Medline Méridiens

Hypertension artérielle et acupuncture : réduction du stress oxydatif et amélioration de de la fonction endothéliale chez des rats spontanément hypertendus

L’acupuncture est reconnue par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) dans la prise en charge de nombreuses maladies, y compris l’hypertension artérielle (HTA). Des études ont montré que l’acupuncture améliore la HTA grâce à divers mécanismes. Cependant, les effets de l’acupuncture sur la HTA par rapport au stress oxydatif ne sont pas encore entièrement compris. De même, l’association entre acupuncture et fonction endothéliale reste inconnue. Afin de mieux comprendre, une équipe de l’Université Chinoise de Hong Kong a réalisé une étude chez des rats spontanément hypertendus.


 

Voir en ligne : Leung SB, Zhang H, Lau CW, Lin ZX. Attenuation of blood pressure in spontaneously hypertensive rats by acupuncture was associated with reduction oxidative stress and improvement from endothelial dysfunction. Chin Med. 2016 ;11(1):38.

Les effets de l'acupuncture sur les expressions en eNOS et peNOS dans les tissus de l'aorte. L'acupuncture a considérablement amélioré les expressions eNOS et peNOS en comparaison au groupe témoin SHR et le groupe sham-acupuncture (acupuncture simulés). Les données ont été exprimées en moyenne ± SD. (Pour eNOS expression, * p <0,001 pour ACU versus témoin SHR ; et # p=0,0053 pour ACU vs sham-acupuncture. Pour l'expression peNOS, p=,012 pour ACU vs contrôle SHR ; # P = 0,0073 pour ACU vs. sham-acupuncture). Pour de plus amples renseignements, voir article qui est distribué sous les termes de la Creative Commons Attribution 4.0 License International (http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/) ; doi : 10.1186/s13020-016-0110-0.

Des rats Wistar-Kyoto (WKYS) spontanément hypertendus (SHT) âgés de 18 semaines ont été arbitrairement répartis en quatre groupes : contrôle WKY (n=8), contrôle SHR (n=8), SHR-acupuncture simulée (n=8) et SHR-acupuncture (n=8). Le groupe SHR-acupuncture a reçu l’électroacupuncture pendant 6 semaines consécutives aux points zusanli (36ES) et taichong (3F). La tension artérielle a été surveillée au cours de la période de traitement, les animaux ont été euthanasiés à la 6e semaine. Les aortes ont été utilisées pour déterminer le taux d’angiotensine II, l’activité de la NADPH oxydase et le taux nitrate/nitrite. Le taux des espèces réactives de l’oxygène (ROS) a été déterminé par dihydroéthidium (DHE), et des études fonctionnelles ont été effectuées pour évaluer la réactivité vasculaire. La synthase d’oxyde nitrique endothéliale (eNOS) a été mesurée par Western Blot.

Les résultats en fin de traitement ont montré une pression artérielle significativement plus faible dans le groupe acupuncture SHR (185,0 ± 5,6 mmHg) par rapport aux groupes contrôles SHR sham-acupuncture et SHR (201,0 ± 5,4 et 197,4 ± 5,9 mmHg, respectivement ; p<0,001). Le taux sérique de l’angiotensine II dans le groupe contrôle SHR était significativement plus élevé que dans le groupe témoin WKY (p<0,001), tandis qu’il a été significativement atténué par le traitement par acupuncture (p=0,023). La coloration par DHE montre que le taux des ROS a diminué dans les aortes (p= 0,0017) et carotides (p=0,039) des rats SHR traités par acupuncture. D’après les dosages biochimiques, l’acupuncture a inhibé l’activité de la NADPH oxydase et renforcé la capacité antioxydante. Dans les études fonctionnelles, la relaxation endothélium-dépendante de l’aorte et des carotides en réponse à l’acétylcholine a été améliorée dans le groupe traité par acupuncture. Les aortes des SHR recevant l’acupuncture ont également exprimé un taux élevé de NOS et de phospho-eNOS (pe-NOS) et un taux de nitrotyrosine réduit. Le taux de nitrate/nitrite dans le tissu aortique a également diminué après acupuncture.

D’après cette étude chez des rats spontanément hypertendus, les effets de l’acupuncture dans le traitement de la HTA sont associés à la réduction du stress oxydatif ainsi qu’à une amélioration de la biodisponibilité de l’oxyde nitrique et de la fonction endothéliale.

