Thème des XIIIes journées de la FA.FOR.MEC qui se tiendront à Lille les vendredi 27 et samedi 28 novembre 2009, le mouvement se veut aussi source de changement, de mutation. Notre profession change et évolue mais n’attire plus les jeunes médecins qui, au terme d’études de médecine longues et d’une capacité d’acupuncture, n’ont pas la garantie d’avoir des honoraires et un niveau de vie corrects. Certes, la capacité a été une victoire importante en terme de formation et aboutira à plus ou moins long terme à la spécialisation. En effet, les médecins ne peuvent intégrer la capacité qu’après un probatoire dont le programme peut correspondre à une année complète d’enseignement.
La reconnaissance par les pouvoirs publics devrait donc aboutir à un relèvement substantiel des honoraires. Ne doutons pas que le Syndicat des Médecins Acupuncteurs de France (SNMAF), la société savante (Collège Français d’Acupuncture et de MTC, CFA-MTC) ou la FA.FOR.MEC (Fédération des Acupuncteurs pour leur Formation Médicale Continue) n’arrivent à infléchir la politique du Ministère de la Santé.
L’exercice illégal de la médecine est un autre problème qui touche de plein fouet les acupuncteurs non médecins.
Il nous faut entamer une réflexion qui doit satisfaire tous les acteurs en présence. La délégation de compétences peut être une solution. Déjà, les sages-femmes selon le décret n° 2008-863 du 27 août 2008 complétant leur code de déontologie, peuvent effectuer des actes dans leur domaine, c’est-à-dire dans le cadre strict de leur fonction médicale (suivi de grossesse et d’accouchement). La sage-femme doit connaître ses limites et ne pas soigner par exemple une infection pulmonaire par acupuncture. Ces pathologies sortent du domaine de la sage-femme et relèvent de celui du médecin. De même, le chirurgien-dentiste ou le vétérinaire peuvent exercer l’acupuncture dans leur domaine professionnel.
Le kinésithérapeute pourrait aussi bénéficier d’une délégation de compétence dans son domaine, les massages chinois, le tuina et toutes les activités corporelles chinoises, mais sur prescription médicale, comme pour les autres soins de kinésithérapie. Au Japon par exemple, les kinésithérapeutes bénéficient ainsi de cours réservés [ [1] ].
Que penser des acupuncteurs non-médecins ? La Médecine Traditionnelle Chinoise et l’acupuncture attirent de nombreuses personnes qui s’imaginent qu’après avoir passé par exemple un CAP d’esthétique, puis un baccalauréat commercial, elles peuvent sans crainte démarrer des études d’acupuncture. Conscient des problèmes, un acupuncteur non-médecin écrivait cependant dans un forum : « certains enseignements sont une véritable escroquerie intellectuelle, une véritable insulte à la tradition médicale chinoise ». En 2003, je comparais le diplôme inter-universitaire délivré par les universités françaises et le diplôme d’acupuncture traditionnelle chinoise et montrais qu’il était difficile de mettre sur un pied d’égalité un enseignement délivré par les écoles d’acupuncture (environ 1200 à 4000 heures, en fonction des établissements, réparties sur 2 ou 3 ans) et 10 années de médecine à temps plein associées à un DIU d’acupuncture et à fortiori maintenant avec une capacité d’acupuncture [ [2] ].
Il paraît évident que pour entrer dans la légalité, l’acupuncture pratiquée par les non-médecins doit satisfaire à des engagements rigoureux et impératifs.
D’abord s’attaquer au problème de santé publique comme on l’a observé récemment à Nîmes : un spécialiste en « Énergétique chinoise » a été mis en examen le 30 septembre 2008 pour « pratique illégale de la médecine, de la profession de masseur-kinésithérapeute et de pharmacien » et placé sous contrôle judiciaire. C’est la Direction Départementale et Régionale des Affaires Sanitaires et Sociales (DDRASS) qui a alerté les autorités à la suite d’une inspection. Et ce cas n’est pas isolé.
Dans un deuxième temps, contrôler la formation car celle-ci est à la base de tout. Il s’agira donc de vérifier par un contrôle de connaissances tous les diplômes obtenus par les non-médecins, vérifier l’exercice des praticiens selon les règles de santé publique (hygiène, sécurité, connaître ses propres limites), bref, une évaluation des pratiques professionnelles (EPP) leur permettant de continuer à exercer légalement.
Dans un troisième temps, organiser un enseignement de haut niveau (aussi bien par des médecins acupuncteurs que par des acupuncteurs non-médecins « reconnus »). Les multiples écoles délivrant un enseignement d’acupuncture devront être fermées au profit d’un enseignement strictement universitaire.
C’est à ce seul prix que les praticiens d’acupuncture et de médecine Traditionnelle Chinoise pourront exercer dans les règles de l’Art et dans celui de la Santé publique et, bien sûr, sous contrôle médical.
Mouvement, oui, un mouvement est enclenché, et nous espérons que le congrès FA.FOR.MEC à Lille sera le congrès de la mutation dans une société qui évolue rapidement dans le respect de la différence et la tolérance.
Références
[1] . Sautreuil P. La Kansai University of Health Sciences (Osaka, Japon) : interview des Drs Setsuko Kame et Daisuke Takeda. Acupuncture & Moxibustion. 2007;6(3):264-268.
[2] . Stéphan JM. Législation de l’acupuncture en France. Acupuncture & Moxibustion. 2003;2(4):233-6.
Stéphan JM. Mouvement 運 動. Acupuncture & Moxibustion. 2008;7(4):277-278. (Ancienne Version)