elle sera une « mauvaise mère ».

Quel diagnostic vous évoque cette patiente selon la différenciation des syndromes ?

Il s’agit une hypogalactie de type Vide [1] avec un Vide de Sang et de qi et particulièrement dans ce cas un vide du qi du Rein.  

Quels sont les signes cliniques qui vous permettent de poser votre diagnostic ?

Après détermination du syndrome général, c’est à dire le Vide de Sang, on peut déterminer les viscères impliqués. Ici le Vide de Sang de Cœur sera très évocateur du fait des palpitations, de l’insomnie et des vertiges. Le Vide de qi de Rate à évoquer en rapport avec les nausées et vomissements du début de grossesse et l’asthénie actuelle.

 Comment sont, selon vous, ses pouls et la langue ?

 Quel traitement proposez-vous en justifiant ?

La moxibustion est essentielle. Les points préconisés sont cités et décrits pour leur efficacité dans les hypogalacties par les différents Textes Classiques (DachengZhen Jiu Sheng JingNanjing etc.. ou moderne (Soulié de Morant). Néanmoins le point IG1 pourra se faire à l’aiguille avec recherche de deqi ou par électroacupuncture à 20Hz. On pourra faire aussi le VC17 à l’aiguille ou en moxibustion. Le Zhen jiu zi sheng  jing déclare : «  lorsqu’il existe une stagnation des vaisseaux du lait avec une lactation insuffisante, la moxibustion la guérit immédiatement » [2].

 Cas cliniques et essais contrôlés randomisés dans la littérature

 L’efficacité de ce traitement est objectivée dans des études de cas et deux ECR ayant utilisé quasiment les mêmes points dans le diagnostic de Vide de qi et de Sang. Toutefois le protocole de Wei [6] dans son ECR explicatif classant les femmes selon la différenciation des syndromes (zheng) n’offre pas plus d’amélioration dans les hypogalacties de type Vide que dans celles en Plénitude par stase de qi de FoieCependant,les auteurs notent que le point IG1 est plus efficace (p<0,01) que le point GI1 du groupe témoin (tableau I). Gageons néanmoins que s’ils avaient utilisé les autres points préconisés selon les zheng et non un point unique, le résultat aurait été sans doute différent.

Tableau I. Principales études du traitement par acupuncture de l’hypogalactie de type Vide. 

Auteur (année, pays)Type d’étude et populationGroupe intervention
Traitement
Résultats sur l’hypogalactie
Wang (2004, Chine) [3]Études de cas (N=54)IG1, VC17, ES18, VE20, ES36, RA6 (recherche deqi) : séance de 30mn
Moxibustion 20mn sur ES18 et VC17 (1 séance/j durant 11 jours)
Efficacité : 78%
Amélioration : 16%
Échec : 6%
Tian (1998, Chine) [4]Etudes de cas (N=63)Vide de qi et de Sang :
VC17, ES18, VB21, VE20 et ES36 (recherche deqi)
Injection sur les points 0,5mg Vitamine B121 séance 1 jour sur 2 (6-8 séances)
Efficacité : 89%
Amélioration : 8%
Échec : 3%
Neri (2011, Italie) [5]ECR pragmatique, parallèle, sans insu (N=90)1. groupe acupuncture-traitement commun :
IG1, ES18 et VC17
– vide de qi et de Sang : ES36, RA6 et VE20
– stase du qi du Foie : FO3, MC6
2. groupe conseils de soins habituels
Traitement  de trois semaines : 2 fois par semaine
Suivi : 3 mois
– Efficacité 100% à  3 semaines supérieure (p <0,03) au groupe contrôle (60%)
– A 3 mois : 35% versus 15% (p<0,03) dans le groupe contrôle.
-Acupuncture supérieure aux conseils de soins habituels
Wei (2008, Chine) [6]ECR analytique, parallèle, sans insu (N=92)1. groupe Acu IG1 avec deqi (n=46)
– vide de qi et de Sang (n=27)
– stase de qi de Foie (n=19)
EA 30 minutes après (20 Hz, 0,1A) 1 fois par jour : 5 jours, puis renouvellement de la session après un intervalle libre de 2 jours
2. groupe contrôle GI1 (n=46) : même stratégie de session 
suivi : 1 mois
Efficacité 100% dans groupe IG1 versus 69,6% groupe contrôle (p<0,01)

 Conclusion

 On peut donc conclure à l’équivalence du traitement individualisé et des protocoles des ECR utilisant la différenciation des syndromes (zheng) dans l’hypogalactie de type Vide (figure 1).  

Figure 1. Équivalence des traitements.

Références

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Mères et enfants au bord du Mékong - Laos
Mères et enfants au bord du Mékong – Laos

Guiraud-Sobral A, Stéphan JM. Hypogalactie et asthénie du post-partum. Acupuncture & Moxibustion. 2013;12(1):38-40. (Version PDF imprimable)

 Obstétrique et acupuncture factuelle. Quel niveau de preuve en 2015 ?

Taj Mahal – Mausolée construit en 1631 par l’empereur moghol musulman Shâh Jahân en mémoire de son épouse Arjumand Bânu Begam Agra morte en donnant naissance à leur quatorzième enfant – Uttar Pradesh – Inde
Taj Mahal – Mausolée construit en 1631 par l’empereur moghol musulman Shâh Jahân en mémoire de son épouse Arjumand Bânu Begam Agra morte en donnant naissance à leur quatorzième enfant – Uttar Pradesh – Inde

Résumé : Introduction. De plus en plus d’études cliniques concernant l’acupuncture en obstétrique sont publiées. Médecins, sages-femmes mais aussi patientes à la recherche de traitements efficaces non tératogènes pendant leur grossesse s’impliquent davantage. Méthodes. Un état des lieux des essais comparatifs randomisés (ECR) est réalisé à partir de la revue de littérature internationale référencée dans la base de donnée Pubmed-Medline. Résultats. Un grade de recommandations A de preuve scientifique établie s’applique aux nausées et vomissements gravidiques ; un grade de recommandations B de présomption scientifique est objectivé dans le syndrome anxio-dépressif, l’engorgement mammaire et la mastite ; et enfin dans les préventions de l’avortement spontané, un grade C de faible niveau de preuve scientifique peut être retenu. Conclusion. L’acupuncture peut être raisonnablement indiquée selon les niveaux de recommandations de la Haute Autorité de Santé Française. Mots-clés : obstétrique – nausées – vomissements – acupuncture –  syndrome douloureux pelvien gravidique – syndrome de Lacomme – mastite – prévention avortement spontané – ECR – recommandations.

