Van Gogh : revue de littérature de ses diverses pathologies et essai d’analyse du déséquilibre énergétique à travers ses peintures

 Résumé : Après une revue de la littérature sur les divers diagnostics selon la médecine allopathique attribués à Van Gogh, une analyse de ses peintures est réalisée selon une grille de lecture basée sur la correspondance entre les couleurs, les Cinq Eléments, les Cinq Emotions et les Sept Sentiments. Une corrélation a pu être établie entre les diverses pathologies dont souffrait le célèbre artiste selon le diagnostic occidental et les déséquilibres énergétiques révélés par les couleurs de ses œuvres, vus sous l’angle de la différenciation des syndromes bianzheng). La prédominance de jaune, de vert et de bleu dans l’ensemble de ses peintures pourrait être attribuée à ses troubles traduits en termes de déséquilibres énergétiques selon la médecine chinoise. Mots-clés : Cinq Eléments - couleurs - déséquilibre énergétique - bianzheng - Van Gogh

Summary: After a review of the literature on various diagnoses according to allopathic medicine, an analysis of Van Gogh’s paintings is performed, on the basis of correspondence between colors and the Five Elements, the Five Emotions et the Seven Feelings. A correlation hasbeenestablished between the diverse diseases of the famous artist, according to Western diagnosis, and energy imbalances revealed by the color of his paintings, from the perspective of pathophysiological syndromes (bianzheng). The predominance of yellow, green and blue in his artwork may be attributed to his disorders, in terms of energy imbalances according to Chinese medicine. Keywords: Five Elements - colors - energy imbalance biangzheng - Van Gogh

   

Introduction

 Hésitant un temps entre vocation artistique et vocation religieuse, Vincent Van Gogh choisit de se consacrer à la peinture. Tout le monde s'accorde à voir en Van Gogh le mythe absolu du génie, du fou, du miséreux, artiste méconnu et condamné au malheur. Sa carrière n'a duré qu'à peine dix ans, et il se serait suicidé [1] en laissant derrière lui une œuvre considérable. Malgré de graves troubles neuropsychologiques, Van Gogh ne s’est quasiment jamais arrêté de peindre. En dix ans, il a réalisé près de neuf-cents tableaux et un millier de dessins.

Son style très coloré présente une vitalité et une tension particulière qui n’ont pas fini de marquer les esprits. Il applique les couleurs par touches de pinceaux, sans mélanger sur la palette. Sous le soleil de Provence, son style de peinture se modifie. Ses toiles sont plus colorées. Il peint par larges touches courbes et utilise abondamment les couleurs jaune, vert et bleu.

La relation entre les trois disciplines, science, médecine et art, a longtemps été un domaine d’exploration fascinant avec leurs contrastes étonnants et leurs frontières mal délimitées. La confrontation des problèmes médicaux chez les artistes (beaux-arts, musique, etc.) a toujours fait couler beaucoup d’encre. On peut pratiquement dire qu’aucune personnalité n’a été autant diagnostiquée à titre posthume que Vincent van Gogh.

Cet article ne vise ni à ajouter une nouvelle maladie à la longue liste déjà établie à ce jour, ni à argumenter sur le «bon diagnostic». Il se propose, à partir des couleurs utilisées par Van Gogh, de faire une « lecture énergétique » basée sur la correspondance entre les couleurs et les Cinq Eléments, les Cinq Emotions et les Sept Sentiments. Un déséquilibre énergétique, dans le cadre de la différenciation des syndromes (bianzheng) selon la médecine traditionnelle chinoise, peut-il influencer sur le choix des couleurs dans toute création artistique ? 

 

Multiplicité de pathologies et de diagnostics en médecine allopathique

 

Vincent Van Gogh (1853-1890) donnait dans son art une essence profonde de la vie, et de façon unique. Plus de cent-cinquante psychiatres et médecins de différentes spécialités ont tenté d'identifier «la maladie» de l’artiste et de multiples diagnostics ont été proposés.

Cependant, comment les troubles neurologiques dont il souffrait ont-ils pu influencer son art ? Ceci n’est pas encore clair. La combinaison de sa personnalité excentrique, irascible, ses humeurs instables et sa créativité prolifique rendent la compréhension de sa pathologie très complexe. Cela pose un grand défi à ceux qui essaient d’analyser les relations existant entre «l'esprit artistique», le cerveau et la maladie. En fait, la plupart des diagnostics proposés pour Van Gogh au cours du siècle dernier ne sont pas basés sur des preuves médicales, mais sont seulement en partie vérifiables à partir d’analyses de ses tableaux et des données biographiques.

D’après une récente publication [2] datant de 2013, une analyse de la maladie de Van Gogh a été réalisée à la lumière de sa correspondance, dont la qualité littéraire est largement reconnue. L’auteur s’est basé sur les antécédents médicaux de l’artiste à travers les nombreuses citations dans ses lettres, pour voir comment Vincent a exprimé ses plaintes, ses émotions liées à sa maladie. Les symptômes sont devenus plus précis après décembre 1888. Au début, Van Gogh avait beaucoup hésité à parler de sa maladie, mais peu à peu, il décrivait dans ses lettres ses expériences tout au long de ses psychoses cycloïdes. Selon l’auteur, il existe des signes de synesthésie, de prosopagnosie et d’agnosie spatiale. L'affinité de Van Gogh pour la poésie, déjà au début de sa vingtaine, rend plausible l'hypothèse d'une excitation du lobe temporal par des décharges épileptiques, ce qui pourrait expliquer en partie le fonctionnement complexe de son esprit créatif et torturé par la souffrance. L’auteur a tenté de placer les diagnostics effectivement réalisés au cours de la vie de l’artiste dans leur contexte historique et culturel. Il est évident que ceux qui établissent un diagnostic et ceux qui le reçoivent sont impliqués dans le même contexte culturel, en tenant pour acquis les modes médicales de leur temps, y compris les biais incorporés. Par ailleurs, à partir des archives de la faculté de médecine de Montpellier et de la correspondance de Van Gogh, le Pr François-Bernard Michel [3] a reconstitué les relations de l’artiste avec ses trois psychiatres (les Drs Jean-Félix Rey, Théophile Peyron et Paul Gachet), de 1888 à son suicide en 1890. Il a montré comment tous les trois ont raté la prise en charge du génie, ne laissant à Van Gogh aucun espoir de guérison.

Il existe une certaine tendance de la part des médecins et des groupes de patients à mouler « la maladie » de Van Gogh dans un schéma propre à leur spécialité ou à leur maladie [4].

