Medline Méridiens

Rétention urinaire chronique suite à une lésion médullaire : efficacité de l’acupuncture comme traitement complémentaire

Une équipe chinoise a réalisé une revue de la littérature pour évaluer l’innocuité et l’efficacité de l’acupuncture dans le traitement de la rétention urinaire suite à une lésion médullaire. La rétention urinaire est définie comme une vessie qui se vide de façon incomplète (volume résiduel post-mictionnel VRPM > 300 ml) ou ne se vide pas du tout (VRPM > 1 000 ml).


 

Voir en ligne : Wang J, Zhai Y, Wu J, Zhao S, Zhou J, Liu Z. Acupuncture for Chronic Urinary Retention due to Spinal Cord Injury : A Systematic Review. Evidence-Based Complementary and Alternative Medicine

L'acupuncture en association avec le cathétérisme intermittent aseptique est plus bénéfique à la rétention urinaire suite à une lésion médullaire que le cathétérisme intermittent aseptique seul (RR=1,23 ; IC95%1,10-1,38).

Une équipe chinoise a réalisé une revue de la littérature pour évaluer l’innocuité et l’efficacité de l’acupuncture dans le traitement de la rétention urinaire suite à une lésion médullaire. La rétention urinaire est définie comme une vessie qui se vide de façon incomplète (volume résiduel post-mictionnel VRPM > 300 ml) ou ne se vide pas du tout (VRPM > 1 000 ml). Dans cette revue, ont été exclues les études non randomisées, quasi-randomisées, rétrospectives, des rapports de cas, des séries de cas, ainsi que les revues de la littérature. Les essais utilisant différentes techniques d’acupuncture traditionnelle chinoise (acupuncture manuelle, électroacupuncture, auriculoacupuncture) ont été retenus. Les ECR impliquant l’acupuncture combinée à une autre thérapie ont également été inclus si cet autre traitement était le même dans les deux groupes (expérimental et contrôle). Les essais comparant différents types d’acupuncture et différents points d’acupuncture ont été exclus. Seuls trois ECR, incluant 334 patients ont été retenus. L’électroacupuncture a été appliquée dans deux essais. L’acupuncture manuelle (basée sur le diagnostic de la maladie et non sur la différenciation du syndrome) a été utilisée dans un essai. Tous les patients ont reçu un traitement d’acupuncture une fois par jour, et chaque traitement a duré 20 ou 30 minutes. La durée du traitement varie de deux semaines (électroacupuncture) à huit semaines (acupuncture manuelle).

Les points zhongji (3VC), qihai (6VC) et guanyuan (4VC) ont été les points les plus fréquemment utilisés, avec une incidence de 100% pour les trois ECR. Puis viennent les points pangguangshu (28V), shenshu (23V), qugu (2VC), yinlingquan (9Rte) et sanyinjiao (6Rte), avec une incidence de 66,7%. Les autres points mentionnés dans les ECR ont été yaoyangguan (3VG), mingmen (4VG), ciliao (32V), shangliao (31V), zhongliao (33V) et xialiao (34V). Le deqi a été obtenu pour tous les points.

Un essai a comparé l’acupuncture à l’acupuncture associée à une rééducation vésicale, sphinctérienne et mictionnelle. Deux essais ont comparé le cathétérisme intermittent aseptique à l’acupuncture associée au cathétérisme intermittent aseptique. Dans ces trois essais, certaines mesures supplémentaires ont été appliquées à la fois dans les deux groupes expérimentaux et contrôles, comportant des médicaments neurotrophiques, la régulation de l’équilibre hydro-électrolytique et acido-basique. La méta-analyse a montré que l’acupuncture associée à la rééducation donne de meilleurs résultats que la réadaptation isolée dans la diminution du VRPM (figure 1). De même, l’acupuncture combinée au cathétérisme intermittent aseptique donne de meilleurs résultats que le cathétérisme intermittent aseptique seul. Aucun événement indésirable grave n’a été signalé. En conclusion, l’acupuncture utilisée comme thérapie complémentaire peut avoir un effet potentialisateur dans le traitement de la rétention urinaire suite à une lésion médullaire. Toutefois, en raison de l’absence d’ECR de haute qualité, des ECR bien conçus sont nécessaires pour fournir des preuves solides.