Summary: Background. More and more clinical studies of acupuncture in obstetrics are published. Doctors, midwives but also patients seeking nonteratogenic effective treatment during pregnancy are more involved. Methods. An evaluation of the randomized controlled trials (RCTs) is made from the international literature review referenced in the Pubmed-Medline database. Results. A Grade A recommendation of established scientific evidence is attributed to nausea and vomiting of pregnancy; a scientific presumption of recommendation B grade is assigned to the anxiety-depressive syndrome, breast engorgement and mastitis; and finally in the prevention of miscarriage, a grade C low level of scientific evidence has been admitted. Conclusion. Acupuncture may be reasonably indicated according to the level of the recommendations by the French High Authority of Health. Keywords: obstetrics – nausea – vomiting – acupuncture – pregnancy pelvic pain syndrome – syndrome Lacomme – mastitis – prevention of miscarriage – RCT – recommendations.

En 2010, un état des lieux des essais comparatifs randomisés (ECR) avait permis de déterminer que, dans certaines indications, l’acupuncture pouvait être raisonnablement utilisée en consultation prénatale, en préparation maternelle, en salle de naissance et en suites de couches en fonction des données issues de la médecine factuelle fondée sur le niveau de preuve (EBM – Evidence-Based Medicine) [[1]]. Cinq années plus tard, les indications de l’acupuncture peuvent être analysées à nouveau à la lumière des récentes études de cas, ECR, méta-analyses ou recommandations professionnelles et l’évaluer selon les recommandations de la Haute Autorité de Santé française (HAS). Un guide d’analyse de la littérature et gradation des recommandations a été publié par l’Agence nationale pour l’accréditation et l’évaluation en santé (Anaes) en 2000 et repris par la HAS en 2013 [[2]]. Ce guide récapitule le grade des recommandations proposées et classées en grade A, B ou C selon les modalités exposées dans le tableau I. 

Tableau I. Les grades des recommandations. 

Grade des recommandationsNiveau de preuve scientifique fourni par la littérature
 A 
Preuve scientifique établie
Niveau 1
– Essais comparatifs randomisés de forte puissance
 – Méta-analyse d’essais comparatifs randomisés
 – Analyse de décision fondée sur des études bien menées
B
Présomption scientifique
 Niveau 2
– Essais comparatifs randomisés de faible puissance
– Études comparatives non randomisées bien menées
 – Études de cohortes 
C
Faible niveau de preuve scientifique
 Niveau 3
– Études cas-témoins
Niveau 4
– Études comparatives comportant des biais importants
– Études rétrospectives 
– Série de cas
– Études épidémiologiques descriptives (transversale, longitudinale)

Nausées, vomissements gravidiques et hyperemesis gravidarum

En 2004, une synthèse méthodique des essais comparatifs randomisés concernant le traitement des nausées et des vomissements gravidiques (NVg) objectivait des résultats favorables à l’acupuncture. Ces essais étaient très hétérogènes mais de qualité méthodologique correcte selon l’échelle de Jadad. Deux techniques se sont révélées les plus efficaces avec un niveau de preuve élevé : la puncture du 6MC (neiguan) et le port d’un bracelet d’acustimulation électrique sur 6MC [[3]].

Une méta-analyse portant sur treize ECR (n=1615) objectivait en 2006 que l’acupuncture versus groupe témoin, toutes modalités confondues (EA, acupuncture ou acupression), réduisait la proportion des nausées (RR = 0,47, IC 95% : 0,35-0,62 ; p <0,0001) et des vomissements (RR = 0,59 ; IC 95% : 0,51-0,68, P <0,0001). Néanmoins, du fait d’un possible effet placebo par rapport aux groupes témoins, les auteurs préconisaient d’autres ECR de plus grande puissance et de haute qualité méthodologique [[4]].

La mise à jour 2015 de la collaboration Cochrane de Matthews et al. [[5]] objective, quant à elle, des preuves limitées concernant l’efficacité de l’acupression ou de l’électroacupuncture (EA) par le 6MC sur les NVg. En effet, l’efficacité de l’électroacupuncture sur MC6 versus dispositif placebo se base sur la seule et unique étude de Rosen de 2003 (n=187) qui en montre une réduction au cours du premier trimestre de la grossesse [[6]]. Cette étude en simple aveugle de bonne qualité méthodologique selon les auteurs de la collaboration Cochrane spécifie cependant que la diminution des NVg va engendrer une prise de poids statistiquement significative (p=0,023) et une diminution de la déshydratation (p=0,024) versus groupe placebo (figure 1).

Figure 1. Comparaison entre électroacupuncture au 6MC versus placebo. Critère de jugement : gain de poids après une période de 3 mois [5].

Toujours selon Matthews et al., l’acupuncture traditionnelle ou au 6MC n’a montré aucun avantage significatif dans les nausées et vomissements versus placebo. Ils se basent encore une fois sur la seule étude de Smith et al. (n=593) [[7]] et omettent de dire qu’il y a une supériorité statistiquement significative d’un protocole d’acupuncture traditionnelle selon la différenciation des syndromes (zheng) (stase de qi de Foie, Chaleur de l’Estomac etc..) dans le groupe acupuncture (n=148) versus acupuncture factice placebo (n=148) en ce qui concerne les nausées (figure 2).

Notons par ailleurs que l’acupuncture factice n’est pas réellement placebo car il s’agit de puncturer sur des zones proches de celles du groupe acupuncture véritable, et, de ce fait, on ne peut que récuser ce placebo qui n’en est pas vraiment un. On sait ainsi que l’acupuncture feinte sur des non-points, surtout appliquée sur le même dermatome, n’est pas inerte et ne peut être considérée comme placebo car faisant intervenir le système limbique [[8]]. Ce qui veut dire que l’acupuncture traditionnelle ou acupuncture factice sur des points du même dermatome est équivalente en terme d’efficacité sur les nausées.

Figure 2. Le protocole d’acupuncture traditionnelle est plus efficace de manière statistiquement significative (différence moyenne à modèle fixe -0.70 ; IC 95%, -1,36 à -0,04 ; p=0,038)  que l’acupuncture factice. Critère de jugement : les nausées au 7e jour [5].

Notons aussi que l’étude Cochrane 2015 fait abstraction de l’hyperemesis gravidarum qui sont des vomissements incoercibles s’accompagnant habituellement d’une perte de poids, d’une cétonurie et de troubles hydro-électrolytiques avec éventuelle déshydratation. Des ECR [9-11] objectivent une efficacité dans cette pathologie et Nguyen dans son article de 2006 [[12]], toujours d’actualité, montre l’intérêt de l’acupuncture versus métoclopramide. Aucun effet indésirable, aucun incident ou accident grave n’a été décrit au cours des séances d’acupuncture ou d’EA chez les femmes enceintes [[13],[14]]. Le métoclopramide, quant à lui, ne possède pas  l’indication spécifique pour les NVg et d’ailleurs ne peut être prescrit que de manière très ponctuelle sans excéder cinq jours en raison des risques neurologiques et cardiaques.