Parmi les diagnostics énoncés dans plus d’une douzaine d’articles retrouvés dans Pubmed (dont la 1ère date de 1981 et les derniers en 2013), on peut citer : glaucome, xanthopsie induite par la digitaline, dyschromatopsie acquise, maladie de Ménière, épilepsie du lobe temporal, trouble bipolaire, saturnisme, intoxication à la thuyone, saturnisme, psychose cycloïde (voir tableau I). Chacune de ces maladies pourrait être responsable des troubles neuropsychologiques qui auraient été aggravés par la malnutrition, le surmenage, l'insomnie et un penchant pour l'alcool, en particulier pour l’absinthe.

 Tableau I. Symptômes/pathologies dont souffrait Van Gogh (PubMed).

 

Symptômes

Références

Institution/Pays

Halos colorés attribués au glaucome

[5] Lanthony P, Bull Soc Ophtalmol Fr.

Service de Physiologie – CNO des XV-XX Paris France

Xanthopsie et cataracte

[6] Arnold WN, Loftus LS. Eye (Lond).

Department of Biochemistry and Molecular Biology, University of Kansas Medical Center, Kansas City 66103.USA

Xanthopsie due à intoxication digitalique

[7] Lee TC. Jama.

[8] Elliott DB, Skaff A. Ophthalmic Physiol Opt.

 

 

[9] Lanthony P. J. Fr Ophtalmol.

 

USA

Centre for Sight Enhancement, School of Optometry, University of Waterloo, Ontario, Canada

 

Service de Physiologie – CNO des XV-XX Paris France

Dyschromatopsie acquise

[10] Hart WM Jr. Surv Ophthalmol.

Department of Ophthalmology, Washington University School of Medicine, St. Louis, Missouri, USA

Maladie de Ménière (épilepsie controversée) : vertiges et étourdissements épisodiques, déséquilibre physique, symptômes auditifs, acouphènes ainsi que réaction présumée psychologique, secondaire à sa symptomatologie physique

 

[11] Arenberg IK et al. Jama.

[12] Arenberg IK et al, Acta Otolaryngol Suppl.

International Meniere's Disease Research Institute, Colorado Neurologic Institute, Englewood 80110. USA

Epilepsie

Remarque : Epilepsie : Diagnostic rédigé par le Dr Peyron, médecin à l'asile de Saint Rémy (France), dans lequel le 9 mai 1889, Van Gogh s'est volontairement engagé à l'asile pour épileptiques et déments

 

[13] Meissner WW. Bull Menninger Clin.

 

 

[14] ter Borg M, Trenité DK. Epilepsy Behav.

Boston Psychoanalytic Institute, Boston College, MA. USA

 

Epilepsy Institute of the Netherlands Sein, Pays-Bas

Trouble bipolaire,

symptômes maniaco-dépressifs ou cyclothymiques

[15] Janka Z. Orv Hetil.

Pszichiátriai Klinika. Hongrie

Psychopathologie due à une intoxication chronique au plomb (saturnisme) : débilitation débutante, stomatite avec perte de dents, douleurs abdominales récurrentes, anémie (avec un « teint de plomb"), neuropathie radiale, encéphalopathie saturnine avec crises d'épilepsie, altérations progressives du caractère et périodes de délire, de trouble mental

[16] González Luque FJ, Montejo González ALActas Luso Esp Neurol Psiquiatr Cienc Afines.

 

Espagne

Saturnisme

[17] Weissman E. J Med Biogr.

 

Department of Internal Medicine, University of Virginia, USA

 

Frontière entre psychose et épilepsie

[18] Lemke S, Lemke C. Nervenarzt.

 

Klinik für Psychiatrie und Neurologie Hans Berger, Friedrich-Schiller-Universität Jena. Allemagne

Epilepsie du lobe temporal avec des oscillations maniaques, humeur dépressive aggravée par l'absinthe, le brandy, la nicotine et de la térébenthine.

 

[19] Morrant JC. Can J Psychiatry.

Shaughnessy Hospital, Vancouver

Canada

Dépendance à l’absinthe (thuyone) : hallucinations, convulsions, sensations de désinhibition

[20] Arnold WN. Jama.

Department of Biochemistry, University of Kansas Medical Center, Kansas City 66103. USA

Psychose cycloïde

[2]Voskuil PH. Front Neurol Neurosci.

 

Hans Berger Clinic for Epilepsy, Oosterhout, Pays-Bas

  Le trouble bipolaire selon les critères DSM-IV

 D’après l’analyse de deux neurologues [21] en 2005, Bogousslavsky J (Neurologie, INSERM Unit 549) et Boller F (Neurologie et Psychiatrie, CHUV Centre Paul Broca, Lausanne, Suisse), il est fortement probable que Van Gogh souffrait de trouble bipolaire ayant causé sa mort par suicide selon les critères DSM-IV. Bien qu'aucun diagnostic définitif n’ait pu être déterminé, les deux auteurs se sont basés sur des preuves extrapolées à partir des échanges de courrier du célèbre artiste. En 2005, les deux neurologues ont rapporté les faits suivants.

Entre février 1886 et octobre 1888, lorsque Van Gogh vivait à Paris, ses lettres ont révélé tous les symptômes de la maladie bipolaire même s’il est difficile à reconstruire la durée exacte de la dépression et des phases maniaques.

Avant 1886, Van Gogh a présenté des épisodes dépressifs majeurs et mineurs alternant avec des phases hypomaniaques ou maniaques, souvent avec des cycles rapides. Les deux épisodes de dépression ont été suivis par des périodes prolongées d'énergie et d'enthousiasme, d'abord comme un évangéliste, puis en tant qu'artiste.

Un épisode dépressif de longue durée a eu lieu à Londres, après une déception amoureuse, quand il a été expulsé de l'église, et au moment de sa séparation d'avec Sien, une prostituée et son fils. Un épisode d’hypomanie durable ou des phases maniaques ont coïncidé avec ses débuts comme évangéliste, ainsi qu’à ses débuts d’artiste.

Au cours des années passées à Paris (1886-1888), il a abusé de l'alcool, consommé beaucoup d'absinthe. L'anxiété, l'irritabilité, l'hostilité, l'excentricité et divers symptômes somatiques se sont manifestés. A Arles (1888), il a connu l'angoisse, la mélancolie, le remords, l'insomnie et l'épuisement physique, à l’origine de son comportement insalubre. La veille de Noël en 1888, au cours de ce qui a été le premier épisode de sa crise psychotique (dont il est resté amnésique), il a coupé une partie de son oreille gauche. En mai 1889, après deux brèves crises psychotiques, il s’est volontairement inscrit à l'asile de Saint-Rémy. A Saint-Rémy, au cours de l'année suivante, il a vécu des épisodes dépressifs sévères et trois crises psychotiques, dont au moins deux étaient concomitantes avec ses visites temporaires à Arles. La dernière de ces crises, caractérisée par des délires religieux et paranoïaques, ainsi que des hallucinations auditives, a persisté pendant trois mois (février-avril 1890) et a laissé quelques souvenirs très vifs. Quittant l'asile en mai 1890 comme étant guéri, il s'installe à Auvers-sur-Oise. Là se sont manifestés des cycles rapides de symptômes maniaques et dépressifs. Le 27 Juillet, il se serait tiré une balle dans la poitrine et il est mort deux jours plus tard.