Action antalgique et fonctionnelle de l’acupuncture ou du TENS dans les douleurs de la ceinture pelvienne et des lombalgies liées à la grossesse

Grossesse - San Francisco's building (1910) - style mission revival -mural (1994) -  San Francisco - USA

 

La douleur de la ceinture pelvienne (en anglais, pelvic girdle pain -PGP-, identifiée par Maurice Lacomme (1897-1986), obstétricien français qui a décrit en 1942 un syndrome « ostéo-musculo-articulaire abdomino-pelvien bénin) et la lombalgie liée à la grossesse (PLBP) sont des problèmes fréquents apparaissant au cours du 2e et surtout 3e trimestre de la grossesse. Cela a des implications physiques, psychologiques et socio-économiques importantes qui peuvent être résolues par l’acupuncture et/ou techniques associées, comme cela a déjà été analysé en 2009, puis 2015 [[1],[2]].

Un nouvel essai comparatif randomisé pragmatique [[3]] a recruté dans des maternités cent-treize femmes enceintes réparties en deux groupes atteints de PGP cliniquement vérifiées entre la 12e et 28e semaine de grossesse [[4]]. L’objectif était donc d’étudier s’il existait une plus grande efficacité de la neurostimulation électrique transcutanée (TENS) dans le groupe expérimental par rapport à l’acupuncture (groupe témoin actif) dans le traitement de la douleur et d’observer l’amélioration du handicap physique dans les activités quotidiennes.

L’intervention consistait en dix séances d’acupuncture (deux séances par semaine) dans le groupe acupuncture. Les points d’acupuncture locaux ont été sélectionnés en fonction des symptômes individuels de la femme et de la présentation clinique, après la palpation diagnostique pour identifier les points sensibles. Au total, dix points segmentaires et sept points extrasegmentaires ont été utilisés : 20VG (baihui), 4GI (hegu), 26V (guanyuanshu), 32V (cialo), 33V (zhongcialo), 54V (zhibian), 11R (hengfu), 60V (kunlun), Ex-B-2 (huatuojiaji en L4L5 et S1-S2), 20VB (fengchi), 12Rt (chongmen), 36E (zusanli). Les aiguilles de 0,25 à 0,30 mm de diamètre ont été laissées in situ pendant 30 min et stimulées manuellement après 10 et 20 minutes avec recherche du deqi.

Dans le groupe TENS, les électrodes étaient placées en fonction des symptômes et de la présentation clinique de chaque femme, unilatéralement ou bilatéralement sur l’articulation sacro-iliaque et les muscles fessiers pour la douleur pelvienne dorsale ou dans la région de l’aine pour la douleur pubienne. Après instructions données à l’hôpital, le dispositif TENS (Cefar Primo) devait être utilisé à la maison pendant au moins 30 minutes par jour pendant 5 semaines. La stimulation à haute fréquence (80Hz avec une durée d’impulsion de 180µs) était mise en place par les femmes elles-mêmes avec une intensité à la limite du supportable au niveau de la zone traitée. En cas d’absence d’effet après la première semaine de traitement à 80Hz, les femmes pouvaient opter pour un mode de stimulation à basse fréquence (2Hz ; 180µs) afin d’avoir une antalgie optimale.

Aucune différence moyenne n’a été détectée entre les deux groupes. Les deux groupes ont réussi à préserver leurs activités physiques et quotidiennes selon les critères de jugement principaux : échelle de handicap Oswestry (ODI), de fonctionnement (échelle fonctionnelle spécifique au patient), échelle de capacité de travail (work ability Index). On a observé aussi une réduction significative (p<0,05) de l’intensité de la douleur du soir au sein des deux groupes : acupuncture -0,96 (intervalle de confiance IC à 95% : -1,91 à -0,01 ; p=0,049), TENS -1,29 (IC à 95 % : -2,13 à -0,44 ; p=0,003). Même chose sur la préoccupation vis-à-vis de la douleur : acupuncture : -1,44 (IC à 95% : -2,31 à -0,57 ; p=0,0012), TENS : -1,99 (IC à 95 % -2,81 à -1,17 ; p<0,0001). En conclusion, le traitement des douleurs de la ceinture pelvienne aussi bien par TENS que par acupuncture soulage le handicap et améliore l’activité physique tout comme les algies et les inquiétudes à l’égard de la douleur. L’une ou l’autre intervention pourrait être recommandée comme alternative non pharmacologique antalgique et pourrait permettre aux femmes enceintes de rester actives. Toutefois, le groupe d’acupuncture a montré une plus grande satisfaction à l’égard du traitement par rapport au TENS sans doute lié au fait que dans ce groupe, il y avait un suivi régulier et empathique qui n’existait pas chez les femmes qui se traitaient elles-mêmes par TENS à la maison. Il serait alors judicieux de réaliser un ECR comparant TENS versus électroacupuncture (stimulation percutanée à travers les aiguilles) ou versus neurostimulation électrique transcutanée appliquée sur le point même d’acupuncture (TEAS).