Prévention des arythmies cardiaques : l’acupuncture parait aussi efficace que les médicaments antiarythmiques

Une revue systématique a été réalisée afin de comparer l’efficacité de l’acupuncture à celle des médicaments antiarythmiques dans la prévention des arythmies cardiaques. Des essais cliniques randomisés (ECR) ont pu être identifiés grâce à une recherche dans les bases Medline, CNKI, Embase et Cochrane (de 1970 à 2016) ainsi que par une recherche manuelle de références croisées de revues et d’articles originaux. Les ECR comportant des patients atteints d’arythmie et répartis de façon aléatoire en deux groupes (soit acupuncture, soit médicaments classiques, ou acupuncture simulée ou repos au lit) ont été inclus dans l’analyse. Au total, treize essais ayant inclus 797 patients ont été retenus pour l’analyse. Les résultats n’ont montré aucune différence statistiquement significative entre l’acupuncture et le traitement conventionnel pour la tachycardie supraventriculaire paroxystique (n=203 ; RR 1,18 ; IC 95% 0,78-1,79 ; I²=80% ; p=0,44). Cependant, dans le groupe atteint d’extrasystoles (battement ventriculaire prématuré), il a été observé un bénéfice statistiquement significatif de l’acupuncture pratiquée en complément de l’administration orale d’antiarythmiques (AAR) par rapport au traitement uniquement par AAR (n=286, RR 1,15 ; IC 95% 1,05-1,27 ; I² = 0% ; p= 0,002). Enfin, pour les patients atteints de tachycardie sinusale n’ayant reçu aucun traitement, l’acupuncture a été bénéfique (n=120 ; MD = 18,80, IC 95% : 12,68-24,92 ; I²=81%, p<0,00001). Les points les plus couramment utilisés dans dix des treize ECR sont neiguan (MC6), shenmen (C7) et xinshu (V15). Deux études ont choisi la méthode de linggui bafa qui utilise les huit points de commande des Méridiens Extraordinaires en fonction des jours et heures liés aux Troncs Célestes et Branches Terrestres, méthode analogue à la méthode similaire des ziwu liuzhu qui utilise les Cinq points shu antiques. Les points utilisés sont gongsun, lieque, shenmai, zhaohai, zulinqi, houxi, neiguan et waiguan. Les thérapeutiques médicamenteuses utilisées : propafenone, diltiazem, amiodarone, mexiletine. En conclusion, cette méta-analyse objective une efficacité de l’acupuncture, comparable à celle des antiarythmiques dans la tachycardie supraventriculaire paroxystique. Par ailleurs, dans l’analyse de sous-groupes avec ou sans AAR, l’acupuncture présente un avantage net dans le traitement des extrasystoles et de la tachycardie sinusale. Néanmoins, d’autres ECR sont nécessaires afin de mieux guider la pratique clinique.


 

Voir en ligne : Li Y, Barajas-Martinez H, Li B, Gao Y, Zhang Z, Shang H, Xing Y, Hu D. Comparative Effectiveness of Acupuncture and Antiarrhythmic Drugs for the Prevention of Cardiac Arrhythmias : A Systematic Review and Meta-analysis of Randomized Controlled Trials. Fron

Méta-analyse montrant l'efficacité de l'acupuncture par rapport à la thérapie existante dans plusieurs types d'arythmies.

Méta-analyse montrant l’efficacité de l’acupuncture par rapport à la thérapie existante dans plusieurs types d’arythmies. (A) Acupuncture vs traitement médicamenteux conventionnel dans la tachycardie supraventriculaire paroxystique ; (B) acupuncture plus administration orale d’antiarythmiques (AAR) par rapport à l’administration orale de AAR seul dans extrasystoles (VPB) ; (C) acupuncture vs. traitement de contrôle (ni acupuncture ni tout autre traitement anti-arythmique) dans la tachycardie sinusale.

Dans la dermatite atopique ou dans le prurit de type sérotoninergique, l’acupuncture agit sur l'inflammation par blocage des récepteurs sérotoninergiques 5-HT2 et 5-HT7

 

Le prurit chronique est un trouble qui résulte d’un certain nombre de maladies de la peau telles que la dermatite atopique, ainsi que des conditions systémiques telles que l’insuffisance rénale, la cirrhose et certains cancers. Bien que les démangeaisons causées par les allergies ou les piqûres d’insectes puissent souvent être traitées avec des antihistaminiques, la plupart des formes de prurits chroniques sont résistantes au traitement antihistaminique [[1]]. La sérotonine périphérique, ou 5-hydroxytryptamine (5-HT), composant de la « soupe inflammatoire » a été identifiée comme un inducteur puissant de prurit [[2]]. Ainsi dans une étude suédoise, il a été objectivé que le stress et l’anxiété peuvent aggraver la dermatite atopique par le système sérotoninergique. L’expression sérotoninergique a été mesurée chez vingt-huit patients atteints de la dermite atopique par rapport à l’étendue de la maladie (SCORing de la dermatite atopique; SCORAD). Les biopsies ont été prélevées sur la peau de la dermite lésionnelle et non lésionnelle et étudiées pour l’expression de la sérotonine, de ses récepteurs 5-HT1A et 5-HT2AR et de la protéine de transport de la sérotonine (SERT), en utilisant l’immunohistochimie. Des corrélations positives et négatives ont été trouvées entre les marqueurs sérotoninergiques et SCORAD, l’inflammation, l’intensité du prurit, les traits d’anxiété et le score de dépression, indiquant que les mécanismes sérotoninergiques sont impliqués dans la dermite atopique [[3]] (figure 3).