  La xanthopsie de Van Gogh

 Certaines hypothèses médicales ont laissé entendre que le goût de Van Gogh pour l'utilisation de la couleur jaune pourrait être lié à son addiction à l'absinthe. En effet, cet alcool contient la thuyone, substance neurotoxique qui, à fortes doses, peut causer la xanthopsie, un trouble de la vision amenant à voir les objets en jaune. Toutefois, une étude a mis en évidence qu'une consommation d'absinthe aurait entraîné le buveur dans l'inconscience en raison de la teneur en alcool avant qu’il ait pu ingérer suffisamment de thuyone pour souffrir de xanthopsie.

Une autre hypothèse suggère que le Dr Gachet aurait prescrit de la digitaline à Van Gogh pour traiter l'épilepsie, substance qui pourrait entraîner une vision teintée de jaune et des changements dans la perception de la couleur d'ensemble [5,9]. Cependant, il n'existe aucune preuve directe que Van Gogh ait consommé de la digitaline, même si Van Gogh a peint la toile «Portrait du Dr Gachet avec branche de digitale».

Il ne semble donc pas exister d’explication médicale en médecine allopathique pouvant expliquer pourquoi Van Gogh avait une forte prédilection pour la couleur jaune dans ses peintures. D’après l’analyse d’Arnold WL [6], cette attirance par le jaune ne pourrait être expliquée que par une question de goût personnel, fondé sur une sensibilité personnelle. Dans quelle mesure le concept "Les goûts et les couleurs, ça ne se discute pas" est-il justifié ? Nos inclinations naturelles dictent nos goûts. Mais dans quelle mesure nos inclinations naturelles pour certaines couleurs seraient-elles le reflet de nos « équilibres/déséquilibres énergétiques » selon la théorie des Cinq Eléments à un temps t donné ?

 Relation entre médecine occidentale et médecine chinoise

 Les Cinq Emotions et les Sept Sentiments

 

Les Cinq Emotions sont réparties sur les Cinq Eléments et sont considérées comme physiologiques quand elles ne se manifestent pas de façon excessive, répétée ou permanente. Elles correspondent à un mode d’adaptation aux aléas de la vie.

Les Sept Sentiments représentent le caractère pathologique des émotions. Aux Cinq Emotions sont ajoutées la tristesse (bei) associée aux Poumons et la frayeur (jing) associée au Cœur et aux Reins.

« Par suite de la séparation avec les parents, de la désespérance, de l’accumulation des soucis et de la concentration, de la rancune d’une part ; du chagrin, de la crainte, de la joie et de la colère, d’autre part, les Organes deviennent alors en état de vide et le Sang et l’Energie quittent leur emplacement naturel » (Suwen, 77).

« Au niveau du Cœur demeure le shen. Les exagérations de la crainte, l’inquiétude, la méditation ou le souci atteignent facilement le shen » (Lingshu, 8).

« La tristesse, l’affliction, les soucis nuisent au Cœur » (Nanjing, 49e difficulté).

Les sentiments en excès lèsent la circulation du qi, ce qui va léser le qi, le Sang, le yin, le yang et les Liquides organiques.

Chaque sentiment peut dérégler son Organe respectif en engendrant et aggravant une maladie et réciproquement, la pathologie d’un Organe peut être révélée par un dérèglement des Sentiments. Chaque sentiment en excès peur se transformer en Feu.

 

Les fonctions des Organes

Les trois Organes les plus touchés par les Sentiments sont le Cœur, le Foie et la Rate, entraînant les syndromes suivants :

-        vide de qi et de Sang blessant la Rate pour le qi, le Cœur et le Foie pour le Sang ;

-        échange entravé entre Cœur (Feu) et Reins (Eau) : mouvements verticaux du Feu et de l’Eau de l’axe shaoyin perturbés ;

-        Foie et Rate en dissonance.

 La Rate 

L’excès de réflexion (soucis, rumination mentale) blesse la Rate et noue le qi. Les fonctions de l’harmonisation-transport du qi, du Sang et des Liquides organiques et de la montée-descente du pur et de l’impur sont entravées. L’Humidité n’est plus éliminée et se transforme en mucosités qui montent au Cœur.

 Le Foie

Le Foie assure la mise en mouvement. La colère, l’énervement, l’irritabilité entravent la libre circulation du qi, provoquant une stagnation du qi du Foie, mucosités impures comprises. D’autre part, le Bois du Foie attaque la Terre de la Rate.

 

Le Cœur

Comme le Cœur n’est plus nourri par le Sang, l’impur stagne, affaiblit le Cœur et le shen, et ferme les orifices, ce qui ralentit le psychisme et provoque les troubles mentaux.

Dans les conditions physiologiques normales, la joie détend et fait circuler le qi et le Sang, procurant une sensation de légèreté, de bien-être et de bonheur. Il s’agit de la joie interne, spontanée, inhérente à l’individu, à différencier avec la joie liée à une cause externe qui peut désorganiser la conscience.

 Dépression et troubles psychiques en médecine chinoise

 -        Les excès et déséquilibres alimentaires, les soucis et pensées obsédantes, le surmenage, entraînent un Vide de qi de Rate (jaune). Celle-ci ne peut plus fabriquer le qi à partir des aliments (yingqi) ni transformer le qi en Sang. La transformation et le transport ne sont plus correctement pourvus, l’Humidité n’est plus chassée et s’installe. A la longue, celle-ci se transforme en Mucosités impures qui montent au Cœur et obstruent ses Orifices.

Le yingqi n’étant plus produit, il ne peut nourrir le Cœur (rouge) qui est la demeure du shen.

Le shenming (clarté de l’Esprit) est affaibli, ce qui provoque les troubles psychiques et engendre la dépression.

-        La dépression et les facteurs émotionnels engendrent une stagnation du qi du Foie (vert) qui envahit la Rate (jaune). Les facteurs psychiques aggravent le Vide du Cœur, ce qui provoque les troubles mentaux.

-        Le refoulement des émotions, la parole non exprimée entraîne une stagnation du qi du Foie qui attaque la Rate par le cycle de soumission. Au cours du temps, cette stagnation de qi peut se transformer en stase de Sang.

-        A cause de la stagnation du qi du Foie, les Mucosités provenant de la Rate s’accumulent dans le Cœur. Le shen est déplacé de sa demeure provoquant les troubles psychiques et la dépression. Si la stagnation du qi du Foie se prolonge, elle se transforme en Feu du Foie. Quand le qi du Foie monte à contre-courant au Cœur, il blesse le Cœur et le shen. Lorsque la stagnation du qi et l’atteinte du Cœur se prolongent, la Rate est touchée, entraînant le Vide de Cœur et de Rate : la Rate ne produit pas le Sang pour nourrir le Cœur qui est la demeure du shen, d’autant plus que les facteurs psychiques aggravent son Vide, ce qui aggrave les troubles mentaux.