 

Figure 1. Le dispositif TENS (Cefar Primo PRO ; DJO Nordic AB, Malmö, Suède) utilisé pour l’étude.

 

 

 

[1]. Stéphan JM. Acupuncture autour de la naissance : bases scientifiques et état des lieux dans les nausées et le syndrome de Lacomme. Acupuncture & Moxibustion. 2009;8(2):86-93.

[2]. Stéphan JM. Obstétrique et acupuncture factuelle. Quel niveau de preuve en 2015 ? Acupuncture & Moxibustion. 2015;14(4):285-291.

[3]. Les ECR pragmatiques cherchent à vérifier l’efficacité d’une thérapeutique en la comparant au traitement de référence habituel, ici dans ce cas précis l’acupuncture.

[4]. Svahn Ekdahl A, Fagevik Olsén M, Jendman T, Gutke A. Maintenance of physical activity level, functioning and health after non-pharmacological treatment of pelvic girdle pain with either transcutaneous electrical nerve stimulation or acupuncture: a randomised controlled trial. BMJ Open. 2021 Oct 1;11(10):e046314.

L’acupuncture peut être aussi efficace que les techniques occidentales de Procréation Médicale Assistée (PMA) chez les femmes infertiles

Les résultats de la méta-analyse montrent ici une augmentation statistiquement significative du taux de grossesse entre le groupe acupuncture seule versus groupe témoin : risque relatif RR= 2,63 (IC 95% 1,60-4,32) ; I²=0%, soit 2,63 fois de plus de possibilité d’être enceinte par acupuncture.

En Chine, l'acupuncture est largement utilisée par les femmes infertiles dans un but de procréation médicale assistée (PMA) mais pas toujours associée aux protocoles usuels de PMA occidentale. De ce fait, cette méta-analyse a pour objectif d’évaluer son efficacité. Six bases de données (Medline, Embase, the Cochrane Central Register of Controlled Trials, the China National Knowledge Infrastructure (CNKI), the China Science and Technology Journal Database (VIP), and Wan-Fang Data) ont été explorées jusqu’en juin 2018. Vingt-deux essais comparatifs randomisés (ECR) concernant 2591 femmes souffrant d'infertilité traitées par acupuncture ou par traitement combiné (phytothérapie chinoise, thérapeutique occidentale de la PMA) ont été inclus. La méta-analyse a été réalisée à l'aide de Revman 5.3. La qualité méthodologique des études a été évaluée à l'aide de l'outil d'évaluation du risque de biais de la Cochrane Collaboration. Le taux de grossesse a été significativement amélioré avec le traitement acupunctural seul ou associé (RR=1,84 ; IC à 95% = 1,62 à 2,10 ; p<0,00001) par rapport à celui du groupe témoin. L'analyse des sous-groupes a objectivé une amélioration significative également avec acupuncture plus médecine occidentale, ou acupuncture plus pharmacopée chinoise ou acupuncture plus pharmacopée chinoise et médecine occidentale en comparaison à une intervention de médecine occidentale pure.  Il a été également observé une amélioration significative de l'infertilité quels qu’en soient la cause  de l’infertilité : syndrome des ovaires polykystiques, infertilité tubaire, troubles ovulatoires ou autres facteurs. 

De surcroît, le taux d'ovulation et l'épaisseur de l'endomètre ont été significativement augmentés. Ainsi dans neuf ECR (n=786), l'épaisseur de l'endomètre a été significativement augmentée. La différence moyenne (DM) sur modèle à effets aléatoires offre une différence statistiquement significative entre les groupes acupuncture et le groupe témoin (DM=1,39 ; IC à 95% 0,51 à 2,27 ; p=0,002). Cependant ce résultat est à tempérer du fait de la grande hétérogénéité statistique entre les études (I² =97%). La concentration de LH a également été diminuée. Par ailleurs, on note moins d'effets indésirables avec l’acupuncture qu’avec les traitements pharmacologiques. En conclusion, l'acupuncture et ses thérapies combinées peuvent être efficaces pour traiter l'infertilité féminine. Cependant, les études incluses ne sont pas suffisamment robustes pour permettre de tirer une conclusion ferme en raison de nombreux biais liés à la qualité des études incluses. De futurs ECR de haute qualité méthodologique sont nécessaires pour confirmer ces résultats.

 Yun L, Liqun W, Shuqi Y, Chunxiao W, Liming L, Wei Y. Acupuncture for infertile women without undergoing assisted reproductive techniques (ART): A systematic review and meta-analysis. Medicine (Baltimore). 2019 Jul;98(29):e1646.3