La Haute Autorité de Santé en France en 2005 précise que la stimulation du point d’acupuncture 6MC est efficace dans les nausées et vomissements gravidiques avec un grade de recommandation A, c’est- à-dire preuve scientifique établie [[15]]. En Grande Bretagne, le rapport du National Institute for Health and Care Excellence (NICE) de 2008 recommande l’utilisation du point 6MC [[16]]. En conclusion, l’utilisation de l’acupuncture dans les NVg chez la femme enceinte peut toujours être proposée en 2015 avec un grade A de recommandation avec un niveau 1 de preuve scientifique établie selon les recommandations de la HAS.

Prévention de l’avortement spontané ou fausse couche

Il s’agit de l’expulsion spontanée du produit de la fécondation entre la détection de celle-ci et la date de viabilité fœtale que l’on considère à 24 semaines d’aménorrhées (SA). On parle de fausse couche lorsque l’enfant ne montre aucun signe vital comme la respiration, les battements du cœur ou les pulsations du cordon ombilical et que son poids est inférieur à 500 g.

Depuis l’analyse de littérature réalisée en 2008 qui objectivait le peu d’études disponibles sur la prévention de l’avortement spontané par acupuncture [[17]], des auteurs ont suggéré en 2012 que l’acupuncture devait faire partie de l’arsenal thérapeutique dans la prévention des fausses couches en se basant sur quatre études concernant des soins de soutien (contrôle plus régulier avec monitoring, relaxation, soutien affectif, conseils informatifs sur mode de vie, alimentation etc.) [[18]]. En effet, lorsque les soins de soutien sont fournis pour les femmes présentant des fausses couches à répétition, on observait une augmentation des résultats bénéfiques dans les groupes en soutien par rapport aux groupes témoins recevant des soins prénataux classiques. Ainsi une étude observationnelle de cohorte prospective a rapporté un taux de grossesse de 75% au-delà de 24 semaines de gestation (n=226) [[19]] ; un ECR a objectivé un pourcentage de 86% dans le groupe soutien (n=44) versus 33% dans le groupe témoin (n=9) [[20]]. Cependant, concernant l’acupuncture, il n’existe qu’un seul essai pragmatique chinois positif. Mais il compare deux variétés d’acupuncture (n=60) mais avec des risques de biais importants sans troisième groupe témoin, sans aucune mise en insu et sans randomisation décrite [[21]]. De ce fait, difficile de conclure. On peut remarquer néanmoins que dans l’assistance médicale à la procréation (AMP), une étude a révélé une réduction statistiquement significative des taux de fausses couches chez les femmes recevant un traitement d’acupuncture (p<0,05). Bien que d’autres études soient nécessaires pour confirmer cela, les auteurs concluaient que l’acupuncture avait le potentiel de promouvoir des réponses hormonales bénéfiques en début de grossesse permettant d’éviter la menace d’avortement spontané [[22]]. En conclusion, dans cette indication, un niveau 4 de faible niveau de preuve scientifique avec un grade de recommandations C peut être retenu.

Syndrome anxio-dépressif durant la grossesse et en post-partum

Une méta-analyse de 2013 de la collaboration Cochrane [[23]] étudiant deux ECR réalisés en 2004 et 2010 [[24],[25]] a montré que les preuves ne sont pas concluantes alors qu’une revue systématique analysant les mêmes études, considère qu’il existe des preuves de haut niveau pour soutenir l’utilisation de l’acupuncture dans les états dépressifs majeurs durant la grossesse [[26]]. Un suivi acupunctural d’un cas clinique sur près de six mois permet à la patiente le sevrage complet de l’inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine (ISRS) [[27]] laissant envisager que l’acupuncture peut être une alternative séduisante aux traitements classiques sans risque iatrogène, ni risques secondaires. A contrario, a été évoqué en fin de grossesse un risque accru d’hypertension artérielle pulmonaire néonatale chez les enfants de mères exposées à un ISRS [[28]].

Dans le post-partum, un ECR pilote en double aveugle réalisé durant les six mois ayant suivi l’accouchement, mais malheureusement de faible population (n=20) a objectivé que l’EA permettait de réduire de manière statistiquement significative l’état dépressif majeur en post-partum [[29]].

En conclusion, l’utilisation de l’acupuncture ou l’EA dans les états dépressifs chez la femme enceinte et en post-partum peut être proposée avec un grade B de présomption scientifique de niveau 2 de preuves selon les recommandations de la HAS.

Syndrome douloureux pelvien gravidique (syndrome de Lacomme) et douleurs lombaires basses

En 2007 et 2008 deux revues systématiques recommandaient d’utiliser l’acupuncture dans les douleurs pelviennes et lombaires basses. La revue de Cochrane (8 ECR répertoriés, n=1305) montrait que l’acupuncture offrait de meilleurs résultats antalgiques par rapport à la kinésithérapie, surtout dans les algies en fin de journée [[30]]. La revue de 2008 de Ee et coll. [[31]] confirmait ces résultats en analysant trois essais sur les quatre-cent-trente-deux références sélectionnées et estimait l’acupuncture, en adjonction au traitement standard, supérieure au traitement standard seul et à la kinésithérapie dans le soulagement des douleurs pelviennes et lombaires basses. Mais ils concluaient que les preuves étaient limitées du fait des nombreux biais et de la faiblesse méthodologique. Ils considéraient que de nouveaux essais contrôlés randomisés de haute qualité méthodologique étaient nécessaires. Quoiqu’il en soit en 2009, un grade de recommandations de niveau B était préconisé [[32]]. En 2015, la mise à jour de la revue Cochrane était réalisée (34 ECR, n=5121) ; six ECR (n=889) s’intéressant aux douleurs pelviennes et treize (n=2385 patientes) concernant à la fois les douleurs lombaires et pelviennes traitées par différentes interventions (exercices, kinésithérapie, manipulations, éducation, gymnastique aquatique, ceinture, acupuncture…) [[33]]. La conclusion évoluait peu, à savoir que l’acupuncture réduisait les douleurs lombo-pelviennes versus la prise en charge habituelle en se basant sur l’unique étude de Kvorning [[34]] (figure 3). Malheureusement, tout se base encore une fois sur une unique étude ouverte de qualité méthodologique médiocre (score de Jadad 2/5) et de faible population.