Figure 3. Expression épidermique, membranaire basale et vasculaire des récepteurs 5-HT2AR, concernant (a) la peau de la dermatite atopique lésionnelle et (b) non lésionnelle. Pointes de flèche : fraction épidermique apicale positive (plus élevée en a qu’en b). Petite flèche : intensité de coloration de la membrane basale (forte en b, absente en a) ; Flèches (ordinaires) : vaisseaux positifs. Barres d’échelle : 20 μm. Figure d’après [11]

 

Or si on sait que l’acupuncture est efficace dans la dermatite atopique, en particulier dans l’amélioration du prurit, ses mécanismes physiopathologiques ne sont pas encore élucidés. Déjà, à partir de l’analyse d’un essai comparatif randomisé mené en Corée du Sud [[4]], Goret et Nguyen avaient effectué une courte revue pour montrer l’efficacité du traitement acupunctural. Ils ont ainsi objectivé que les points les plus utilisés en fonction de cent-seize études cliniques et en fonction de la différenciation des syndromes (bianzheng) étaient un noyau de cinq points 11GI (quchi), 10Rt (xuehai), 36E (zusanli), 6Rt (sanyinjiao) et 4GI (hegu) associés à l’utilisation de points ashi en cas de lésions cutanées [[5]].

Le but de cette étude expérimentale de Park et coll. [[6]]  était donc de tester les effets anti-prurigineux de l’acupuncture et d’en étudier les mécanismes possibles.

L’acupuncture a été réalisée sur le point 11GI (quchi) bilatéralement juste avant l’injection de substances pruritogènes sur un modèle de prurit aigu sur la joue de souris ou de dermatite atopique induite par la substance MC903.

L’acupuncture a significativement réduit les démangeaisons aiguës déclenchées par le composé 48/80, la chloroquine, ou surtout la sérotonine. Elle a également nettement réduit le prurit engendré par les agonistes de récepteurs de la sérotonine 5-HT2 et 5-HT7. En outre, le 11GI a eu des effets préventifs et thérapeutiques sur le prurit chronique ainsi que sur l’inflammation et épaississement épidermique chez les souris atteintes de dermatite atopique induite par MC903. Quchi a également considérablement réduit la surexpression des récepteurs 5-HT2A, 5-HT2B et 5-HTdans les lésions cutanées de type dermatite atopique chez les souris traitées par MC903. En conclusion, ces résultats soulignent que l’acupuncture améliore considérablement non seulement l’inflammation de la peau, mais aussi le prurit sérotoninergique à la fois aigu et chronique vraisemblablement par l’inhibition des récepteurs de la sérotonine 5-HT2 et 5-HT7.

 DJean-Marc Stéphan

Coordinateur du DIU d’acupuncture obstétricale Université de Lille - Faculté de Médecine
Président de l’association « Acupuncture & Moxibustion »
Président du Syndicat Nationale des Médecins Acupuncteurs de France (SNMAF)
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ORCID : 0000-0002-3377-2280

Conflit d’intérêts : aucun

 Références 

[1].  Mollanazar NK, Smith PK, Yosipovitch G. Mediators of Chronic Pruritus in Atopic Dermatitis: Getting the Itch Out? Clin Rev Allergy Immunol. 2016 Dec;51(3):263-292.
[2].  Bautista DM, Wilson SR, Hoon MA. Why we scratch an itch: the molecules, cells and circuits of itch. Nat Neurosci. 2014 Feb;17(2):175-82.
[3].  Rasul A, El-Nour H, Blakely RD, Lonne-Rahm SB, Forsberg J, Johansson B, Theodorsson E, Nordlind K. Effect of chronic mild stress on serotonergic markers in the skin and brain of the NC/Nga atopic-like mouse strain. Arch Dermatol Res. 2011 Nov;303(9):625-33.
[4].  Park JG, Lee H, Yeom M, Chae Y, Park HJ, Kim K. Effect of acupuncture treatment in patients with mild to moderate atopic dermatitis: a randomized, participant- and assessor-blind sham-controlled trial. BMC Complement Med Ther. 2021;21(1):132.
[5]. Goret O, Nguyen J. Traitement par acupuncture de la dermatite atopique. acupuncture & Moxibustion. 2021;20(2):209-213.
[6]. Park HJ, Ahn S, Lee H, Hahm DH, Kim K, Yeom M. Acupuncture ameliorates not only atopic dermatitis-like skin inflammation but also acute and chronic serotonergic itch possibly through blockade of 5-HT2 and 5-HT7 receptors in mice. Brain Behav Immun. 2021;93:399-408. doi: 10.1016/j.bbi.2021.01.027.