Les symptômes de ces déséquilibres sont d’apparition progressive : signes de ralentissement psychique : mutisme, visage inexpressif, regard fixe (cf. Autoportraits de Van Gogh), léthargie, dépression, introversion, confusion mentale, intellect affaibli.

 

Analyse des peintures de Van Gogh

 Méthodologie

 Dans cette étude, les peintures de Van Gogh sont analysées selon une grille de lecture basée sur :

La correspondance entre :

- les couleurs et les Cinq Eléments,

- les couleurs et les Cinq Organes,

- les couleurs et Cinq Emotions et les Sept Sentiments (tableau II),

- les symptômes/diagnostics de Van Gogh selon la médecine occidentale et la physiopathologie en médecine chinoise (tableau III).

Une théorie en chromothérapie selon laquelle nous sommes instinctivement attirés par les couleurs qui nous permettraient de corriger un déséquilibre d’énergie pouvant engendrer des problèmes physiques, mentaux ou émotionnels [22].

 Tableau II. Correspondance entre les couleurs, les Cinq Eléments, les Organes, les Cinq Emotions et les Sept Sentiments.

 

Couleur

Elément

Organe

Cinq Emotions et Sept Sentiments

Vert

Bois

Foie

Colère – Enervement – Irritabilité – Irascibilité – Courroux – Fureur

Rouge

Feu

Cœur

Joie - Frayeur

Jaune

Terre

Rate

Souci- Rumination mentale – Contrariété – Préoccupations - Appréhension

Blanc

Métal

Poumons

Chagrin –Tristesse – Affliction

Noir

(Bleu)

Eau

Reins

Inquiétude – Peur - Crainte – Frayeur - Effroi - Panique

 

 Tableau III. Correspondance des troubles de Van Gogh selon la médecine allopathique et la médecine chinoise.

 

Symptômes selon la médecine allopathique

Déséquilibre énergétique selon la médecine chinoise

Halos colorés attribués au glaucome

Xanthopsie et cataracte

Xanthopsie due à intoxication digitalique

Dyschromatopsie acquise

Foie : Atteinte de   l’organe sensoriel visuel

Maladie de Ménière : vertiges et étourdissements épisodiques, déséquilibre physique, symptômes auditifs, acouphènes

Rein : atteinte de l’organe sensoriel auditif

Epilepsie

 

Rein : Vide du qi 

Foie/Vésicule biliaire : chaleur humide

Foie : montée de yang

Trouble bipolaire, symptômes maniaco-dépressifs ou cyclothymiques,

Psychose cycloïde

Psychopathologie due à une intoxication chronique au plomb (crises d'épilepsie, altérations progressives du caractère, périodes de délire, troubles mentaux)

Dépendance à l’absinthe (thuyone) : hallucinations, convulsions, sensations de désinhibition

Rein - Cœur : atteinte de l’axe shaoyin 

  

Symptomatologie de Van Gogh selon la médecine chinoise

 Les signes de dépression, stress, insomnie de Van Gogh peuvent correspondre aux syndromes suivants :

-        syndrome de yin vide, Feu florissant,

-        syndrome Vide de Cœur et de Rate : correspondant au vide de Sang,

-        syndrome Stagnation du qi de Foie et accumulation de mucosités.

La stagnation de qi se transforme en Feu, donnant les signes de Feu : irritabilité, colère facile, acouphènes.

Le Vide de yin du Cœur, conséquence de la Chaleur du Foie et du non-échange avec l’Eau des Reins pourrait être à l’origine des insomnies.

Le qi du Foie blesse le Cœur-Esprit, entraînant des signes de Cœur et de shen blessés : colère, insomnies, confusion mentale, hallucinations, illusions sensorielles.

Van Gogh présentait aussi des signes de Vide de Sang à la tête (acouphènes, vertiges) et de Vide de Sang du Cœur (insomnies).

Le yin déficient et le Feu en plénitude peuvent expliquer sa dépression.

Par ailleurs, on peut aussi noter des signes de Chaleur-Vide :

-        du Cœur (vide de yin) : insomnie, agitation anxieuse

-        du Foie (élévation du yang) : colère, vertiges

-        des Reins (vide de yin) : vertiges

La stagnation de qi et l’accumulation de mucosités sont à l’origine de :

-        signes de mucosités du Cœur : agitation mentale, insomnie ou sommeil perturbé.

-        signes de stagnation de qi du Foie : dépression, abattement, alternance de l’humeur.

En conclusion, les symptômes de Van Gogh pourraient correspondre à l’atteinte de   :

-        Rate et Reins : vide de yin ;

-        Foie : vide de Sang et montée du yang ;

-        Cœur : Plénitude de Feu suite au vide du Rein yin.

 Les couleurs utilisées par Van Gogh

 On peut noter une prédominance de jaune et de bleu, et en proportions moindres du vert dans les peintures de Van Gogh.

-        Le vide du yin de Rate pourrait être à l’origine de son attirance pour la couleur jaune (ex. : Les tournesols ; Epis de blé).

 

Epis de blé (juin 1890)                                                                                                                               
Huile sur toile 64,5 x 48.5 cm

Rijksmuseum, Amsterdam

 

 

Vase avec quinze tournesols (Arles, août 1888).

National Gallery, Londres, Angleterre

 

 -        Le vide de Sang du Foie pourrait expliquer une certaine prédominance de vert dans ses oeuvres (ex : Les bords de l’Oise à Auvers).

 

 

Les bords de l'Oise à Auvers (juillet 1890)
Huile sur toile 73,3 x 93,7 cm.
Detroit, The Detroit Institute of Arts

 

-        Le bleu prédomine dans de nombreuses œuvres de Van Gogh (ex : La nuit étoilée ; Branches fleuries d’amandier ; Champ de blé sous un ciel orageux).

 

La nuit étoilée (Cyprès et village) / (juin 1889)
Huile sur toile, 73.7 x 92.1 cm
New York, MOMA

 

La couleur bleue n’existe pas dans le tableau classique de correspondances des couleurs avec les Cinq Eléments. Selon le Feng Shui, le bleu est assimilé à l’élément Eau, donc à l’organe Rein. Ce qui pourrait expliquer la prédominance du bleu par le vide du yin des Reins.

Mais si l’on rapproche le bleu du vert en se référant à une certaine similitude d’écriture en chinois, l’attirance par la couleur bleue chez Van Gogh pourrait alors être assimilée au vide de Sang du Foie. 