Ce syndrome douloureux gravidique suscite encore des études, même si elles ne sont pas toutes de haute qualité méthodologique. Ainsi, deux petites études prospectives ouvertes ont été réalisées dans le nord de la France, l’une au centre hospitalier de Lens (n=21), l’autre à celui de Douai (n=30)  [[35],[36]]. Toutes deux ont montré une amélioration des algies mais aussi de l’incapacité fonctionnelle. Un ECR est en cours qui a bénéficié d’une étude pilote (n=41) objectivant également l’efficacité de l’acupuncture à la fois sur la douleur et la fonction [[37]].

Figure 3. L’acupuncture associée aux soins usuels prénataux est statistiquement plus efficace (RR=4,16 IC 95% 1,77 -9,78 p=0,0011) que les soins usuels seuls [33].

Enfin, une revue de littérature systématique de novembre 2015 a conclu à partir de sept ECR que le traitement acupunctural durant la grossesse réduisait les algies lombo-pelviennes et améliorait la fonction et la capacité au travail. Aucun effet secondaire n’était objectivé. Les auteurs concluaient que le niveau de preuve était suffisamment important pour préconiser l’acupuncture dans les douleurs lombo-pelviennes de la grossesse [[38]]. Néanmoins, la population étudiée n’est pas encore très élevée et la méta-analyse n’a pas été réalisée en raison de l’hétérogénéité des ECR déjà présentés précédemment [32]. En conclusion et en attendant d’avoir un ECR de haute qualité méthodologique, un grade B de présomption scientifique de niveau 2 de preuves selon les recommandations de la HAS peut donc être proposé.

 Engorgement mammaire et mastite

En 2011, une analyse des essais contrôlés randomisés avait montré l’intérêt de l’acupuncture dans les engorgements mammaires et les mastites. En effet, l’acupuncture en association avec les recommandations de positionnement correct du nourrisson offre une possibilité de prévenir les arrêts d’allaitement suite à des engorgements mammaires ou des mastites [[39]]. On observait ainsi chez les femmes recevant l’acupuncture versus soins habituels une plus grande amélioration statistiquement significative des symptômes à partir du 4e jour (RR= 0,82 ; IC 95% 0,82 [0,69-0,96], p=0,0014) et qui restait encore significative (p=0,041) au 5e jour [[40]]. Les auteurs de cette revue Cochrane avaient analysé l’ECR suédois de type pragmatique de Kvist de 2007 (n=140) [[41]]. L’action préventive de l’acupuncture dans l’atténuation des inconvénients de la montée laiteuse a bénéficié aussi d’une étude de cohorte (n=149), prospective et comparative (groupe acupuncture n=102 ; groupe témoin n=47) permettant d’analyser l’efficacité d’une seule et unique séance d’acupuncture réalisée au lendemain de l’accouchement. Les points choisis : 37VB (guangming), 41VB (zulinqi), 6R (zhaohai), 44E (neiting) ont diminué la douleur de la montée laiteuse dès J3 versus le groupe témoin [[42]]. Un grade B de présomption scientifique de niveau 2 de preuves selon les recommandations de la HAS peut donc être proposé.

Conclusion

En raison de la progression constante des études cliniques concernant la femme enceinte, le niveau de preuve évolue. Depuis 2010, deux-cent-quatre-vingt-deux publications ont été référencées dans la base de données américaine Pubmed-Medline.gov dépendant de la National Center for Biotechnology Information (NCBI) concernant l’obstétrique, dont soixante-quatre ECR. Ainsi selon l’HAS, un grade de recommandations A de preuve scientifique établie s’applique toujours aux nausées et vomissements gravidiques ; un grade de recommandations B de présomption scientifique est objectivé dans le syndrome anxio-dépressif, l’engorgement mammaire et la mastite ; et pour une nouvelle indication, les préventions de l’avortement spontané, un grade C de faible niveau de preuve scientifique peut être retenu.

Dans un prochain article, seront étudiées les autres indications de l’acupuncture chez la femme enceinte comme les versions, l’analgésie durant le travail, l’induction et la maturation … mais aussi la procréation médicale assistée.

Taj Mahal – Mausolée construit en 1631 par l’empereur moghol musulman Shâh Jahân en mémoire de son épouse Arjumand Bânu Begam Agra morte en donnant naissance à leur quatorzième enfant – Uttar Pradesh – Inde
Taj Mahal – Mausolée construit en 1631 par l’empereur moghol musulman Shâh Jahân en mémoire de son épouse Arjumand Bânu Begam Agra morte en donnant naissance à leur quatorzième enfant – Uttar Pradesh – Inde

 Références

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Syndrome anxio-dépressif et grossesse : synthèse à propos d’un cas clinique traité par zhenjiu (针灸) et électroacupuncture

Crater Lake (lac de cratère) dans la caldeira du volcan Mazama – Oregon – USA
Crater Lake (lac de cratère) dans la caldeira du volcan Mazama – Oregon – USA


Résumé
 : Introduction. L’objectif de ce travail est d’évaluer la possibilité d’utiliser l’acupuncture-moxibustion (zhenjiu) et l’électroacupuncture dans le syndrome anxio-dépressif chez la femme enceinte. Méthodes. Une étude d’un cas clinique d’une anxio-dépression mesurée à 21 sur l’échelle d’évaluation de la dépression HDRS de Hamilton 17 permet d’étudier le protocole de traitement selon la différenciation des syndromes (bianzheng). Après un rappel de la physiopathologie selon la Médecine Traditionnelle Chinoise (MTC) et celle de la médecine expérimentale, un état des lieux des essais comparatifs randomisés (ECR) et méta-analyses est réalisé. Résultats. L’acupuncture peut être utilisée en monothérapie chez la femme enceinte. Selon les preuves issues des ECR et méta-analyses, on peut considérer sa contribution utile et efficace et elle peut être une alternative raisonnable soit des inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS), soit de la psychothérapie. Conclusion.L’utilisation de l’acupuncture dans les états dépressifs chez la femme enceinte peut être proposée avec un grade B de présomption scientifique selon les recommandations de la Haute Autorité de Santé française (HAS). Mots clés : Acupuncture – grossesse –dépression – bianzheng – axe hypothalamo-hypophysaire-surrénalien –sérotonine – BDNF – glutamate –  hippocampe – GABA – noradrénaline – stress – HDRS.

