Acu. expérimentale

Mécanismes d'action du point 36E : une étude randomisée d’un modèle de rat arthritique

L’effet anti-inflammatoire et antinociceptif de l’acupuncture au zusanli 36E sur les pattes et les articulations enflammées des rats AIA. a) Apparition typique des articulations de la cheville en trois groupes le jour 21. (b) analyses histologiques sur les articulations droites des cheville (x100) teintées par colorant H&E : on observe l’érosion à différents degrés dans le cartilage articulaire et l’arthrite subchondral dans les groupes des rats AIA et rats traités par 36E (flèche noire). c-e) La teneur en TNF-α et d’IL-1β mesurée dans l’œdème de la cheville droite par technique ELISA. Les données obtenues sont exprimées sous la forme de la moyenne ± SEM dans les groupes de contrôle (●), AIA (■) et 36E (▲). ●P < 0,05, ●●P < 0,01, et ●●●P < 0,001 indiquent les différences statistiquement significatives par rapport au groupe témoin ; ★P < 0,05 et ★★P < 0,01 indiquent des différences statistiquement significatives par rapport au groupe de l’AIA.

 


Une suractivation des réponses immunitaires et inflammatoires contribue souvent au développement de maladies auto-immunes chroniques systémiques telles que la polyarthrite rhumatoïde (PR). L’acupuncture est recommandée par l'OMS pour traiter 16 types de maladies inflammatoires, incluant la PR.

La PR est une maladie auto-immune chronique systémique caractérisée par l'agrégation de cellules immunitaires et la sécrétion de cytokines dans la synoviale articulaire.

Le rat Wistar est le modèle animal de PR induit par adjuvant (AIA) couramment utilisé comme modèle de douleur inflammatoire par injections intraplantaires soit d’adjuvant complet de Freund ou soit par injection de solution saline le jour 0  afin d’étudier les actions de l’acupuncture. Le point zusanli (36E) est considéré comme le point le plus courant utilisé dans le traitement de la PR.

Dans une précédente étude, des auteurs chinois ont déjà démontré dans le sérum des modèles de rat AIA que l'acupuncture au point 36E peut réguler plusieurs systèmes de réponse immunitaire de cytokines.

Dans cette présente étude, la même équipe utilise le modèle expérimental AIA pour étudier le point 36E en ce qui concerne les interactions entre les cellules immunitaires et les principaux médiateurs chez trois groupes de rats, âgés de 6 à 8 semaines : un groupe contrôle et deux groupes de rats AIA (avec et sans traitement par acupuncture).

L'œdème articulaire et la latence de retrait de la patte servent de critères pour observer les effets sur l'inflammation. Le dosage immunologique multiplex permet de mesurer le taux de 24 cytokines, de chimiokines et de facteurs de croissance dans les articulations de la cheville pendant le traitement, aux jours 1, 7, 15 et 21.

Les monocytes et la polarisation des macrophages dans les articulations enflammées ont été étudiés en détectant les populations phénotypiques M1 et M2 et leurs cytokines.

Les résultats ont montré que la puncture du point 36E réduit l'œdème de la patte et améliore le seuil nociceptif des rats AIA. Plusieurs cytokines immunitaires sont régulées par l'acupuncture et les rats traités ont montré une amélioration significative des symptômes comparés aux rats AIA sans traitement au jour 21.

Ainsi, l'acupuncture module de façon spécifique les monocytes / macrophages dans l’inflammation des articulations de la cheville des rats AIA. Elle  inhibe également les macrophages de phénotype M1 avec réduction du taux d’interleukines IL-1β. L'inhibition de la polarisation des macrophages peut être l'un des mécanismes clés de l'action anti-inflammatoire de l’acupuncture.

Cette recherche a mis en évidence un paradigme de recherche systématique pour l’étude des mécanismes d'action de l'acupuncture.

 

Yang F, Gong Y, Yu N, Yao L, Zhao X, Hong S, Wang S, Chen B, Xu Y, Pang G, Wang H, Guo Y, Li Y, Guo Y, Xu Z. ST36 Acupuncture Alleviates the Inflammation of Adjuvant-Induced Arthritic Rats by Targeting Monocyte/Macrophage Modulation. Evid Based Complement Alternat Med. 2021 Feb 27;2021:9430501. doi: 10.1155/2021/9430501. eCollection 2021.

 

Analyse des effets de l’acupuncture par IRMf sur le réseau impliquant l’amygdale

De plus en plus de preuves indiquent que les effets principaux de l’acupuncture sont obtenus par médiation du système nerveux central. Cependant, les réseaux cérébraux spécifiques sous-tendant ces effets demeurent incertains. Dans cette étude utilisant l’IRM fonctionnelle (IRMf), une méthode d’analyse de covariance interrégionale a été utilisée afin d’examiner la connectivité fonctionnelle de réseaux cérébraux impliqués dans l’acupuncture. L’IRMf a été réalisée avant, pendant et après stimulation du zusanli (ES36) sur des volontaires sains, point connu pour être impliqué dans la modulation de la douleur. Ont été tout d’abord identifiés des changements des signaux d’IRMf significatifs pendant la stimulation d’acupuncture au niveau de l’amygdale gauche, amygdale qui a été par la suite choisie comme référence fonctionnelle pour les analyses de connectivité. Les résultats ont démontré qu’il y a un réseau cérébral associé à l’amygdale pendant la condition de repos. Ce réseau englobe les structures cérébrales qui sont impliquées tant dans la sensation de douleur que dans la modulation de la douleur. Les auteurs ont aussi constaté qu’un tel réseau concernant la douleur pourrait être modulé autant par l’acupuncture verum que par l’acupuncture sham (feinte). Cependant, comparée à la sham acupuncture, l’acupuncture vraie induit un niveau plus élevé de corrélations parmi le réseau associé à l’amygdale. En conclusion, ces découvertes indiquent que l’acupuncture peut changer l’état fonctionnel du réseau cérébral spécifique de l’amygdale qui est à la base la modulation de douleur et de la perception douloureuse.


Acupression et électroacupuncture : il n’y a pas de différence dans la réponse corticale


Les études en IRM fonctionnelles objectivent que les stimuli acupuncturaux entraînent un effet dans la zone sous-corticale. Mais il existe aussi une action sur l’aire primaire somatosensorielle (S1). A partir d’une magnétoencéphalographie tête entière (MEG), les auteurs ont donc analysé l’effet sur cette zone S1 de 15 minutes d’électroacupuncture (EA) et l’acupression (AP) afin d’évaluer les différents types de simulation d’acupuncture. Il s’avère que les deux formes d’acupuncture entrainent une diminution significative des amplitudes de réponse après cinq minutes de stimulation. Toutefois, la latence de ces baisses a été plus précoce par EA ( 30 ms après le stimulus) que par AP (> 100 ms). En conclusion les deux formes d’acupuncture (EA et AP) agissent sur la zone SI, de concert avec leurs effets sur la régulation sous-corticale endogène antalgique. Donc ces thérapies ont un potentiel de traitement touchant la zone S1 et éventuellement peut modifier la neuroplasticité. Une étude plus approfondie au sein des populations neuropathiques serait nécessaire afin de l’évaluer.