-        La plénitude de Feu de Cœur (suite au vide du Rein yin) pourrait être l’explication de la quasi-absence de couleur rouge dans ses œuvres (exception : La vigne rouge ; Le café de nuit, place Lamartine, Arles).

 La vigne rouge (novembre 1888)
Huile sur toile, 75 x 93 cm
Moscou, Musée Pouchkine


Le Café de nuit (septembre 1888)

70 x 89 cm

Yale University Art Gallery, New Haven, Connecticut, USA

 Tableau IV. Correspondance entre les couleurs des œuvres de Van Gogh et les Cinq Eléments/Organes

 

Couleurs prédominantes

Organes /Elément

Peintures

Marron

Rate/Terre

Les mangeurs de pommes de terre (avril 1885)

Jaune

Rate/Terre

Tournesols dans un vase (août 1888);

Jaune/Marron & Bleu

 

Le semeur au coucher du soleil (juin 1888) ; Moissons en Provence (juin 1888) ; Terrasse du café le soir (septembre 1888) ; Chambre de Vincent à Arles (octobre 1888) ; Souvenir du jardin à Etten (novembre 1888) ; Iris (mai 1889) ; Portrait du docteur Gachet (juin 1890)

Vert & Bleu

Foie/Bois & Reins/Eau

Les bords de l’Oise à Auvers (juillet 1890) ; Champ de blé sous un ciel orageux (juillet 1890)

Bleu/Noir

Reins/Eau

La nuit étoilée (juin 1889) ;

Autoportrait à l’oreille bandée (1889) ; Autoportrait à Saint-Rémy (septembre 1889) ; Le semeur (1889) ; Branches fleuries d’amandier (février 1890) ; Route avec un cyprès et une étoile (1890)

 


Le semeur au coucher du soleil (novembre 1888)
Huile sur jute sur toile, 73,5 x 93
Zurich, Fondation collection E. G. Bührle

 


Les mangeurs de pommes de terre (avril 1885)
Huile sur toile, 82 x 114 cm
Amsterdam, Musée Vincent Van Gogh

 

 Autoportrait à Saint Remy (septembre 1889)
Huile sur toile, 65 x 54 cm
Paris, Musée d'Orsay

 

 

Branches fleuries d'amandier (février 1890)
Huile sur toile, 73,5 x 92 cm
Rijksmuseum, Amsterdam

 

Portrait du docteur Gachet (juin 1890)
Huile sur toile, 66 x 57 cm
Collection privée (Christie's New York, 1990)

 

Iris (mai 1889)
huile sur toile, 71 x 93 cm
Malibu, Paul Getty Museum

 


Champ de blé sous un ciel orageux (juillet 1890)
Huile sur toile 50 x 100,5 cm.
Amsterdam, Rijksmuseum Vincent Van Gogh

 

 Conclusion

 Il existe une concordance entre les divers diagnostics allopathiques attribués à Van Gogh et les déséquilibres énergétiques vus sous l’angle de syndromes physiopathologiques en médecine traditionnelle chinoise. La prédominance de jaune, vert et bleu dans l’ensemble de ses peintures pourrait être attribuée à ses troubles traduits en termes de déséquilibres énergétiques selon la médecine chinoise (tableau IV).

 

 

Dr Tuy Nga Brignol

Rédactrice en chef d'Acupuncture & Moxibustion

Rédactrice en chef de la revue « Les cahiers de myologie »

* Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

 Conflit d’intérêts : aucun

 Références

 1- Naifeh S, Gregory White Smith, « Van Gogh : The Life”. Random House (New York), 2011.

2- Voskuil PH.. Van Gogh's disease in the light of his correspondence. Front Neurol Neurosci. 2013;31:116-25.

3- Michel FB, « Van Gogh, psychologie d’un génie incompris », Ed Odile Jacob, 2013.

4- Voskuil P. Diagnosing Vincent van Gogh, an expedition from the sources to the present "mer à boire". Epillpsy Behav. 2013;28(2):177-80.

5- Lanthony P, [Van Gogh's xanthopsia], Bull Soc Ophtalmol Fr. 1989 Oct;89(10):1133-4. 

6- Arnold WN, Loftus LS, Xanthopsia and van Gogh's yellow palette, Eye (Lond). 1991;5 ( Pt 5):503-10.

7- Lee TC, Van Gogh's vision. Digitalis intoxication? JAMA. 1981;245(7):727-9.

8- Elliott DB, Skaff A, Vision of the famous: the artist's eye, Ophthalmic Physiol Opt. 1993;13(1):82-90.

9- Lanthony P.  [Dyschromatopsias and pictorial art]. J Fr Ophthalmol. 1991;14(8-9):510-20.

10- Hart WM Jr. Acquired dyschromatopsias. Surv Ophthalmol. 1987;32(1):10-31.

11- Arenberg IK, Countryman LF, Bernstein LH, Shambaugh GE Jr, Van Gogh had Menière's disease and not epilepsy. Jama. 1990;264(4):491-3. Comment in : Jama. 1991;265(6):722-4.

12- Arenberg IK, Countryman LL, Bernstein LH, Shambaugh GE Jr, Vincent's violent vertigo. An analysis of the original diagnosis of epilepsy vs. the current diagnosis of Meniére's disease, Acta Otolaryngol Suppl. 1991;485:84-103.

13- Meissner WW, The artist in the hospital: the van Gogh case, Bull Menninger Clin. 1994;58(3):283-306.

14- ter Borg M, Trenité DK. The cultural context of diagnosis: the case of Vincent van Gogh. Epilepsy Behav. 2012;25(3):431-9.

15- Janka Z, [Artistic creativity and bipolar mood disorder], Orv Hetil. 2004;145(33):1709-18.

16- González Luque FJ, Montejo González AL, [Implication of lead poisoning in psychopathology of Vincent van Gogh], Actas Luso Esp Neurol Psiquiatr Cienc Afines. 1997;25(5):309-26.

17- Weissman E, Vincent van Gogh (1853-90): the plumbic artist, J Med Biogr. 2008;16(2):109-17.

18- Lemke S, Lemke C, [The psychiatric disease of Vincent van Gogh], Nervenarzt. 1993;64(9):594-8.

19- Morrant JC, The wing of madness: the illness of Vincent van Gogh, Can J Psychiatry. 1993;38(7):480-4.

20- Arnold WN, Vincent van Gogh and the thujone connection, JAMA. 1988;260(20):3042-4.

21- Carotaa A, Iariac G, Berneyb A, Bogousslavskya J, Understanding Van Gogh’s Night: Bipolar Disorder IN Neurological Disorders in Famous Artists. Bogousslavsky J, Boller F (eds): Front Neurol Neurosci. Basel, Karger, 2005, vol 19, pp 121–131

22- Norris S – Chromothérapie – Série Découverte et Initiation – 224 p – The Ivy Press Limited 2001.