SummaryBackground. The objective of this study was to evaluate the possibility of using acupuncture-moxibustion (zhenjiu) and electroacupuncture in the anxiety-depressive syndrome in pregnant women. Methods. A study of a clinical case of anxiety and depression measured 21 on the HDRS Depression Rating Scale Hamilton 17 allows to study the treatment protocol according to the differentiation of syndromes (bianzheng). After a review of the pathophysiology according to Traditional Chinese Medicine (TCM) and the experimental medicine, an overview of randomized controlled trials (RCTs) and meta-analysis is performed. Results. Acupuncture can be used as monotherapy in pregnant women. According to evidence from RCTs and meta-analyzes, one can consider its useful and effective contribution and it can be a reasonable alternative to selective inhibitors of serotonin reuptake (SSRIs) or psychotherapy. Conclusion. The use of acupuncture in depression in pregnant women can be offered with a grade B Scientific presumption, according to the recommendations of the French High Health Authority (HAS). Keywords: Acupuncture – pregnancy – depression – bianzheng – hypothalamic-pituitary-adrenal axis – serotonin – BDNF – glutamate – hippocampus – GABA – noradrenaline – stress – HDRS.

Introduction

En juin 2012, madame Nelly P, âgée de 44 ans sans antécédents particuliers, hormis une allergie aux pollens, aux poils de chat, consulte pour un syndrome anxio-dépressif.

Depuis juillet 2011, elle est en arrêt de travail suite à un harcèlement moral professionnel et a saisi le Conseil de Prud’hommes afin de régler son litige avec son employeur. Elle bénéficie d’un traitement antidépresseur par inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine (citalopram 20mg) et anxiolytique (bromazepam 3mg).  

Son médecin traitant l’adresse pour sevrage, car elle est enceinte.

En effet, elle est à 18 semaines d’aménorrhée (18SA).

Elle avait bénéficié sur plus d’une dizaine d’années de différentes techniques d’assistance médicale à la procréation (AMP), onze au total, et toutes sans succès.

De ce fait, cette grossesse inespérée est précieuse, surtout qu’elle avait été considérée comme stérile.

 Observation

Anamnèse du cas clinique

19 juin 2012 : 18SA : état anxio-dépressif modéré

Madame Nelly P se présente ce jour très angoissée. Soixante et onze kilogrammes pour 1m66, elle n’a pris que deux kilos par rapport au début de la grossesse. Et malgré celle-ci, elle a du mal à s’imaginer enceinte. A l’échelle d’évaluation de la dépression de Hamilton 17 (HDRS – Hamilton Depression Rating Scale) [[1]], son état dépressif est coté à 21 (toute cotation au dessus de 17 montre que les symptômes dépressifs sont modérés à sévères). L’inventaire de dépression de Beck (échelle BDI), indique également une dépression modérée puisque cotée à 15 (cotation de 8 à 15 correspond à une dépression modérée), et cela malgré le traitement [[2]].

Son sommeil est très agité, parsemé de rêves et de cauchemars, avec difficulté à l’endormissement. Elle est toujours angoissée, anxieuse. Problèmes digestifs à type de ballonnements, perte d’appétit. Elle est constamment fatiguée, fatigue qu’elle évalue à 6,5 (sur une échelle visuelle analogique allant de 0 à 10, 10 étant le maximum de fatigue).

La langue est pâle et avec empreintes de dents. Les pouls sont fins (xi) et faibles (ruo). Cela évoque un Vide combiné de Sang de Cœur et de Vide de qi de Rate selon la différenciation des syndromes (bianzheng) associé à un Vide de qi de Rein.

Les points appliqués durant vingt minutes sont 14VC (juque), 15V (xinshu), 7C (shenmen), point assentiment shu de Cœur, 36E (zusanli), 20DM (baihui), 4DM (mingmen) et 23V (shenshu) en moxibustion à l’armoise et 6MC (neiguan) en électroacupuncture (EA) à la fréquence de 2 Hz (durée d’impulsion rectangulaire asymétrique de 0,5ms d’un courant pulsé alternatif à moyenne nulle) par l’intermédiaire d’un stimulateur électrique Agistim duo Sédatelec® à une intensité supportable par le patient.

Le traitement appliqué à une semaine d’intervalle produit ses effets car même si la cotation à l’HDRS et au BDI baisse peu (respectivement 18 et 13) à la troisième séance, elle est sevrée de son traitement allopathique.

9 juillet 2012 : 20SA+6j : syndrome du canal carpien

Cependant, un syndrome du canal carpien bilatéral apparaît à la quatrième séance, Des paresthésies surtout au niveau de la main droite, estimées à 6 sur une échelle visuelle analogique de la douleur (EVA, 10 étant la douleur maximale) et 4 à gauche commencent à la réveiller la nuit.

Les pouls changent aussi car deviennent xian (tendus) en Barrière, tout en restant xi (fins) ailleurs. La langue est toujours pâle, la pointe et les bords rouges. Au Vide combiné du qi de Rate et de Reins et de Sang de Cœur, la Stase du qi du Foie est responsable de la Stase de Sang aux poignets, et en particulier au niveau du shoujueyin, Méridien du Maître du Cœur, lié au Foie.

Le traitement précédent est adapté. Sont ajoutés 7MC (daling), stimulé avec le 6MC en EA à la fréquence de 15Hz ; 11GI (quchi), point qui fait circuler le qi, chasse le Vent et l’Humidité, équilibrant xue et qi (Sang et Energie) ; 8MC (laogong) qui disperse localement l’Humidité et les Mucosités ; 4MC (ximen) en tonification, car point xi, point des affections aiguës [[3]] ; 14F (qimen), point mu du Foie et enfin 3F (taichong), point source qui draine la stase du qi du Foie. En deux séances, l’amélioration est obtenue (EVA à 2 bilatéralement).

23 août 2012 : 27SA+3j : reprise évolutive

Un mois de vacances et sans acupuncture réactive le syndrome du canal carpien (EVA=6,5 bilatéralement) avec paresthésies insomniantes depuis une dizaine de jours et sensation de gonflement et d’engourdissement. Elle présente aussi les jambes lourdes liées à une insuffisance veineuse. La digestion devient difficile et une constipation s’est installée. Par contre, l’état anxio-dépressif est amélioré puisque le HDRS est coté à 15 et le BDI à 10. La fatigue est moins prononcée, moins anxieuse même si la dépression est toujours présente. La langue est malgré tout pâle avec empreintes des dents plus marquées et toujours les bords rouges. Les pouls sont devenus davantage hua (glissant) et ru (mou) aux Barrières, xi (fins) au niveau des autres loges. Selon la différenciation des syndromes (bianzheng), il s’agit encore d’une combinaison de Vide de Sang associé à celui du Vide de qi de Rate et d’une stagnation du qi du Foie. Quatre séances de vingt minutes à une semaine d’intervalle sont pratiquées utilisant le même traitement que précédemment mais en supprimant les points 20DM en moxibustion et le point 4MC. A la place, sont rajoutés 12VC (zhongwan), point mu de l’Estomac qui harmonise Rate-Pancréas et Estomac et 6RP (sanyinjiao) point de réunion des trois yin du membre inférieur (tonifie le qi de la Rate, d’où nourrit le Sang). A nouveau, le syndrome du canal carpien s’améliore : elle n’est plus réveillée la nuit (EVA 3). La constipation persiste. L’état anxio-dépressif reste stable.

