Brèves d’acupuncture

 Figure 2.  Méta-analyse étudiant la gravité de la dépression par le score HAMD (échelle de dépression de Hamilton) de l’acupuncture par rapport au groupe témoin. Trois études ont comparé l’acupuncture aux médicaments, et cinq études ont comparé les médicaments associés à l’acupuncture versus médicaments seuls. Les résultats montrent que les groupes expérimentaux d’acupuncture pourraient soulager davantage la dépression par rapport aux groupes témoins (différence moyenne à modèle aléatoire DM random=-1,97 ; IC à 95%=-3,14, -0,80 ; P<0,00001). L’analyse des sous-groupes objective également que le groupe thérapeutique médicamenteuse usuelle associé à l’acupuncture est de manière statistiquement significative plus efficace que le groupe médicaments sans acupuncture (DM=-2,95, IC à 95 % =-3,55, -2,36 ; P<0,00001 ; I²=0%), alors que l’efficacité est équivalente quand elle est utilisée seule (DM=-0,14, IC à 95% : -0,88, 0,59 ; P = 0,71 ; I²=0%). Observons également la grande hétérogénéité de l’ensemble I²=82% qui a nécessité l’utilisation de la différence moyenne à modèle aléatoire (DM random) [[1]].

 La douleur chronique est définie comme une douleur qui se poursuit au-delà de 3 mois. À l’échelle internationale, pas moins de 20 % des adultes (18 à 65 ans) et plus de 33 % des personnes âgées (>65 ans) souffrent de ces algies chroniques. En outre, les dernières estimations affirment que la douleur chronique touche environ 1,5 milliard de personnes dans le monde, et ces chiffres augmentent régulièrement. Aux États-Unis, on pense que celle-ci affecte plus de 116 millions d’adultes, ce qui est plus élevé que la prévalence combinée des maladies cardiaques, du diabète et du cancer [[2]]. Dans les pays européens, il a été démontré que la douleur causée par les lombalgies chroniques et les maladies musculosquelettiques coûtait jusqu’à 2 % du produit intérieur brut (PIB) [[3]]. Cette forte prévalence engendre un lourd fardeau économique à la société et peut entraîner non seulement une réduction de la qualité de vie des patients, mais également un impact négatif très important sur leur état psychologique pouvant aller jusqu’à un état anxiodépressif majeur, facteur de comorbidité [[4]].

L’objectif de cette revue systématique et de cette méta-analyse était donc d’évaluer les preuves existantes sur l’efficacité et l’innocuité de l’acupuncture dans le soulagement de la dépression liée à la douleur chronique.

Les auteurs You et coll. ont effectué des recherches dans sept bases de données en ligne pour identifier les essais comparatifs randomisés (ECR) publiés avant septembre 2020. Ils ont inclus des études qui utilisaient l’acupuncture comme groupe d’intervention, avec ou sans groupe témoin, et acupuncture combinée à la thérapeutique usuelle médicamenteuse versus groupe témoin traité par médicaments conventionnels seuls. Les évaluations ont été effectuées à l’aide de l’échelle de dépression de Hamilton (HAMD), de l’échelle visuelle analogique (EVA) pour la douleur ; les effets indésirables ont été notés.

Huit études portant sur 636 participants ont été identifiées et incluses dans la méta-analyse.

Les résultats ont montré que le traitement d’acupuncture seul était aussi efficace que le traitement médicamenteux en améliorant le score HAMD (MD=-0,14 ; IC à 95%=-0,88 à 0,59 ; P=0,71 ; I²=0%) et en soulageant le score de l’EVA sur la douleur (MD=-0,42 ; IC à 95% = -1,10 à -0,27 ; P=0,23 ; I²=46%), mais le traitement d’acupuncture a nettement moins d’effets indésirables et est plus sûr (OR=0,03 ; IC à 95%=0,01 à 0,21 ; P=0,0003 ; I²=7%).

Les auteurs noteront toutefois que l’acupuncture combinée aux médicaments est plus efficace que le traitement médicamenteux seul autant pour améliorer le score HAMD (MD=-2,95 ; IC à 95%= -3,55 à -2,36 ; P<0,00001) que pour atténuer le score EVA sur la douleur (MD=-1,06 ; IC à 95%=-1,65 à -0,47 : P=0,0004).

En conclusion, l’acupuncture est un traitement efficace et sûr dans l’état dépressif lié à la douleur chronique. Mais associée à un traitement médicamenteux, elle est plus efficace encore que la thérapeutique médicale usuelle seule. Néanmoins, les conclusions étaient limitées en raison de la faible puissance de la méta-analyse par insuffisance du nombre d’ECR inclus et de leur qualité méthodologique médiocre.  

Dr Jean-Marc Stéphan

Coordinateur du DIU d’acupuncture obstétricale - Université Lille - Faculté de Médecine
Directeur de la revue « Acupuncture & Moxibustion » Chargé d'enseignement à la Faculté de Médecine de Rouen (DIU acupuncture obstétricale et initiation à l’acupuncture médicale)
Médecin acupuncteur attaché au CHG de Denain 59220
Président du SNMAF (Syndicat National des Médecins Acupuncteurs de France)
Secrétaire-Général de l'Ecole Française d'Acupuncture et de l'Association Scientifique des Médecins Acupuncteurs de France (ASMAF-EFA)
Membre titulaire du C.F.A-MTC (Collège Français d’Acupuncture et de MTC) : société savante d'acupuncture
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ORCID : 0000-0002-3377-2280

 Références

[1]. You J, Li H, Xie D, Chen R, Chen M. Acupuncture for Chronic Pain-Related Depression: A Systematic Review and Meta-Analysis. Pain Res Manag. 2021 Feb 22;2021:6617075.

[2]. Steglitz J, Buscemi J, Ferguson MJ. The future of pain research, education, and treatment: a summary of the IOM report "Relieving pain in America: a blueprint for transforming prevention, care, education, and research". Transl Behav Med. 2012 Mar;2(1):6-8.

[3].  Azevedo LF, Costa-Pereira A, Mendonça L, Dias CC, Castro-Lopes JM. The economic impact of chronic pain: a nationwide population-based cost-of-illness study in Portugal. Eur J Health Econ. 2016 Jan;17(1):87-98.

[4]. Gureje O. Treating chronic pain in the context of comorbid depression. Pain. 2008 Jan;134(1-2):3-4.