 

Nos remerciements au Ciné-Club de Caen (Partie Beaux-Arts) pour l’iconographie.

Visitez leur site : http://www.cineclubdecaen.com/peinture/materiel/grandspeintres.htm

 

 Brignol TN. Van Gogh : revue de littérature de ses diverses pathologies et essai d’analyse du déséquilibre énergétique à travers ses peintures. Acupuncture & Moxibustion. 2013;12(3) 

 

Spécificité des points d’acupuncture utilisés dans la dysménorrhée primaire


Brèves d’acupuncture

 

Tuy Nga Brignol, Jean-Marc Stéphan

Spécificité des points d’acupuncture utilisés dans la dysménorrhée primaire

Pourcentage d’utilisation des dix combinaisons de points les plus usités. La combinaison la plus courante est le VC4 et RA6 (60,97% ) ou RA6 et VC6 (28,6%), RA6 et VE32 (27,4%) etc.

 L'acupuncture fournit une analgésie efficace dans la dysménorrhée primaire. Une étude basée sur l'exploration de données de la littérature a permis de sélectionner les points les plus généralement utilisés dans les essais cliniques avec ou sans randomisation, avec ou sans groupe témoin, publiés en anglais ou en chinois de janvier 1978 à avril 2014. Cette étude a pour intérêt d’examiner les principes de sélection des points d'acupuncture et leurs caractéristiques. 67,24% des points d'acupuncture utilisés étaient des points d'acupuncture spécifiques selon les théories de différenciation des syndromes, points de croisement, points shu antiques, points yuan et points shu et mu. Il en résulte donc une spécificité des points les plus fréquemment travaillés : sanyinjiao (RA6), guanyuan (VC4), qihai (VC6), diji (RA8), ciliao (VE32), etc.

Les méridiens les plus souvent utilisés étaient renmai (Vaisseau Conception), zutaiyin (Rate-Pancréas) et zutaiyang (Vessie). Les points des membres inférieurs ont été les plus fréquemment puncturés. En conclusion, l’'exploration de données est une approche possible afin d'identifier les caractéristiques de la sélection des points d'acupuncture. Cette  étude indique ainsi que les protocoles d’acupuncture moderne du traitement de la dysménorrhée primaire sont basés sur une sélection des points d'acupuncture spécifiques mettant en pratique les théories de la médecine traditionnelle chinoise.

 Yu S, Yang J, Yang M, Gao Y, Chen J, Ren Y, Zhang L, Chen L, Liang F, Hu Y. Application of acupoints and meridians for the treatment of primary dysmenorrhea : a data mining-based literature study. Evid Based Complement Alternat Med. 2015;2015:752194. doi : 10.1155/2015/752194. Epub 2015 Feb 24. Review.

 

La stimulation du hegu objective l’effet spécifique de l’acupuncture selon la technique de la piqûre à l’opposé 

 


La spécificité des points d’acupuncture est l’un des concepts clés de la théorie de l’acupuncture traditionnelle. La question est de savoir s’il existe des preuves scientifiques suffisantes pour prouver ou réfuter cette spécificité. Un aspect important de cette spécificité est la latéralité du point. Les données sont particulièrement rares concernant la latéralité des points homologues d’un même méridien, situés sur les côtés opposés du corps. Cependant, dans le but de traiter une maladie particulière, rien ne permet de dire si l’on doit choisir le point latéralisé à droite plutôt que celui de gauche (par exemple 4GI droit ou gauche). Selon l’acupuncture expérimentale, la stimulation de points d’acupuncture spécifiques en vue d’une analgésie acupuncturale va favoriser la libération de substances analgésiques dans le système nerveux central tels que des peptides opioïdes etc., ce qui signifie que les points d’acupuncture bilatéraux auraient le même effet. D’autre part, selon le chapitre 63 du Suwen, décrivant la piqûre miu, il est dit que « si une maladie est liée au côté gauche, le point de traitement est du côté droit, et vice versa », ce qui souligne que la stimulation des points d’acupuncture d’un côté latéral spécifique pourrait conduire à des avantages thérapeutiques dans les conditions spécifiques. Bref, ceci est à la base du concept de l’acupuncture controlatérale et permettrait d’affirmer la latéralité spécifique du point d’acupuncture. Il a déjà été constaté que la stimulation ipsilatérale de hegu (4GI) engendre une augmentation de la vascularisation dans le hegu controlatéral (4GI). En outre, l’augmentation de la vascularisation a été asymétrique, ce qui suggère que 4GI possède une latéralité de la distribution de sang. Une autre étude a objectivé que la stimulation du 6MC (neiguan) diffère selon que l’on puncture à droite ou à gauche, d’où également un effet latéralisé sur la variabilité de la fréquence cardiaque. Le but de cette étude est d’explorer si la stimulation de 4GI du côté droit peut entraîner un effet différent par rapport à celle du côté gauche sur la variabilité de la fréquence cardiaque. Afin d’exclure le biais lié au sexe, vingt-huit jeunes femmes volontaires en bonne santé ont été recrutées et réparties au hasard dans le groupe I (n = 14 ; âge moyen : 26,14 ± 1,19) et le groupe II (n = 14 ; âge moyen : 25,93 ± 1,39) selon l’ordre d’inscription au moment du recrutement. Dans le groupe I, 4GI du côté gauche a été stimulé lors de la première séance et 4GI du côté droit a été stimulé lors de la deuxième séance, en laissant au moins huit jours entre les deux séances. Dans le groupe II, 4GI du côté droit a été stimulé en premier puis le côté gauche a été stimulé plus tard. L’aiguille, insérée dans une profondeur de 15 mm, a été tournée lentement toutes les 5 minutes au cours des 30 minutes de la séance d’acupuncture, afin de maintenir la sensation d’endolorissement et d’engourdissement liée au deqi. L’ECG a été enregistré et la variabilité de la fréquence cardiaque a été analysée. Les résultats montrent qu’il n’y avait pas de différence significative de variabilité de la fréquence cardiaque entre les groupes I et II (aussi bien dans le domaine temporel que dans le domaine fréquentiel) lorsque la latéralité du point 4GI est explorée. Cette absence de latéralité du point 4GI sur la variabilité de la fréquence cardiaque est inattendue quand on la compare au point 6MC qui possède la latéralité. En effet, une étude approfondie antérieure a indiqué que l’acupuncture de 6MC produit une action différente sur la variabilité de la fréquence cardiaque en fonction de la latéralité droite ou gauche. D’après les auteurs, une explication possible pourrait être donnée en se basant sur la théorie traditionnelle de l’acupuncture : 6MC est un des points d’acupuncture spécifiques cardiovasculaires le plus couramment utilisé dans les textes classiques. Alors que 4GI appartient au méridien Gros Intestin qui n’a pas pour fonction de moduler la fonction cardiovasculaire.