Du 2 octobre 2012 (33SA) jusqu’au terme : constipation, lombalgie

Six séances de 20 mn à une semaine d’intervalle vont se succéder jusqu’au terme à 40SA+6j où la constipation sera au premier plan, mais aussi les lombalgies en rapport avec un Vide de yin des Reins. Persistent encore l’insomnie et l’anxiété. La langue est à ce moment rouge globalement et plus seulement à la pointe et sur les bords ; le pouls est xi (fin), shuo (rapide), xian (tendu). On a toujours un Vide de Cœur et une Stase du qi de Foie.

3R (taixi), 6R (zhaohai) ont été ajoutés alors que les points 11GI, 8MC, 7MC ont été supprimés du fait de la diminution nette du syndrome du canal carpien (EVA=2). Neiguan et qimen sont stimulés en EA à la fréquence de 2HZ. La constipation s’est améliorée progressivement et le 8 novembre, Madame Nelly P. accoucha par césarienne d’une petite Coralie, 3 kg 500. Le syndrome anxio-dépressif ne s’est jamais amendé complètement puisque deux jours avant sa césarienne, le test d’Hamilton était toujours à 12, signe de dépression légère.

Discussion

Physiopathologie selon la Médecine Chinoise

Le traitement global a consisté à produire du Sang en tonifiant à la fois le qi de Rate et le Sang du Cœur, mais aussi en fin de grossesse le yin des Reins. Au préalable et du fait des onze AMP, on peut considérer qu’elle avait un Vide de jing acquis (le Vide de Sang) et inné (Vide des Reins).

L’influence du shen est primordiale dans la grossesse. L’émotion de l’événement, mais aussi la crainte, l’angoisse, l’anxiété et les divers troubles émotionnels engendrent ce Vide de yin et de Sang du Cœur. Les pathologies des organes et des entrailles en Vide ou Plénitude peuvent entraîner le Feu Mental en rapport avec l’âme viscérale du Cœur, le shen. Celui-ci sera perturbé en cas d’insuffisance du yin du Rein, de Foie ou de Rate entraînant un yang apparent par non-contrôle du yin de Cœur.

Mécanismes physiopathologiques expérimentaux

La recherche actuelle physiopathologique

En raison de l’hétérogénéité clinique et étiologique du trouble dépressif majeur, il est difficile d’élucider sa physiopathologie. De ce fait, il est préférable d’étudier les théories neurobiologiques actuelles en fonction de leurs fondements empiriques les plus valides et de leur plus haute pertinence clinique en étudiant forces et faiblesses des preuves. Les théories choisies sont basées sur des études portant sur le stress psychosocial mais aussi l’action des hormones de l’axe hypothalamo-hypophysaire-surrénalien, les neurotransmetteurs comme la sérotonine, la noradrénaline, la dopamine, le glutamate, l’acide gamma-aminobutyrique (GABA), les circuits neuronaux, des facteurs neurotrophiques, les rythmes circadiens, l’altération système endocannabinoïde endogène [[4],[5]]. La physiopathologie dépressive peut varier pendant le cours de la maladie, mais aussi selon les différents malades. Il s’avère donc que la connaissance existante actuelle ne plaide pas pour une hypothèse physiopathologique unifiée de cette maladie. En conséquence, les traitements antidépresseurs, y compris les approches psychologiques et biologiques, doivent être adaptés en fonction de l’individualité de chaque patient et de son état pathologique. Le tableau I ci-dessous résume les différentes hypothèses. 

Tableau I. Hypothèses neurobiologiques cliniquement pertinentes du trouble dépressif majeur (d’après [5]). 

HypothèsePrincipale forcePrincipale faiblesse
Vulnérabilité génétiqueDes preuves solides à partir des études réalisées sur des jumeaux montre une prévalence des facteurs génétiques de 30-40 % [[6]] Aucune interaction de gène spécifique ou d’un gène-environnement a été identifié avec certitude [[7]]
Activité de l’axe hypothalamo-hypophysaire-surrénalien altéré  (CRH, cortisol, cytokines etc.)Explication plausible que le stress traumatique de l’enfance et/ou le stress récent soit un facteur de risque de dépression [8-10]Aucun effet antidépresseur cohérent des médicaments ciblant préférentiellement  l’axe hypothalamo-hypophysaire-surrénalien, comme les cytokines ou les antagonistes des récepteurs CRH [[11]] 
Carence en monoamines (sérotonine, noradrénaline, dopamine..)Presque chaque molécule inhibant la recapture de la monoamine a des propriétés antidépressives [12-14]. C’est la théorie neurobiologique la plus cliniquement pertinente de la dépression.La carence des monoamines serait probablement un effet secondaire d’autres anomalies biologiques en amont de la synthèse de la monoamine, comme le laissent supposer l’action des agonistes dopaminergiques et celle des sympathomimétiques d’action centrale [[15],[16]] 
Dysfonction des régions spécifiques du cerveauLa stimulation profonde des régions spécifiques du cerveau, comme le cortex cingulaire subgénual peut produire des effets antidépresseurs [[17]]Les différentes méthodes de neuroimagerie (IRMf, PET, SPECT) dans la dépression majeure fournit un chevauchement limité des résultats entre les régions du cerveau les plus systématiquement identifiés qui comprennent les zones de le cortex cingulaire antérieur, dorsolatéral, médial et inférieur, le cortex préfrontal, l’insula, le gyrus temporal supérieur, les ganglions de la base et du cervelet [[18]] 
Processus neurotoxiques (glucocorticoïdes, glutamate) et altération de facteurs neurotrophiques (Brain derived neurotrophic factor – BDNF, Glial Derived Neurotrophic Factor – GDNF)Les états dépressifs itératifs, non traités ou les stress répétés engendrent une perte en volume du cerveau en particulier au niveau hippocampe et cortex préfrontal en rapport la baisse d’expression des facteurs neurotrophiques (Brain derived neurotrophic factor – BDNF) dans la neurogenèse hippocampique [19-21] Aucune preuve chez les humains pour les mécanismes neurobiologiques spécifiques, comme par exemple pour l’amygdale [[22]]
Réduction de l’activité GABAergique (acide gamma-aminobutyrique) dans les cortex préfrontal et occipitalConvergence des données provenant d’études de spectroscopie en résonance magnétique et en post mortem [[23]]Aucun effet antidépresseur cohérent des molécules ciblant le système GABA [[24,25]]
Dérèglement du système glutamateEffets potentiellement rapides et robustes de médicaments ciblant le système du glutamate en particulier  par les antagonistes du récepteur  glutamate N-methyl-D-aspartate (NMDA) [[26], [27]] Spécificité discutable, car le glutamate est impliqué dans presque toutes les activités du cerveau [[28]]
Rythmes circadiens altérésManipulation des rythmes circadiens (par exemple, la privation de sommeil) peut avoir une efficacité antidépressive [[29]] Aucune compréhension moléculaire du lien entre perturbations du rythme circadien et dépression [[30]]
Altération du système endocannabinoïde endogène (anandamide et 2-arachidonoylglycérol -2-AG)Rôle possible du système endocannabinoïde dans le traitement des émotions anormales, utile pour des troubles psychiatriques comme la dépression majeure [[31],[32]] Pas d’action dans une méta-analyse des cannabinoïdes dans la dépression  des affections bipolaires [[33]] mais davantage sur l’anxiété [[34]]

En résumé, la vulnérabilité génétique et le stress sont des facteurs clés de l’étiopathogénie de la dépression. La dysrégulation de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien réduit les volumes et l’activité de l’hippocampe et du cortex préfrontal chez les patients déprimés et perturbe l’homéostasie des circuits neuronaux, en particulier la neuroplasticité. Celle-ci désigne l’ensemble des mécanismes qui permettent au cerveau d’adapter sa structure et ses fonctions au stress de l’environnement et recouvre la synaptogenèse (mécanismes de potentiation et de dépression à long terme de la transmission synaptique), processus de résistance aux stress cellulaires, mécanismes de survie et de mort neuronale sous dépendance des facteurs neurotrophiques et enfin la neurogenèse (formation de nouveaux neurones). Il reste à confirmer si les changements structurels cérébraux liés à ces anomalies de la neuroplasticité sont totalement réversibles dans le temps et au contraire, ne s’installent pas définitivement au cours du vieillissement [4,35-38]. La figure 1 résume l’ensemble de l’étiopathogénie.

 Figure 1. Etiopathogénie de la dépression. Le stress, la vulnérabilité génétique vont déclencher des processus moléculaires engendrant la dépression. Libération de glucocorticoïdes et de corticotrophine CRH (corticotropin-releasing hormone) et cytokines pro-inflammatoires (TNFα, IL-1, IL-6) interviennent dans la physiologie du stress [38]. Dans la dépression, la perturbation de la sérotonine (5-HT), la noradrénaline (NA) et la dopamine (DA) entrave la transmission les boucles de régulation en rétroaction (feedback) qui éteignent normalement la réponse au stress. L’hyperactivité sympathique contribue à l’activation immunitaire et la libération de cytokines inflammatoires. Les cytokines inflammatoires interfèrent davantage avec le système monoaminergique et la signalisation neurotrophique (BDNF et GDNF). Ils peuvent aussi diminuer la sensibilité du récepteur central au corticostéroïde, conduisant à la rupture de commande de la rétroaction.

L’acupuncture expérimentale

Les travaux de recherche expérimentale concernant les mécanismes d’action de l’acupuncture-moxibustion (zhenjiu 针灸) et de l’électroacupuncture (EA) sur la dépression ont essentiellement été menés sur des modèles d’animaux en état de stress [38,[39]]. Ainsi, les expériences sur animaux ont objectivé que l’acupuncture et l’EA agissent à tous les niveaux précédemment décrits.

Axe hypothalamo-hypophysaire-surrénalien et cytokines

Chez des modèles d’animaux mis en situation de stress (immobilisation, exposition à la chaleur, au froid, nage forcée etc.), il a été démontré de nombreuses fois que l’EA ou l’acupuncture inhibe l’hypersécrétion des hormones glucocorticoïdes (cortisol et corticostérone) [40-44], augmente l’IL-2 qui est généralement diminuée en cas de stress [39,45-47] et diminue l’IL-1 [[48]].

Système limbique et brain-derived neurotrophic factor (BDNF)

Chez des rats soumis à un stress, l’EA du point ES36 (zusanli) restaure de manière statistiquement significative l’expression de l’ARNm du BDNF (brain-derived neurotrophic factor) au niveau de l’hippocampe [[49]], tout comme l’acupuncture sur 20VG, yintang et neiguan (6MC) entraîne un effet identique par régulation positive (up-regulation) dans le cortex préfrontal et l’hippocampe sur des modèles de rats dépressifs par stress [[50]]. De même, l’acupuncture augmente les neurones à NPY (neuropeptide Y) dans l’aire CA1 et le gyrus dentelé de l’hippocampe [[51]] et appliquée au point shenmen (7C) augmente le BDNF au niveau du cortex préfrontal [[52]]. Elle possède aussi une action sur l’amygdale en augmentant le nombre de cellules à NPY, permettant de réduire l’anxiété comportementale chez des rats devenus adultes [[53]] ou sur l’hypothalamus par action sur l’axe hypothalamo-hypophysaire-surrénalien [[54]]. Une autre étude expérimentale a démontré un effet potentiel antidépresseur de l’EA (60/4Hz 30 mn) sur les points 20VB et anmian dans un modèle de dépression chez le rat induit par stress chronique qui pourrait être médié par la régulation positive des cellules du gyrus dentelé [[55]]. L’EA montre donc essentiellement son activité antidépressive ou anxiolytique par son action au niveau de l’hippocampe [44,56-62].

Molécules informationnelles (monoamine, noradrénaline, GABA, système glutamate  etc.)

Sur un modèle de rats en dépression, l’acupuncture augmente dans l’hypothalamus et l’hippocampe la noradrénaline (NA), la 5-hydoxytryptamine (5-HT – sérotonine) et la dopamine [[63]]. De même, dans la région C4 de l’hippocampe, l’EA (2 Hz) sur sanyinjiao (6RA) et baihui (20VG) augmente de manière statistiquement significative (p<0,05) le 5-HT et l’acétyl-cholinestérase [[64]], comme l’acupuncture régule en augmentant la 5-HT au niveau du cortex préfrontal [52]. L’EA mais aussi la moxibustion et l’acupuncture agiront aussi en stimulant les systèmes dopaminergiques et sérotoninergiques chez des modèles de rats stressés [[65]], réduit l’adrénaline et la noradrénaline sur des modèles de rat en stress d’immobilisation [[66]], augmente la dopamine au niveau du cortex préfrontal et de l’hippocampe et diminue la corticostérone [[67]].

L’EA ou l’acupuncture vont permettre aussi d’activer les récepteurs GABAergiques A et B en régulant négativement les neurones glutaminergiques de l’hippocampe [68-70].