 

Guangjun W, Yuying T, Shuyong J, Wenting Z, Weibo Z. Bilateral hegu acupoints have the same effect on the heart rate variability of the healthy subjects. Evid Based Complement Alternat Med. 2014;2014:106940. doi: 10.1155/2014/106940.

  

Restructuration du réseau cérébral moteur dans le traitement de l’AVC par acupuncture

 


IRMf avant et après deux semaines d'acupuncture – L’analyse de la fraction anisotropique (FA) montre la récupération. La FA mesure le degré d'organisation des faisceaux de substance blanche. C’est un des index qui peuvent être calculés. La FA évalue le degré avec lequel les molécules d'eau diffusent dans une seule direction.

Différentes interventions thérapeutiques peuvent induire un remodelage de l'architecture du réseau du système nerveux moteur après accident vasculaire cérébral (AVC). Il a été prouvé que l'acupuncture peut avoir une efficacité prometteuse dans la récupération motrice suite à un AVC. Cependant, il est difficile de savoir si la réorganisation motrice du réseau cérébral grâce à l’acupuncture est corrélée avec la durée d’installation de l'AVC et à la gravité du déficit initial.

Une étude a été réalisée chez neuf patients (7 hommes et 2 femmes ; âge moyen : 57,7 +/- 9.92 ans)  pour déterminer par IRM fonctionnelle (IRMf) la relation entre l'organisation motrice du cerveau après un traitement par acupuncture et les changements de l’ultrastructure de la substance blanche. Les critères de recrutement ont été : récupération stable de l’AVC ;  premier épisode d’AVC compris entre 2 et 12 semaines ; cognition suffisante pour exécuter des ordres simples (Score Mini-Mental State Examination MMSE> 21). Sont exclus de l’étude les patients avec : infarctus bilatéraux, AVC récurrents, antécédents d'alcool ou de drogue, antécédents d'épilepsie ou autre maladie neurologique ou troubles psychiatriques, déficits cognitifs graves, aphasie globale, et contre-indications à l’IRM. Les patients comme les sujets contrôles (appariés en âge et sexe) sont à dominance droite. Les huit sujets contrôles (6 hommes et 2 femmes ; âge moyen : 51,6 + 4,8 ans) ont un examen neurologique normal. Ils n’ont pas d’antécédents d'épilepsie ou d'autres maladies neurologiques ou troubles psychiatriques.

Une aiguille a été insérée verticalement au point 34VB (jambe gauche) à une profondeur de 2-3 cm, et stimulée de façon équilibrée entre « stimulation et dispersion ». L’aiguille est tournée à droite puis à gauche pendant 1 min à une vitesse de 60 fois/min. La procédure a été réalisée par le même acupuncteur pour tous les participants. Deux séances à deux semaines d’intervalle ont été effectuées afin d’analyser la différence de réponse induite par l'acupuncture au niveau du cerveau en phase de récupération.

Les résultats ont montré que chez les patients AVC, l'acupuncture entraîne une réorganisation du réseau moteur après la survenue de l'AVC. L'acupuncture peut induire une augmentation de la connectivité fonctionnelle entre le cortex gauche primaire moteur (M1) et le droit M1, le cortex pré-moteur, l'aire motrice supplémentaire (AMS), le thalamus et le cervelet. Après deux semaines de récupération, la connectivité fonctionnelle accrue de la M1 gauche a été plus largement distribuée et située principalement dans l'insula, le cervelet, les ganglions de la base et l’AMS. Par ailleurs, il existe une relation négative significative entre la valeur FA* (fraction anisotropique) dans le M1 à gauche à la numérisation de base et le noeud central de cette région après traitement par acupuncture, à la fois au début et après deux semaines de récupération.

Ces résultats apportent un nouvel éclairage sur la compréhension de la théorie de la réorganisation des troubles moteurs suite à des lésions cérébrales chez les patients victimes d'AVC.

 

Bai L, Tao Y, Wang D, Wang J, Sun C, Hao N, Chen S, Lao L. Acupuncture Induces Time-Dependent Remodelling Brain Network on the Stable Somatosensory First-Ever Stroke Patients: Combining Diffusion Tensor and Functional MR Imaging. Evid Based Complement Alternat Med. 2014;2014:740480. doi: 10.1155/2014/740480.

 

L’acupression au point 32V (ciliao) est efficace sur le degré d’anxiété et sur la délivrance chez les parturientes

 


Une doula est une femme aux côtés de la femme enceinte, à l’écoute de ses désirs, ses besoins. Elle propose un accompagnement dans la continuité, une relation de confiance, de complicité et d’intimité de femme à femme.

 

Un essai clinique randomisé de type pragmatique a été mené en Iran, dans la salle d’accouchement à l’Hôpital Shoushtari de l’Université de Chiraz des Sciences Médicales. Les 150 participantes ont été réparties de façon aléatoire en trois groupes (50 dans chaque groupe) en soins de soutien par une doula (groupe A), acupression (groupe B) et soins de routine pour le groupe contrôle (groupe C).

Les critères d’inclusion étaient : âge gestationnel de 37-41 semaines basé sur la date du dernier cycle menstruel ou de l’échographie des premier et deuxième trimestres ; première ou deuxième grossesse ; âgées entre 18 et 35 ans ; grossesse unique ; présentation de la tête ; absence d’anomalies chromosomiques ou d’anomalies fœtales évidentes ; absence de médication spéciale pendant la grossesse, et ayant au moins un niveau d’enseignement moyen. D’autre part, les critères d’exclusion de l’étude étaient : diabète maternel, restriction de croissance, incompatibilité de rhésus, antécédents de tabagisme, pré-éclampsie, oligohydramnios, placenta praevia, décollement placentaire, méconium épais, médicaments tels que scopolamine, ocytocine, atropine. Dans le groupe A, la doula* était à côté de la femme enceinte dès son entrée dans le département, pour la calmer, l’encourager et donner des conseils sur les positions appropriées en fonction des étapes de travail. Les positions ont été choisies de telle sorte qu’elles empêchent la fatigue et la monotonie. Dans le deuxième groupe (B), à 3 cm - 4 et 7 - 8 cm de dilatation, la mère a été placée dans une position correcte et l’acupression effectuée au point 32V (ciliao). La pression a été appliquée de façon continue et en douceur par les deux pouces pendant 20 minutes, au début des contractions puis arrêtée à la fin des contractions. Selon les résultats d’une analyse de variance, aucune différence significative n’a été observée entre les trois groupes avant intervention, en ce qui concernait l’état (P = 0,900) et l’anxiété-trait (P = 0,318). Après intervention, le score moyen de l’état d’anxiété du groupe de contrôle était respectivement de 27,5 et 26,0 points supérieur à celui des groupes A et B. Par ailleurs, le score moyen de l’anxiété-trait du groupe de contrôle était respectivement de 7,6 et 7,2 points plus élevé que celui des groupes A et B, et les différences étaient statistiquement significatives (P <0,001).