Rythmes circadiens

L’EA à une fréquence de 2Hz appliquée sur baihui (20VG) et yintang permet d’améliorer le rythme circadien de la température et celui de la concentration en mélatonine et d’améliorer de ce fait une dépression induite par le stress chez le rat [[71]].

Les études cliniques

En 2007, un essai clinique quasi randomisé à deux bras ayant inclus des femmes enceintes entre 15 et 30 SA (semaines d’aménorrhée) dans un groupe acupuncture (n=28) et un groupe témoin sans acupuncture (n=23) a étudié les troubles de l’humeur : état dépressif, anxiété, irritabilité. Le critère d’évaluation : échelle EVA (0 à 10). Les points utilisés : 7C (shenmen), 6MC (neiguan), 9P (taiyuan), 36E, 3F (taichong), yintang, 20VG, 17VC (shanzhong) avec recherche du deqi.  Douze sessions de 25mn une fois par semaine avec possibilité dans les deux groupes d’utiliser de la phytothérapie : passiflora  edulis et hypericum perforatum. Aucun effet indésirable n’a été retrouvé. On observe une amélioration de la détresse émotionnelle diminuée de 60% à l’EVA chez 15/25 des patientes dans le groupe d’étude versus le groupe témoin (26%) ; 5/19 (p = 0,013) [[72]]. Malheureusement , les limites et biais sont nombreux : critères de jugement non valables (pas d’utilisation des échelles reconnues comme le HDRS ou le BDI ; pas de groupe placebo ni de mise en insu du fait qu’il s’agit d’un essai pragmatique ; faible puissance du fait d’une population étudiée peu nombreuse et d’un score Jadad évalué à 0.

La méta-analyse Cochrane de Dennis et Dowswell conclut d’ailleurs en 2013 que les preuves ne sont pas suffisamment concluantes pour permettre de recommander l’acupuncture dans le traitement de la dépression prénatale. Pourtant, par rapport au début du traitement, elle montre néanmoins que l’acupunture spécifique a une réduction de 50% du score HDRS versus acupuncture non spécifique (RR= 1,68 ; IC 95% 1,06 à 2,66) [[73]].

Cette méta-analyse a pris en compte deux essais comparatifs (ou contrôlés) randomisés (ECR), ceux de Manber en 2004 et 2010. Une autre revue systématique aussi de 2013 et analysant les deux mêmes ECR conclut par contre qu’il existe des preuves de haut niveau pour soutenir l’utilisation de l’acupuncture dans les états dépressifs majeurs durant la grossesse [[74]].

L’ECR de Manber en 2004 (n=61) a inclus des femmes entre 11 et 28SA avec un HDRS17 >=14. Huit semaines de traitement en douze sessions. Trois groupes : acupuncture (n=20), acu non spécifique (n=21) et massages (n=20). Les points ont été choisis individuellement selon les principes de la médecine chinoise. Des points ont été interdits : 4F, 1 et 6RP, 21VB, 60 et 67V, 3 et 4RM, 5 et 6RM, 36ES et 45ES, 23V et 32V, 4R et 44VB, 12RM en fin de grossesse.

Les critères de jugement sont l’HDRS17 et le BDI (échelle Beck). On observe 69% d’efficacité de l’acupuncture spécifique avec amélioration significative de l’HDRS et BDI (p<0,0001). Ce pourcentage est équivalent à celui du traitement allopathique (50-70%). Les massages et l’acupuncture placebo offrent un taux respectif d’amélioration de 32% et 47%. Pas de différence significative néanmoins entre les deux groupes acupuncture (p=0,115) [[75]]. Cette étude est de qualité méthodologique moyenne car le score de Jadad peut être estimé à 3. Il y a bien randomisation, mais non décrite ; l’insu-patient non prouvé par un questionnaire ; il y a un insu-évaluateur et une analyse en intention de traiter. Mais on peut objectiver des limites comme la faible puissance avec une population (n=61) trop homogène.

L’objectif du second ECR (n=152) en double aveugle de Manber en 2010 a été d’estimer l’efficacité de l’acupuncture dans la dépression pendant la grossesse. Cent-cinquante femmes enceintes (12 à 30SA) qui avaient des critères de trouble dépressif majeur (HDRS>14) selon le DSM IV-TR ont été randomisées en trois groupes. Le premier groupe (n=52) a bénéficié d’acupuncture spécifique individualisée de la dépression. Le deuxième groupe : acupuncture contrôle non spécifique (n=49) ; troisième groupe (n=49) : massages. Le traitement a duré huit semaines (douze séances de vingt-cinq minutes, à raison de deux séances par semaine les quatre premières semaines, puis une par semaine les quatre dernières semaines). Le critère principal : HDRS, calculé par des évaluateurs en aveugle, au départ, puis à quatre et huit semaines de traitement. On observe une diminution statistiquement significative (p<0,05) de la gravité des symptômes chez les femmes qui ont bénéficié de l’acupuncture spécifique versus les deux autres groupes combinés ou le groupe acupuncture non spécifique seul (figure 2). En conclusion, ce protocole d’acupuncture spécifique a montré son efficacité avec un pourcentage de réponse comparable à celui observé dans les traitements de la dépression standard de durée similaire. Les auteurs déclaraient que l’acupuncture pourrait être une option thérapeutique valide dans la dépression durant la grossesse. Cet ECR est d’excellente qualité méthodologique (Jadad = 5) [[76]].

Figure 2. Changement du score (HDRS) de la sévérité de la dépression dans les trois groupes, d’après 76].

Conclusion

A la lumière de ce cas clinique, des études expérimentales et de ces ECR, on peut donc considérer que l’acupuncture est une alternative séduisante aux traitements classiques. Sans effets secondaires, sans effets iatrogènes autant sur la maman que sur l’enfant alors que l’on connaît les effets indésirables associés au traitement pharmacologique des états dépressifs sur les fœtus à échéance [[77]]. Il ne serait pas déraisonnable d’utiliser l’acupuncture en tant que monothérapie dans les dépressions des femmes enceintes. Cela pourrait être une alternative raisonnable aux inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) ou de la psychothérapie. Néanmoins, il est nécessaire de réaliser de nouveaux ECR de grande puissance et grande qualité méthodologique et même de réaliser des ECR entre acupuncture et ISRS si l’éthique le permet, ceci afin de déterminer si l’acupuncture peut être considérée comme un traitement de première ligne chez les femmes enceintes. En conclusion et compte tenu de tous ces éléments, l’utilisation de l’acupuncture dans les états dépressifs chez la femme enceinte peut être proposée avec un grade B de présomption scientifique de niveau 2 de preuves selon les recommandations de la Haute Autorité de Santé française (HAS) [[78]].

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