 

Akbarzadeh M, Masoudi Z, Zare N, Vaziri F. Comparison of the effects of doula supportive care and acupressure at the BL32 point on the mother's anxiety level and delivery outcome. Iran J Nurs Midwifery Res. 2015 Mar-Apr;20(2):239-46.

 

Dans le syndrome de l’oeil sec, l’acupuncture est plus efficace que les larmes artificielles

 


 


Comparaison entre acupuncture et larmes artificielles (AT) par le test de Schirmer (SIT). L’acupuncture est statistiquement plus efficace : la différence moyenne standardisée globales (SMD) = 1,47 ; IC95% : 0,58 -2,36 ; p=0,001 ; mais grande hétérogénéité  I2 = 94% (p < 0,00001).

L'efficacité de l'acupuncture chez les patients atteints du syndrome de l'œil sec reste controversée. Afin d’en déterminer une preuve d’efficacité, une méta-analyse a été réalisée avec une recherche dans les bases de données Pubmed, Ovid, la bibliothèque Cochrane, CNKI et Wanfang prenant en compte tous les essais cliniques jusqu’à la date du 1 octobre 2014. Les critères de jugement étaient le test de Schirmer (TS), l’évaluation de la coloration de la surface cornéenne à la fluorescéine (CFS) et le test de stabilité du film lacrymal (TBUT : tear break up time). Sept essais contrôlés randomisés (ECR) ont été inclus : 198 patients traités par acupuncture et 185 par larmes artificielles (exclusion : les ECR traitant du syndrome de Sjögren, les ECR dont les patients bénéficiaient d’un traitement par moxibustion ou non traités par larmes artificielles dans le groupe témoin). Les points généralement  utilisés étaient : 1VB, 5ES, yintang, 4GI, 3IG, 3F, 6R, 5TR, 14VB, 2V, 2ES, 2V, 20VG, taiyang, 1ES, 6RA, 40ES, 23VG, 20GI, 10RA, 36ES. Dans le groupe traité par acupuncture, la stabilité du film lacrymal était significativement plus longue que celle du groupe larmes artificielles après le traitement (p < 0,00001). Le TS était significativement plus élevé dans le groupe acupuncture versus groupe larmes artificielles après traitement (p = 0,001). Les CFS des patients dans le groupe acupuncture étaient aussi significativement améliorés par rapport à ceux du groupe larmes artificielles (p<0,0001). En conclusion, l’acupuncture est efficace chez les patients atteints de sécheresse oculaire, en partie mieux que le traitement de larmes artificielles. Toutefois, cette méta-analyse inclut des ECR de petites tailles, de faible qualité méthodologique et d’une durée de traitement courte. De ce fait, il est nécessaire de réaliser des essais contrôlés randomisés en double aveugle, de grande puissance avec une longue durée de traitement. De même, il existe une hétérogénéité importante nécessitant des méthodologies similaires.

 

Yang L, Yang Z, Yu H, Song H. Acupuncture therapy is more effective than artificial tears for dry eye syndrome: evidence based on a meta-analysis. Evid Based Complement Alternat Med. 2015;2015:143858. doi: 10.1155/2015/143858.

 

L’électroacupuncture est efficace dans le traitement de la dépression chez le rat modèle

 


Rat soumis à une natation dans l’eau glacée à 4°C

Afin d’explorer de nouvelles options de traitement non invasif pour la dépression, des chercheurs chinois ont mené une étude préclinique pour examiner les effets de l’acupuncture électrique (EA) chez l’animal-modèle de stress, le rat Sprague-Dawley. La dépression a été induite par un stress modéré imprévisible chronique (UCMS pour Unpredictable Chronic Mild Stress), combiné à l’isolement pendant 21 jours. Les rats ont été soumis chaque jour de façon aléatoire à des situations de stress telles que : privation de nourriture (24 h), privation d’eau (24 h), litière humide (24 h), natation dans l’eau glacée à 4°C (5 min), position agrafée par la queue (5 min), choc électrique à 100V (2 mA, 5 min), inversion du cycle lumière / obscurité (12 h).

Dix-huit rats Sprague-Dawley ont été répartis au hasard en trois groupes : groupe contrôle (ne recevant ni induction de stress UCMS et ni traitement par EA), groupe modèle (recevant UCMS mais sans être traité par EA), et groupe EA (recevant UCMS et traité par EA). Les rats du groupe traité ont reçu l’EA (1mA, 2 Hz pendant 20 minutes) une fois par jour pendant 21 jours. Deux points ont été sélectionnés : baihui (20VG) et yintang, selon les indications de la médecine traditionnelle chinoise pour traiter les maladies liées à l’esprit et au cerveau. Les effets de l’EA ont été évalués par le test de champ ouvert (permettant de mesurer une activité motrice de type anxiolytique), la consommation de sucre (pour mesurer un comportement de la dépression par l’évaluation de l’état hédonique ou capacité de procurer du plaisir), le poids corporel et le dosage de la galanine (GAL) dans l’hippocampe. Les rats ont été sacrifiés au 22è jour pour la détection de l’expression de la GAL ARNm dans l’hippocampe. Les résultats ont montré au 21e  jour une diminution de poids chez le groupe modèle par rapport au groupe contrôle, mais une augmentation significative du poids du groupe EA par rapport au groupe modèle. Ceci indique que les procédures de stress UCMS ont une influence négative sur le poids, mais qui a pu être neutralisée par l’EA. Concernant la consommation de sucre, les résultats ont montré que les rats des groupes modèle et EA ont perdu l’attirance pour le sucre après induction UCMS, mais l’EA a pu améliorer la situation. L’expression de la GAL ARNm du groupe modèle est significativement diminuée par rapport au groupe contrôle, tandis que celle du groupe EA est significativement supérieure à celle du groupe modèle. La GAL est un neuropeptide présent dans l’ensemble du système nerveux central, plus particulièrement dans l’hippocampe et l’hypothalamus. Elle participe à la régulation de nombreuses fonctions physiologiques au cours du processus de réaction au stress. D’après cette étude, l’EA permet de réduire de façon significative le déficit des activités comportementales induites par UCMS par un mécanisme de modulation positive de l’expression de la galanine dans l’hippocampe.

 

Mo Y, Yao H, Song H, Wang X, Chen W, Abulizi J, Xu A, Tang Y, Han X, Li Z. Alteration of behavioral changes and hippocampus galanin expression in chronic unpredictable mild stress-induced depression rats and effect of electroacupuncture treatment. Evid Based Complement Alternat Med. 2014;2014:179796. doi: 10.1155/2014/179796.

  

 

 

Se connecter

Veuillez mettre votre identifiant puis mot de passe dans les 2 cases appropriées ci-dessous